“Être cheftaine me permet de donner du sens à ma vie”

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Evelyne a failli ne pas y revenir. Elle a été cheftaine chez les Scouts et Guides de France quand elle était jeune, mais les études puis le travail et la vie de famille avec des enfants en bas âge ont eu raison de son agenda : il n’était plus possible de passer ses week-ends en chemise bleue ! Mais, quand son fils aîné fête ses 6 ans, cette habitante d’Haguenau (Bas-Rhin) rempile à la quarantaine : « Je voulais qu’il connaisse le même plaisir que j’ai eu à faire du scoutisme. Comme on manquait de bras, j’ai remis le pied à l’étrier. » 


Chaque année, ils sont 15.000 à encadrer les 850 groupes de ce mouvement de jeunesse qui affiche un nombre d’adhérents en hausse de plus de 20% en 5 ans. « L’investissement représente entre 300 et 500 heures de bénévolat, explique le délégué national à la communication, François Mandil. Les animations se déroulent un week-end par mois, plus de une à trois semaines l’été. Cela nécessite des réunions de préparation le samedi, ainsi que des actions d’intendance dans la semaine : répondre aux parents, trouver les lieux de rencontre, valider les pistes pédagogiques avec l’équipe de soutien… » Si l’engagement a toujours été intense, tout est fait pour que chacun ait les moyens de le vivre dans les meilleures conditions : formations Bafa et adaptation en équipe de chefs et cheftaines. Pour rejoindre les Scouts et Guides de France, il n’y a pas d’âge minimum ni de prérequis nécessaires. David n’avait jamais entendu parler de scoutisme avant qu’un employeur ne digresse, en plein entretien d’embauche : « Pourquoi ne viendriez-vous pas voir notre groupe de Neuville samedi prochain ? » Près de 15 ans plus tard, David n’a « jamais pensé arrêter. Chez les scouts, j’ai trouvé un fort esprit de famille qui nourrit toute ma vie », témoigne le quadragénaire. Et d’observer avec satisfaction : « Les jeunes que j’ai eu à encadrer ont rejoint la maîtrise [le groupe de chefs, ndlr]. »


Chez les scouts, j’ai trouvé un fort esprit de famille qui nourrit toute ma vie.

- David, la quarantaine


Plus de 70% des chefs ont entre 17 et 25 ans, comme Clémence, 21 ans, qui vient des Yvelines. « Dernière-née d’une fratrie de cinq enfants, j’ai attendu avec impatience de rejoindre mes soeurs chez les scouts et j’y ai vécu des années incroyables. J’avais hâte de devenir cheftaine, pour rendre service après avoir tant appris. » Étudiante en école de commerce et cheftaine pour la première fois cette année, elle n’a aucun regret : « Nos rencontres le week-end me permettent de redonner du sens à une vie étudiante un peu sinueuse. » Les contraintes universitaires sont-elles un obstacle ? « Non, répond celle qui a choisi de continuer à la rentrée. Cet été, je devais commencer mon stage en juillet, mais j’ai réussi à le décaler pour assurer le camp et le jamboree », souligne-t-elle. Entre Sciences Po à Lille et une mission de collaborateur politique à Tourcoing, Pierre, la vingtaine, enchaîne les années de chef au sein du groupe où il a été louveteau. Reconnaissant envers ses propres chefs qui lui ont fait confiance, il a puisé dans cette « école de vie » pour se construire en tant qu’adulte. « Je n’imagine pas ma vie sans le scoutisme. Je me sens faire partie d’une grande chaîne, comme un maillon dans une histoire qui me dépasse », explique-t-il. Les responsabilités sont réelles et assumées : chefs et cheftaines témoignent se sentir au service d’une bonne cause, portant une vraie utilité sociale. Et toujours dans la joie !


À Savoir

Vous voulez devenir chef ou cheftaine ? Trouvez le responsable Scouts et Guides de France le plus proche de chez vous sur la page d’accueil du site : www.sgdf.fr

Dans les coulisses du ZooParc de Beauval

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C’est un adorable poupon potelé et râblé – 60 kg à la naissance ! – à la peau plissée et caparaçonnée. Un bébé blindé. « On l’attrapera comme on pourra ! », préviennent vétérinaires et soigneurs, rassemblés devant l’enclos. « L’intervention peut durer plusieurs minutes, ou à peine 30 secondes… Tout dépendra du comportement de la mère !» , ajoute Jonathan Payet. Comme si elle pressentait l’approche imminente, la maman, Henna, et sa corpulence dissuasive, 1,8 t de douceur maternelle, rechigne à s’éloigner de sa progéniture : un gracieux bébé rhinocéros indien qui a vu le jour dans la nuit du 27 au 28 août au ZooParc de Beauval, dans le Loir-et-Cher. 


Il faut être conscients que nous agissons pour la défense de la biodiversité et la conservation des espèces, nous sommes un réservoir.


Ce matin-là, une semaine après la naissance, les équipes de Jonathan Payet, responsable de la Plaine asiatique du zoo, et de Nicolas Goddard, vétérinaire, se préparent à une mission délicate : ils doivent séparer durant quelques instants le nouveau-né de sa mère pour lui implanter une puce électronique d’identification sous la peau, de la taille d’un grain de riz. « Nous allons essayer de la placer dans le cou, où la chair est plus tendre ! » L’abordage est rapide et spectaculaire : après avoir isolé Henna, en l’attirant à l’écart avec de la luzerne, soigneurs et vétérinaires s’engouffrent dans l’enclos par une trappe, immobilisent le rejeton – le premier bébé rhino indien né en Europe cette année. Les gestes sont précis, coordonnés, accomplis sous les rugissements de Henna… « La mère a beaucoup râlé, le danger était qu’elle se blesse en se cognant aux grilles, mais tout s’est bien passé. Le vétérinaire a même eu le temps de vérifier le sexe du bébé. C’est bien une femelle. Il reste à lui choisir un prénom ! » , se réjouit Jonathan.


750 naissances par an


Le ZooParc de Beauval, inauguré en 1980, héberge deux espèces de rhinocéros : le rhinocéros blanc d’Afrique et le rhinocéros indien d’Asie. « Le rhino indien appartient aux espèces dites vulnérables. Il se reconnaît à sa corne unique et à ses plaques de peau qui lui font comme une armure ! » , explique Jonathan, soulagé, à l’issue de l’incursion de l’équipe médicale. Plus de 100 soigneurs officient dans le ZooParc, qui accueille sur 40 ha plus de 10 000 animaux de 600 espèces différentes, et s’enorgueillit d’environ 750 naissances par an. Certains des hôtes du ZooParc, créé par Françoise Delord et dirigé aujourd’hui par son fils Rodolphe, sont uniques en France : les pandas géants, dont le célèbre Yuan Meng, âgé de 2 ans (entraperçu ce jour-là en train de boulotter des bambous), les diables de Tasmanie ou les koalas… dont l’un deux, quelques minutes plus tard, nous fixera avec intensité, de ses yeux de bille de verre incrustés dans sa frimousse. L’heure, en cette fin de matinée, est à la pesée.


Marsupial endémique d’Australie, le koala possède lui aussi le statut d’espèce vulnérable. Deux fois par semaine, la soigneuse, Delphine Pouvreau, en charge du secteur pandas et koalas, pèse ses protégés indolents, après les avoir décrochés des arbustes ou interrompus dans leur grignotage de feuilles d’eucalyptus. Elle nous autorise à pénétrer dans la serre, où les koalas exposent leur flegme. De retour dans le bâtiment des soins, juché sur sa balance, Alguna, un koala né en juin 2006, ressemble à une irrésistible peluche. « 4,890 kg, annonce Delphine. Comme le koala dort beaucoup et qu’il est tout le temps mou, on doit le peser pour savoir s’il est en bonne santé ! » Avec six autres soigneurs, Delphine veille également sur les kangourous arboricoles, les félins, les diables de Tasmanie ou les langurs de Java, singes originaires de l’île indonésienne ou de ses voisines… 


En 2017, cette ancienne monitrice d’équitation, au zoo depuis 2001, a participé à une initiative poignante : la réintroduction de langurs de Java dans la forêt tropicale. Sur les 14 langurs relâchés, deux étaient des femelles nées à Beauval en 2013, Samui et Indah. « C’est le rêve de tout soigneur de vivre un moment comme celui-ci. J’en avais les larmes aux yeux ! Même si les zoos ont leurs détracteurs, il faut être conscients que nous agissons pour la défense de la biodiversité et la conservation des espèces, nous sommes un réservoir. »


La sauvegarde des espèces


Le ZooParc, que les visiteurs peuvent depuis le mois de mars contempler depuis la voie des airs, à bord de télécabines qui survolent le parc sur plus de 800 m, a lancé de nombreux projets de conservation. Une association, Beauval Nature, a été créée en 2009 pour agir pour la sauvegarde des espèces. Dans le cadre de l’un des 50 programmes de conservation soutenus ou gérés actuellement par l’association, une première réintroduction de gorilles de Beauval s’est déroulée en juin au Gabon. 


Âgées de 9 et 12 ans, Kuimba et Mayombé, deux femelles, ont été relâchées dans le parc national des plateaux Batéké. -Responsable de la collection animalière et directeur de la conservation pour l’association Beauval Nature, Éric Bairrão Ruivo a accompagné les gorilles au Gabon. Ce passionné souligne le paradoxe de ces -initiatives. « La réintroduction de -spécimens, un processus extrêmement complexe, c’est à la fois un aveu d’échec pour l’humanité et un dernier espoir pour préserver les espèces » , explique-t-il. Avant d’ajouter : « Je sais que l’homme a détruit la nature, mais je suis aussi convaincu que c’est lui qui sauvera la nature. » Dans cette perspective, un ZooParc comme Beauval – « La plus grande école du monde », dit-il – peut être un lieu de sensibilisation. « Je suis confiant dans la nouvelle génération, consciente des enjeux » , assure-t-il.


Initiation aux soins


C’est le sens, par exemple, des sessions « Soigneur d’un jour » (juniors et adultes), qui proposent aux visiteurs de participer, durant une demi-journée, aux activités d’un soigneur animalier : nettoyage, soins, nourrissage… Ce jour-là, Paul, 10 ans, escorté de trois membres du service pédagogique, achève son initiation devant un bassin à la surface agitée d’étranges remous. Sa mission : ravitailler des -arapaïmas (le plus gros poisson d’eau douce d’Amérique du Sud) et des lamantins, -d’imposants mammifères aquatiques -herbivores. Muni d’un seau rempli de harengs, puis d’un sac de pommes de terre coupées, Paul distribue ses gourmandises aux -arapaïmas. Ses yeux brillent. Il n’en démord pas. « Plus tard, je veux devenir soigneur ! »


> Pour aller plus loin :


ZooParc de Beauval,

41110 Saint-Aignan-sur-Cher.

Tél. : 02 54 75 50 00

www.zoobeauval.com


Une application ZooParc de Beauval (App Store, Google Play) permet de profiter d’infos, d’astuces et de conseils durant la visite. Situé au sud de Blois, à mi-chemin entre Tours et Vierzon, le ZooParc est ouvert tous les jours de l’année, y compris les jours fériés. Il est accessible par l’A85 (sortie n° 12). En train, gare TER de Saint-Aignan-Noyers-sur-Cher (à 8 km). Tarifs : 32 € (adulte), 26 € (enfant de 3 à 10 ans inclus), gratuit pour les enfants de moins de 3 ans.


Association Beauval Nature : Créée 2009, l’association de conservation des espèces menacées a lancé un magazine, Beauval Nature Mag, qui permet de faire découvrir les actions concrètes de ses programmes à travers le monde. Le premier numéro (5 €), consacré à l’Asie du Sud-Est, est disponible à la Maison Beauval Nature, à l’intérieur du parc. L’association propose également de parrainer un animal (https://parrainages.zoobeauval.com). Jusqu’au 25 octobre, le ZooParc accueille, en son sein, une exposition photos pour sensibiliser à la protection des espèces.

Après un abus sexuel, aimer envers et malgré tout

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Sur le canapé, Sophie Ducrey se tourne tendrement vers son mari. Dominique, timide, accueille son visage au creux de son épaule dans un geste tendre. Elle, belle brune de 46 ans aux yeux pétillants, et lui, grand homme sec réservé approchant la cinquantaine, s’aiment depuis 30 ans. Comme au premier jour, quand leurs regards se sont croisés au pied d’une statue de la Vierge Marie. Pourtant, il aurait pu en être autrement. Fraîchement tombés amoureux à 17 et 21 ans, ces jeunes catholiques pratiquants confient leur émoi à un frère de la communauté de Saint-Jean, confesseur de Sophie. Celui-ci souligne que la jeune fille doit d’abord interroger sa vocation religieuse… « Il me disait vouloir un chemin de sainteté pour moi, que je devais le suivre pour y arriver, et j’y ai cru », raconte Sophie, amère. « J’avais confiance dans la parole de ce prêtre, c’était un questionnement sérieux à mes yeux alors j’ai pris mes distances », ajoute Dominique. Pourtant, le religieux agresse sexuellement la jeune femme lors des mois qu’elle passe dans son prieuré pour discerner son appel à la vie contemplative. Trouvant le courage de rompre tout lien avec lui, Sophie sort de son emprise physique, retrouve Dominique et l’épouse.


Il me disait vouloir un chemin de sainteté pour moi, que je devais le suivre pour y arriver, et j’y ai cru.

- Sophie Ducrey


« C’est l’amour de ma vie ! s’exclame Sophie. Il m’a toujours regardée tel que je suis. Il a été un roc sur lequel je pouvais m’appuyer. Dominique a tenu bon face à toutes les tempêtes, les tremblements de terre et les rivières qui débordent. » Les obstacles ont été nombreux : dépasser la marque indélébile laissée par son agression physique, prendre conscience de l’emprise du religieux sur elle, cela a été un long chemin. Quasiment aussi difficile à parcourir que celui pour faire connaître la vérité dans l’Église. Dans son livre Étouffée. Récit d’un abus spirituel et sexuel (Tallandier), sorti le 5 septembre, Sophie raconte… et Dominique est omniprésent.


Un couple dans la tempête de la révélation


« Les mots sur ce qu’elle a vécu sont venus plusieurs années après notre mariage, pourtant cela s’est manifesté très tôt, implicitement, entre nous, confie-t-il sereinement. Des gestes naturels à mes yeux lui étaient douloureux, au sein d’une vie intime bancale. » Dès leurs premières relations intimes, Sophie a évoqué ce que son esprit lui permettait de dire : une peur dans le contact des corps, issue d’un « geste déplacé » d’un prêtre. À l’époque, elle est encore emprisonnée par les justifications théologiques du frère qu’elle a faites siennes. Celui-ci lui a expliqué qu’en se soumettant à ses assauts sexuels, elle l’aide à rester prêtre – une vision dévoyée de la vocation, s’appuyant sur la théorie de « l’amour d’amitié » de Marie-Dominique Philippe, fondateur des frères de Saint-Jean, et remise en cause aujourd’hui dans cette communauté religieuse. « Nous avons vécu dans l’inconscience de ce dont il s’est agi, explique Sophie d’un ton neutre. Dix ans plus tard, je suis sortie du déni. La douleur, la colère et la souffrance se sont réveillées et tout a explosé en moi. »


Au sein de notre couple, nous avons longtemps vécu dans l’inconscience de ce dont il s’est agi.

- Sophie Ducrey


Sophie Ducrey et son mari en parlent des heures durant, se pleurent dans les bras. Le couple s’appuie sans mesure sur le dialogue. Dominique devient « la lanterne qui suffit à me rendre espoir chaque jour et à donner sens aux ténèbres », écrit Sophie ; « [ses bras] sont le lieu de mon repos, le creux de ma chapelle », continue-t-elle. Mais pas tous les jours, pas ceux où le moindre contact physique déclenche une crise de panique chez Sophie, ceux où elle n’a « même plus la force de hurler » car « hurler, c’est encore vivre ». « Cela a longtemps été un combat quotidien, au jour le jour », avoue Dominique. L’un et l’autre savent pourtant leur chance : d’autres qu’eux, traversés par cette puissante lame de fond, se sont déchirés sans pouvoir s’en remettre.


Lui a souvent été tenté, reconnaît-il, de ramener Sophie à une vie plus « normale » : « Nous avons cinq enfants, une belle vie. Plusieurs fois, j’ai eu envie de lui dire : arrêtons, oublions ce passé, si dramatique qu’il soit, et ne gardons que notre amour. J’étais tiraillé entre la soutenir inconditionnellement et l’entraîner vers une vie différente, où la douleur n’aurait pas besoin de s’exprimer. Mais ce n’était pas ce dont elle avait besoin. Ce passage du tunnel était nécessaire, j’en suis conscient aujourd’hui plus qu’hier, pour qu’elle avance vers elle-même. » Pour Sophie, « traverser ensemble cette épreuve » a consolidé leurs liens : « Face à ma vulnérabilité, mes limites, il a déployé des ressources de douceur et de respect qui ont enrichi notre couple sur le long terme. Nous avons fait le choix, à chaque fois, de nous unir contre l’adversité, même si elle était à l’intérieur de notre couple. »


Accepter l’impossible


L’union a aussi été indispensable lors de la quête de vérité dans laquelle s’est lancée le couple. En 2007, dix ans après les faits, Sophie Ducrey veut alerter la communauté Saint-Jean : elle a été manipulée et agressée par l’un d’entre eux ; or, il est toujours en situation de continuer. Immédiatement, Dominique répond présent et l’accompagne pour la première (et dernière) confrontation de sa femme avec ce prêtre. « Nous sommes un couple, nous sommes “un”, il m’a semblé évident d’être à ses côtés pour ce moment qui allait être si difficile pour elle, raconte-il. J’avais l’impression que nous étions David contre Goliath, il avait une telle autorité. Mais je ne pouvais pas la laisser seule devant son geôlier, son bourreau. » Lors de cet entretien, le frère concède avoir fait du mal sans le vouloir, rappelle le pardon échangé après une fellation forcée que Sophie a refusée, mais à l’évocation d’abus sexuel, il nie en bloc. Dominique se souvient amèrement de « l’absence de considération pour la souffrance exprimée en face de lui ». Face aux souvenirs de son mari, Sophie réfrène un tremblement, réminiscence de l’état de choc post-traumatique dans lequel l’avait laissée cette rencontre.


Je ne pouvais pas croire que la communauté promette des choses sans les faire. 

- Dominique
, mari de Sophie Ducrey


Longtemps, ils ont cru que leur démarche pourrait aboutir. Plusieurs années durant, ils alertent les frères en responsabilité dans la communauté, appellent des évêques, contactent des prêtres spécialistes de droit canon. Si la justice pénale ne peut rien – un procureur saisi confirme à Sophie que la prescription oblige à classer la procédure – le couple garde confiance en l’Église. Cette institution est toujours, à leurs yeux, le chemin de la Vérité, la voie vers Dieu. Constamment, ils rappellent « ne pas vouloir faire de mal » à la congrégation mais chercher à s’assurer que le frère ne puisse pas faire de nouvelles victimes. Quand Sophie s’agace des lenteurs des échanges, des réponses évasives concernant ce frère, qui reste un accompagnateur spirituel reconnu – et donc demandé –, Dominique la tempère : « Durant tout le processus, j’ai été en permanence celui qui relativise, qui tente de prendre de la hauteur, de comprendre une logique qui pouvait ne pas être la nôtre. Je ne pouvais pas croire que la communauté promette des choses sans les faire, comme toutes ces fois où l’on nous a écrit qu’il ne serait plus en contact avec des jeunes femmes sans que ce soit vrai. J’ai lutté pour comprendre un tel scandale… »


En 2011, lors d’un procès canonique, la Congrégation pour la doctrine de la foi tranche : le frère doit être retiré de l’état clérical, sa culpabilité est reconnue. Un an plus tard, l’appel commue la peine en un « remède pénal » – comprendre, un retrait de paroisse quelques temps sans qu’il ne perde son statut de prêtre. Il est renvoyé en mission, auréolé d’une image de martyr. Sophie se voit comme un poisson sur un ponton qui s’agite pour retrouver l’eau et l’oxygène qu’elle procure… et finit par ne plus être animée que par des spasmes. « Accepter que j’étais totalement impuissante a été ce que j’ai vécu de plus difficile dans ma vie, lâche-t-elle en baissant le regard, se souvenant des journées sans pouvoir bouger, physiquement malade. Je pouvais comprendre qu’une personne soit perverse et que je me sois faite manipuler par elle, mais qu’une Église entière accepte la perversion ainsi… » Elle ne finit pas sa phrase mais enchaîne, déterminée : « Je me suis accrochée à ma foi, elle m’a sauvée du désespoir. J’ai ressenti le chaos total sur terre et je me suis appuyée sur la certitude que la vérité existe et qu’un jour, elle éclatera. Nous sommes réellement aveugles sur cette terre mais la lumière est bien là, même si nous ne la voyons pas. »


La foi toujours là


Sophie Ducrey et son mari n’ont jamais perdu cette foi qui les a aussi accompagnés tout au long de leur vie de couple. D’ailleurs, les premières années, ils la vivaient comme oblats de la communauté Saint-Jean… « C’est un engagement envers le Seigneur que nous avons toujours maintenu, explique Dominique. Même si la confiance envers la communauté a été brisée, la philosophie de saint Jean est toujours belle à mes yeux, je ne la renie pas. » Sophie garde précieusement l’enseignement de l’évangéliste : « Chercher la vérité en soi. » Si elle avoue avoir des difficultés à aller à la messe, l’Église est bien « sa mère » et elle se sent en constant dialogue avec Dieu : « Je cherche qui Il est et, en même temps, je ne me suis jamais sentie aussi proche de Lui. »


Le couple s’est toujours nourri de plusieurs influences spirituelles : leur paroisse de quartier, les équipes Notre-Dame, ainsi que d’autres communautés. Leurs familles et amis sont catholiques. Mais certains, aujourd’hui, leur tournent le dos. « Toutes nos démarches ont été cachées au reste de la communauté comme aux paroissiens des églises concernées par ce frère. Quand j’essayais d’en parler, on me rétorquait que j’étais “l’instrument du Diviseur”, le diable, dévoile Sophie. Maintenant que je dis les choses clairement, on répond que je mens ou on s’éloigne pour ne pas avoir à entendre. »


Ce livre, c’est nous. C’est Sophie, mais c’est aussi ce qui a marqué une grande partie de notre vie de couple, de famille. 

- Dominique, mari de Sophie Ducrey


Pourtant, le religieux fait aujourd’hui l’objet d’une procédure d’expulsion de la communauté, suspendue à la conclusion d’un nouveau procès canonique en cours à Rome, à la suite de nouveaux témoignages contre lui. Sans compter qu’il a interdiction de porter l’habit des « petits gris » depuis 2013.


Alors pourquoi avoir sorti ce livre aujourd’hui, si longtemps après les faits ? Sophie Ducrey nous fixe tristement : elle a essayé de le faire par le passé, mais une menace d’action en justice de son agresseur a refroidi les éditeurs. Dominique la reprend : « Ce livre, c’est nous. C’est Sophie, mais c’est aussi ce qui a marqué une grande partie de notre vie de couple, de famille. Et l’on est dans un épisode où l’on assume qui l’on est, ce que l’on a vécu. Fini. Bas les masques. Nous n’avons plus rien à perdre, parce que nous sommes déjà sauvés. » Sa femme conclut doucement sur l’aventure d’écriture thérapeutique qu’a été cet ouvrage sans cesse retravaillé d’année en année, au fur et à mesure que l’emprise psychologique de son agresseur s’est déconstruite. Elle évoque ces « autres », celles qui ne sont pas encore sorties de leur cercle infernal et qui sont tellement fragiles qu’une seule parole peut les écorcher vives, ces victimes pour qui elle ose ces mots. « Il est toujours prêtre, et libre », précise-t-elle. Et ses mains agrippées à celles de Dominique s’animent d’un énième tremblement, trahissant un chemin de guérison encore en cours pour le couple. 


À lire 
Étouffée. Récit d’un abus spirituel et sexuel, Sophie Ducrey, Tallandier, 17,90€.

L’auteure déconstruit, à travers le récit de son parcours, les mécanismes de l’emprise qu’elle a subie de la part d’un prêtre de la communauté de Saint-Jean menant à une agression sexuelle, ainsi que les soutiens dont il a bénéficié dans l’Église.

Réduire ses déchets… et son budget

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En cinq minutes chrono, Aude verse dans un saladier un yaourt, du lait entier et de la crème fraîche, mélange le tout, et répartit la préparation dans des petits pots en verre avant de les placer dans une yaourtière, aidée par sa fille. « Et voilà, maintenant 10 heures de fermentation, deux heures de refroidissement et on aura une douzaine de yaourts ! » Comme l’équipement paraît coûteux et technique, elle précise que la cuisson peut se faire au four. Aude Blet-Charaudeau, puéricultrice, la quarantaine, les cheveux poivre et sel et le visage détendu, a entraîné son mari et ses trois enfants (7, 9 et 11 ans) dans une démarche de réduction des déchets domestiques il y a un peu plus de trois ans. Assise à la terrasse du pavillon familial, à Mérignac (Gironde), elle explique que « les efforts sont largement compensés par la satisfaction retirée. Si on ne se sentait pas mieux, on arrêterait ».


« Je me dis c’est foutu, sauf si… »


Le premier pas


Aude a eu le déclic au moment de la Cop 21. « Quand j’ai entendu les journalistes dire que cela ne suffirait pas. Je me suis dit que nous devions vraiment agir à notre niveau. » Peu de temps après, elle tombe par hasard sur le livre Famille (presque) zéro déchet, ze guide, de Jérémie Pichon et Bénédicte Moret (Thierry Souccar, 2016), et décide de franchir le pas. « Au début, cela me paraissait très ambitieux. L’objectif était de réduire nos déchets de moitié. À l’époque, nous remplissions une poubelle de 50 litres en deux à trois jours. L’objectif a été atteint en un an. Ensuite, nous sommes arrivés à une production de déchets d’1 kg par semaine et aujourd’hui on est à 2 kg par mois à cinq. »

Réduire ses déchets? et son budget
© Sébastien Le Clezio pour La Vie


À première vue, on ne devine pas que la famille produit environ 100 fois moins de déchets qu’un foyer moyen (selon les chiffres de l’Ademe en 2018). La cuisine est certes équipée de plusieurs appareils électroménagers qu’on ne trouve pas dans toutes les maisons (yaourtière, Thermomix), mais ce sont là les seuls composants du mobilier qui sortent de l’ordinaire. À l’extérieur, en revanche, se trouvent deux compartiments à compost. Un classique en bois d’environ 1m3 et un second, plus petit, en plastique, accueille les ordures ménagères qu’il est déconseillé de mettre directement au compost (viandes, poissons, agrumes, oignons…). Une décomposition s’opère ensuite grâce à des micro-organismes selon une méthode japonaise appelée Bokashi.


Réapprendre à s’ouvrir à la vie


À la portée de tous


Lorsqu’elle a adopté cette démarche, Aude a d’abord choisi de supprimer de son sac de course tous les produits à usage unique. Essuie-tout et bouteilles d’eau minérale ont été remplacés par des torchons micro-fibres et des gourdes en métal. Puis elle a réduit les emballages plastiques, jusqu’à s’en passer complètement. Aujourd’hui, dans la cuisine de la famille Blet-Charaudeau, on aperçoit tout juste quelques emballages cartonnés de pâtes. Le reste est contenu dans des pots en verre ou des boîtes en plastique. Pour faire des courses, beaucoup optent pour des sacs en tissu ; Aude y va directement avec ses propres contenants placés dans une carriole et pèse les aliments sur place. « Que ce soit pour les courses ou pour la cuisine, ça ne demande pas vraiment d’efforts ou de temps supplémentaire. C’est une question d’habitude, d’organisation et surtout d’anticipation. »


Toutes ces manières de faire n’ont rien de révolutionnaire : pour la plupart, ce sont des solutions de bon sens. Elles pourraient même paraître futiles, mais appliquées à la majorité des foyers, la différence serait très significative. Et surtout elles sont à la portée de tous. « J’étais un véritable panier percé. Je me laissais beaucoup plus tenter et donc je gaspillais énormément. » En achetant au poids et en utilisant toujours les mêmes contenants, on connaît mieux ses besoins et on limite plus facilement le gaspillage. Cela permet aussi de faire des économies malgré des prix plus élevés à l’achat en bio ou en vrac : quand on cuisine soi-même, le produit fini revient moins cher. « Grâce à cela et à d’autres réflexes écologiques – comme le fait de prendre plus souvent le vélo à la place de la voiture – on a divisé notre budget par trois ! »


Trois priorités au quotidien pour le climat


L’étape suivante a été les produits d’entretien. Aude réalise elle-même ses préparations, comme la lessive, la poudre, qui remplace les pastilles pour le lave–vaisselle, ou bien du produit à récurer. Ce type de préparation ne demande aucune technique ou connaissance particulière et peu d’efforts. Il s’agit de mélanger à de l’eau un petit nombre de produits d’entretien. Des « recettes » se trouvent facilement sur Internet. Pourtant, au début, c’est ce qui lui paraissait le moins accessible : « Je m’imaginais avec mon petit équipement de chimiste, s’amuse-t-elle. Aujourd’hui, je conseillerais même de commencer par ça. »


Le fait maison


Enfin, les produits d’hygiène et de santé sont venus diminuer encore un peu la poubelle familiale. Les cotons démaquillants sont remplacés par des -tissus-éponges, les tampons et serviettes hygiéniques par des culottes de règles, mais la salle de bains n’est pas entièrement débarrassée des déchets. La famille utilise encore des produits d’hygiène et de beauté emballés, « et bien sûr des médicaments, là je ne lésine pas ! ». En expliquant tout ça, elle se défend vite de tomber dans l’excès inverse : « Je ne vise pas un foyer entièrement zéro déchet. Je pense que c’est déjà bien là où on en est. Je sais que je ne vais pas sauver le monde seule, ce n’est pas l’objectif , précise-t-elle avec une pointe d’ironie. Mais j’ai la satisfaction d’agir et de mieux connaître ce que je consomme et ce que mes enfants mangent. »

Réduire ses déchets? et son budget
© Sébastien Le Clezio pour La Vie


Après la préparation des yaourts, Aude enchaîne avec le déjeuner, toujours aidée de sa fille Nila. Au menu : nuggets et haricots verts. Là encore, tout est fait maison. Les frères de Nila s’activent autour, mettant le couvert et grignotant des noisettes du jardin, impatients. Au premier abord, les enfants paraissent indifférents à la réduction des déchets. Quand on aborde la question, Léo, le cadet, évoque le fait de ne pas jeter des déchets par terre. Tom, l’aîné, précise même que « c’est maman » qui est dans une démarche zéro déchet, pas la famille… Mais en discutant, très vite, des applications concrètes lui viennent. Il pratique le surf depuis plusieurs années déjà, il a donc eu l’occasion de constater la pollution de ses propres yeux. « Une fois, j’ai vu une canette de coca dans l’eau pendant que je surfais. » Il fait ainsi sans difficulté le lien entre la pollution de l’océan et les déchets ménagers. Mais il sait aussi ce qu’il lui en coûte. « Je préférais quand on achetait des Danette et des Mamie Nova…! » Naturellement timide au début, Nila, 9 ans, semble s’amuser à paner le poulet pour les -nuggets avec sa mère. Et bien sûr, une fois à table, le jugement de Léo est sans appel : « Les nuggets de maman, c’est les meilleurs ! » dixit un amateur de McDonald’s.


Au départ, la relation avec autrui n’était pas évidente. Les premiers refus d’emballages dans les commerces, comme la boucherie ou la boulangerie, n’étaient pas très bien compris. Au sein même du foyer, son mari n’était pas sur le même rythme qu’elle, alors la relation conjugale s’est un temps compliquée. « Mais très vite, il a pris le pli, parce qu’il a ressenti la même satisfaction que moi. » Aujourd’hui au contraire, Aude a développé de nouvelles et meilleures relations sociales grâce à cette démarche et à l’association Zero Waste, dont elle fait partie. « On crée des liens, on partage des astuces et des recettes entre nous et j’ai de meilleures relations avec les commerçants de proximité que j’en avais dans les supermarchés. »



Réduire ses déchets? et son budget
© Sébastien Le Clezio pour La Vie


 


Applis et outils numériques : amis ou ennemis ?


Yuka, BuyOrNot… Il n’est plus rare aujourd’hui de croiser dans les rayons des magasins des consommateurs, Smartphone à la main, utiliser ces applications. L’idée de ces outils est de lister les qualités nutritionnelles ou l’empreinte environnementale des aliments. Parallèlement se multiplient sur les réseaux sociaux des conseils DIY ( do-it-yourself) pour limiter ses déchets ou produire soi-même cosmétiques ou produits d’entretien écoresponsables. Plus viraux encore, des hashtags apparaissent pour encourager les internautes à prendre leur part du changement (comme le #TrashtagChallenge, qui incitait à se montrer en train de nettoyer un lieu de ses déchets). De louables initiatives qui reposent pourtant sur un paradoxe : l’empreinte carbone colossale des machines qu’elles nécessitent. Appareils et centres de données qui stockent les informations représentent en effet une part importante – et croissante – des rejets mondiaux de gaz à effet de serre.


Robin Nitot


> Pour débuter :


Je sauve la planète à domicile, d’Adeline et Alexis Voizard, Quasar.

Un « cahier-coach Laudato si’ », pour se lancer chez soi de façon ludique, en revisitant pièce par pièce nos actions et gestes de la vie quotidienne.

La vie d’un jeune « Aspi » vue de l’intérieur

Standard


Camille a passé son bac L en 2016 à Charleville, à l’âge de 19 ans. Excepté l’année de 2de redoublée, il a effectué une scolarité sans faute. Raconter ce parcours, c’est égrener une multitude d’étapes, la plupart douloureuses, certaines humiliantes, vécues au coude à coude avec ses parents. Si Camille vous livrait lui-même ce récit, vous entreriez dans son histoire en prenant le temps de relire chacune de ces étapes, à partir d’un détail. « L’autisme Asperger est une autre manière d’être au monde, prévient Damien, son père, professeur des écoles. Nous, “neurotypiques”, utilisons des nationales pour nous exprimer, eux vont prendre le chemin de terre et ça va être très long, ou au contraire une autoroute et là c’est fulgurant de rapidité. Ils voient tous les détails ; cette accumulation de détails surcharge le cerveau et joue un grand rôle dans leur fatigabilité. » Ce jour-là, Camille et ses parents nous accueillent dans leur maison de Charleville-Mézières (Ardennes), pour nous raconter comment, ensemble, ils se sont battus pour relever le défi de l’inclusion scolaire de Camille.


L’incompréhension générale


Dès la maternelle et le primaire, son intégration était compliquée. Mais c’est vers 13 ou 14 ans que son rapport aux autres est devenu problématique. « Jusque-là, ça ne me dérangeait pas d’être seul dans mon coin, et les autres ensemble. Je me suis alors dit que ce serait bien de m’intégrer à ma classe, mais je n’y arrivais pas. Je ne regardais pas les autres dans les yeux, je n’avais pas confiance en moi, je n’avais pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais seul », raconte-t-il, assis dans un fauteuil du salon, entre son père et sa mère. La situation est devenue de plus en plus difficile, jusqu’au jour où « un petit événement (l’a) fait flipper » : « J’étais à bout. Je suis allé à l’hôpital. On ne savait pas ce que j’avais. » « Camille, qui a toujours été gentil et pacifique, se réfugiait dans les jeux vidéo. Mais il est devenu agressif, déprimé et violent. Nous étions perdus face à cette situation », explique Nadège, sa mère, elle aussi professeure des écoles. Les séjours en hôpital s’enchaînent, accompagnés d’annonces de diagnostics qui se révèlent tous erronés : dépression à tendance paranoïaque, syndrome bipolaire et même schizophrénie ! « Pendant deux ans, nous avons été dans une errance de diagnostic », poursuit-elle.


“L’école inclusive est l’école de l’esprit d’équipe“


Poser le bon diagnostic


Deux ans « de galère », en pleine adolescence, où Camille se voit administrer des traitements inadaptés, avec des effets inverses pour les personnes autistes. « Il a été déscolarisé en 2de. On m’a dit que j’étais une mère qui le couvait trop. En fait, le corps médical n’écoute pas assez les parents », regrette amèrement Nadège. Quand Camille a eu 15 ans, le diagnostic a été enfin posé par une spécialiste du centre de ressources autisme de Reims. Il a alors pu reprendre l’école. Il a bénéficié de l’accompagnement en classe d’un premier assistant de vie scolaire (AVS), prénommé Benjamin. « Il m’a compris rapidement, quand ça n’allait pas il était là, il m’écoutait. AVS, ça ne gagne pas assez bien sa vie, Benjamin s’est rabattu sur un autre métier, aide-soignant. Il est parti à regret », se souvient Camille, d’autant plus reconnaissant pour sa présence rassurante qu’il a dû composer l’année suivante avec un nouvel AVS jugé « catastrophique » : « Camille est très fatigable. Au bout d’une demi-heure de cours, il décroche. L’AVS est là pour prendre des notes, l’aider à se repérer dans l’espace et le temps, gérer son cartable, ranger ses affaires, etc. », précise sa mère.


Un handicap invisible


Passage en première ensuite, des résultats laborieux, et une épreuve orale au bac de français qui se passe mal. « Camille avait le droit d’être accompagné sur décision de l’Éducation nationale à cette épreuve. Or la professeure n’était pas au courant et ne comprenait pas pourquoi la présence d’une tierce personne était nécessaire ; c’est le problème du handicap invisible. Nous avons dû aller voir le proviseur », raconte son père. Camille poursuit : « J’étais censé passer le premier pour cet examen, or mon nom figurait tout en bas de la liste, j’étais le dernier ! » L’AVS, admise à rester le temps qu’il prépare son exposé, a été invitée à sortir ensuite, ce qui a mis Camille en état de stress. La note s’en est ressentie : 6/20 ! « Pour le principe, car c’était trop injuste, on ne pouvait pas laisser passer ça », reprend sa mère. Camille et ses parents ont fait appel au Défenseur des droits, qui lutte contre les discriminations. « Il a eu le droit de repasser l’épreuve en septembre, mais ça a pourri notre été. » L’année suivante, les épreuves du bac se passent bien. Une fois le diplôme en poche, il effectue un service civique, suivi d’un contrat aidé à la médiathèque de Charleville-Mézières, avec la mission locale. « Un lieu normalement calme », donc adapté à son hyperacousie et à sa grande sensibilité, précisent ses parents. Il a poursuivi ensuite une formation d’auxiliaire de bibliothèque dans une médiathèque de Reims.


En classe avec des enfants différents


Témoigner et informer


Depuis un an, lors de ses temps libres, il développe sa passion du cinéma et du montage vidéo, et réalise une « websérie », composée d’épisodes de 10 minutes environ, qui s’intitule « Nos souvenirs construisent nos avenirs ». Les deux premiers épisodes ont fait l’objet de présentation officielle et ont été récompensés. Camille y présente, avec des pointes d’humour, de petites scènes inspirées de la vie d’un jeune homme atteint du syndrome d’Asperger : « Je m’adresse au monde extérieur, aux gens qui accompagnent ou vivent avec un Asperger, pour leur dire ce qu’est le syndrome. Pour ceux qui connaissent ou pas, les profs, les médecins, les élèves… » Occasion de le découvrir de l’intérieur et de comprendre certains décalages et incompréhensions. Une manière de faire bouger les lignes, dans le sens de l’inclusion des enfants « hors cadre ».



En classe avec un « Aspi », comment s’y prendre ?


Nadège et Damien Huré adressent ces recommandations aux profs qui accueillent un jeune atteint du syndrome d’Asperger : « Inviter l’élève à s’installer au premier rang. Répéter plusieurs fois les consignes. N’en énoncer qu’une à la fois. Ne pas parler fort. Être calme. S’exprimer clairement. Ne pas donner les devoirs à faire pour le lendemain à la fin du cours quand les élèves ne sont plus attentifs et qu’il y a du bruit. Si les profs écrivent leurs cours, les leur transmettre, c’est une aide précieuse. » Des conseils judicieux pour relever le défi de l’école inclusive.


> À voir


La websérie est visible sur la chaîne Youtube « Nos souvenirs construisent nos avenirs », son titre.
Et aussi… Si vous êtes intéressé par le projet de Camille, vous pouvez contacter damien.hure @wanadoo.fr

La vie d’un jeune « Aspi » vue de l’intérieur

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Camille a passé son bac L en 2016 à Charleville, à l’âge de 19 ans. Excepté l’année de 2de redoublée, il a effectué une scolarité sans faute. Raconter ce parcours, c’est égrener une multitude d’étapes, la plupart douloureuses, certaines humiliantes, vécues au coude à coude avec ses parents. Si Camille vous livrait lui-même ce récit, vous entreriez dans son histoire en prenant le temps de relire chacune de ces étapes, à partir d’un détail. « L’autisme Asperger est une autre manière d’être au monde, prévient Damien, son père, professeur des écoles. Nous, “neurotypiques”, utilisons des nationales pour nous exprimer, eux vont prendre le chemin de terre et ça va être très long, ou au contraire une autoroute et là c’est fulgurant de rapidité. Ils voient tous les détails ; cette accumulation de détails surcharge le cerveau et joue un grand rôle dans leur fatigabilité. » Ce jour-là, Camille et ses parents nous accueillent dans leur maison de Charleville-Mézières (Ardennes), pour nous raconter comment, ensemble, ils se sont battus pour relever le défi de l’inclusion scolaire de Camille.


L’incompréhension générale


Dès la maternelle et le primaire, son intégration était compliquée. Mais c’est vers 13 ou 14 ans que son rapport aux autres est devenu problématique. « Jusque-là, ça ne me dérangeait pas d’être seul dans mon coin, et les autres ensemble. Je me suis alors dit que ce serait bien de m’intégrer à ma classe, mais je n’y arrivais pas. Je ne regardais pas les autres dans les yeux, je n’avais pas confiance en moi, je n’avais pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais seul », raconte-t-il, assis dans un fauteuil du salon, entre son père et sa mère. La situation est devenue de plus en plus difficile, jusqu’au jour où « un petit événement (l’a) fait flipper » : « J’étais à bout. Je suis allé à l’hôpital. On ne savait pas ce que j’avais. » « Camille, qui a toujours été gentil et pacifique, se réfugiait dans les jeux vidéo. Mais il est devenu agressif, déprimé et violent. Nous étions perdus face à cette situation », explique Nadège, sa mère, elle aussi professeure des écoles. Les séjours en hôpital s’enchaînent, accompagnés d’annonces de diagnostics qui se révèlent tous erronés : dépression à tendance paranoïaque, syndrome bipolaire et même schizophrénie ! « Pendant deux ans, nous avons été dans une errance de diagnostic », poursuit-elle.


“L’école inclusive est l’école de l’esprit d’équipe“


Poser le bon diagnostic


Deux ans « de galère », en pleine adolescence, où Camille se voit administrer des traitements inadaptés, avec des effets inverses pour les personnes autistes. « Il a été déscolarisé en 2de. On m’a dit que j’étais une mère qui le couvait trop. En fait, le corps médical n’écoute pas assez les parents », regrette amèrement Nadège. Quand Camille a eu 15 ans, le diagnostic a été enfin posé par une spécialiste du centre de ressources autisme de Reims. Il a alors pu reprendre l’école. Il a bénéficié de l’accompagnement en classe d’un premier assistant de vie scolaire (AVS), prénommé Benjamin. « Il m’a compris rapidement, quand ça n’allait pas il était là, il m’écoutait. AVS, ça ne gagne pas assez bien sa vie, Benjamin s’est rabattu sur un autre métier, aide-soignant. Il est parti à regret », se souvient Camille, d’autant plus reconnaissant pour sa présence rassurante qu’il a dû composer l’année suivante avec un nouvel AVS jugé « catastrophique » : « Camille est très fatigable. Au bout d’une demi-heure de cours, il décroche. L’AVS est là pour prendre des notes, l’aider à se repérer dans l’espace et le temps, gérer son cartable, ranger ses affaires, etc. », précise sa mère.


Un handicap invisible


Passage en première ensuite, des résultats laborieux, et une épreuve orale au bac de français qui se passe mal. « Camille avait le droit d’être accompagné sur décision de l’Éducation nationale à cette épreuve. Or la professeure n’était pas au courant et ne comprenait pas pourquoi la présence d’une tierce personne était nécessaire ; c’est le problème du handicap invisible. Nous avons dû aller voir le proviseur », raconte son père. Camille poursuit : « J’étais censé passer le premier pour cet examen, or mon nom figurait tout en bas de la liste, j’étais le dernier ! » L’AVS, admise à rester le temps qu’il prépare son exposé, a été invitée à sortir ensuite, ce qui a mis Camille en état de stress. La note s’en est ressentie : 6/20 ! « Pour le principe, car c’était trop injuste, on ne pouvait pas laisser passer ça », reprend sa mère. Camille et ses parents ont fait appel au Défenseur des droits, qui lutte contre les discriminations. « Il a eu le droit de repasser l’épreuve en septembre, mais ça a pourri notre été. » L’année suivante, les épreuves du bac se passent bien. Une fois le diplôme en poche, il effectue un service civique, suivi d’un contrat aidé à la médiathèque de Charleville-Mézières, avec la mission locale. « Un lieu normalement calme », donc adapté à son hyperacousie et à sa grande sensibilité, précisent ses parents. Il a poursuivi ensuite une formation d’auxiliaire de bibliothèque dans une médiathèque de Reims.


En classe avec des enfants différents


Témoigner et informer


Depuis un an, lors de ses temps libres, il développe sa passion du cinéma et du montage vidéo, et réalise une « websérie », composée d’épisodes de 10 minutes environ, qui s’intitule « Nos souvenirs construisent nos avenirs ». Les deux premiers épisodes ont fait l’objet de présentation officielle et ont été récompensés. Camille y présente, avec des pointes d’humour, de petites scènes inspirées de la vie d’un jeune homme atteint du syndrome d’Asperger : « Je m’adresse au monde extérieur, aux gens qui accompagnent ou vivent avec un Asperger, pour leur dire ce qu’est le syndrome. Pour ceux qui connaissent ou pas, les profs, les médecins, les élèves… » Occasion de le découvrir de l’intérieur et de comprendre certains décalages et incompréhensions. Une manière de faire bouger les lignes, dans le sens de l’inclusion des enfants « hors cadre ».



En classe avec un « Aspi », comment s’y prendre ?


Nadège et Damien Huré adressent ces recommandations aux profs qui accueillent un jeune atteint du syndrome d’Asperger : « Inviter l’élève à s’installer au premier rang. Répéter plusieurs fois les consignes. N’en énoncer qu’une à la fois. Ne pas parler fort. Être calme. S’exprimer clairement. Ne pas donner les devoirs à faire pour le lendemain à la fin du cours quand les élèves ne sont plus attentifs et qu’il y a du bruit. Si les profs écrivent leurs cours, les leur transmettre, c’est une aide précieuse. » Des conseils judicieux pour relever le défi de l’école inclusive.


> À voir


La websérie est visible sur la chaîne Youtube « Nos souvenirs construisent nos avenirs », son titre.
Et aussi… Si vous êtes intéressé par le projet de Camille, vous pouvez contacter damien.hure @wanadoo.fr

La vie d’un jeune « Aspi » vue de l’intérieur

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Camille a passé son bac L en 2016 à Charleville, à l’âge de 19 ans. Excepté l’année de 2de redoublée, il a effectué une scolarité sans faute. Raconter ce parcours, c’est égrener une multitude d’étapes, la plupart douloureuses, certaines humiliantes, vécues au coude à coude avec ses parents. Si Camille vous livrait lui-même ce récit, vous entreriez dans son histoire en prenant le temps de relire chacune de ces étapes, à partir d’un détail. « L’autisme Asperger est une autre manière d’être au monde, prévient Damien, son père, professeur des écoles. Nous, “neurotypiques”, utilisons des nationales pour nous exprimer, eux vont prendre le chemin de terre et ça va être très long, ou au contraire une autoroute et là c’est fulgurant de rapidité. Ils voient tous les détails ; cette accumulation de détails surcharge le cerveau et joue un grand rôle dans leur fatigabilité. » Ce jour-là, Camille et ses parents nous accueillent dans leur maison de Charleville-Mézières (Ardennes), pour nous raconter comment, ensemble, ils se sont battus pour relever le défi de l’inclusion scolaire de Camille.


L’incompréhension générale


Dès la maternelle et le primaire, son intégration était compliquée. Mais c’est vers 13 ou 14 ans que son rapport aux autres est devenu problématique. « Jusque-là, ça ne me dérangeait pas d’être seul dans mon coin, et les autres ensemble. Je me suis alors dit que ce serait bien de m’intégrer à ma classe, mais je n’y arrivais pas. Je ne regardais pas les autres dans les yeux, je n’avais pas confiance en moi, je n’avais pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais seul », raconte-t-il, assis dans un fauteuil du salon, entre son père et sa mère. La situation est devenue de plus en plus difficile, jusqu’au jour où « un petit événement (l’a) fait flipper » : « J’étais à bout. Je suis allé à l’hôpital. On ne savait pas ce que j’avais. » « Camille, qui a toujours été gentil et pacifique, se réfugiait dans les jeux vidéo. Mais il est devenu agressif, déprimé et violent. Nous étions perdus face à cette situation », explique Nadège, sa mère, elle aussi professeure des écoles. Les séjours en hôpital s’enchaînent, accompagnés d’annonces de diagnostics qui se révèlent tous erronés : dépression à tendance paranoïaque, syndrome bipolaire et même schizophrénie ! « Pendant deux ans, nous avons été dans une errance de diagnostic », poursuit-elle.


“L’école inclusive est l’école de l’esprit d’équipe“


Poser le bon diagnostic


Deux ans « de galère », en pleine adolescence, où Camille se voit administrer des traitements inadaptés, avec des effets inverses pour les personnes autistes. « Il a été déscolarisé en 2de. On m’a dit que j’étais une mère qui le couvait trop. En fait, le corps médical n’écoute pas assez les parents », regrette amèrement Nadège. Quand Camille a eu 15 ans, le diagnostic a été enfin posé par une spécialiste du centre de ressources autisme de Reims. Il a alors pu reprendre l’école. Il a bénéficié de l’accompagnement en classe d’un premier assistant de vie scolaire (AVS), prénommé Benjamin. « Il m’a compris rapidement, quand ça n’allait pas il était là, il m’écoutait. AVS, ça ne gagne pas assez bien sa vie, Benjamin s’est rabattu sur un autre métier, aide-soignant. Il est parti à regret », se souvient Camille, d’autant plus reconnaissant pour sa présence rassurante qu’il a dû composer l’année suivante avec un nouvel AVS jugé « catastrophique » : « Camille est très fatigable. Au bout d’une demi-heure de cours, il décroche. L’AVS est là pour prendre des notes, l’aider à se repérer dans l’espace et le temps, gérer son cartable, ranger ses affaires, etc. », précise sa mère.


Un handicap invisible


Passage en première ensuite, des résultats laborieux, et une épreuve orale au bac de français qui se passe mal. « Camille avait le droit d’être accompagné sur décision de l’Éducation nationale à cette épreuve. Or la professeure n’était pas au courant et ne comprenait pas pourquoi la présence d’une tierce personne était nécessaire ; c’est le problème du handicap invisible. Nous avons dû aller voir le proviseur », raconte son père. Camille poursuit : « J’étais censé passer le premier pour cet examen, or mon nom figurait tout en bas de la liste, j’étais le dernier ! » L’AVS, admise à rester le temps qu’il prépare son exposé, a été invitée à sortir ensuite, ce qui a mis Camille en état de stress. La note s’en est ressentie : 6/20 ! « Pour le principe, car c’était trop injuste, on ne pouvait pas laisser passer ça », reprend sa mère. Camille et ses parents ont fait appel au Défenseur des droits, qui lutte contre les discriminations. « Il a eu le droit de repasser l’épreuve en septembre, mais ça a pourri notre été. » L’année suivante, les épreuves du bac se passent bien. Une fois le diplôme en poche, il effectue un service civique, suivi d’un contrat aidé à la médiathèque de Charleville-Mézières, avec la mission locale. « Un lieu normalement calme », donc adapté à son hyperacousie et à sa grande sensibilité, précisent ses parents. Il a poursuivi ensuite une formation d’auxiliaire de bibliothèque dans une médiathèque de Reims.


En classe avec des enfants différents


Témoigner et informer


Depuis un an, lors de ses temps libres, il développe sa passion du cinéma et du montage vidéo, et réalise une « websérie », composée d’épisodes de 10 minutes environ, qui s’intitule « Nos souvenirs construisent nos avenirs ». Les deux premiers épisodes ont fait l’objet de présentation officielle et ont été récompensés. Camille y présente, avec des pointes d’humour, de petites scènes inspirées de la vie d’un jeune homme atteint du syndrome d’Asperger : « Je m’adresse au monde extérieur, aux gens qui accompagnent ou vivent avec un Asperger, pour leur dire ce qu’est le syndrome. Pour ceux qui connaissent ou pas, les profs, les médecins, les élèves… » Occasion de le découvrir de l’intérieur et de comprendre certains décalages et incompréhensions. Une manière de faire bouger les lignes, dans le sens de l’inclusion des enfants « hors cadre ».



En classe avec un « Aspi », comment s’y prendre ?


Nadège et Damien Huré adressent ces recommandations aux profs qui accueillent un jeune atteint du syndrome d’Asperger : « Inviter l’élève à s’installer au premier rang. Répéter plusieurs fois les consignes. N’en énoncer qu’une à la fois. Ne pas parler fort. Être calme. S’exprimer clairement. Ne pas donner les devoirs à faire pour le lendemain à la fin du cours quand les élèves ne sont plus attentifs et qu’il y a du bruit. Si les profs écrivent leurs cours, les leur transmettre, c’est une aide précieuse. » Des conseils judicieux pour relever le défi de l’école inclusive.


> À voir


La websérie est visible sur la chaîne Youtube « Nos souvenirs construisent nos avenirs », son titre.
Et aussi… Si vous êtes intéressé par le projet de Camille, vous pouvez contacter damien.hure @wanadoo.fr

La vie d’un jeune « Aspi » vue de l’intérieur

Standard


Camille a passé son bac L en 2016 à Charleville, à l’âge de 19 ans. Excepté l’année de 2de redoublée, il a effectué une scolarité sans faute. Raconter ce parcours, c’est égrener une multitude d’étapes, la plupart douloureuses, certaines humiliantes, vécues au coude à coude avec ses parents. Si Camille vous livrait lui-même ce récit, vous entreriez dans son histoire en prenant le temps de relire chacune de ces étapes, à partir d’un détail. « L’autisme Asperger est une autre manière d’être au monde, prévient Damien, son père, professeur des écoles. Nous, “neurotypiques”, utilisons des nationales pour nous exprimer, eux vont prendre le chemin de terre et ça va être très long, ou au contraire une autoroute et là c’est fulgurant de rapidité. Ils voient tous les détails ; cette accumulation de détails surcharge le cerveau et joue un grand rôle dans leur fatigabilité. » Ce jour-là, Camille et ses parents nous accueillent dans leur maison de Charleville-Mézières (Ardennes), pour nous raconter comment, ensemble, ils se sont battus pour relever le défi de l’inclusion scolaire de Camille.


L’incompréhension générale


Dès la maternelle et le primaire, son intégration était compliquée. Mais c’est vers 13 ou 14 ans que son rapport aux autres est devenu problématique. « Jusque-là, ça ne me dérangeait pas d’être seul dans mon coin, et les autres ensemble. Je me suis alors dit que ce serait bien de m’intégrer à ma classe, mais je n’y arrivais pas. Je ne regardais pas les autres dans les yeux, je n’avais pas confiance en moi, je n’avais pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais seul », raconte-t-il, assis dans un fauteuil du salon, entre son père et sa mère. La situation est devenue de plus en plus difficile, jusqu’au jour où « un petit événement (l’a) fait flipper » : « J’étais à bout. Je suis allé à l’hôpital. On ne savait pas ce que j’avais. » « Camille, qui a toujours été gentil et pacifique, se réfugiait dans les jeux vidéo. Mais il est devenu agressif, déprimé et violent. Nous étions perdus face à cette situation », explique Nadège, sa mère, elle aussi professeure des écoles. Les séjours en hôpital s’enchaînent, accompagnés d’annonces de diagnostics qui se révèlent tous erronés : dépression à tendance paranoïaque, syndrome bipolaire et même schizophrénie ! « Pendant deux ans, nous avons été dans une errance de diagnostic », poursuit-elle.


“L’école inclusive est l’école de l’esprit d’équipe“


Poser le bon diagnostic


Deux ans « de galère », en pleine adolescence, où Camille se voit administrer des traitements inadaptés, avec des effets inverses pour les personnes autistes. « Il a été déscolarisé en 2de. On m’a dit que j’étais une mère qui le couvait trop. En fait, le corps médical n’écoute pas assez les parents », regrette amèrement Nadège. Quand Camille a eu 15 ans, le diagnostic a été enfin posé par une spécialiste du centre de ressources autisme de Reims. Il a alors pu reprendre l’école. Il a bénéficié de l’accompagnement en classe d’un premier assistant de vie scolaire (AVS), prénommé Benjamin. « Il m’a compris rapidement, quand ça n’allait pas il était là, il m’écoutait. AVS, ça ne gagne pas assez bien sa vie, Benjamin s’est rabattu sur un autre métier, aide-soignant. Il est parti à regret », se souvient Camille, d’autant plus reconnaissant pour sa présence rassurante qu’il a dû composer l’année suivante avec un nouvel AVS jugé « catastrophique » : « Camille est très fatigable. Au bout d’une demi-heure de cours, il décroche. L’AVS est là pour prendre des notes, l’aider à se repérer dans l’espace et le temps, gérer son cartable, ranger ses affaires, etc. », précise sa mère.


Un handicap invisible


Passage en première ensuite, des résultats laborieux, et une épreuve orale au bac de français qui se passe mal. « Camille avait le droit d’être accompagné sur décision de l’Éducation nationale à cette épreuve. Or la professeure n’était pas au courant et ne comprenait pas pourquoi la présence d’une tierce personne était nécessaire ; c’est le problème du handicap invisible. Nous avons dû aller voir le proviseur », raconte son père. Camille poursuit : « J’étais censé passer le premier pour cet examen, or mon nom figurait tout en bas de la liste, j’étais le dernier ! » L’AVS, admise à rester le temps qu’il prépare son exposé, a été invitée à sortir ensuite, ce qui a mis Camille en état de stress. La note s’en est ressentie : 6/20 ! « Pour le principe, car c’était trop injuste, on ne pouvait pas laisser passer ça », reprend sa mère. Camille et ses parents ont fait appel au Défenseur des droits, qui lutte contre les discriminations. « Il a eu le droit de repasser l’épreuve en septembre, mais ça a pourri notre été. » L’année suivante, les épreuves du bac se passent bien. Une fois le diplôme en poche, il effectue un service civique, suivi d’un contrat aidé à la médiathèque de Charleville-Mézières, avec la mission locale. « Un lieu normalement calme », donc adapté à son hyperacousie et à sa grande sensibilité, précisent ses parents. Il a poursuivi ensuite une formation d’auxiliaire de bibliothèque dans une médiathèque de Reims.


En classe avec des enfants différents


Témoigner et informer


Depuis un an, lors de ses temps libres, il développe sa passion du cinéma et du montage vidéo, et réalise une « websérie », composée d’épisodes de 10 minutes environ, qui s’intitule « Nos souvenirs construisent nos avenirs ». Les deux premiers épisodes ont fait l’objet de présentation officielle et ont été récompensés. Camille y présente, avec des pointes d’humour, de petites scènes inspirées de la vie d’un jeune homme atteint du syndrome d’Asperger : « Je m’adresse au monde extérieur, aux gens qui accompagnent ou vivent avec un Asperger, pour leur dire ce qu’est le syndrome. Pour ceux qui connaissent ou pas, les profs, les médecins, les élèves… » Occasion de le découvrir de l’intérieur et de comprendre certains décalages et incompréhensions. Une manière de faire bouger les lignes, dans le sens de l’inclusion des enfants « hors cadre ».



En classe avec un « Aspi », comment s’y prendre ?


Nadège et Damien Huré adressent ces recommandations aux profs qui accueillent un jeune atteint du syndrome d’Asperger : « Inviter l’élève à s’installer au premier rang. Répéter plusieurs fois les consignes. N’en énoncer qu’une à la fois. Ne pas parler fort. Être calme. S’exprimer clairement. Ne pas donner les devoirs à faire pour le lendemain à la fin du cours quand les élèves ne sont plus attentifs et qu’il y a du bruit. Si les profs écrivent leurs cours, les leur transmettre, c’est une aide précieuse. » Des conseils judicieux pour relever le défi de l’école inclusive.


> À voir


La websérie est visible sur la chaîne Youtube « Nos souvenirs construisent nos avenirs », son titre.
Et aussi… Si vous êtes intéressé par le projet de Camille, vous pouvez contacter damien.hure @wanadoo.fr

La vie d’un jeune « Aspi » vue de l’intérieur

Standard


Camille a passé son bac L en 2016 à Charleville, à l’âge de 19 ans. Excepté l’année de 2de redoublée, il a effectué une scolarité sans faute. Raconter ce parcours, c’est égrener une multitude d’étapes, la plupart douloureuses, certaines humiliantes, vécues au coude à coude avec ses parents. Si Camille vous livrait lui-même ce récit, vous entreriez dans son histoire en prenant le temps de relire chacune de ces étapes, à partir d’un détail. « L’autisme Asperger est une autre manière d’être au monde, prévient Damien, son père, professeur des écoles. Nous, “neurotypiques”, utilisons des nationales pour nous exprimer, eux vont prendre le chemin de terre et ça va être très long, ou au contraire une autoroute et là c’est fulgurant de rapidité. Ils voient tous les détails ; cette accumulation de détails surcharge le cerveau et joue un grand rôle dans leur fatigabilité. » Ce jour-là, Camille et ses parents nous accueillent dans leur maison de Charleville-Mézières (Ardennes), pour nous raconter comment, ensemble, ils se sont battus pour relever le défi de l’inclusion scolaire de Camille.


L’incompréhension générale


Dès la maternelle et le primaire, son intégration était compliquée. Mais c’est vers 13 ou 14 ans que son rapport aux autres est devenu problématique. « Jusque-là, ça ne me dérangeait pas d’être seul dans mon coin, et les autres ensemble. Je me suis alors dit que ce serait bien de m’intégrer à ma classe, mais je n’y arrivais pas. Je ne regardais pas les autres dans les yeux, je n’avais pas confiance en moi, je n’avais pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais seul », raconte-t-il, assis dans un fauteuil du salon, entre son père et sa mère. La situation est devenue de plus en plus difficile, jusqu’au jour où « un petit événement (l’a) fait flipper » : « J’étais à bout. Je suis allé à l’hôpital. On ne savait pas ce que j’avais. » « Camille, qui a toujours été gentil et pacifique, se réfugiait dans les jeux vidéo. Mais il est devenu agressif, déprimé et violent. Nous étions perdus face à cette situation », explique Nadège, sa mère, elle aussi professeure des écoles. Les séjours en hôpital s’enchaînent, accompagnés d’annonces de diagnostics qui se révèlent tous erronés : dépression à tendance paranoïaque, syndrome bipolaire et même schizophrénie ! « Pendant deux ans, nous avons été dans une errance de diagnostic », poursuit-elle.


“L’école inclusive est l’école de l’esprit d’équipe“


Poser le bon diagnostic


Deux ans « de galère », en pleine adolescence, où Camille se voit administrer des traitements inadaptés, avec des effets inverses pour les personnes autistes. « Il a été déscolarisé en 2de. On m’a dit que j’étais une mère qui le couvait trop. En fait, le corps médical n’écoute pas assez les parents », regrette amèrement Nadège. Quand Camille a eu 15 ans, le diagnostic a été enfin posé par une spécialiste du centre de ressources autisme de Reims. Il a alors pu reprendre l’école. Il a bénéficié de l’accompagnement en classe d’un premier assistant de vie scolaire (AVS), prénommé Benjamin. « Il m’a compris rapidement, quand ça n’allait pas il était là, il m’écoutait. AVS, ça ne gagne pas assez bien sa vie, Benjamin s’est rabattu sur un autre métier, aide-soignant. Il est parti à regret », se souvient Camille, d’autant plus reconnaissant pour sa présence rassurante qu’il a dû composer l’année suivante avec un nouvel AVS jugé « catastrophique » : « Camille est très fatigable. Au bout d’une demi-heure de cours, il décroche. L’AVS est là pour prendre des notes, l’aider à se repérer dans l’espace et le temps, gérer son cartable, ranger ses affaires, etc. », précise sa mère.


Un handicap invisible


Passage en première ensuite, des résultats laborieux, et une épreuve orale au bac de français qui se passe mal. « Camille avait le droit d’être accompagné sur décision de l’Éducation nationale à cette épreuve. Or la professeure n’était pas au courant et ne comprenait pas pourquoi la présence d’une tierce personne était nécessaire ; c’est le problème du handicap invisible. Nous avons dû aller voir le proviseur », raconte son père. Camille poursuit : « J’étais censé passer le premier pour cet examen, or mon nom figurait tout en bas de la liste, j’étais le dernier ! » L’AVS, admise à rester le temps qu’il prépare son exposé, a été invitée à sortir ensuite, ce qui a mis Camille en état de stress. La note s’en est ressentie : 6/20 ! « Pour le principe, car c’était trop injuste, on ne pouvait pas laisser passer ça », reprend sa mère. Camille et ses parents ont fait appel au Défenseur des droits, qui lutte contre les discriminations. « Il a eu le droit de repasser l’épreuve en septembre, mais ça a pourri notre été. » L’année suivante, les épreuves du bac se passent bien. Une fois le diplôme en poche, il effectue un service civique, suivi d’un contrat aidé à la médiathèque de Charleville-Mézières, avec la mission locale. « Un lieu normalement calme », donc adapté à son hyperacousie et à sa grande sensibilité, précisent ses parents. Il a poursuivi ensuite une formation d’auxiliaire de bibliothèque dans une médiathèque de Reims.


En classe avec des enfants différents


Témoigner et informer


Depuis un an, lors de ses temps libres, il développe sa passion du cinéma et du montage vidéo, et réalise une « websérie », composée d’épisodes de 10 minutes environ, qui s’intitule « Nos souvenirs construisent nos avenirs ». Les deux premiers épisodes ont fait l’objet de présentation officielle et ont été récompensés. Camille y présente, avec des pointes d’humour, de petites scènes inspirées de la vie d’un jeune homme atteint du syndrome d’Asperger : « Je m’adresse au monde extérieur, aux gens qui accompagnent ou vivent avec un Asperger, pour leur dire ce qu’est le syndrome. Pour ceux qui connaissent ou pas, les profs, les médecins, les élèves… » Occasion de le découvrir de l’intérieur et de comprendre certains décalages et incompréhensions. Une manière de faire bouger les lignes, dans le sens de l’inclusion des enfants « hors cadre ».



En classe avec un « Aspi », comment s’y prendre ?


Nadège et Damien Huré adressent ces recommandations aux profs qui accueillent un jeune atteint du syndrome d’Asperger : « Inviter l’élève à s’installer au premier rang. Répéter plusieurs fois les consignes. N’en énoncer qu’une à la fois. Ne pas parler fort. Être calme. S’exprimer clairement. Ne pas donner les devoirs à faire pour le lendemain à la fin du cours quand les élèves ne sont plus attentifs et qu’il y a du bruit. Si les profs écrivent leurs cours, les leur transmettre, c’est une aide précieuse. » Des conseils judicieux pour relever le défi de l’école inclusive.


> À voir


La websérie est visible sur la chaîne Youtube « Nos souvenirs construisent nos avenirs », son titre.
Et aussi… Si vous êtes intéressé par le projet de Camille, vous pouvez contacter damien.hure @wanadoo.fr

La vie d’un jeune « Aspi » vue de l’intérieur

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Camille a passé son bac L en 2016 à Charleville, à l’âge de 19 ans. Excepté l’année de 2de redoublée, il a effectué une scolarité sans faute. Raconter ce parcours, c’est égrener une multitude d’étapes, la plupart douloureuses, certaines humiliantes, vécues au coude à coude avec ses parents. Si Camille vous livrait lui-même ce récit, vous entreriez dans son histoire en prenant le temps de relire chacune de ces étapes, à partir d’un détail. « L’autisme Asperger est une autre manière d’être au monde, prévient Damien, son père, professeur des écoles. Nous, “neurotypiques”, utilisons des nationales pour nous exprimer, eux vont prendre le chemin de terre et ça va être très long, ou au contraire une autoroute et là c’est fulgurant de rapidité. Ils voient tous les détails ; cette accumulation de détails surcharge le cerveau et joue un grand rôle dans leur fatigabilité. » Ce jour-là, Camille et ses parents nous accueillent dans leur maison de Charleville-Mézières (Ardennes), pour nous raconter comment, ensemble, ils se sont battus pour relever le défi de l’inclusion scolaire de Camille.


L’incompréhension générale


Dès la maternelle et le primaire, son intégration était compliquée. Mais c’est vers 13 ou 14 ans que son rapport aux autres est devenu problématique. « Jusque-là, ça ne me dérangeait pas d’être seul dans mon coin, et les autres ensemble. Je me suis alors dit que ce serait bien de m’intégrer à ma classe, mais je n’y arrivais pas. Je ne regardais pas les autres dans les yeux, je n’avais pas confiance en moi, je n’avais pas les mêmes centres d’intérêt. J’étais seul », raconte-t-il, assis dans un fauteuil du salon, entre son père et sa mère. La situation est devenue de plus en plus difficile, jusqu’au jour où « un petit événement (l’a) fait flipper » : « J’étais à bout. Je suis allé à l’hôpital. On ne savait pas ce que j’avais. » « Camille, qui a toujours été gentil et pacifique, se réfugiait dans les jeux vidéo. Mais il est devenu agressif, déprimé et violent. Nous étions perdus face à cette situation », explique Nadège, sa mère, elle aussi professeure des écoles. Les séjours en hôpital s’enchaînent, accompagnés d’annonces de diagnostics qui se révèlent tous erronés : dépression à tendance paranoïaque, syndrome bipolaire et même schizophrénie ! « Pendant deux ans, nous avons été dans une errance de diagnostic », poursuit-elle.


“L’école inclusive est l’école de l’esprit d’équipe“


Poser le bon diagnostic


Deux ans « de galère », en pleine adolescence, où Camille se voit administrer des traitements inadaptés, avec des effets inverses pour les personnes autistes. « Il a été déscolarisé en 2de. On m’a dit que j’étais une mère qui le couvait trop. En fait, le corps médical n’écoute pas assez les parents », regrette amèrement Nadège. Quand Camille a eu 15 ans, le diagnostic a été enfin posé par une spécialiste du centre de ressources autisme de Reims. Il a alors pu reprendre l’école. Il a bénéficié de l’accompagnement en classe d’un premier assistant de vie scolaire (AVS), prénommé Benjamin. « Il m’a compris rapidement, quand ça n’allait pas il était là, il m’écoutait. AVS, ça ne gagne pas assez bien sa vie, Benjamin s’est rabattu sur un autre métier, aide-soignant. Il est parti à regret », se souvient Camille, d’autant plus reconnaissant pour sa présence rassurante qu’il a dû composer l’année suivante avec un nouvel AVS jugé « catastrophique » : « Camille est très fatigable. Au bout d’une demi-heure de cours, il décroche. L’AVS est là pour prendre des notes, l’aider à se repérer dans l’espace et le temps, gérer son cartable, ranger ses affaires, etc. », précise sa mère.


Un handicap invisible


Passage en première ensuite, des résultats laborieux, et une épreuve orale au bac de français qui se passe mal. « Camille avait le droit d’être accompagné sur décision de l’Éducation nationale à cette épreuve. Or la professeure n’était pas au courant et ne comprenait pas pourquoi la présence d’une tierce personne était nécessaire ; c’est le problème du handicap invisible. Nous avons dû aller voir le proviseur », raconte son père. Camille poursuit : « J’étais censé passer le premier pour cet examen, or mon nom figurait tout en bas de la liste, j’étais le dernier ! » L’AVS, admise à rester le temps qu’il prépare son exposé, a été invitée à sortir ensuite, ce qui a mis Camille en état de stress. La note s’en est ressentie : 6/20 ! « Pour le principe, car c’était trop injuste, on ne pouvait pas laisser passer ça », reprend sa mère. Camille et ses parents ont fait appel au Défenseur des droits, qui lutte contre les discriminations. « Il a eu le droit de repasser l’épreuve en septembre, mais ça a pourri notre été. » L’année suivante, les épreuves du bac se passent bien. Une fois le diplôme en poche, il effectue un service civique, suivi d’un contrat aidé à la médiathèque de Charleville-Mézières, avec la mission locale. « Un lieu normalement calme », donc adapté à son hyperacousie et à sa grande sensibilité, précisent ses parents. Il a poursuivi ensuite une formation d’auxiliaire de bibliothèque dans une médiathèque de Reims.


En classe avec des enfants différents


Témoigner et informer


Depuis un an, lors de ses temps libres, il développe sa passion du cinéma et du montage vidéo, et réalise une « websérie », composée d’épisodes de 10 minutes environ, qui s’intitule « Nos souvenirs construisent nos avenirs ». Les deux premiers épisodes ont fait l’objet de présentation officielle et ont été récompensés. Camille y présente, avec des pointes d’humour, de petites scènes inspirées de la vie d’un jeune homme atteint du syndrome d’Asperger : « Je m’adresse au monde extérieur, aux gens qui accompagnent ou vivent avec un Asperger, pour leur dire ce qu’est le syndrome. Pour ceux qui connaissent ou pas, les profs, les médecins, les élèves… » Occasion de le découvrir de l’intérieur et de comprendre certains décalages et incompréhensions. Une manière de faire bouger les lignes, dans le sens de l’inclusion des enfants « hors cadre ».



En classe avec un « Aspi », comment s’y prendre ?


Nadège et Damien Huré adressent ces recommandations aux profs qui accueillent un jeune atteint du syndrome d’Asperger : « Inviter l’élève à s’installer au premier rang. Répéter plusieurs fois les consignes. N’en énoncer qu’une à la fois. Ne pas parler fort. Être calme. S’exprimer clairement. Ne pas donner les devoirs à faire pour le lendemain à la fin du cours quand les élèves ne sont plus attentifs et qu’il y a du bruit. Si les profs écrivent leurs cours, les leur transmettre, c’est une aide précieuse. » Des conseils judicieux pour relever le défi de l’école inclusive.


> À voir


La websérie est visible sur la chaîne Youtube « Nos souvenirs construisent nos avenirs », son titre.
Et aussi… Si vous êtes intéressé par le projet de Camille, vous pouvez contacter damien.hure @wanadoo.fr