Le combat d’une gynécologue contre son propre cancer

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Comment est né ce livre qui raconte votre propre lutte contre le cancer du sein ?

Un ancien collègue m’avait suggéré l’idée. C’était 15 mois après le début « des hostilités », je n’étais pas encore complètement remise et je voulais faire quelque chose de ce qui m’était arrivé. Écrire pour témoigner de cette expérience en mêlant mon regard de femme et ma vision de médecin gynécologue est devenu peu à peu une évidence. Je n’avais pas pris de notes pendant les traitements – j’en aurais été bien incapable –, mais je n’ai eu aucune difficulté à me remémorer ces mois douloureux que je raconte de manière chronologique. Cela m’a apaisée. Avec le recul, je pense que mettre ce vécu sur le papier m’a permis de me libérer pour aller de…

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Comment réagir devant le carnet de notes de votre enfant ?

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Le carnet d’évaluation de fin d’année cristallise tant d’enjeux, avec la mention du passage en classe supérieure, la moyenne annuelle des notes, les lacunes pointées, des conseils de devoirs de vacances, un éventuel avis d’orientation… Tout enfant aspire à réussir, il est fier de montrer ses bons résultats et déçu de ses échecs, même s’il affecte le détachement. Comment lire avec lui son carnet d’évaluation ? Comment se positionner en tant que parents face à des difficultés lorsque le résultat n’est pas à la hauteur des attentes ? Avis croisés.

1. Projetez votre enfant dans des stratégies positives

Patricia Garouste, psychologue scolaire à La Ciotat (13)

Quels que soient les résultats, il revient aux parents de clarifier l’enjeu du contrat pédagogique. L’évaluation, c’est la façon qu’a l’école de mesurer si l’enfant a compris, intériorisé un savoir. Elle n’a pas d’impact sur le contrat parental, contrat d’amour et de confiance inconditionnels. Les apprentissages ne doivent pas être un enjeu de pouvoir ni de conflit. Trop souvent, dans le fonctionnement professionnel comme parental, on confond évaluation et jugement. L’évaluation mesure une compétence et se distingue du jugement sur la personne. « Cette note est nulle » ne doit pas résonner comme un « tu es nul ». L’évaluation est à la fois partielle et partiale : elle mesure un savoir didactique défini qui est en train de se construire, et ignore d’autres savoirs qui construisent la personne et que notre système scolaire français ne valorise pas encore suffisamment, hélas : résilience, leadership, empathie, conscience civique, etc.

De plus, en France, l’école évalue trop de façon normative, par rapport au groupe. Les parents veilleront à préférer l’évaluation par rapport à soi-même, en soulignant les progrès de l’enfant, sans le comparer aux échecs ou aux réussites des autres. Souvent, face à une mauvaise note, l’élève se défausse sur les « attributions externes » : « C’est pas ma faute, le prof est nul, toute la classe a raté… » Il s’agira de l’aider à mieux identifier les attentes du professeur et ce que lui peut changer. Inutile de remuer le couteau dans la plaie le 30 juin, mieux vaut projeter le jeune dans des stratégies positives. Les vacances offrent d’ailleurs l’occasion rêvée : lire et mesurer en cuisinant, compter en s’amusant… Cela change tout ! L’enfant expérimente que le nombre et les lettres ont une application pratique, une valeur en dehors de l’école, et pas juste pour obtenir une bonne note. Les évaluations internationales apprécient justement la « littératie » (capacité à comprendre et à réagir de façon appropriée aux textes écrits) et la « numératie » (capacité à utiliser les concepts numériques et mathématiques), voilà pourquoi les élèves français peinent, tant leurs savoirs sont cloisonnés.

L’été, on développe aussi d’autres savoirs : compétence sociale, relationnelle, artistique, sportive… Tous les enfants devraient faire un camp scout ! Ces acquisitions rejaillissent sur l’école. Ainsi, un adolescent passionné de sport a vu ses résultats scolaires s’améliorer à mesure qu’il pratiquait. En réussissant dans un domaine, on gagne en maîtrise de soi, en confiance, en persévérance… La motivation peut aussi s’appuyer sur du renforcement positif. J’utilise ainsi un tableau d’aide comportementale hebdomadaire, que les parents peuvent adapter. Je propose à l’enfant trois actions concrètes à modifier : « Je commence mes devoirs seul » ; « je répète mon violon seul » ; « je prends ma douche seul », par exemple. S’il réussit, il marque un point vert et obtient une récompense – définie au préalable avec les parents – dès 15 points marqués. C’est un contrat gagnant-gagnant (moins de cris, de stress, plus de paix), qui aide l’enfant à grandir.

2. Identifiez les problèmes

Matthieu Grimpret, enseignant, auteur du Coaching scolaire (Eyrolles)

S’agit-il de difficultés conjoncturelles ou structurelles ? Un obstacle conjoncturel résulte d’un manque ponctuel de travail ou de motivation. Dans ce cas, j’invite les parents à être assez fermes dans leur réponse et à imposer à l’enfant des devoirs de vacances adaptés à ses difficultés, en lien avec les professeurs. Sa légèreté ou sa paresse ayant entraîné une baisse de résultats, il lui appartient de remédier au problème par davantage de travail.

Une difficulté structurelle se manifeste par des lacunes importantes, l’impression de subir sa scolarité, l’incapacité à se projeter… Je conseille alors un mois de coupure complète pour neutraliser ce blocage psychologique à l’égard de l’école, puis un accompagnement : remise à niveau, stage de remédiation, suivi personnalisé. Certains enfants stressent à l’approche de la rentrée des classes. Cette aide leur permettra de dédramatiser et de repartir d’un bon pied.

3. Relativisez les notes !

Simon Amouraben, élève au lycée expérimental de Saint-Nazaire (44)

Dans notre lycée, nous n’avons pas de notes, ni d’obligation de passer les examens du système traditionnel. En fin d’année, chaque élève réalise une auto-évaluation de ce qu’il a réalisé de bien, de pas bien, de ce qu’il veut changer à la rentrée prochaine. Alors je conseillerais aux parents de relativiser les notes, même un 0 sur 20 ! Ce n’est pas une bonne note qui garantit le bonheur. L’important, c’est ce que l’enfant a réellement appris, aimé. À quoi ça sert d’apprendre pour apprendre sous la contrainte, d’attendre que le cours se termine et de tout oublier à la fin de l’année ? L’essentiel c’est de trouver un sens à ses études.

C’est une preuve de confiance des parents à l’égard de l’enfant, une épreuve sans doute pour beaucoup, vu le système dans lequel nous vivons, tellement attaché aux diplômes et à une certaine idée de la réussite. Je suis sorti du système classique en troisième. Depuis, mes parents ne me disent plus le soir : « Tu as eu un contrôle ? ça s’est bien passé ? » mais : « Qu’as-tu appris aujourd’hui ? » Et je réponds : « J’ai appris à faire la cuisine, à répondre au téléphone, à découvrir la vie des Vikings… » Autrement dit, j’ai appris la vie. 

Au sommaire de Science & Vie n°1186

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À LIRE

Les continents de l’ignorance, par Stuart Firestein, Ed. Odile Jacob, 2014, 192 p., 24 €http://ignorance.biology.columbia.edu/firestein/

> L’excellent ouvrage d’Hervé Zwirn, Les limites de la connaissance, Ed. Odile Jacob, 2000, 384 p., 32 €

> Concernant le module sur le ressenti: Qu’est-ce que l’animal, par Georges Chapouthier, Ed. Le Pommier, 2004, 64 p., 5 €

> Aux frontières de la science. Dictionnaire de l’ignorance, sous la direction de Michel Cazenave, Hachette Littératures, février 2000.

> Quand la science a dit… c’est Impossible, sous la direction de Nayla Farouki, Ed. Le Pommier, 2008, 160 p., 25 €

> On pourra aussi consulter avec intérêt quelques ouvrages d’épistémologie générale:

La philosophie des sciences au XXe siècle, par Anouk Barberousse, Max Kistler et Pascal Ludwig. Ed. Flammarion, collection Champs, 2000, 350 p., 10 €

La connaissance objective, par Karl Popper. Ed. Flammarion, collection Champs, 1998, 580 p., 13 €

La structure des révolutions scientifiques, par Thomas Kuhn. Ed. Flammarion, collection Champs, 1983, 284 p., 8 €

La digitalisation de l’assurance à l’ère du Big Data

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Les innovations technologiques inondent notre quotidien : santé, maison, auto connectée… De nouvelles mouvances auxquelles les assureurs doivent s’adapter en élaborant des contrats spécifiques, qu’il s’agisse de tirer profit de ces innovations ou d’assurer de nouveaux risques.

Les innovations récentes et les données recueillies par leur biais permettent aux assureurs d’affiner les tarifications proposées aux assurés tout en diminuant la sinistralité, donc le risque à porter. Et pour cause les objets connectés changent peu à peu nos habitudes, notre manière de penser mais permettent surtout de chiffrer et comptabiliser nos déplacements, notre quotidien… L’exploitation de la masse impressionnante de données ainsi générées et collectées, appelée « Big Data », fait couler beaucoup d’encre : si certains y voient l’avenir, d’autres y voient la percée de Big Brother…

Assurance et santé connectée

La santé connectée est l’une des thématiques centrales sur lesquelles planchent actuellement les assureurs afin de déterminer comment en tirer parti au mieux. Les assureurs forment par exemple des partenariats avec des entreprises ayant conçu des applications e-santé. Axa vient d’ailleurs, en mars 2016, de réaliser une levée de fonds à l’intention de la start-up Américaine Wellth, dont l’application vise à inciter les assurés à respecter leurs traitements médicaux afin d’éviter l’aggravation des pathologies et l’hospitalisation. Ce qui revient indirectement à diminuer le risque à couvrir, donc les coûts des assureurs dans le domaine de la santé.

En France, certains assureurs proposent désormais des services de téléconsultations médicales, une initiative qui ne plait pas au Conseil national de l’Ordre des Médecins. Déjà en 2014 Axa s’alliait avec Withings pour mettre en place un contrat de complémentaire santé connectée. Les 1 000 premiers souscripteurs ont ainsi reçu une montre connectée comptant leurs pas, et l’assureur leur offrait des chèques-cadeaux s’ils en faisaient plus de 7 000 par jour. Mais parce que l’analyse de ces données et le calcul du retour sur investissement sont difficiles, ces contrats sont encore rares, d’autant que selon une enquête du T-Day Insurance, seuls 29% des Français accepteraient de communiquer leurs données de santé à un assureur.

L’auto et la maison connectée en plein essor

On ne compte plus les contrats d’assurance « pay how you drive », qui fleurissent depuis un moment et permettent, grâce à un boitier embarqué, de déterminer si l’automobiliste conduit de manière responsable, en vue de le récompenser par la diminution du montant de sa prime d’assurance.

Les USA ont plusieurs années d’avance sur les Français en la matière et il semblerait que le modèle n’y ait pas reçu le succès escompté : il est en effet difficile de qualifier la conduite car les facteurs à prendre en compte sont très nombreux et que la conduite varie en fonction du lieu, de la météo…

Les assureurs et courtiers proposent également de plus en plus de contrats spécialisés destinés aux maisons connectées : télésurveillance, alarme connectée, pilotage à distance grâce à une application mobile mais aussi gestion des éclairages, mesure d’énergie… autant de moyens censés améliorer le confort de vie mais surtout faire baisser la sinistralité. Selon une étude du cabinet de conseil PwC, 70% des Français accepteraient d’installer un capteur dans leur voiture ou leur maison afin de payer moins cher leur prime d’assurance.

Pas de doute, l’assurance se digitalise et s’adapte. Une tendance qui n’est pas prête de s’arrêter ; les nouvelles technologies bouleverseront encore le domaine assurantiel avec, notamment, l’arrivée des voitures autonomes, qui pourraient bien signer la fin des contrats d’assurances auto tels qu’on les connait aujourd’hui…

Mariages nuls : le pape plaide pour une meilleure préparation

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« Une partie de nos mariages sacramentaux sont nuls » : c’est la phrase qu’a finalement retenue le Vatican pour retranscrire les propos improvisés par le pape François devant des milliers de Romains rassemblés en congrès diocésain dans la cathédrale Saint-Jean-de-Latran, selon Apic. « Une grande majorité de nos mariages sacramentaux sont nuls », avait-il prononcé en réalité, évoquant la culture du provisoire qui a envahi notre société. « Et pour cela, ajoutait-il, une grande majorité de nos mariages sacramentaux sont nuls, parce que [les époux] disent: ‘Oui, pour toute la vie’, mais ne savent pas ce qu’ils disent, parce qu’ils ont une autre culture ». L’affirmation avait attiré au pape de vifs commentaires.

L’Eglise présume toujours un mariage valide 

Qu’est-ce qui fait qu’un mariage est nul dans le droit de l’Eglise, s’est demandé (en anglais) le site américain d’information catholique Crux : « Je peux dire d’expérience que cette culture du provisoire, la manière conditionnelle et temporaire avec laquelle nous considérons les institutions permanentes, ont un impact sur notre façon de vivre le mariage, et sur les relations entre époux », analyse le canoniste J.D. Flynn, dans le Nebraska, pour CNA, dans des propos rapportés par le site. Mais il ajoute qu’«il est important pour les gens de se rappeler que l’Eglise présume toujours un mariage valide, à moins qu’il soit prouvé le contraire. »

L’ignorance de la nature du mariage figure parmi les critères de nullité de l’engagement, explique le canoniste, mais « il faut prouver d’une manière définitive que [les époux] ignoraient vraiment que le mariage est une union permanente.» Et ce serait l’ignorance d’une « compréhension humaine fondamentale » du mariage, clarifie-t-il, « et non pas une ignorance de niveau d’études supérieures de théologie du mariage ».

La préparation au mariage, “un chemin de conversion”

Reste que l’enjeu actuel, comme l’a relevé le pape devant les fidèles italiens, est d’approfondir la préparation au mariage, rapporte La Croix : « Il faut faire la préparation “avec proximité, sans se faire peur, lentement », a-t-il préconisé : « C’est un chemin de conversion ». Le pape a rappelé qu’en tant qu’archevêque de Buenos Aires, il avait toujours interdit les mariages pendant une grossesse, parce que la précipitation à se marier avant la naissance, pour être « socialement en règle », empêchait le sacrement d’être librement consenti – ce qui est un motif de nullité.

Remarquant que la plupart des couples venant aux préparations au mariage cohabitaient déjà, il a engagé les prêtres à « ne pas dire toute de suite “Pourquoi tu ne te maries pas à l’église?” » : « Non, accompagnez-les, attendre et faire mûrir la fidélité ».

Pourquoi le bitume fond-il au soleil ?

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Le bitume ne devient liquide au'à 150 °C - Ph. aigle_dore / Flickr / CC BY 2.0

Le bitume ne devient liquide au’à 150 °C – Ph. aigle_dore / Flickr / CC BY 2.0

Une fois le bitume coulé sur nos routes, il ne fond jamais au sens propre; il perd “seulement” de sa consistance et donc ramollit lorsque sa température augmente. En effet, il ne devient liquide qu’à 150 °C, sa température de fusion !

De plus, il existe une multitude de types de bitume, chacun acquérant une dureté qui lui est propre en se solidifiant. Cette dureté dépend de leur composition en molécules hydrocarbonées (un bitume peut en contenir plus de 10000 différentes) et de leur mode d’obtention : par distillation seule, ou en complétant avec d’autres processus.

La dureté de chaque sorte de bitume est chiffrée

Elle est indiquée par un grade, déterminé en fonction de la profondeur –en 1/10 de millimètre – à laquelle une aiguille pénètre dans les bitumes à 25 °C en l’espace de cinq secondes, sous l’effet d’un poids de 100 g. ainsi, un bitume de grade 50/70 présente une pénétrabilité située entre 50 et 70 1/10 de millimètre et un bitume pur de classe 35/50, entre 35 et 50 1/10 de millimètre.

Dans ces conditions, les différents bitumes affichent chacun une température de ramollissement différente. “Le plus mou utilisé en France, le 160/220, sert surtout pour l’entretien de routes à trafic plu- tôt faible. Il perd de sa consistance dès qu’il est exposé quelques heures à 35 °C. Le bitume le plus largement coulé est le 35/50, employé essentiellement dans la construction de chaussées neuves ou l’entretien de routes à plus grand trafic, telles les autoroutes. Il commence à ‘fondre’ après plusieurs heures à 50 °C environ”, détaille Olivier Moglia, ingénieur chez total Bitumes France.

Surtout que la chaussée peut atteindre des températures bien supérieures à celle de l’air, car le sol s’échauffe plus vite. “On considère en général que lorsqu’il fait vraiment chaud en France, poursuit Olivier Moglia, c’est-à-dire quand l’air atteint 30 °C à 40 °C au soleil, la surface de la route s’échauffe jusque environ 60 °C à 70 °C.”

–K.B.

D’aprèes S&V Questions-Réponses n°16

 

> Lire aussi :

 

 

 

Ondes gravitationnelles : Ligo, encore, en attendant Virgo…

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Ces images abstraites, ce sont les ondes gravitationnelles, noyées dans le bruit de fond de la Terre, enregistrées une seconde durant et à 1 milliseconde d'intervalle par les interféromètres de Ligo, distants de 3000 kilomètres. Images Ligo.

Ces images abstraites, ce sont les ondes gravitationnelles, noyées dans le bruit de fond de la Terre, enregistrées une seconde durant et à 1 milliseconde d’intervalle par les interféromètres de Ligo, distants de 3000 kilomètres. Images Ligo.

Et de deux ! Le détecteur d’ondes gravitationnelles américain Ligo vient de rééditer son exploit de septembre 2015, en observant la fusion de deux trous noirs, à 1,4 milliard d’années-lumière d’ici. C’est donc la seconde fois, en seulement trois mois d’observation, que Ligo parvient à déceler ces infimes vibrations de la trame de l’espace-temps, provoquées par des évènements cosmiques d’une puissance vertigineuse…
Reprenons : la première détection a eu lieu le 14 septembre 2015, une date marquante de l’histoire des sciences. Ce jour là, les deux interféromètres de Hanford et Livingstone, situés à 3000 kilomètres l’un de l’autre, de part et d’autre des Etats-Unis, se déformèrent, à 7 milliseconde d’intervalle et 0,2 seconde durant, pendant le passage d’un train d’ondes gravitationnelles, des « rides » de l’espace-temps se déplaçant à la vitesse de la lumière… L’évènement était dû, 1,3 milliard d’années auparavant, à la fusion de deux trous noirs d’une masse respective de 36 et 29 masses solaires. De véritables monstres stellaires. La fusion de ces deux astres avait créé un nouveau trou noir plus massif, de 62 masses solaires. Le solde de la masse – trois fois le Soleil… – avait été dissipé en ondes gravitationnelles : le phénomène cosmique le plus puissant de l’Univers à cet instant là.
Trois mois plus tard, le 26 décembre 2015, Ligo récidive en observant la fusion de deux trous noirs, encore, à la distance de 1,4 milliard d’années-lumière. Cette fois-ci, les trous noirs arborent respectivement des masses de 14 et 8 masses solaires, le trou noir résultant de la fusion ayant une masse de 21 masses solaires. La masse manquante, équivalent à celle du Soleil, ayant disparu dans le flot invisible d’ondes gravitationnelles…
Cette fois-ci, la masse des deux astres du couple étant plus faible, l’évènement, moins énergétique a duré plus longtemps : une seconde, et sa détection par Ligo a été plus difficile.
Mais qu’a observé Ligo ? Une vibration, noyée dans le bruit de fond de la Terre… Comment, dès lors, les astronomes peuvent-ils affirmer que deux trous noirs, en une seconde, se sont fondus en un seul, comment peuvent-ils annoncer la masse des deux astres, et leur distance ?
En fait, Ligo est actuellement très myope, il n’a pas « vu » les deux astres, comme le ferait un télescope optique, un télescope infrarouge, X ou gamma, ou un radiotélescope… Sa résolution, c’est à dire sa capacité à percevoir des détails sur les astres, est vertigineusement faible : il est impossible, aujourd’hui, de savoir où la fusion des deux astres a eu lieu, dans le volume d’Univers embrassé par Ligo, il existe des milliards de galaxies…
Au fond, les astronomes, face au ciel « gravitationnel » sont un peu comme des aveugles qui voudraient, à partir du « ding dong » qu’elle émet, reconstituer la forme, la taille, la masse d’une cloche d’église…
Une fois enregistré le faible signal gravitationnel de la fusion des trous noirs – c’est à dire la déformation, durant une seconde, des interféromètres, perceptible sur le changement de trajet des lasers qui les parcourent – un logiciel l’a automatiquement détecté. Un peu plus d’une minute après l’évènement, les astronomes étaient alertés, et pouvaient rechercher une éventuelle contrepartie du phénomène dans le spectre électromagnétique… Dans le cas de la fusion de trous noirs, il est probable qu’aucun autre signal ne soit émis, mais d’autres phénomènes – supernovae, chutes d’étoiles dans des trous noirs, etc – doivent donner lieu, en plus du rayonnement gravitationnel, à une gigantesque émission lumineuse…
Puis les chercheurs ont comparé la courbe enregistrée à des millions de courbes théoriques, calculées à partir des équations de la relativité générale et correspondant à autant de couples de trous noirs en approche de fusion.
C’est donc après des mois de calcul que la collaboration Ligo/Virgo a pu annoncer que l’évènement gravitationnel GW151226 correspondait, avec une très haute probabilité, à la fusion de deux trous noirs de 14 et 8 masses solaires situés à 1,4 milliard d’années-lumière.

Avec ses deux antennes de détection, l'interféromètre Ligo est actuellement très myope. Voici les deux immenses régions du ciel où ont pu avoir lieu les deux fusions de trous noirs détectées les 14 septembre et 26 décembre 2015. Quand Virgo s'associera à Ligo, la précision de mesure, c'est à dire la résolution du "télescope gravitationnel" que les trois antennes synthétiseront, sera spectaculairement améliorée. Document Ligo.

Avec ses deux antennes de détection, l’interféromètre Ligo est actuellement très myope. Voici les deux immenses régions du ciel où ont pu avoir lieu les deux fusions de trous noirs détectées les 14 septembre et 26 décembre 2015. Quand Virgo s’associera à Ligo, la précision de mesure, c’est à dire la résolution du “télescope gravitationnel” que les trois antennes synthétiseront, sera spectaculairement améliorée. Document Ligo.

L’ère de l’astronomie gravitationnelle a donc bel et bien débutée. Deux détections en trois mois, dès ses débuts, augurent d’un brillant futur pour cette nouvelle fenêtre ouverte sur l’Univers.
Bientôt, les premiers résultats astrophysiques et cosmologiques vont émerger des données. Première surprise : Ligo n’a détecté que des fusions de trous noirs de très grande masse, alors que la première source de rayonnement gravitationnel attendue correspondait à des fusions d’étoiles à neutrons, probablement cent fois ou mille fois plus fréquente…
Déjà, les chercheurs se demandent comment des trous noirs aussi massifs peuvent se retrouver aussi près l’un de l’autre, quand on sait que ces astres obscurs se sont formés après l’explosion d’étoiles supergéantes, rarissimes et dévastatrices…
Une piste : les trous noirs massifs des couples GW150914 et GW151226 se seraient formés dans des milieux stellaires très denses et chaotiques, comme les amas globulaires ou les noyaux galactiques, par exemple.
Un troisième évènement a été enregistré par Ligo, le 12 octobre 2015, LVT151012, mais n’a pas été retenu officiellement, la qualité de son signal étant jugée insuffisante.
Si Ligo peut être considéré aujourd’hui comme atteint d’une très sévère myopie, il n’en sera, espérons-le, plus de même dans quelques mois, lorsque l’interféromètre Virgo, près de Pise, en Italie, s’engagera à son tour dans la recherche d’ondes gravitationnelles. Avec Ligo et Virgo fonctionnant ensemble, les chercheurs disposeront d’un interféromètre de la taille de la Terre ou presque, permettant une triangulation beaucoup plus précise, du fait de la différence d’arrivée temporelle des signaux sur chaque antenne.
On pourra alors, effectivement, parler de « télescope gravitationnel » capable d’observer des sources avec une résolution de quelques degrés dans le ciel.
La montée en puissance de ces deux machines révolutionnaires devrait permettre, d’ici l’an 2020, de détecter des centaines, voire des milliers de ces implosions invisibles et titanesques.
Il est en effet impossible, à notre très modeste échelle humaine, de réaliser se qui se passe réellement, quand, dans le cosmos, deux trous noirs fusionnent. Essayez d’imaginer la coalescence de deux trous noirs, à un milliard d’années-lumière. Si l’énergie gravitationnelle produite à l’acmé de la fusion était émise sous forme de lumière, ici, sur Terre, malgré la sidérante distance nous séparant de l’évènement, nous serions un instant éblouis, dans la nuit, par un flash plus puissant que la Pleine Lune.
Serge Brunier

Les antibiotiques et les césariennes troublent les microbes intestinaux des bébés

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Le microbiote intestinal, la communauté bactérienne peuplant notre ventre, joue un role clé dans la régulation du métabolisme et des défenses immunitaires. - Crédit: V. Altounian / Science Translational Medicine (2016)

Le microbiote intestinal, la communauté bactérienne peuplant notre ventre, joue un rôle clé dans la régulation du métabolisme et des défenses immunitaires. Or, les  antibiotiques interfèrent avec son bon développement chez les bébés – Crédit: V. Altounian / Science Translational Medicine (2016)

C’est un monde aussi méconnu que précieux, dont les biologistes mettent peu à peu en lumière les multiples effets sur notre santé : le microbiote intestinal. Soit l’ensemble des communautés bactériennes peuplant notre ventre, qui régulent notre métabolisme et nos défenses immunitaires et vont jusqu’à influencer notre tempérament !

Le microbiote se développe à partir de la naissance, puis s’installe et accompagne chacun d’entre nous tout au long de sa vie. Son bon état de santé a un effet protecteur contre le diabète, l’obésité, l’asthme et les allergies, comme l’ont montré plusieurs études récentes. Or, deux importantes études, publiées le 15 juin, offrent un aperçu de son développement chez les bébés… et des facteurs extérieurs qui peuvent le troubler.

Les bébés traités par antibiotiques ont des bactéries intestinales moins variées, plus résistantes à ces médicaments

Ces études, publiées dans la revue Science Translational Medicine, montrent que les antibiotiques administrés aux nourrissons déséquilibrent leur microbiote, et favorisent la résistance à ces médicaments. D’autre part, le mode d’accouchement (césarienne ou voie basse) et le mode d’alimentation (allaitement ou lait artificiel) contribuent aussi à forger un microbiote plus ou moins varié, et donc plus ou moins en bonne santé.

Les deux équipes, l’une américano-finlandaise (Institut Broad, Massachussets, Etats-Unis et université d’Helsinki), l’autre américaine (Centre médical Langone, New York) ont suivi, respectivement, 43 et 39 bébés de leur naissance jusqu’à leurs 2 ans et 3 ans. Tout au long de ces périodes, leurs selles étaient analysées périodiquement, afin d’y mesurer l’ADN bactérien et d’en déduire la quantité et la qualité des bactéries présentes dans l’intestin.

 

Exemples d'espèces bactériennes faisant partie du microbiote intestinal : Bacterioides biacutis - CDC Public Health Image Library / Wikimedia Commons / domaine public

Exemples d’espèces bactériennes faisant partie du microbiote intestinal : Bacterioides biacutis – CDC Public Health Image Library / Wikimedia Commons / domaine public

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Fusobacterium novum – CDC Public Health Image Library / Wikimedia Commons / domaine public

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Escherichia coli – Doc. RNDr. Josef Reischig, CSc. / Wikimedia Commons / CC BY SA 3.0

L’accouchement par voie basse et l’allaitement enrichissent le microbiote de l’enfant…

Résultats : la première équipe a conclu que l’exposition aux antibiotiques réduit la diversité bactérienne chez les bébés, et ralentit la maturation du microbiote. De même, les enfants nés par césarienne présentaient un microbiote moins varié (et donc offrant une protection moins complète), ce qui était aussi le cas pour les enfants nourris au biberon.

La raison ? La source principale des bactéries infantiles est le corps de la mère, laquelle les transmet à son enfant aussi bien au moment de l’accouchement par voie vaginale, que via l’allaitement au sein. Le contact physique avec le bébé contribue aussi à enrichir son microbiote, selon les auteurs.

…tandis que les antibiotiques et les césariennes les affaiblissent

La seconde équipe s’est concentrée, elle, sur l’effet des antibiotiques. Sur les 39 bébés suivis, la moitié a reçu plusieurs traitements antibiotiques avant l’âge de 3 ans… avec pour effet, encore une fois, la réduction de la diversité des espèces bactériennes vivant dans leur intestin.

Plus grave : la prise d’un antibiotique faisait immédiatement grimper la quantité de gènes bactériens capables de rendre les bactéries résistantes à ces médicaments. Certains de ces gènes persistaient des mois après le traitement. La même équipe a également confirmé l’effet négatif des césariennes sur le microbiote des bébés, dont elles freinent la maturation.

Globalement, ces études s’inscrivent dans une suite d’études montrant comment un bon état de santé est forgé dès l’âge le plus tendre par une grande diversité bactérienne qui élit demeure dans l’intestin de l’enfant. Elle jouera tout au long de sa vie un rôle protecteur vis-à-vis des infections, des maladies allergiques, respiratoires et métaboliques.

—Fiorenza Gracci

 

> Lire aussi :

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Les super pouvoirs du ventre S&V n°1183 (2016). L’amas grouillant formé par le microbiote forme un véritable écosystème, régulant aussi nos rythmes biologiques, notre mémoire, notre moral… Aussi étonnant que scientifiquement prouvé !

SVIE_1183_218

  • Toutes nos bactéries vont être recensées S&V n°1088 (2008). Le “Human Microbiome Project” démarre aux Etats-Unis : depuis, les biologistes ont recensé l’ensemble des gènes des bactéries peuplant le corps humain, ouvrant un tout nouveau pan de la recherche biomédicale.

S&V 1088 - human microbiome project

  • Antibiotiques, comment mater la résistanceS&V n°991 ( 2000). C’est une guerre continue qui oppose les bactéries aux antibiotiques, où de nouvelles armes s’inventent sans cesse. Au milieu de cette bataille, la santé humaine est en jeu.
 S&V 991 - resistance antibiotiques

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Le blog de Mathieu Grousson : « La particule X pourrait être le signe que l’espace compte plus de trois dimensions », Steeve Giddings, théoricien

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Les espaces de Calabi Yau donnent à voir ce que serait un univers doté de dimensions d’espace supplémentaires (ph. Wikipedia, Jbourjai).

 

Alors que le LHC, le grand accélérateur de particules basé près de Genève accumule des données à une cadence sans précédent, le suspens demeure entier. A ce jour, nul n’est en mesure d’affirmer si l’excès rendu public le 15 décembre dernier constitue la première manifestation d’une particule inconnue ou bien une simple fluctuation statistique. Pour autant, la déferlante de travaux théoriques visant à donner du corps à cette manifestation inattendue est sans précédent.

Aujourd’hui, nous donnons la parole à Steve Giddings, au département de physique de l’université de Californie, à Santa Barbara. Ses travaux les plus récents explorent la possibilité que la particule X soit l’expression de l’existence de dimensions supplémentaires.

 

Steve Giddins, physicien théoricien au département de physique de l’université de Californie, à Santa Barbara (ph. : Sonia Fernandez)

Steve Giddins, physicien théoricien au département de physique de l’université de Californie, à Santa Barbara (ph. : Sonia Fernandez)

 

Science & Vie : Vous explorez la possibilité que le X soit un signe que notre univers compte plus de trois dimensions d’espace. Quel est votre point de départ ?

Steve Giddings : Ce travail s’inscrit dans le cadre des scénarios dits de « compactifications gauchis » (« warped compactifications ») qui offrent une possibilité d’expliquer pourquoi la gravitation est si faible en comparaison des trois autres interactions fondamentales. Concrètement, ces modèles considèrent que l’Univers compte des dimensions d’espace supplémentaires en plus des trois que nous connaissons, dimensions possédant la propriété d’être extrêmement courbées. Ces dimensions additionnelles, qui pourraient être minuscules, sont invisibles dans la mesure où les particules – de même que les interactions électromagnétique, faible et forte – sont contraintes de se propager exclusivement dans trois dimensions. A l’inverse, la gravitation peut également se propager dans les dimensions supplémentaires dans lesquelles elle est, par conséquent, en partie diluée.

 

Science & Vie : Quel est le lien avec la particule X ?

Steve Giddings : Lors de ses incursions dans les dimensions supplémentaires, la particule médiatrice de l’interaction gravitationnelle, le graviton, est susceptible de vibrer. Or, les calculs montrent que ces vibrations se manifestent dans les trois dimensions ordinaires sous la forme d’une particule additionnelle qui ressemble au graviton, mais dotée d’une masse (à l’inverse le graviton est de masse nulle). Au stade où nous en sommes, ce que nous savons du X est compatible avec un tel graviton massif.

 

Science & Vie : Cela semble une interprétation particulièrement radicale, non ?

Steve Giddings : De très nombreux modèles ont été proposés ces derniers mois pour rendre compte de l’excès observé au LHC. La plupart d’entre eux sont un peu tirés par les cheveux. A l’inverse, les scénarios à bases de dimensions supplémentaires possèdent une très grande simplicité intrinsèque.

 

Science & Vie : Comment savoir si le X est bien un graviton massif ?

Steve Giddings : Dans la version la plus simple de cette approche, nous devrions continuer à voir le X se désintégrer en deux photons, mais également en paires de deux leptons, par exemple une paire électron/positon ou bien muon/anti-muon. Par ailleurs, si le X est un graviton massif, son spin (la grandeur qui mesure l’équivalent d’une sorte de mouvement de rotation sur lui-même) devrait être égal à deux. Pour l’heure, les données expérimentales sont compatibles avec une particule de spin égale à 0 ou 2.

 

Science & Vie : Ce serait une révolution ?

Steve Giddings : Un graviton massif serait un signal clair que l’espace possède plus de trois dimensions, ce qui serait à l’évidence une découverte d’une très grande profondeur. Mais évidemment, tout dépend pour l’instant de savoir si l’excès observé est un véritable signal ou une simple fluctuation ! Et dans le meilleur des cas, de ce qui sera découvert ensuite…

 

Propos recueillis par Mathieu Grousson

 

Mathieu Grousson est un journaliste collaborateur de Science & Vie spécialiste de la physique fondamentale. Suivez son blog “Particule X” :

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