Energie : Les excréments humains recèlent d’importantes quantités de biogaz inexploitées

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Composé à 60 % par du méthane, le biogaz est obtenu en maintenant la matière organique en un milieu dépourvu d'oxygène - Ph. Corinne Schuster-Wallace / UNU-INWEH

Composé à 60 % par du méthane, le biogaz est obtenu en maintenant la matière organique en un milieu dépourvu d’oxygène – Ph. Corinne Schuster-Wallace / UNU-INWEH

Plutôt que de les envoyer à l’égout, pourquoi ne pas collecter les déjections humaines et les convertir en une source d’énergie ? Le biogaz ainsi obtenu pourrait fournir, mondialement, une quantité de combustible suffisante à alimenter 138 millions de foyers !

A lui seul, le gaz naturel (ou méthane) qui forme 60 % de ce biogaz, représenterait une valeur de 9,5 milliards de dollars, d’après les estimations de l’université des Nations unies, commanditaire d’un rapport publié aujourd’hui.

De la matière organique, les bactéries font du gaz

Ce sont les bactéries qui produisent le biogaz via un processus naturel de dégradation de matière organique (ou biomasse), comme la matière fécale, dans des conditions d’anaérobie (absence d’oxygène). Ce même processus est exploité en agriculture par la “méthanisation”, la production de méthane à partir des déjections des vaches d’élevage, et pourrait être utilisé lors de missions spatiales habitées. Les chercheurs suggèrent à présent de le mettre en place en substitution du réseau des eaux usées.

Mais extraire du combustible de nos excréments n’est que l’un des bénéfices possibles. Dans le rapport réalisé par l’Institut pour l’eau, l’environnement et l’énergie (une branche de l’université des Nations unies basée au Canada), le concept est poussé jusqu’au bout. Car même une fois brûlé comme combustible, le biogaz peut encore servir.

Une fois carbonisé, le biogaz donne un produit exploitable comme du charbon de bois

Son résidu après combustion s’avère en effet un équivalent du charbon de bois ! Et plus durable, de surcroît : alors que ce dernier est obtenu à partir des arbres, le biogaz généré par les déchets corporels humains pourrait fournir 2 millions de tonnes d’une matière équivalente en termes énergétiques. Et ce, sans abattre une seule plante !

Les gains possibles pour l’économie et l’énergie sont donc flagrants. Mais d’après les experts de l’ONU, les bénéfices pour l’environnement et la santé humaine seraient encore plus importants, surtout dans les pays les moins développés économiquement, où les sanitaires manquent cruellement dans de nombreuses régions.

1 milliard de personnes n’ont pas accès aux sanitaires

Un milliard de personnes sur la planète, en particulier en Inde, n’ont pas du tout l’usage des toilettes et font leurs besoins à l’air libre. Si leurs déjections étaient récupérées, 200 millions de dollars (180 millions d’euros) par an pourraient être générés par le biogaz extrait. Le gain énergétique permettrait d’alimenter en électricité jusqu’à 18 millions de foyers sur place.

En somme, cette nouvelle étude montre l’intérêt de cesser de considérer nos déjections comme un déchet, mais plutôt comme une ressource. Pour juger de sa richesse, les analyses chimiques ont montré que l’urine humaine contient 300 grammes de phosphore, 900 grammes de potassium et 300 g de soufre par mètre cube, tandis que les excréments produit en un an par une seule personne sont riches de 4,5 kilos d’azote et 550 grammes de phosphore.

—Fiorenza Gracci

 

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S&V 1163 méthanisation

S&V 1071 - biomasse

S&V 883 - egout Chicago

 

J’habite chez ma fille

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Une délicate odeur de légumes embaume la cuisine. Un tablier autour de la taille, Paule, 74 ans, saupoudre une pincée de sel dans la marmite fumante. « Voilà, c’est prêt ! », lance-t-elle en déposant son velouté de poireaux au milieu de la table. Suzanne, sa mère, se régale : « C’est bon comme la soupe au lait que faisait cuire autrefois grand-mère dans la cheminée… » Et de déballer, dans une longue tirade, des souvenirs de son enfance entre Ligugé et Arcachon. « À 98 ans, maman est un livre ouvert dans lequel je réapprends chaque jour à lire », commente Paule dans un sourire. Voilà bientôt un an que cette ancienne assistante maternelle, installée dans une petite maison à Saint-Grégoire, près de Rennes, accueille sa mère sous son toit. « Quand mon…

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Deuil : Comment recréer du sens à partir de l’insensé

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« La mort ne peut pas être utile, ou servir. Je déteste ces mots. Pourtant, je crois que Ferdinand aurait aimé ce que l’on fait avec l’association qui porte son nom. » C’est ainsi que l’acteur Patrick Chesnais évoquait dans nos pages en 2008 son combat contre l’alcool au volant, qui causa la mort de son fils de 20 ans, passager d’un chauffard imbibé de whisky. La mort n’a pas de sens. Et quand le traumatisme surgit, avec le décès brutal d’un enfant, mais aussi d’un mari, d’une soeur, d’un parent, viennent les questions : « Pourquoi ? Pourquoi à moi ? » « En psychologie, on parle de la théorie du monde juste, note Jacques Lecomte, psychologue, président de l’Association française de psychologie positive. La plupart d’entre nous, surtout issus d’un milieu relativement protégé, croient qu’il nous arrive ce qu’on mérite. Mais voilà que…

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Ils ont vu l’impact du réchauffement climatique en comptant pendant 18 ans les insectes d’un toit

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balanin des glands ou charançon du chêne

Les espèces spécialisées, comme le charançon du chêne (Curculio glandium), qui ne se nourrit que de glands, s’avèrent les plus vulnérables au changement climatique, d’après l’étude danoise. – Ph. Klaus Bek Nielsen

Ce sont pas moins de 250 000 insectes de 1543 espèces différentes que deux entomologistes danois ont compté, semaine après semaine, pendant 18 ans, toujours sur le même toit : celui du Muséum d’histoire naturelle de Copenhague, au Danemark. C’est le plus long suivi d’insectes jamais réalisé !

Du printemps à l’automne, entre 1992 et 2009, Ole Karsholt et Jan Pedersen ont ainsi identifié et classé une fois par semaine les bestioles contenues dans un piège lumineux posé sur le toit de leur bureau, à 17,5 mètres de hauteur.

Un patient travail de fourmi grâce auquel ils ont vu se déployer sous leurs yeux, petit à petit, l’impact du réchauffement climatique sur la biodiversité. Leur échantillon de 1543 espèces est en effet représentatif de tous les insectes peuplant le Danemark : y figurent 42 % des papillons de nuits et 12 % des coléoptères du pays.

Les insectes peuplant le toit du Muséum de Copenhague ont évolué avec la hausse des températures

Or, cette population a beaucoup évolué au fil du temps, sous l’effet de la hausse du thermomètre : des espèces invasives sont arrivées, des espèces vivant habituellement plus au sud dans le continent ont commencé à s’installer dans cette région nordique, et les espèces nordiques ont commencé à diminuer.

Ainsi, la première observation de la coccinelle asiatique ou arc-en-ciel, désormais considérée comme une espèce invasive, a eu lieu sur le toit du Muséum de Copenhague, ainsi que six autres espèces jamais vues auparavant dans la région.

La coccinelle asiatique ou coccinelle arlequin  (Harmonia axyridis), considérée comme invasive en Europe, a été repérée pour la première fois au Danemark sur le toit du Muséum de Copenhague au cours des 18 ans de suivi. - Ph. n.a.t.u.r.e / flickr.com / CC BY NC ND 2.0

La coccinelle asiatique ou coccinelle arlequin (Harmonia axyridis), considérée comme invasive en Europe, a été repérée pour la première fois au Danemark sur le toit du Muséum de Copenhague au cours des 18 ans de suivi. – Ph. n.a.t.u.r.e / Flickr / CC BY NC ND 2.0

Les espèces d’insectes spécialistes sont les plus affectées par le réchauffement climatique

Mais face au réchauffement, toutes les espèces ne sont pas logées à la même enseigne. Les plus affectés, ont découvert les chercheurs, sont les animaux qui se nourrissent d’une seule plante, autrement dit qui sont très spécialisés. Ces insectes ont connu, à travers l’Europe, une hausse de température dans leur habitat de 0,14 °C entre 1993 et 2008 pour les papillons de nuit spécialisés et de 0,42 °C entre 1995 et 2008 pour les coléoptères spécialisés.

Le problème de ces bestioles spécialisées est qu’elles sont contraintes d’attendre que leur plante nourricière produise au printemps les fruits ou les feuilles dont ils s’alimentent ! Ce qui est devenu un problème, depuis que le réchauffement chamboule les dates d’éclosion des bourgeons et de développement des fruits de nombreuses plantes : les insectes spécialisés ont beau essayer de s’accorder avec le nouveau calendrier, en sortant plus tôt ou plus tard de leurs œufs au printemps, beaucoup ne s’y retrouvent plus.

A l’inverse, le fait d’avoir une alimentation plus variée donne sans doute un avantage aux espèces généralistes : plus flexibles, elles sont capables de se nourrir des premières feuilles, fleurs ou fruits qui se développeront au printemps.

Les espèces aimant le froid voient leur habitat se réduire

L’une des espèces spécialistes est le balanin des noisettes, un petit coléoptère de la famille des curculionidés, qui se nourrit uniquement des fruits du noisetier. Accoutumé au climat froid des régions aussi nordiques que le Danemark, s’il était présent à Copenhague au cours de la première moitié du suivi (1992-2001), il a été par la suite entièrement supplanté par son cousin le charançon du chêne (ou balanin du gland), dont la seule nourriture sont les glands. Cet habitué de contrées moins froides, comme l’Europe centrale, n’avait jamais été signalé auparavant dans la capitale danoise.

Or, comme le notent les chercheurs, cela signifie une réduction de l’habitat des espèces amatrices du froid : elles ont beau se déplacer vers le nord, elles ne peuvent migrer à l’infini sans trop s’approcher des pôles, où règne un climat arctique.

—Fiorenza Gracci

 

> Lire aussi :

 

> Lire également dans les Grandes Archives de S&V :

  • Les animaux malades de l’homme S&V n°1149 (2013). Aux quatre coins de la planète, les dégâts que notre espèce fait subir aux autres ne se comptent plus. Tour d’horizons en images.

S&V 1149 - animaux disparition

  • Le vivant déboussoléS&V n°1075 (2007). Le flou règne désormais entre les saisons, et cela dérègle l’horloge qui rythme la cadence de la nature. La fable du chêne, de la mésange et de la chenille résume bien comment les espèces tentent de s’y adapter.

S&V 1075 - fable chene chenille mesange climat

GA

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