Les antibiotiques et les césariennes troublent les microbes intestinaux des bébés

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Le microbiote intestinal, la communauté bactérienne peuplant notre ventre, joue un role clé dans la régulation du métabolisme et des défenses immunitaires. - Crédit: V. Altounian / Science Translational Medicine (2016)

Le microbiote intestinal, la communauté bactérienne peuplant notre ventre, joue un rôle clé dans la régulation du métabolisme et des défenses immunitaires. Or, les  antibiotiques interfèrent avec son bon développement chez les bébés – Crédit: V. Altounian / Science Translational Medicine (2016)

C’est un monde aussi méconnu que précieux, dont les biologistes mettent peu à peu en lumière les multiples effets sur notre santé : le microbiote intestinal. Soit l’ensemble des communautés bactériennes peuplant notre ventre, qui régulent notre métabolisme et nos défenses immunitaires et vont jusqu’à influencer notre tempérament !

Le microbiote se développe à partir de la naissance, puis s’installe et accompagne chacun d’entre nous tout au long de sa vie. Son bon état de santé a un effet protecteur contre le diabète, l’obésité, l’asthme et les allergies, comme l’ont montré plusieurs études récentes. Or, deux importantes études, publiées le 15 juin, offrent un aperçu de son développement chez les bébés… et des facteurs extérieurs qui peuvent le troubler.

Les bébés traités par antibiotiques ont des bactéries intestinales moins variées, plus résistantes à ces médicaments

Ces études, publiées dans la revue Science Translational Medicine, montrent que les antibiotiques administrés aux nourrissons déséquilibrent leur microbiote, et favorisent la résistance à ces médicaments. D’autre part, le mode d’accouchement (césarienne ou voie basse) et le mode d’alimentation (allaitement ou lait artificiel) contribuent aussi à forger un microbiote plus ou moins varié, et donc plus ou moins en bonne santé.

Les deux équipes, l’une américano-finlandaise (Institut Broad, Massachussets, Etats-Unis et université d’Helsinki), l’autre américaine (Centre médical Langone, New York) ont suivi, respectivement, 43 et 39 bébés de leur naissance jusqu’à leurs 2 ans et 3 ans. Tout au long de ces périodes, leurs selles étaient analysées périodiquement, afin d’y mesurer l’ADN bactérien et d’en déduire la quantité et la qualité des bactéries présentes dans l’intestin.

 

Exemples d'espèces bactériennes faisant partie du microbiote intestinal : Bacterioides biacutis - CDC Public Health Image Library / Wikimedia Commons / domaine public

Exemples d’espèces bactériennes faisant partie du microbiote intestinal : Bacterioides biacutis – CDC Public Health Image Library / Wikimedia Commons / domaine public

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Fusobacterium novum – CDC Public Health Image Library / Wikimedia Commons / domaine public

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Escherichia coli – Doc. RNDr. Josef Reischig, CSc. / Wikimedia Commons / CC BY SA 3.0

L’accouchement par voie basse et l’allaitement enrichissent le microbiote de l’enfant…

Résultats : la première équipe a conclu que l’exposition aux antibiotiques réduit la diversité bactérienne chez les bébés, et ralentit la maturation du microbiote. De même, les enfants nés par césarienne présentaient un microbiote moins varié (et donc offrant une protection moins complète), ce qui était aussi le cas pour les enfants nourris au biberon.

La raison ? La source principale des bactéries infantiles est le corps de la mère, laquelle les transmet à son enfant aussi bien au moment de l’accouchement par voie vaginale, que via l’allaitement au sein. Le contact physique avec le bébé contribue aussi à enrichir son microbiote, selon les auteurs.

…tandis que les antibiotiques et les césariennes les affaiblissent

La seconde équipe s’est concentrée, elle, sur l’effet des antibiotiques. Sur les 39 bébés suivis, la moitié a reçu plusieurs traitements antibiotiques avant l’âge de 3 ans… avec pour effet, encore une fois, la réduction de la diversité des espèces bactériennes vivant dans leur intestin.

Plus grave : la prise d’un antibiotique faisait immédiatement grimper la quantité de gènes bactériens capables de rendre les bactéries résistantes à ces médicaments. Certains de ces gènes persistaient des mois après le traitement. La même équipe a également confirmé l’effet négatif des césariennes sur le microbiote des bébés, dont elles freinent la maturation.

Globalement, ces études s’inscrivent dans une suite d’études montrant comment un bon état de santé est forgé dès l’âge le plus tendre par une grande diversité bactérienne qui élit demeure dans l’intestin de l’enfant. Elle jouera tout au long de sa vie un rôle protecteur vis-à-vis des infections, des maladies allergiques, respiratoires et métaboliques.

—Fiorenza Gracci

 

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> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Les super pouvoirs du ventre S&V n°1183 (2016). L’amas grouillant formé par le microbiote forme un véritable écosystème, régulant aussi nos rythmes biologiques, notre mémoire, notre moral… Aussi étonnant que scientifiquement prouvé !

SVIE_1183_218

  • Toutes nos bactéries vont être recensées S&V n°1088 (2008). Le “Human Microbiome Project” démarre aux Etats-Unis : depuis, les biologistes ont recensé l’ensemble des gènes des bactéries peuplant le corps humain, ouvrant un tout nouveau pan de la recherche biomédicale.

S&V 1088 - human microbiome project

  • Antibiotiques, comment mater la résistanceS&V n°991 ( 2000). C’est une guerre continue qui oppose les bactéries aux antibiotiques, où de nouvelles armes s’inventent sans cesse. Au milieu de cette bataille, la santé humaine est en jeu.
 S&V 991 - resistance antibiotiques

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