Découverte d’un matériau capable de produire de l’énergie par photosynthèse

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Cristal de birnessite, tel qu'on le trouve dans la nature. Légèrement modifié, il transforme l'eau en oxygène et en hydrogène par l'action de la lumière (Copyright : Hannes Osterhammer; Beitrag Münchener Micromounter).

Minéral de birnessite, tel qu’on le trouve dans la nature. Légèrement modifié, il transforme l’eau en oxygène et en hydrogène par l’action de la lumière (Copyright : Hannes Osterhammer; Beitrag Münchener Micromounter).

La nature regorge de trésors, encore faut-il savoir les dénicher. C’est ce qu’ont fait des chercheurs en découvrant qu’un matériau naturel nommé “birnessite” peut effectuer, moyennant une transformation en laboratoire, une photosynthèse qui coupe les molécules d’eau en oxygène et en hydrogène, par la simple action de la lumière, à l’instar de ce que font les plantes.

L’hydrogène ainsi extrait de ce processus peut alors servir comme carburant de piles à hydrogène pour de nombreuses applications. Cette découverte, fruit d’années de recherches et d’un heureux concours de circonstances, s’inscrit dans la quête de sources d’énergie propres et peu couteuses.

Une photosynthèse minérale

Au départ, ils ne visaient pas aussi haut : les chercheurs du Département d’ingénierie chimique et biomédicale de l’université d’État de Floride étudiaient les propriétés physico-chimiques de la birnessite, un matériau à base d’oxyde de manganèse, soit contenant des atomes d’oxygène (O) et de manganèse (Mn) que l’on trouve à l’état naturel dans les déserts et les fonds océaniques.

Produite par le dépôt lent d’atomes de Mn dans un milieu liquide, elle a une structure en lamelles (représentées par la formule MnO) qui emprisonne des atomes d’autres éléments chimiques (en bleu), comme le montre la figure ci-dessous.

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Structure atomique de la birnessite (Crédit : Lucht, & Mendoza-Cortes, J. Phys. Chem. C)

Or les scientifiques savent que cette structure présente de similarités chimiques avec l’organisation atomique des molécules (ou complexes moléculaires) en jeu dans la photosynthèse au sein des plantes, ce que l’on nomme complexe d’oxydation de l’eau (COE).

La birnessite : une usine à hydrogène figée et inerte

Néanmoins, si la structure atomique de la birnessite est à une certaine échelle similaire au COE de la photosynthèse végétale, elle est inerte chimiquement, ne produisant aucune réaction active : la birnessite ressemble à un générateur d’hydrogène dont toutes les pièces du mécanisme seraient soudées entre elles – une sorte de pâle imitation figée du plan de la machine photosynthétique.

C’est là qu’intervient l’heureux concours de circonstances : afin d’étudier plus en détail la structure atomique du matériau, les chercheurs ont voulu isoler une lamelle de birnessite et modifier également le jeu d’atomes qui se greffent sur la structure de base. Et là, surprise : cette couche d’une épaisseur nanoscopique s’est animée chimiquement et s’est mise sous l’effet de l’éclairage à couper les molécules d’eau du milieu pour produire de l’oxygène et de l’hydrogène.

 

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Transformation en laboratoire de la structure de la birnessite : extraction d’une simple couche (Crédit : Lucht, & Mendoza-Cortes, J. Phys. Chem. C)

 Vers une énergie propre et peu couteuse ?

Certes, la production de cette structure monocouche particulière nécessite de fournir de l’énergie (et peut-être d’émettre du CO2 et des polluants). Et si l’on compte le temps et l’argent qu’il a fallu investir pour que la connaissance et l’étude de ce matériau aboutisse à ce résultat, le bilan est négatif…

Mais une fois découvert ce nouveau matériau, l’industrie peut prendre le relai de la recherche académique et modifier le bilan global de l’opération. Peut-être qu’à l’avenir, si la faisabilité à grande échelle est confirmée, nous pourrons obtenir de l’énergie presque gratuitement et sans pollution, en faisant le plein d’eau de nos machines et voitures.

– Román Ikonicoff

 

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