Ciel du mois : comment photographier le cosmos

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La nébuleuse de la Lyre, M 57, se trouve à un peu plus de deux mille années-lumière de la Terre. Cet anneau de fumée qui brille dans la nuit mesure dix mille milliards de kilomètres de diamètre. Au centre de la nébuleuse, l'étoile qui l'a expulsée et l'illumine s'éteint doucement... L'image a été prise en juillet 2016 dans le Limousin, avec un télescope de 150 mm de diamètre et 1800 mm de focale, et un boîtier Nikon D 4. La photographie résulte de la fusion avec le logiciel DeepSkyStacker de 400 images, posées chacune 5 secondes à 12 800 ISO. Photo S.Brunier.

La nébuleuse de la Lyre, M 57, se trouve à un peu plus de deux mille années-lumière de la Terre. Cet anneau de fumée qui brille dans la nuit mesure dix mille milliards de kilomètres de diamètre. Au centre de la nébuleuse, l’étoile qui l’a expulsée et l’illumine s’éteint doucement… L’image a été prise en juillet 2016 dans le Limousin, avec un télescope de 150 mm de diamètre et 1800 mm de focale, et un boîtier Nikon D 4. La photographie résulte de la fusion avec le logiciel DeepSkyStacker de 400 images, posées chacune 5 secondes à 12 800 ISO. Photo S.Brunier.

La photographie des planètes, des étoiles, des nébuleuses et galaxies, jadis réservée aux astronomes professionnels ou aux amateurs très éclairés, s’est démocratisée à un point tel que désormais, tout amateur, même débutant, peut tirer le portrait des astres les plus beaux du cosmos… Il y a une quarantaine d’années, seule une poignée d’amateurs, en France, maîtrisaient les télescopes, les appareils photos et les pellicules capables de donner de belles images du ciel. Aujourd’hui, ils sont des milliers ; ce mois-ci, je vous propose ici des techniques particulièrement simples pour vous initier à cette fascinante activité : la photographie de l’invisible…
Invisible ? Oui : les images du ciel prises au télescope révèlent évidemment des astres invisibles à l’œil nu mais, mieux encore, elles montrent aussi des astres invisibles dans les télescopes ! Pourquoi ? Tout simplement parce que les appareils photo modernes sont plus sensibles que l’œil humain, et, aussi et surtout, que l’astrophotographe peut poser autant de temps qu’il le désire, quand l’œil « rafraîchit » les images qu’il observe environ vingt cinq fois par seconde…
Ce qui va vous permettre cet été de réaliser vos premières images télescopiques, ce sont les progrès des télescopes, des appareils photo et des logiciels de traitement d’images.

Pour prendre des photographies du ciel, il faut un télescope installé sur une monture équatoriale et un boîtier reflex numérique. C'est tout ! Ce petit télescope de 150 mm de diamètre et son boîtier photographique ont permis de réaliser les images qui illustrent cet article. Photo S.Brunier.

Pour prendre des photographies du ciel, il faut un télescope installé sur une monture équatoriale et un boîtier reflex numérique. C’est tout ! Ce petit télescope de 150 mm de diamètre et son boîtier photographique ont permis de réaliser les images qui illustrent cet article. Photo S.Brunier.

Avant de développer ces nouvelles pratiques astrophotographiques, voyons pourquoi, jusqu’à la fin du XX e siècle, seuls des astronomes amateurs quasi professionnels parvenaient à fixer l’image des nébuleuses et galaxies lointaines. D’abord, à l’époque, les télescopes devaient suivre le mouvement apparent des astres, du à la rotation de la Terre sur elle-même, de façon quasi parfaite. L’instrument devait être remarquablement réglé, en particulier sa « mise en station ». Cette mise en station était un véritable pensum, il s’agissait de rendre l’axe de rotation du télescope parallèle à l’axe de rotation de la Terre, une technique très longue et difficile à mettre en œuvre. De même, le photographe devait, l’œil à l’oculaire d’un instrument de guidage, suivre précisément le mouvement du télescope, et ceci pendant les dizaines de minutes nécessaires à la prise de vue… Un véritable challenge…

Cette époque « aristocratique », qui réservait le cosmos aux initiés, est révolue… Certains télescopes achetés dans le commerce se règlent presque tout seuls, d’autres sont dotés d’instruments de mise en station très faciles à utiliser. Enfin, désormais, ni une mise en station très précise, ni un suivi des astres pendant la prise de vue ne sont nécessaires, grâce aux progrès des appareils numériques et aux logiciels de traitement d’images.
Alors comment faire ? D’abord, bien sûr, disposer d’un appareil photo numérique reflex, à objectifs interchangeables. Car le télescope, durant la prise de vue, remplacera l’objectif photo… Puis disposer d’un télescope ou d’une lunette astronomique. Les instruments d’initiation sont disponibles dans le commerce pour mille euros environ. Quel instrument faut-il choisir ? Le prix d’un instrument d’astronomie croit comme le diamètre de son optique, donc, en fonction de votre budget, vous opterez pour une lunette ou un télescope de 100 à 200 millimètres de diamètre. Mais, si votre but, c’est avant tout de réaliser des images dignes du télescope spatial Hubble ou presque, c’est surtout la monture de l’instrument qui guidera votre choix et votre dépense… Optez pour une monture équatoriale, c’est à dire une monture qui suivra automatiquement le mouvement des astres dans le ciel. La plupart de ces montures sont aujourd’hui proposées avec un « kit » de pointage et de guidage, ce qui signifie qu’elles ont en mémoire la plupart des objets célestes, et que moyennant la mise en station de la monture, votre instrument pourra s’orienter n’importe où dans l’Univers…

Les montures équatoriales permettent de suivre le mouvement apparent des astres dans le ciel. Pour cela, il faut pointer l'axe de la monture vers le Pôle céleste nord.

Les montures équatoriales permettent de suivre le mouvement apparent des astres dans le ciel. Pour cela, il faut pointer l’axe de la monture vers le Pôle céleste nord.

La mise en station, maintenant : c’est le « point dur », crucial, de vos débuts en astronomie…
Choisissez une monture équipée d’un « viseur polaire », c’est à dire d’une petite lunette qu’il suffit d’orienter vers l’Etoile Polaire pour que la monture soit sommairement mise en station. Avec un peu d’expérience, vous affinerez cette mise en station en pointant le Pôle céleste plus précisément ; avec un viseur polaire, c’est enfantin…
En résumé, pour devenir astrophotographe, il suffit de trouver l’Etoile Polaire dans le ciel ! Celle-ci est facile à observer, plein nord, bien sûr, avec les brillantes étoiles de la Grande Ourse qui lui tournent perpétuellement autour…

Le viseur polaire, qui permet de pointer directement le Pôle céleste nord, est indispensable lorsque l'on débute en astronomie...

Le viseur polaire, qui permet de pointer directement le Pôle céleste nord, est indispensable lorsque l’on débute en astronomie…

Une fois la mise en station, même sommaire, assurée, il suffit de pointer une cible de votre choix dans le ciel et de monter votre appareil photo sur le télescope. Des bagues de montage standard vous permettront de remplacer l’objectif de votre appareil par le télescope, qui se transformera comme par magie en super téléobjectif de 1000, 2000 ou 3000 millimètres de focale.

Le ciel du mois d'août 2016. L'Etoile polaire est facile à trouver, plein nord, et perpétuellement entourée des brillantes étoiles de la Grande Ourse.

Le ciel du mois d’août 2016. L’Etoile polaire est facile à trouver, plein nord, et perpétuellement entourée des brillantes étoiles de la Grande Ourse.

Prendre une photographie de la Lune est enfantin : il suffit de faire des tests de sensibilité et de temps de pose et de valider la bonne combinaison en regardant l’image obtenue sur l’écran du boîtier photographique… Afin d’éviter les effets du vent, de la turbulence atmosphérique, des vibrations instrumentales, optez pour un temps de pose court, de l’ordre du millième de seconde.

La Lune, photographiée en banlieue parisienne en mai 2016. Pour cette image prise avec un télescope de 150 mm de diamètre, le mode vidéo a été utilisé, la vidéo étant ensuite traitée avec le logiciel Autostakkert. Photo S.Brunier.

La Lune, photographiée en banlieue parisienne en mai 2016. Pour cette image prise avec un télescope de 150 mm de diamètre, le mode vidéo a été utilisé, la vidéo étant ensuite traitée avec le logiciel Autostakkert. Photo S.Brunier.

Quand vous maîtriserez cette technique simple, vous pourrez chercher à améliorer encore vos images, en additionnant de multiples poses pour augmenter le rapport signal sur bruit de vos images.
Puis vous utiliserez des logiciels spécialisés, comme Autostakkert ou Registax, par exemple, qui, dotés d’une véritable « intelligence artificielle », discriminent automatiquement vos meilleures prises de vue pour les sélectionner et les fusionner parfaitement… Si vous disposez d’une fonction « vidéo » sur votre appareil photo, ce seront des milliers d’images que le logiciel pourra analyser et sélectionner… Cette technique de vidéo photographie est plébiscitée désormais par tous les astronomes amateurs.
La photographie des étoiles, des nébuleuses et des galaxies exige des temps de pose bien supérieurs, pour qu’une image révèle des galaxies invisibles, distantes de plusieurs centaines de millions d’années-lumière, un temps de pose de 20, 30, 60 minutes, voire plus est indispensable.
Impossible de réaliser une image nette avec un tel temps de pose sans une monture équatoriale coûteuse et minutieusement réglée, et sans un système de guidage automatique – une caméra installée sur un petit télescope monté sur l’instrument photographique, et qui suit une étoile du champ – complexe et coûteux…
Il est pourtant possible d’obtenir de belles images avec un simple appareil photo monté sur un petit télescope, installé sur une modeste monture…

Le Grand amas d'Hercule compte plus de cinq cent mille étoiles, et brille à 22 000 années-lumière de la Terre, aux confins de la Voie lactée. Photo prise en juillet 2016 dans le Limousin, avec un télescope de 150 mm de diamètre et un boîtier Nikon D 4. La photographie résulte de la fusion avec le logiciel DeepSkyStacker de 500 images, posées chacune 5 secondes à 51200 ISO. Photo S.Brunier.

Le Grand amas d’Hercule compte plus de cinq cent mille étoiles, et brille à 22 000 années-lumière de la Terre, aux confins de la Voie lactée. Photo prise en juillet 2016 dans le Limousin, avec un télescope de 150 mm de diamètre et un boîtier Nikon D 4. La photographie résulte de la fusion avec le logiciel DeepSkyStacker de 500 images, posées chacune 5 secondes à 51200 ISO. Photo S.Brunier.

Pour cela, il suffit de choisir des temps de pose très courts, de 2 à 10 secondes, en réglant la sensibilité de l’appareil à son maximum, 6400, 12800, 25600 ISO par exemple, et de prendre des dizaines ou des centaines d’images à la suite… Pour réaliser ces rafales automatiquement, certains appareils sont équipés d’un intervallomètre, sinon, il faut en acheter un… Une fois les poses effectuées, un logiciel spécialisé, comme DeepSkyStacker, par exemple, analysera les centaines d’images, corrigera les défauts de mouvement de la monture, corrigera sa mise en station défaillante, recentrera précisément les images, et les fusionnera, afin de lisser complètement le bruit électronique du à la forte sensibilité utilisée, et de ne faire ressortir que les détails de l’image du ciel…
Les photographies qui illustrent cet article ont été réalisées en banlieue parisienne et dans le Limousin, en 2016, avec le matériel et les techniques décrites ici. A votre tour, maintenant, de vous lancer à la découverte de l’Univers et de connaître le plaisir et le vertige de la contemplation de l’invisible…
Serge Brunier

Cette photographie de la grande nébuleuse d'Orion a été prise en banlieue parisienne en janvier 2016. Télescope de 150 mm de diamètre et 1800 mm de focale, boîtier Nikon D4. 600 poses de quatre secondes ont été prises à 2500 ISO, le traitement de l'image a été réalisé avec le logiciel Iris par Frédéric Tapissier. Photo S.Brunier.

Cette photographie de la grande nébuleuse d’Orion a été prise en banlieue parisienne en janvier 2016. Télescope de 150 mm de diamètre et 1800 mm de focale, boîtier Nikon D4. 600 poses de quatre secondes ont été prises à 2500 ISO, le traitement de l’image a été réalisé avec le logiciel Iris par Frédéric Tapissier. Photo S.Brunier.

Pourquoi le football est un sport collectif, malgré lui

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Ce n’était pas une tendinite, mais une entorse à la vérité. Le genre de blessure qui se résorbe dans la liesse. Ce soir-là, en pleine finale de l’Euro 84, Patrick Battiston hèle son banc. Il réclame son remplacement. Michel Hidalgo, le sélectionneur des Tricolores, sollicite un défenseur, Manuel Amoros, qui entrera en jeu à la 73e minute. Le faux éclopé, Patrick Battiston, finira par l’avouer : il a menti pour permettre à son coéquipier de goûter à l’euphorie du sacre européen. La France, ce 27 juin, l’emporte 2 à 0, face à l’Espagne. Et l’« esprit du foot », qui parfois gît dans la rouerie, s’incarne dans ce geste altruiste, à l’image du tempérament de cette troupe de héros romantiques. « Dans cette…

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Violence dans les médias et sur internet : comment faire face ?

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« Il faut que chacun d’entre nous comprenne que si le monde va mal, c’est à nous de l’améliorer, qu’il faut répondre à la violence par la douceur, à la haine par l’amour, à l’égoïsme par la solidarité. » Dans une émouvante lettre ouverte publiée le 30 juin, les parents du policier Jean-Baptiste Salvaing, assassiné trois semaines plus tôt avec sa compagne, par un djihadiste de Daech à leur domicile de Magnanville (Yvelines), invitent leurs concitoyens à ne pas se laisser entraîner dans le piège de la violence. « La mobilisation extraordinaire qu’a suscitée cette tragédie peut nous faire espérer que désormais chacun d’entre nous fasse le choix de la paix. C’est la seule voie possible. »

Comme ces parents endeuillés, beaucoup de Français cherchent de quelle manière répondre, individuellement ou collectivement, à cette violence multiforme et souvent imprévisible. Faut-il s’enfermer, ruminer sa douleur, répondre coup pour coup ? Comment se protéger et ne pas se laisser entraîner dans une spirale qui peut se révéler destructrice ? Nous avons posé la question à trois experts, auteurs de plusieurs ouvrages sur la question : Ariane Thiran-Guibert, formatrice en relations non violentes en Belgique, Françoise Keller, spécialiste de la communication non violente (CNV) à Lyon, et le philosophe Jean-Marie Muller. Voici leurs conseils.

Écouter ses propres émotions. En effet, le risque est d’être trop vite dans la réaction. Les actes de violence dont nous sommes les témoins ou les victimes, et les émotions qu’ils provoquent en nous, sont d’abord une occasion de nous interroger en profondeur. Quels sont mes besoins, mes valeurs ? À quoi je tiens le plus ? Quel monde ai-je envie de construire ? Et comment je fais pour mettre mes propres actes en conformité avec mes aspirations ? En ce sens, la violence peut nous inviter à plus de responsabilité, à plus d’engagement. Attention à ne pas rester seul. Quelle action collective vais-je pouvoir mener ? Quelle association vais-je pouvoir rejoindre ? 

Choisir et diversifier ses sources d’information… Méfions-nous de nos perceptions. Dans l’actualité, nous sommes beaucoup plus souvent attirés (fascinés ?) par ce qui va mal. Et ce n’est pas que le problème des médias, même s’il est vrai que ceux-ci nous entraînent souvent dans cette logique. Sur les réseaux sociaux, une vidéo violente a bien plus de chance d’être relayée qu’une initiative de paix, plus difficile à montrer, il est vrai. Attention au voyeurisme. 

Analyser les causes de la violence. Contrairement à une idée reçue, aucune violence n’est « gratuite ». Qu’elle vienne de Daech ou des casseurs de rue, elle a toujours des causes, des racines plus ou moins profondes, souvent liées à un sentiment d’injustice, de mépris ou d’humiliation. Chercher à comprendre (ce qui ne veut pas dire justifier) permet de prendre du recul et de ne pas rester dans un registre purement émotionnel. D’où la nécessité de se former et de s’informer. Cette réflexion peut aussi permettre de reconnaître la violence qui est en soi. 

Travailler sur soi-même. La violence n’est pas seulement un phénomène extérieur, elle est aussi à l’intérieur de nous-mêmes. Je peux cultiver en moi un espace de paix qui me rendra plus fort face aux aléas de la vie. Se retrouver avec des amis, prendre le temps de la convivialité, écouter de la musique, pratiquer un sport, marcher en montagne ou au bord de la mer… Autant d’activités qui peuvent nous permettre de prendre des moments de respiration, de ressourcement. Il ne s’agit pas de fuir la réalité, mais de prendre les forces nécessaires pour mieux l’affronter. Le jeûne médiatique (couper la radio, la télé, les réseaux sociaux) peut être aussi une réponse transitoire. Dans tous les cas, ne restons pas inactifs. Face à la peur et à l’insécurité générées par la violence, l’engagement personnel, qui nous fait sortir de la passivité, apparaît comme le meilleur rempart. Presque une thérapie !

Les automobiles auraient évolué comme les espèces vivantes

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L'évolution de l'automobile pourrait être appréhendé sous un éclairage darwinien (Domaine public)

L’évolution de l’automobile pourrait être appréhendé sous un éclairage darwinien (Domaine public)

Sous la pression constante du “dernier modèle” – d’iPhone ou smartphone, d’ordinateur, de téléviseur, de voiture, de drone, et autres – nous perdons de vue parfois l’aspect étrange de la technologie, phénomène inconnu ailleurs dans le monde du vivant.

Or des chercheurs de l’université de Californie à Los Angeles (UCLA) et l’université de Gothenberg en Suède ont tenté de caractériser l’évolution de ce phénomène (pensée et activité humaines autant qu’objet physique) afin de mieux le cerner et, si possible, prévoir vers quoi il nous amène. Leur cible : les voitures.

Un Darwin dans le moteur des automobiles

Ils ont ainsi analysé les 3 575 modèles développés par 172 constructeurs différents qui ont constitué l’histoire de l’automobile américaine depuis 1896 jusqu’à 2014, à la recherche de lois.

Et ils ont découvert quelques particularités qui, sans être absolument révolutionnaires, leur ont donné des outils théoriques pour prévoir l’avenir – du moins une version possible. Ils ont surtout validé l’utilisation de la théorie de l’évolution des espèces de Darwin (1859) comme moyen d’interprétation du phénomène-objet technologique.

La concurrence entre espèces Vs. les conditions de l’environnement

Ainsi, en considérant les dates d’apparition et de disparition d’un modèle (ou d’une “lignée” de modèles apparentés) comme s’il s’agissait d’une espèce vivante, les chercheurs ont observé les faits suivants :

1- Si les espèces ont tendance à se diversifier en période de croissance économique (et inversement en période de récession), et si elles sont également sensibles aux changements du prix du carburant, ces facteurs extérieurs jouent moins dans la diversification que la compétition entre espèces (ce qui revient à une compétition entre firmes).

Apparition d’espèces dominantes

2- En particulier, à partir de la Seconde Guerre Mondiale, la diversité a chuté drastiquement par rapport à la période précédente (1896-1939) par l’apparition de quelques espèces dominantes consommant toutes les ressources de l’environnement (c’est-à-dire le portefeuille des Américains).

Les auteurs expliquent la constance de ce phénomène par le fait que, lorsque que cette domination technologique s’est établie, il est devenu beaucoup plus économique pour les majors de poursuivre le développement des gammes existantes que d’investir sur des modèles (ou lignées de modèles) nouveaux.

Homogénéisation génétique

3- Depuis les années 1980, les espèces dominantes se sont homogénéisé – plus de grandes différences techniques entre les espèces-modèles – et le terrain de compétition s’est déplacé presque exclusivement sur les différences de prix.

4- Concernant les véhicules électriques et hybrides, qui représentent un changement technologique fondamental survenu ces dernières années, les chercheurs ont identifié un processus (naissant) de diversification semblable à celui des débuts de l’automobile à essence. Ce qui leur a permis d’extrapoler vers l’avenir.

Les voitures électriques et hybrides refont le monde

En effet, ils prévoient que dans les trois ou quatre décennies à venir, le marché de ces voitures connaître une grande diversité – avant que quelques espèces dominantes ne finissent par s’imposer.

Néanmoins, il nous semble que les rythmes des innovations technologiques entre la fin du XIXe siècle et ce début du XXIe n’étant pas du tout les mêmes, cela pourrait se résoudre bien plus vite. L’avenir le dira.

–Román Ikonicoff

 

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  • L’irrésistible extension de la théorie de l’évolution – S&V n°1159 – 2014 – Si Darwin a basé sa théorie de l’évolution par la sélection naturelle sur l’étude de la morphologie des espèces, depuis 155 ans la théorie s’est enrichie, notamment elle a intégré la génétique (Théorie synthétique de l’évolution) dans les années 1930. Mais depuis quelques années, les principes découverts par Darwin s’appliquent également dans d’autres domaines, comme la technologie, la psychologie, la médecine, la culture voire même la cosmologie et la physique quantique.

1159

  • Et si on repensait toutes les machines – S&V n°1153 – 2013 – Achetez ce numéro en ligne. Un collectif a décidé de réinventer toutes les machines afin de refonder la technologie sur des bases plus claires et simples… et sortir du cercle de l’innovation et sophistication tout-azimut.

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  • “Objets connectés – Vers les interfaces gestuelles ?” – S&V n°1177 – 2015 – Achetez ce numéro en ligne. Les grandes firmes de la Toile, en particulier Google, se sont lancées dans les interfaces gestuelles, afin de dépasser le stade de l’écran tactile et de la souri-clavier. Ces technologies sont séduisantes, mais seront-elles adoptées par les utilisateurs ?

Capture interfaces