Comment notre corps se réchauffe-t-il quand il fait froid ?

Standard

Face au froid, la thermorégulation implique une réponse de la circulation, du métabolisme, et du cerveau. - Ph. Ktoine / Flickr / CC BY SA 2.0

Face au froid, la thermorégulation implique une réponse de la circulation, du métabolisme, et du cerveau. – Ph. Ktoine / Flickr / CC BY SA 2.0

C’est le moins qu’on puisse dire : notre corps n’aime pas les variations de température. Il met tout en œuvre pour se maintenir à 37 °C, par un ensemble de mécanismes de thermorégulation. S’il est face à une baisse du thermomètre, il riposte au moindre signe de refroidissement.

Aussi, quand la protection assurée par les tissus adipeux de la peau ne suffit plus, des contre-mesures se mettent en place, dont les frissons. Ces contractions musculaires sont déclenchées dans le cerveau par l’hypothalamus (le centre de contrôle de notre température interne). Conséquence : l’énergie musculaire est transformée en chaleur, et la température remonte.

Les vaisseaux sanguins redirigent la circulation

Simultanément, le métabolisme s’adapte et l’organisme augmente sa consommation de glucose et sa production d’ATP (adénosine triphosphate), molécules pourvoyeuses d’énergie. Enfin, pour éviter une grande perte de chaleur quand le sang passe près de l’air ambiant, le diamètre des capillaires de la peau diminue.

Ces petits vaisseaux se contractent, renvoyant le sang vers les gros vaisseaux plus profonds et les organes internes (foie, intestins, cœur), ce qui accroît la couche de protection entre le milieu extérieur et la masse sanguine.

Parfois, en conditions de froid extrême, les réponses physiologiques n’y suffisent pas : sous les 35 °C de température corporelle, on rentre en hypothermie, mais la situation ne devient critique pour la survie qu’au-dessous de 30 °C.

A quoi est due la “morsure” du froid?

Il arrive  que la baisse de température puisse aller jusqu’à faire mal. Il aura fallu attendre 2007 pour comprendre pourquoi le froid intense est si “piquant” et identifier le coupable : un type particulier de canaux sodiques, nommé NaV1.

Les canaux sodiques sont des protéines dites “transmembranaires”, qui traversent la membrane des neurones sensoriels. En laissant passer des ions sodium, elles produisent un signal nerveux qui sera propagé jusqu’au cerveau. Or, les NAV1 sont uniquement situées sur les terminaisons nerveuses sensibles à la douleur, appelés nocicepteurs, notamment de la peau.

En conditions normales, elles sont peu activées, contrairement aux autres canaux sodiques qui s’ouvrent et se ferment pour enclencher le signal nerveux. Mais dès que la température diminue fortement, les rôles s’inversent et les NaV1 s’activent, transmettant alors un signal de douleur au cerveau.

G.K. et K.J.

D’après S&V Questions Réponses n°14

 

  • Vive les cellules graisseuses !S&V n°1165 (2014). De la régulation de l’appétit à celle de la température, en passant par les défenses immunitaires, le tissu adipeux est bien plus qu’une simple réserve d’énergie.

S&V 1165 - graisse

  • Quand l’homme dépasse ses limites S&V n°929 (1995). A travers les océans et les Pôles, certains réalisent des exploits d’endurance en repoussant les limites de l’organisme. Face au froid, à la faim, à la mer… comment réagit le corps humain ?

S&V 929 - limites froid

 

Courir procure les mêmes effets que le cannabis, affirme une étude.

Standard

 

Tous drogués ? (Ph. Elvert Barnes Via Flickr CC BY 2.0)

Tous drogués ? (Ph. Elvert Barnes Via Flickr CC BY 2.0)

S’entraîner à la course est bien meilleur que consommer du cannabis. Mais il n’empêche que les deux activités auraient beaucoup en commun, selon une nouvelle étude effectuée chez les souris – dont on sait par ailleurs qu’elles constituent un modèle très proche de celui des humains.

Si l’on savait depuis longtemps que faire du sport déclenche les endorphines, en particulier la course de fond, les chercheurs montrent que finalement ces endorphines ne participent pas (ou peu) à l’”ivresse du coureur” : ce sont les endocannabinoïdes qui lui procurent ce sentiment de bien-être.

 Euphorie du coureur et cannabis

Ceux qui pratiquent la course – mais cela vaut sûrement pour les autres sports d’endurance – connaissent cet effet “second souffle” où tout à coup les douleurs et lourdeurs physiques s’estompent et où l’esprit connaît un moment de plénitude et d’euphorie.

L’effet, qui peut intervenir durant l’effort où après son arrêt, est notamment lié à l’invasion du cerveau par des substances qu’il sécrète. Et jusque-là l’on évoquait le rôle des “endorphines” dans ce processus, soit la production au niveau cérébral de molécules opioïdes, les mêmes que celles de l’opium.

Mais la nouvelle étude bat en brèche cette affirmation pour démontrer que l’effet est plutôt du type cannabis, du moins chez la souris : la course déclencherait la production des mêmes neurotransmetteurs qui apparaissent lorsqu’on fume de la marijuana, en particulier un “endocannabinoïde” nommé anandamide (contraction de “ananda”, signifiant béatitude en sanskrit, et “amide”, signalant la forme moléculaire de la substance).

Des souris coureuses

Pour démontrer cela, les chercheurs ont entrainé à la course 234 souris mâles et les ont testé pendant plusieurs semaines, à raison de 10 à 12 souris par jour en moyenne, pour une série de tests (chacun répété plusieurs fois avec différents groupes de souris).

La première expérience, avec 32 souris, visait à tester leur comportement : les 3 premiers jours, toutes les souris ont été enfermées dans une cage avec une roue tournante afin de les familiariser avec l’exercice. Laissées libres de leurs choix, elles ont en moyenne couru 5,4 km/jour.

Puis les chercheurs ont bloqué les roues pendant 2 jours, pour les faire récupérer, et ont scindé le groupe en deux : le 6e jour, seules 16 souris ont pu bénéficier d’un déblocage de la roue pendant 5 heures – et elles s’y sont données à cœur joie. Les autres n’ont pas pu courir.

Le test de la boite sombre-lumineuse

C’est alors que les chercheurs ont soumis l’ensemble à deux tests dont on sait qu’ils permettent d’évaluer chez la souris l’anxiété (ou stress) et la douleur ressentie : l’expérience de la boite sombre-brillante et celle de la plaque chauffante.

La première est un montage où deux boites, l’une obscure l’autre exposée à la lumière, communiquent par une ouverture. Il a été démontré qu’une souris placée dans un tel environnement inhabituel tend naturellement à se réfugier dans l’obscurité : ses incursions du coté lumineux sont d’autant plus nombreuses que son niveau d’anxiété est élevé. Or les souris joggeuses ont par ce biais montré que leur anxiété était moindre.

Le test sur plaque chauffante

Le deuxième test, celui de la plaque chauffante (à 53 °C), mesure la sensibilité à la douleur : et encore une fois, les souris sportives réagissaient moins violemment (temps de latence entre l’immobilité et les mouvement réactifs) que les autres.

Ces tests ont été répétés ensuite mais cette fois en mesurant les taux d’endocannabinoïdes et d’endorphines dans le sang des souris. Puis avec des inhibiteurs de ces substances. Puis enfin (pour confirmer les résultats) avec des souris modifiées génétiquement afin de ne pas produire d’endocannabinoïdes.

Mettre en lumière le rôle du système endocannabinoïde

Dans chaque test, les chercheurs ont constaté que le taux d’endorphines dans le sang n’influe pas sur l’anxiété ni la sensibilité à la douleur, ce qu’ils expliquent par le fait que ces molécules sécrétées dans le sang ne peuvent traverser la barrière encéphalique et donc atteindre le cerveau.

En revanche, ils ont montré qu’il y a un lien fort entre le taux de molécules du système endocannabinoïde, qui passent la barrière, et le comportement moins anxieux et sensible à la douleur des souris coureuses.

L’étude a ainsi permis de relativiser l’effet des endorphines et, au contraire, mettre en avant l’importance du système endocannabinoïde dans les effets ressentis par les joggeurs – et, supposent-ils, pour tout un ensemble de sports d’endurance. Mais bien sûr cela ne signifie pas qu’il faut compenser le manque de course par du cannabis (l’inverse étant .

Román Ikonicoff

 

> Lire aussi :

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Et l’intelligence humaine vint aux souris – S&V n°1148 – 2013. Les souris sont les animaux préférés des chercheurs, car sur de nombreux aspects biologiques, leur fonctionnement ressemble au nôtre. Mais de là à essayer de les doper aux neurones humaines, il n’y a qu’un pas… que les chercheurs ont franchi.

1148

  • Cinq sports sur ordonnance – S&V n°1152 – 2013. Manger sain n’est pas, loin s’en faut, la seule façon de garder la forme. Toutes les études montrent que le sport est l’un des facteurs essentiels de l’amélioration de la santé.

1152

  • Incroyables neurones – S&V n°1141, 2012. Bien plus qu’on ne le pensait, le fonctionnement de notre cerveau repose sur ce qui se passe à l’intérieur de ses plus petites composantes, les neurones.

S&V 1141 - couv