Violence dans les médias et sur internet : comment faire face ?

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« Il faut que chacun d’entre nous comprenne que si le monde va mal, c’est à nous de l’améliorer, qu’il faut répondre à la violence par la douceur, à la haine par l’amour, à l’égoïsme par la solidarité. » Dans une émouvante lettre ouverte publiée le 30 juin, les parents du policier Jean-Baptiste Salvaing, assassiné trois semaines plus tôt avec sa compagne, par un djihadiste de Daech à leur domicile de Magnanville (Yvelines), invitent leurs concitoyens à ne pas se laisser entraîner dans le piège de la violence. « La mobilisation extraordinaire qu’a suscitée cette tragédie peut nous faire espérer que désormais chacun d’entre nous fasse le choix de la paix. C’est la seule voie possible. »

Comme ces parents endeuillés, beaucoup de Français cherchent de quelle manière répondre, individuellement ou collectivement, à cette violence multiforme et souvent imprévisible. Faut-il s’enfermer, ruminer sa douleur, répondre coup pour coup ? Comment se protéger et ne pas se laisser entraîner dans une spirale qui peut se révéler destructrice ? Nous avons posé la question à trois experts, auteurs de plusieurs ouvrages sur la question : Ariane Thiran-Guibert, formatrice en relations non violentes en Belgique, Françoise Keller, spécialiste de la communication non violente (CNV) à Lyon, et le philosophe Jean-Marie Muller. Voici leurs conseils.

Écouter ses propres émotions. En effet, le risque est d’être trop vite dans la réaction. Les actes de violence dont nous sommes les témoins ou les victimes, et les émotions qu’ils provoquent en nous, sont d’abord une occasion de nous interroger en profondeur. Quels sont mes besoins, mes valeurs ? À quoi je tiens le plus ? Quel monde ai-je envie de construire ? Et comment je fais pour mettre mes propres actes en conformité avec mes aspirations ? En ce sens, la violence peut nous inviter à plus de responsabilité, à plus d’engagement. Attention à ne pas rester seul. Quelle action collective vais-je pouvoir mener ? Quelle association vais-je pouvoir rejoindre ? 

Choisir et diversifier ses sources d’information… Méfions-nous de nos perceptions. Dans l’actualité, nous sommes beaucoup plus souvent attirés (fascinés ?) par ce qui va mal. Et ce n’est pas que le problème des médias, même s’il est vrai que ceux-ci nous entraînent souvent dans cette logique. Sur les réseaux sociaux, une vidéo violente a bien plus de chance d’être relayée qu’une initiative de paix, plus difficile à montrer, il est vrai. Attention au voyeurisme. 

Analyser les causes de la violence. Contrairement à une idée reçue, aucune violence n’est « gratuite ». Qu’elle vienne de Daech ou des casseurs de rue, elle a toujours des causes, des racines plus ou moins profondes, souvent liées à un sentiment d’injustice, de mépris ou d’humiliation. Chercher à comprendre (ce qui ne veut pas dire justifier) permet de prendre du recul et de ne pas rester dans un registre purement émotionnel. D’où la nécessité de se former et de s’informer. Cette réflexion peut aussi permettre de reconnaître la violence qui est en soi. 

Travailler sur soi-même. La violence n’est pas seulement un phénomène extérieur, elle est aussi à l’intérieur de nous-mêmes. Je peux cultiver en moi un espace de paix qui me rendra plus fort face aux aléas de la vie. Se retrouver avec des amis, prendre le temps de la convivialité, écouter de la musique, pratiquer un sport, marcher en montagne ou au bord de la mer… Autant d’activités qui peuvent nous permettre de prendre des moments de respiration, de ressourcement. Il ne s’agit pas de fuir la réalité, mais de prendre les forces nécessaires pour mieux l’affronter. Le jeûne médiatique (couper la radio, la télé, les réseaux sociaux) peut être aussi une réponse transitoire. Dans tous les cas, ne restons pas inactifs. Face à la peur et à l’insécurité générées par la violence, l’engagement personnel, qui nous fait sortir de la passivité, apparaît comme le meilleur rempart. Presque une thérapie !

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