Où sont passés les rites de passage ?

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Quand êtes-vous devenue une femme ? Qu’est-ce qui a fait de vous un homme ? Pardonnez cette irruption brutale dans un domaine ô combien personnel, vertigineux peut-être. C’est pourtant une belle interrogation. Nous étions des enfants, nous voilà des adultes ; entre les deux, il faut bien qu’il y ait eu un tournant, une transition, une métamorphose, même infime. Et si la question renvoie à des souvenirs intimes, les…

Jean-Michel Blanquer : “Le rite marque la fin d’un cycle et ouvre au suivant”

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Qu’en est-il des rites à l’école ?


Toutes les sociétés développent des rites, autrement des pratiques sauvages apparaissent. Il s’agit d’un besoin anthropologique fondamental. Il est donc important que l’école cultive des rites, notamment lors des passages, qui sont des moments charnière et peuvent susciter de l’angoisse. La scolarité est marquée par trois moments clés : la fin du CM2, la fin de la 3e et la fin de la terminale. Le rite marque la fin d’un cycle et ouvre au suivant. Il est là pour donner confiance et nourrit le sens d’appartenance à un groupe.


La jeune génération reprend du service


N’est-ce pas là où la République a failli, en termes de symboles, de solennité, de sacré, et donc d’appartenance ?


Dès son origine, la République française a révélé un grand sens du rite, qui n’est pas concurrent du religieux, mais différent. L’École de la IIIe République a su solenniser l’enseignement, le rôle du maître, la reconnaissance du mérite et de l’excellence. Peut-être certaines cérémonies comme la remise des prix sont-elles tombées en désuétude, au nom d’une sorte de libertarisme. Par ailleurs, le rite repose sur l’appartenance à un groupe, une collectivité ; or l’individualisme fragilise la société. Sans doute avons-nous à retrouver davantage de solennité, qui incarne le respect dû aux élèves et aux adultes. Dans tous les pays du monde, par exemple, le doctorat est célébré en grande pompe, avec un lieu, une tenue, une célébration. Le rite cristallise le respect de tous envers tous et souligne l’importance d’un travail accompli, de ce qu’il consacre et de ce qu’il ouvre.


Que propose l’Éducation nationale ?


La classe est une petite république, avec ses rituels. Nous avons instauré la coutume du « livre pour l’été », distribué aux 800.000 élèves de France en fin de CM2. C’est un moment fort, qui a une portée symbolique et pratique : la transmission de notre patrimoine littéraire, mais aussi la reconnaissance des compétences de l’élève, tant par l’institution que par la société, avec la présence, par exemple, du chef d’établissement ou du maire. Dans le même esprit, nous devrions introduire une cérémonie de remise de diplôme du brevet. Il s’agit de saluer son obtention par une réjouissance collective. Pour ceux qui passeront le baccalauréat en 2021, le grand oral tiendra lieu de moment plus solennel, qui viendra clôturer le cycle du secondaire. À la discrétion des établissements, une cérémonie de remise des diplômes du bac a lieu en début d’année. C’est aussi une manière de formaliser l’appartenance à un corps, celui des anciens élèves. Enfin, chaque rentrée scolaire est à ritualiser. La « rentrée en musique » que nous promouvons permet de manifester cette unité, notamment par le chant choral. Elle introduit un peu de joie le jour de la rentrée et nous rappelle que l’école est une chance.

Grandir en autonomie

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Le « zéro risque » et la notion de confort absolu sont à la mode, et la tentation grande pour les parents de confiner leurs enfants. Céline Anaya Gautier, elle, a osé le contraire… S’inspirant d’un rituel quechua, cette photographe a parcouru avec son fils 1 200 km jusqu’à Saint-Jacques-de-Compostelle pour célébrer son passage à l’âge de raison. Elle relate l’aventure en images dans le livre Dis maman, c’est encore loin Compostelle ? (le Passeur). Au bout du chemin, l’enfant a quitté ses vêtements pour en endosser de nouveaux. Tout un symbole.


Des rites plus individualisés


« Pour grandir, l’enfant a besoin d’expériences vécues sous le regard des autres, qui valident ses progrès, souligne la psychologue Charlotte Argod. Un rite l’aide à trouver sa nouvelle place. Et permet surtout aux parents de se préparer au changement et d’adapter leurs…

“Les Étoiles de Gennevilliers font du bien à la cité et aux enfants“ 

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Au centre culturel et social Aimé-Césaire de la cité du Luth, à Gennevilliers (Hauts-de-Seine), le ciel gris ne parvient pas à atténuer la joie et les sourires des enfants, réunis ce mercredi 5 juin. Ils s’apprêtent à recevoir le prix de la Vaillance, du fonds Coeurs vaillants-âmes vaillantes, des mains de la présidente du jury, Jacqueline Tabarly. Cette cité, située dans le nord de la ville, compte 9 000 habitants de quelque 60 nationalités. Tout a commencé à la rentrée scolaire de 2018. La mairie ayant annoncé la suppression des activités périscolaires, plusieurs enfants du Luth, encouragés par leurs parents, sont allés demander à l’Action catholique des enfants (ACE) de leur organiser des activités. « On ne voulait pas traîner dans les rues seuls, sans avoir rien à faire. Grâce au club,…

La périlleuse équation des mathématiques dans la réforme du Bac

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Romain est en seconde au lycée Lacordaire (Marseille), et comme une grande partie de ses pairs, il veut faire médecine. Alors quand il a dû choisir ses « spécialités » – trois matières approfondies qui remplacent les séries S, ES et L – il a opté pour les mathématiques, sans hésiter. Et pourtant, elles ne sont plus obligatoires. Le cas de Romain est révélateur d’une tendance plus globale : une étude du syndicat SNES/FSU indique que les mathématiques restent choisies par 70% des élèves dans l’académie de Versailles, et 65% à échelle nationale. 


En donnant la possibilité aux élèves de choisir leurs matières, le gouvernement entend promouvoir une formation plus individualisée, plus en phase avec la flexibilité du monde professionnel, et rompant le déterminisme de « tel parcours égale tel métier ». Pourtant, les profils que l’on retrouve sont paradoxalement homogènes, et la triplette maths – physique – sciences de la vie et de la terre dessine les contours d’une filière S 2.0. Comment en est-on arrivé là ?


Pourquoi Pythagore a-t-il toujours la côte ? 


Entre les 12 spécialités proposées, les élèves sont supposés faire un choix « en fonction de leurs goûts et ambitions ». Mais la logique de l’ancien système ne tarde pas à prendre le dessus, et consacre la domination des sciences dures sur les sciences humaines. Par inertie, ou par sécurité, la nouvelle génération continue donc à privilégier les mathématiques pour « ne pas se fermer de portes » sur le marché de l’emploi, où elles sont omniprésentes – de l’informatique à l’analyse financière, en passant par l’architecture. 


« Faites ce que vous voulez, mais faites des maths quand même » 


Selon Claire Gueville, secrétaire nationale en charge des questions lycée au Syndicat National des Enseignants du Second Degré (SNES), la communication ministérielle autour de cette réforme repose sur une logique de « venez comme vous êtes et faites ce que vous voulez ». Un discours incompatible avec la notion de contrainte inhérente au processus d’apprentissage : « On a besoin des maths ! » insiste-t-elle. Sauf que cette liberté de choix se heurte à l’impératif de cohérence entre les spécialités choisies et aux recommandations des parents et professeurs.


Par inertie, ou par sécurité, la nouvelle génération continue donc à privilégier les mathématiques.


Au cours de cette année, les professeurs de seconde ont, en effet, eu un rôle d’information – si ce n’est d’incitation – envers les élèves pour qu’ils n’abandonnent pas les mathématiques. « Plusieurs fois, les professeurs nous ont expliqué que c’était important qu’on choisisse des maths, même si c’est pas obligatoire. Ils ont dit qu’on en aurait vraiment besoin plus tard », explique Romain. 


Face à ce nouveau système de choix, les parents sont déboussolés, peu convaincus par l’inventivité pédagogique du ministre de l’Éducation nationale. « Le plus difficile, c’était de changer d’état d’esprit, d’un coup. On avait plus les mêmes repères et il y a encore beaucoup d’incertitude concernant l’impact du choix des spécialités sur l’orientation post-bac » confie Catherine, parent d’élève d’un lycée privé en Essonne. « Les maths me semblaient indispensables, pour avoir de la discipline dans la réflexion et de la rigueur. Mon fils a finalement pris les maths, mais c’était son choix » conclut-elle.


Les inégalités et la concurrence accentuées par la réforme 


L’asymétrie d’information et un accompagnement déficient de la part des professeurs perpétuent ainsi les inégalités dans le système scolaire. En donnant l’illusion du choix, le ministre de l’Éducation nationale a simplement déplacé la sélection. C’est désormais le lycée et les moyens dont il dispose qui jouent un rôle déterminant, car le nombre de spécialités proposées est propre à chaque établissement. Si les maths seront, elles, proposées partout, les demandes sont souvent supérieures aux places disponibles. Surtout dans les lycées dits « sensibles », qui manquent de moyens. « Dans ces lycées là, on va simplement dissuader certains élèves de prendre maths, afin d’améliorer le niveau global » précise Claire Gueville. 


Selon elle, ce phénomène met en lumière une ligne sociale de fracture. Les élèves qui ont un meilleur niveau scolaire continuent de privilégier de manière pragmatique la triplette maths-sciences-physique, pour ne se fermer aucune porte. Ceux qui proviennent de milieux plus défavorisés ont souvent un niveau scolaire moins élevé, et croient au discours du « faites ce que vous voulez ». Ils sont mal orientés, et choisissent moins les mathématiques, laissant alors le champ libre aux « premiers de cordée ».


La concurrence entre les filières s’est ainsi transformée en une concurrence entre les matières, où une forme de hiérarchisation demeure.


Enfin, un professeur avec plus de 10 ans d’expérience dans un grand lycée parisien constate un véritable « patriotisme disciplinaire ». La concurrence entre les filières s’est ainsi transformée en une concurrence entre les matières, où une forme de hiérarchisation demeure. La domination des mathématiques crée, selon lui, un véritable climat d’adversité au sein-même du corps professoral. Chacun « se bat » pour avoir le plus de demandes de sa spécialité, afin de préserver ses heures, et donc son poste. « Les professeurs se sentent en danger puisque le nombre de leurs élèves n’est pas fixé. Les professeurs de maths sont aussi concernés : on leur a fait baisser le nombre d’heures de 6 à 4 par semaine. »


Qu’en pensent les universités ? 


Dans la continuité logique de la réforme, on pourrait s’attendre à ce que les établissements supérieurs reviennent sur leur processus de sélection et le contenu de leurs cours. Or cela est loin d’être le cas : « L’enseignement supérieur ne va pas s’adapter, c’est aux élèves de le faire. Et les classes préparatoires ont publié leurs “attendus” cette semaine : les maths sont presque partout », alerte Claire Gueville. 


Les élèves qui n’auraient pas choisi les mathématiques seront ainsi pénalisés, puisque les cursus scientifiques, habitués aux profils « S », prendront simplement ceux qui ont privilégié les triplettes sciences de la vie – maths – physique. Pas question, visiblement, de faire une remise à niveau face à ces nouveaux profils, ou d’assouplir les procédures de sélection.


Initialement prévue pour mieux préparer les élèves à l’enseignement supérieur, la réforme Blanquer semble avoir été le fruit d’un déficit de concertation. Elle exige de prévoir, dès le début du lycée, le secteur d’études supérieures et même le métier exercé. Difficile pour des élèves de seconde, qui évoluent dans un système éducatif en mutation permanente.

La Dolce Vita ambacienne de Léonard

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Léonard de Vinci arrive sur le sol français à 64 ans, à dos de mulet – selon la légende –, à l’invitation de François Ier. Nous sommes à l’automne 1516. Contre une pluie d’écus d’or, il devient alors le « premier peintre, ingénieur et architecte » du roi de France.


C’est à pied et sans aucune richesse que nous entrons au château du Clos Lucé, une charmante bâtisse de tuffeau et de briques roses visitée par 380 000 touristes chaque année. L’historien Pascal Brioist nous attend. Auteur de Léonard de Vinci, homme de guerre (Alma, 2013) et des Audaces de Léonard de Vinci (Stock, 2019), il est ici chez lui. À tel point que la famille Saint Bris, propriétaire des lieux depuis 1854, a fait du sieur Brioist son conseiller technique. À lui de rendre le manoir le plus « authentique » possible, comme il y a cinq siècles.


Arpenter les deux pièces qui servirent d’ateliers artistique et…

Être père et mère : un bonheur si naturel. Sauf exception

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Dans le premier Donne-moi des fils ou je meurs (Grasset) de Maud Jan-Ailleret, la femme se montre impuissante à garder la vie en elle ; dans le second Pater dolorosa (Le Passeur) de Jérémie Szpirlglas, elle choisit de l’arrêter. Dans les deux cas, une réflexion intense sur le sens de la vie, la fécondité, le handicap.


Du point de vue de la mère


Une jeunesse dorée, une idylle née sur les bancs de la fac, qui vire à l’amour de toute une vie, un mariage, le bonheur à deux. Mais le conte de fée s’arrête là pour Laure, l’héroïne du roman de Maud Jan-Ailleret. Orpheline de mère à 13 ans, elle enchaîne les fausses couches. Une première, une deuxième, une troisième… Sur la tombe de sa mère, une prière s’élève, les bribes d’un Notre Père douloureux : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel… Pourquoi ? Pourquoi ? T’es là ? Dieu, t’es là ? Parle-moi… Est-ce que j’ai fait quelque chose de mal ? » Après des mois d’errance, le diagnostic tombe, brisant son rêve de famille nombreuse : « translocation robertsonienne ». 


Avec talent, Maud Jan-Ailleret évoque ce tabou des fausses-couches, l’impuissance et la maladresse de l’entourage.


Une anomalie génétique rare, qui ne laisse que 30% de chances de mener une grossesse jusqu’au bout, de manière aléatoire. Une explication, à défaut de consolation. Le temps passe et transforme sa quête de maternité en obsession. Jusqu’à friser l’hystérie. Faut-il tenter de nouveau ? Son couple résistera-t-il ? Avec talent, Maud Jan-Ailleret évoque ce tabou des fausses-couches, l’impuissance et la maladresse de l’entourage, les interlocuteurs plus ou moins heureux qui jalonnent le parcours médicalisé, la détresse grandissante qui se meut en plaie béante dont la douleur est ravivée par les grossesses si naturelles des autres.


Du point de vue du père


Pour une suspicion de trisomie, une IMG sonne le glas de la grossesse. On croit régler un problème et mille autres surgissent. Derrière l’acronyme aseptisé, la réalité et les lendemains douloureux que l’hôpital ne prend pas en charge. Que dire au grand frère candide ? Que le bébé était « malade » ? Et alors ? Alors on n’a pas voulu le garder ? Vers qui se tourner quand on n’est pas croyant ? Comment incriminer la science quand on croit dans le progrès ? Et pourtant… et pourtant, il y a ce doute qui taraude, que les séances de psy ne parviennent à dissiper. Une ombre plane. Il y a ce jour de la naissance si on l’avait laissé vivre. 


La confusion du père, saisi par ce vertige de l’homme capable de s’ériger en maître de la vie et de la mort.


Et puis ce jour effroyable où l’on croise un trisomique dans la rue, au rire cristallin. Heureux. Et ces nuits peuplées de cauchemar. Et les fausses couches qui s’enchaînent, comme autant de vengeances de la Nature. Les cœurs se ferment ; dans le lit conjugal, les corps s’éloignent. Jusqu’à l’accusation, à l’instar du premier couple : « C’est de ta faute ». Enfin, une nouvelle grossesse, marquée par la farouche décision de la mère de la mener à terme. Et la confusion du père, saisi par ce vertige de l’homme capable de s’ériger en maître de la vie et de la mort : « Pourquoi garder celui-ci, alors qu’on s’est séparé de Lou ? Injustice. » Livré du point de vue du père, ce récit de Jérémie Szpirlglas évoque la réaction masculine à ce tsunami émotionnel. Son impuissance face à sa compagne qui s’enfonce dans la dépression, sa culpabilité – il le reconnaît : il ne se sentait pas capable de supporter le handicap de son enfant. Expression de sa confusion, il dépeint les pensées contradictoires qui s’entrechoquent dans son esprit et ne trouvent à s’épancher.

Être père et mère : un bonheur si naturel. Sauf exception.

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Dans le premier Donne-moi des fils ou je meurs (Grasset) de Maud Jan-Ailleret, la femme se montre impuissante à garder la vie en elle ; dans le second Pater dolorosa (Le Passeur) de Jérémie Szpirlglas, elle choisit de l’arrêter. Dans les deux cas, une réflexion intense sur le sens de la vie, la fécondité, le handicap.


Du point de vue de la mère


Une jeunesse dorée, une idylle née sur les bancs de la fac, qui vire à l’amour de toute une vie, un mariage, le bonheur à deux. Mais le conte de fée s’arrête là pour Laure, l’héroïne du roman de Maud Jan-Ailleret. Orpheline de mère à 13 ans, elle enchaîne les fausses couches. Une première, une deuxième, une troisième… Sur la tombe de sa mère, une prière s’élève, les bribes d’un Notre Père douloureux : « Que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel… Pourquoi ? Pourquoi ? T’es là ? Dieu, t’es là ? Parle-moi… Est-ce que j’ai fait quelque chose de mal ? » Après des mois d’errance, le diagnostic tombe, brisant son rêve de famille nombreuse : « translocation robertsonienne ». 


Avec talent, Maud Jan-Ailleret évoque ce tabou des fausses-couches, l’impuissance et la maladresse de l’entourage.


Une anomalie génétique rare, qui ne laisse que 30% de chances de mener une grossesse jusqu’au bout, de manière aléatoire. Une explication, à défaut de consolation. Le temps passe et transforme sa quête de maternité en obsession. Jusqu’à friser l’hystérie. Faut-il tenter de nouveau ? Son couple résistera-t-il ? Avec talent, Maud Jan-Ailleret évoque ce tabou des fausses-couches, l’impuissance et la maladresse de l’entourage, les interlocuteurs plus ou moins heureux qui jalonnent le parcours médicalisé, la détresse grandissante qui se meut en plaie béante dont la douleur est ravivée par les grossesses si naturelles des autres.


Du point de vue du père


Pour une suspicion de trisomie, une IMG sonne le glas de la grossesse. On croit régler un problème et mille autres surgissent. Derrière l’acronyme aseptisé, la réalité et les lendemains douloureux que l’hôpital ne prend pas en charge. Que dire au grand frère candide ? Que le bébé était « malade » ? Et alors ? Alors on n’a pas voulu le garder ? Vers qui se tourner quand on n’est pas croyant ? Comment incriminer la science quand on croit dans le progrès ? Et pourtant… et pourtant, il y a ce doute qui taraude, que les séances de psy ne parviennent à dissiper. Une ombre plane. Il y a ce jour de la naissance si on l’avait laissé vivre. 


La confusion du père, saisi par ce vertige de l’homme capable de s’ériger en maître de la vie et de la mort.


Et puis ce jour effroyable où l’on croise un trisomique dans la rue, au rire cristallin. Heureux. Et ces nuits peuplées de cauchemar. Et les fausses couches qui s’enchaînent, comme autant de vengeances de la Nature. Les cœurs se ferment ; dans le lit conjugal, les corps s’éloignent. Jusqu’à l’accusation, à l’instar du premier couple : « C’est de ta faute ». Enfin, une nouvelle grossesse, marquée par la farouche décision de la mère de la mener à terme. Et la confusion du père, saisi par ce vertige de l’homme capable de s’ériger en maître de la vie et de la mort : « Pourquoi garder celui-ci, alors qu’on s’est séparé de Lou ? Injustice. » Livré du point de vue du père, ce récit de Jérémie Szpirlglas évoque la réaction masculine à ce tsunami émotionnel. Son impuissance face à sa compagne qui s’enfonce dans la dépression, sa culpabilité – il le reconnaît : il ne se sentait pas capable de supporter le handicap de son enfant. Expression de sa confusion, il dépeint les pensées contradictoires qui s’entrechoquent dans son esprit et ne trouvent à s’épancher.

Retour à Hauteville House

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Forte houle et traversée agitée à bord du ferry de Saint-Malo… Mais grand ciel lavé et plein soleil dès notre débarquement à Saint-Pierre-Port. Déjà venue sur l’île anglo-normande en 2002, pour le bicentenaire du grand homme, Évelyne Bloch-Dano retrouve le chemin le long des quais, aimantée par les ruelles qui grimpent vers la vieille cité, jusqu’au 38 rue Hauteville. 


Une large façade grise, plutôt austère. De la rue, rien qui distingue un lieu d’exception – une simple plaque de marbre signale les dates de l’exil à Guernesey (1855-1870). Aucun panneau explicatif à l’intérieur non plus. Car la volonté a toujours été de garder « dans son jus » la seule maison que Victor Hugo ait jamais possédée, cet édifice en terre étrangère qui appartient à la mairie de Paris, la récente campagne de travaux financée par le mécéne François Pinault n’ayant rien changé à l’affaire.


Profusion et fantaisie


Voici donc le grand portail vert qui s’entrebâille…

La sexualité de nos garçons, parlons-en !

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Entre œillades et pouffements de rire, des ados se passent un téléphone sous le manteau, pendant qu’à l’écart, une jeune fille rougissante rentre la tête dans les épaules. La scène n’est pas si rare dans les cours de récré ou salles de classe des collèges et lycées, où les jeunes filles comme garçons font circuler des « nudes », des photos dénudées d’eux-mêmes ou de leurs camarades, de plus en plus jeunes, parfois à peine pubères. Rendue incontrôlable une fois qu’elle est publiée sur WhatsApp, Snapchat ou Instagram, la diffusion de ces images intimes fait des ravages sur la réputation, la confiance et l’estime de soi de nombreux adolescents.


 La grande question du garçon à l’adolescence est : “Suis-je un homme” ?


Pression du groupe, course à la normalité, peur de la différence ou de ne pas être aimé… Pris dans les troubles de leur âge, les jeunes adolescents sont d’autant plus perdus dans leurs…