“Être cheftaine me permet de donner du sens à ma vie”

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Evelyne a failli ne pas y revenir. Elle a été cheftaine chez les Scouts et Guides de France quand elle était jeune, mais les études puis le travail et la vie de famille avec des enfants en bas âge ont eu raison de son agenda : il n’était plus possible de passer ses week-ends en chemise bleue ! Mais, quand son fils aîné fête ses 6 ans, cette habitante d’Haguenau (Bas-Rhin) rempile à la quarantaine : « Je voulais qu’il connaisse le même plaisir que j’ai eu à faire du scoutisme. Comme on manquait de bras, j’ai remis le pied à l’étrier. » 


Chaque année, ils sont 15.000 à encadrer les 850 groupes de ce mouvement de jeunesse qui affiche un nombre d’adhérents en hausse de plus de 20% en 5 ans. « L’investissement représente entre 300 et 500 heures de bénévolat, explique le délégué national à la communication, François Mandil. Les animations se déroulent un week-end par mois, plus de une à trois semaines l’été. Cela nécessite des réunions de préparation le samedi, ainsi que des actions d’intendance dans la semaine : répondre aux parents, trouver les lieux de rencontre, valider les pistes pédagogiques avec l’équipe de soutien… » Si l’engagement a toujours été intense, tout est fait pour que chacun ait les moyens de le vivre dans les meilleures conditions : formations Bafa et adaptation en équipe de chefs et cheftaines. Pour rejoindre les Scouts et Guides de France, il n’y a pas d’âge minimum ni de prérequis nécessaires. David n’avait jamais entendu parler de scoutisme avant qu’un employeur ne digresse, en plein entretien d’embauche : « Pourquoi ne viendriez-vous pas voir notre groupe de Neuville samedi prochain ? » Près de 15 ans plus tard, David n’a « jamais pensé arrêter. Chez les scouts, j’ai trouvé un fort esprit de famille qui nourrit toute ma vie », témoigne le quadragénaire. Et d’observer avec satisfaction : « Les jeunes que j’ai eu à encadrer ont rejoint la maîtrise [le groupe de chefs, ndlr]. »


Chez les scouts, j’ai trouvé un fort esprit de famille qui nourrit toute ma vie.

- David, la quarantaine


Plus de 70% des chefs ont entre 17 et 25 ans, comme Clémence, 21 ans, qui vient des Yvelines. « Dernière-née d’une fratrie de cinq enfants, j’ai attendu avec impatience de rejoindre mes soeurs chez les scouts et j’y ai vécu des années incroyables. J’avais hâte de devenir cheftaine, pour rendre service après avoir tant appris. » Étudiante en école de commerce et cheftaine pour la première fois cette année, elle n’a aucun regret : « Nos rencontres le week-end me permettent de redonner du sens à une vie étudiante un peu sinueuse. » Les contraintes universitaires sont-elles un obstacle ? « Non, répond celle qui a choisi de continuer à la rentrée. Cet été, je devais commencer mon stage en juillet, mais j’ai réussi à le décaler pour assurer le camp et le jamboree », souligne-t-elle. Entre Sciences Po à Lille et une mission de collaborateur politique à Tourcoing, Pierre, la vingtaine, enchaîne les années de chef au sein du groupe où il a été louveteau. Reconnaissant envers ses propres chefs qui lui ont fait confiance, il a puisé dans cette « école de vie » pour se construire en tant qu’adulte. « Je n’imagine pas ma vie sans le scoutisme. Je me sens faire partie d’une grande chaîne, comme un maillon dans une histoire qui me dépasse », explique-t-il. Les responsabilités sont réelles et assumées : chefs et cheftaines témoignent se sentir au service d’une bonne cause, portant une vraie utilité sociale. Et toujours dans la joie !


À Savoir

Vous voulez devenir chef ou cheftaine ? Trouvez le responsable Scouts et Guides de France le plus proche de chez vous sur la page d’accueil du site : www.sgdf.fr

Dans les coulisses du ZooParc de Beauval

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C’est un adorable poupon potelé et râblé – 60 kg à la naissance ! – à la peau plissée et caparaçonnée. Un bébé blindé. « On l’attrapera comme on pourra ! », préviennent vétérinaires et soigneurs, rassemblés devant l’enclos. « L’intervention peut durer plusieurs minutes, ou à peine 30 secondes… Tout dépendra du comportement de la mère !» , ajoute Jonathan Payet. Comme si elle pressentait l’approche imminente, la maman, Henna, et sa corpulence dissuasive, 1,8 t de douceur maternelle, rechigne à s’éloigner de sa progéniture : un gracieux bébé rhinocéros indien qui a vu le jour dans la nuit du 27 au 28 août au ZooParc de Beauval, dans le Loir-et-Cher. 


Il faut être conscients que nous agissons pour la défense de la biodiversité et la conservation des espèces, nous sommes un réservoir.


Ce matin-là, une semaine après la naissance, les équipes de Jonathan Payet, responsable de la Plaine asiatique du zoo, et de Nicolas Goddard, vétérinaire, se préparent à une mission délicate : ils doivent séparer durant quelques instants le nouveau-né de sa mère pour lui implanter une puce électronique d’identification sous la peau, de la taille d’un grain de riz. « Nous allons essayer de la placer dans le cou, où la chair est plus tendre ! » L’abordage est rapide et spectaculaire : après avoir isolé Henna, en l’attirant à l’écart avec de la luzerne, soigneurs et vétérinaires s’engouffrent dans l’enclos par une trappe, immobilisent le rejeton – le premier bébé rhino indien né en Europe cette année. Les gestes sont précis, coordonnés, accomplis sous les rugissements de Henna… « La mère a beaucoup râlé, le danger était qu’elle se blesse en se cognant aux grilles, mais tout s’est bien passé. Le vétérinaire a même eu le temps de vérifier le sexe du bébé. C’est bien une femelle. Il reste à lui choisir un prénom ! » , se réjouit Jonathan.


750 naissances par an


Le ZooParc de Beauval, inauguré en 1980, héberge deux espèces de rhinocéros : le rhinocéros blanc d’Afrique et le rhinocéros indien d’Asie. « Le rhino indien appartient aux espèces dites vulnérables. Il se reconnaît à sa corne unique et à ses plaques de peau qui lui font comme une armure ! » , explique Jonathan, soulagé, à l’issue de l’incursion de l’équipe médicale. Plus de 100 soigneurs officient dans le ZooParc, qui accueille sur 40 ha plus de 10 000 animaux de 600 espèces différentes, et s’enorgueillit d’environ 750 naissances par an. Certains des hôtes du ZooParc, créé par Françoise Delord et dirigé aujourd’hui par son fils Rodolphe, sont uniques en France : les pandas géants, dont le célèbre Yuan Meng, âgé de 2 ans (entraperçu ce jour-là en train de boulotter des bambous), les diables de Tasmanie ou les koalas… dont l’un deux, quelques minutes plus tard, nous fixera avec intensité, de ses yeux de bille de verre incrustés dans sa frimousse. L’heure, en cette fin de matinée, est à la pesée.


Marsupial endémique d’Australie, le koala possède lui aussi le statut d’espèce vulnérable. Deux fois par semaine, la soigneuse, Delphine Pouvreau, en charge du secteur pandas et koalas, pèse ses protégés indolents, après les avoir décrochés des arbustes ou interrompus dans leur grignotage de feuilles d’eucalyptus. Elle nous autorise à pénétrer dans la serre, où les koalas exposent leur flegme. De retour dans le bâtiment des soins, juché sur sa balance, Alguna, un koala né en juin 2006, ressemble à une irrésistible peluche. « 4,890 kg, annonce Delphine. Comme le koala dort beaucoup et qu’il est tout le temps mou, on doit le peser pour savoir s’il est en bonne santé ! » Avec six autres soigneurs, Delphine veille également sur les kangourous arboricoles, les félins, les diables de Tasmanie ou les langurs de Java, singes originaires de l’île indonésienne ou de ses voisines… 


En 2017, cette ancienne monitrice d’équitation, au zoo depuis 2001, a participé à une initiative poignante : la réintroduction de langurs de Java dans la forêt tropicale. Sur les 14 langurs relâchés, deux étaient des femelles nées à Beauval en 2013, Samui et Indah. « C’est le rêve de tout soigneur de vivre un moment comme celui-ci. J’en avais les larmes aux yeux ! Même si les zoos ont leurs détracteurs, il faut être conscients que nous agissons pour la défense de la biodiversité et la conservation des espèces, nous sommes un réservoir. »


La sauvegarde des espèces


Le ZooParc, que les visiteurs peuvent depuis le mois de mars contempler depuis la voie des airs, à bord de télécabines qui survolent le parc sur plus de 800 m, a lancé de nombreux projets de conservation. Une association, Beauval Nature, a été créée en 2009 pour agir pour la sauvegarde des espèces. Dans le cadre de l’un des 50 programmes de conservation soutenus ou gérés actuellement par l’association, une première réintroduction de gorilles de Beauval s’est déroulée en juin au Gabon. 


Âgées de 9 et 12 ans, Kuimba et Mayombé, deux femelles, ont été relâchées dans le parc national des plateaux Batéké. -Responsable de la collection animalière et directeur de la conservation pour l’association Beauval Nature, Éric Bairrão Ruivo a accompagné les gorilles au Gabon. Ce passionné souligne le paradoxe de ces -initiatives. « La réintroduction de -spécimens, un processus extrêmement complexe, c’est à la fois un aveu d’échec pour l’humanité et un dernier espoir pour préserver les espèces » , explique-t-il. Avant d’ajouter : « Je sais que l’homme a détruit la nature, mais je suis aussi convaincu que c’est lui qui sauvera la nature. » Dans cette perspective, un ZooParc comme Beauval – « La plus grande école du monde », dit-il – peut être un lieu de sensibilisation. « Je suis confiant dans la nouvelle génération, consciente des enjeux » , assure-t-il.


Initiation aux soins


C’est le sens, par exemple, des sessions « Soigneur d’un jour » (juniors et adultes), qui proposent aux visiteurs de participer, durant une demi-journée, aux activités d’un soigneur animalier : nettoyage, soins, nourrissage… Ce jour-là, Paul, 10 ans, escorté de trois membres du service pédagogique, achève son initiation devant un bassin à la surface agitée d’étranges remous. Sa mission : ravitailler des -arapaïmas (le plus gros poisson d’eau douce d’Amérique du Sud) et des lamantins, -d’imposants mammifères aquatiques -herbivores. Muni d’un seau rempli de harengs, puis d’un sac de pommes de terre coupées, Paul distribue ses gourmandises aux -arapaïmas. Ses yeux brillent. Il n’en démord pas. « Plus tard, je veux devenir soigneur ! »


> Pour aller plus loin :


ZooParc de Beauval,

41110 Saint-Aignan-sur-Cher.

Tél. : 02 54 75 50 00

www.zoobeauval.com


Une application ZooParc de Beauval (App Store, Google Play) permet de profiter d’infos, d’astuces et de conseils durant la visite. Situé au sud de Blois, à mi-chemin entre Tours et Vierzon, le ZooParc est ouvert tous les jours de l’année, y compris les jours fériés. Il est accessible par l’A85 (sortie n° 12). En train, gare TER de Saint-Aignan-Noyers-sur-Cher (à 8 km). Tarifs : 32 € (adulte), 26 € (enfant de 3 à 10 ans inclus), gratuit pour les enfants de moins de 3 ans.


Association Beauval Nature : Créée 2009, l’association de conservation des espèces menacées a lancé un magazine, Beauval Nature Mag, qui permet de faire découvrir les actions concrètes de ses programmes à travers le monde. Le premier numéro (5 €), consacré à l’Asie du Sud-Est, est disponible à la Maison Beauval Nature, à l’intérieur du parc. L’association propose également de parrainer un animal (https://parrainages.zoobeauval.com). Jusqu’au 25 octobre, le ZooParc accueille, en son sein, une exposition photos pour sensibiliser à la protection des espèces.