La lévitation acoustique entre dans l’ère de la précision

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Des particules de polystyrène en lévitation acoustique (CREDIT: M. Andrade/University of São Paulo)

Des chercheurs de l’université de São Pablo au Brésil ont conçu un nouveau dispositif pour déplacer des objets sans aucun contact physique grâce à la lévitation par ondes sonores ou « lévitation acoustique ». Si de tels dispositifs ont déjà été testés dans les laboratoires de recherche, celui-ci résout l’un des principaux obstacles techniques auxquels les chercheurs étaient confrontés avec les ondes sonores : la stabilité et la maniabilité des objets en lévitation. Ce système expérimental permet de déplacer des objets sans aucun risque de les voir choir, ce qui intéresse particulièrement les secteurs sensibles du nucléaire et de la chimie où la matière transportée est très réactive et destructrice.

La lévitation par onde sonore peut sembler un phénomène paradoxal car par définition une onde se déplace, généralement à grande vitesse. En effet, une onde, qu’elle soit acoustique, électromagnétique ou de toute autre nature, est un transport d’énergie qui se fait par la modification cyclique et régulière des paramètres physiques du milieu. En particulier, une onde sonore consiste en la compression et la dilatation de l’air : les particules d’air restent sur place mais elles subissent (par tranches) des compressions et des dilatations à un rythme régulier. Ainsi, ce ne sont pas les particules qui se déplacent mais bien la pression à laquelle elles sont soumises – l’oreille est sensible à ces variations de pression de l’air qui l’entoure, qu’elle transforme en signaux nerveux interprétés par notre cerveau sous la forme que nous nommons « son ».

Pour faire de la lévitation, on crée des ondes stationnaires

Donc en principe, une onde se déplace : l’onde lumineuse (électromagnétique) court dans le vide à quelque 300 000 km/s, une onde sonore évolue dans l’air ambiant à 330 m/s environ, etc . Comment alors figer sur place un objet grâce aux ondes ? On n’a jamais vu un surfeur rester immobile sur la crête d’une vague ! De fait, le phénomène de lévitation acoustique repose sur l’une des caractéristiques des ondes : la possibilité de créer des structures statiques, ou « stationnaires », en faisant se superposer deux ondes identiques se déplaçant en sens contraire. Ainsi, lorsqu’on fait se rencontrer de front deux ondes de même fréquence, celles-ci peuvent créer une structure statique à condition que leurs crêtes et leurs creux respectifs se superposent exactement – sans cette coïncidence de fréquence temporelle et de configuration spatiale, la rencontre détruit toute régularité et rend le système totalement chaotique.

Pour faire léviter un objet grâce aux ondes sonores, on crée donc des ondes stationnaires : cette fois les poches de surpression (crêtes) et de sous-pression (creux) ne bougent plus, et tout objet placé dans un de ces creux y demeure car il est ceinturé par deux « murs » de surpression – à condition que la force de gravité s’exerçant sur l’objet ne soit pas supérieure à celle exercée par les poches de surpression. Un tel résultat s’obtient grâce à un dispositif simple, un émetteur placé en face d’un réflecteur : l’émetteur génère des ondes en continu vers le réflecteur qui renvoie dans le sens inverse des ondes identiques, c’est-à-dire de même fréquence. Cela assure la coïncidence temporelle des ondes incidentes. Mais pour garantir la coïncidence spatiale qui permettra aux crêtes et aux creux des deux ondes de se superposer exactement, il faut placer le récepteur à une distance particulière de l’émetteur. Concrètement, cette distance doit être un multiple de la longueur d’onde c’est-à-dire de la distance entre deux crêtes (ou deux creux) de pression.

Différentes configurations des ondes sonores stationnaires (CREDIT: M. Andrade/University of São Paulo)

Différentes configurations des ondes sonores stationnaires (CREDIT: M. Andrade/University of São Paulo)

Cette dernière condition est le point faible de la technique de lévitation acoustique car il suffit d’une infime variation de fréquence ou de distance entre l’émetteur et le réflecteur, voire d’un infime défaut d’alignement des deux ondes pour détruire ce beau schéma statique : les objets en lévitation retombent. Et c’est en ce point que les chercheurs brésiliens ont innové : en donnant au réflecteur une forme très particulière (calculée grâce à un logiciel de simulation), soit un creux parabolique, ils parviennent à maintenir la cohérence spatiale entre les deux ondes, quelle que soit la distance émetteur-réflecteur et leur alignement. Mieux ! En déplaçant horizontalement le réflecteur ou en le faisant pivoter sur son axe, ils parviennent à déformer la configuration des ondes stationnaires sans la détruire.

La stabilité de leur système permet enfin d’envisager des dispositifs de lévitation acoustique pour des matières dangereuses et destructives, comme la matière radioactive ou des substances chimiques très réactives qui ne doivent entrer en contact avec aucune autre matière. Un réel besoin pour les industries de ces secteurs qui, pour l’heure, se servent de systèmes robotisés très chers et qui doivent être remplacés régulièrement. Néanmoins, il reste un dernier défi à relever : si le système des chercheurs a prouvé sa fiabilité avec des objets petits et très légers – en substance, des boules de polystyrène de 3 mm de diamètre – il faut maintenant vaincre l’obstacle du passage à grande échelle pour assurer le transport sécurisé de gros objets lourds.

Román Ikonicoff

 

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  • Visualiser une onde acoustique avec du sel de table – S&V n°1127 – 2011 – La physique des ondes, acoustiques mais aussi électromagnétiques et autres, est complexe et a passionné les savants des siècles passés. Le magazine propose une petite expérience pour les visualiser – à la manière dont le faisaient les anciens.

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  • Et voici le froid qui vient du son – S&V n°1072 – 2007 – Les ondes acoustiques jouent depuis longtemps les seconds rôles dans la recherche scientifique, derrière les ondes électromagnétiques qui ont accaparé toute l’attention des savants à la fin du XIXe siècle (théorie de l’électromagnétisme de Maxwell) et durant une bonne partie du XXe (théorie de la relativité restreinte et physique quantique). Mais aujourd’hui, les ondes sonores inspirent à nouveau les chercheurs.

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  • Attention, les objets nous écoutent – S&V n°1168 – 2014 – Les nouvelles technologies ont trouvé dans les ondes sonores un nouvel espace d’expérimentation : avec des caméras à haute définition, des algorithmes réussissent à reproduire les sons d’une scène très distante en analysant les micro-vibration des objets physiques. Un outil idéal pour l’espionnage…

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Un vaccin prometteur contre Ebola démarre la phase d’essai

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La phase de test a débuté pour le vaccin de Janssen (ici, un contrôle visuel des éprouvettes) / Ph. © Janssen

La phase de test a débuté pour le vaccin de Janssen (ici, un contrôle visuel des éprouvettes) / Ph. © Janssen

Les essais ont déjà commencé : le nouveau candidat vaccin contre Ebola, élaboré par la société pharmaceutique Janssen, sera testé sur 72 volontaires sains au Royaume-Uni.  Très vite, d’autres essais débuteront aux États-Unis, puis, aussitôt qu’ils donneront des résultats, le vaccin pourra être testé à grande échelle en Afrique de l’Est. Cette première phase clinique (phase 1 dans le jargon des pharmaceutiques) est destinée à vérifier, d’une part, si le produit est bien toléré et d’autre part le niveau de réponse immunitaire qu’il provoque.

Confiante du bon fonctionnement de son vaccin, Janssen se prépare à conduire des essais de grande envergure au Ghana, au Kenya et en Tanzanie le plus rapidement possible : plus de 400 000 doses de vaccin auront été produites en avril pour les assurer. Mais les essais pourraient débuter dès février-mars si tout se passe bien. Pour cela, il faudra d’abord que les premiers résultats obtenus en Europe soient bons, et que les autorités sanitaires locales donnent leur feu vert. Ces trois pays ne sont pas touchés par l’épidémie actuelle, mais l’ont été par le passé et pourraient l’être à l’avenir : la population gagnerait donc à être immunisée contre le redoutable virus.

L’action de ce vaccin repose sur un fonctionnement à double tir, dit « prime-boost »

A la pointe des biotechnologies vaccinales, le nouveau candidat vaccin est une combinaison de deux substances, fonctionnant sur le mode du « prime-boost » (amorce-stimulation) : « une première dose de vaccin amorce une réaction par le système immunitaire, puis une deuxième dose stimule une réponse soutenue au fil du temps, comme un coup de fouet qui rend plus robuste et durable la protection immunitaire », explique Benoît Callendret, responsable du développement du vaccin chez Crucell, filiale de Jannsen.

Ce mécanisme d’immunisation à double tir est utilisé de plus en plus fréquemment dans la recherche vaccinale de solutions aux maladies très difficiles à combattre, telles le sida/VIH ou le paludisme. Son atout majeur ? Elle permet d’agir sur plusieurs fronts immunitaires, afin d’enclencher la réponse immunitaire la plus complète possible.

Comment ça marche ? Dans le vaccin en cours de test, la première substance est en fait un virus de la famille des Adénovirus, modifié génétiquement pour être inoffensif pour l’homme, mais capable de s’introduire dans les cellules du patient. Là, il se met à produire un fragment du virus Ebola, la glycoprotéine. En réponse, les défenses immunitaires innées de l’oranisme s’activent et des anticorps sont produits contre le virus Ebola.

Un mois ou deux plus tard, le patient reçoit une deuxième substance, un autre virus modifié génétiquement, le MAV, de la famille des Poxvirus (parmi lesquels, la variole). Celui-ci marche sur le même principe, produisant également la glycoprotéine du virus Ebola, mais il agit sur d’autres tissus corporels que le premier. « Au final, le double vaccin permet d’atteindre le plus grand nombre possible de cellules corporelles afin de réaliser la plus grande protection possible contre la maladie », résume Benoît Callendret.

Fin novembre dernier, l’annonce avait été donnée qu’un autre vaccin, produit par GlaxoSmithKline, avait réussi la première phase de tests. Les chances se multiplient donc de pouvoir enfin enrayer l’épidémie qui sévit depuis près d’un an en Afrique de l’Ouest.

Fiorenza Gracci

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S&V 1165 Ebola

S&V 1105 vaccin grippe

  • Virus : la fin de l’homme ? – S&V n°934. Le « péril viral » est annoncé pour le troisième millénaire. Aux nombreux virus déjà connus s’ajoute en effet la menace d’une multitude d’autres…

S&V 934 virus

 

 

 

Le télescope spatial Hubble photographie le ciel… d’une autre galaxie

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Ces myriades d'étoiles n'appartiennent pas à la Voie lactée, notre galaxie, mais à la galaxie d'Andromède, située à 2.5 millions d'années-lumière de la Terre. Ce gros plan montre une minuscule partie de la photographie prise par le télescope spatial Hubble. Photo Nasa/ESA/STSCI.

Ces myriades d’étoiles n’appartiennent pas à la Voie lactée, notre galaxie, mais à la galaxie d’Andromède, située à 2.5 millions d’années-lumière de la Terre. Ce gros plan montre une minuscule partie de la photographie prise par le télescope spatial Hubble. Photo Nasa/ESA/STSCI.

C’est le ciel… Le ciel, oui, mais le ciel d’une autre galaxie… Cette image à couper le souffle, que vient de nous offrir le télescope spatial Hubble, va faire date dans l’histoire de l’astronomie. Depuis quelques années, le télescope spatial n’est plus beaucoup utilisé pour des projets d’observations unitaires et décisives scientifiquement. Le télescope spatial, en orbite depuis vingt cinq ans, est moins sollicité pour ses prouesses optiques, que certains télescopes au sol, désormais, peuvent atteindre, voire dépasser. Alors le comité scientifique qui gère l’instrument a décidé, pour ses toutes dernières années d’observation, d’utiliser le télescope spatial à contre emploi, comme un télescope de « sondage », à très grand champ. Cette technique d’observation, consistant à réaliser d’immenses mosaïques célestes, en multipliant les images, est énormément consommatrice en temps d’observation pour Hubble, ses caméras ayant, justement, un champ de vision minuscule, inévitable corollaire de sa très haute résolution, c’est à dire sa capacité à détecter de très fins détails sur les astres observés.

La galaxie d'Andromède est visible à l’œil nu et aux jumelles. C'est la galaxie spirale géante la plus proche de notre propre galaxie, la Voie lactée. Photo NAOJ/Robert Gendler.

La galaxie d’Andromède est visible à l’œil nu et aux jumelles. C’est la galaxie spirale géante la plus proche de notre propre galaxie, la Voie lactée. Photo NAOJ/Robert Gendler.

Alors Hubble se lance dans de grandes chevauchées cosmiques, filant à 28 000 km/h autour de la Terre, son miroir obstinément pointé vers le même coin de ciel, qu’il scanne méthodiquement, usant de temps de pose totalement déraisonnables…

Le télescope spatial Hubble a réalisé une image mosaïque de la galaxie d'Andromède comptant 1.5 milliard de pixels et couvrant le quart environ de la surface de la galaxie. Plus de 100 millions d'étoiles sont visibles sur l'image originale. Ces étoiles ne sont pas perceptibles sur cette image en basse définition. Photo Nasa/ESA/STSCI.

Le télescope spatial Hubble a réalisé une image mosaïque de la galaxie d’Andromède comptant 1.5 milliard de pixels et couvrant le quart environ de la surface de la galaxie. Plus de 100 millions d’étoiles sont visibles sur l’image originale. Ces étoiles ne sont pas perceptibles sur cette image en basse définition. Photo Nasa/ESA/STSCI.

Ici, piloté par l’équipe d’une vingtaine de chercheurs du PHAT (Panchromatic Hubble Andromeda Treasury) le télescope spatial est resté deux semaines – 394 heures de pose – pointé dans la direction de la belle galaxie d’Andromède, cousine de notre propre galaxie, la Voie lactée. Distante d’environ 2,5 millions d’années-lumière, cette galaxie spirale géante est visible à l’œil nu ou dans de simples jumelles. Le télescope spatial ne peut couvrir la galaxie toute entière, d’ailleurs, une telle couverture totale de la grande et diaphane elfe céleste n’intéressait pas vraiment les astronomes, qui ambitionnent plutôt de dresser un catalogue des populations stellaires d’Andromède. Le champ de l’image prise par Hubble couvre donc environ la moitié du bulbe et du disque de la galaxie d’Andromède, brossant un immense panorama d’une soixantaine de milliers d’années-lumière… Six filtres ont été utilisés par les chercheurs, depuis l’ultraviolet jusqu’à l’infrarouge en passant par la lumière visible.
La radicalité de cette extraordinaire image qui compte un milliard et demi de pixels tient dans la combinaison inédite d’un très grand champ et d’une résolution spatiale surréaliste : Hubble détecte des détails de 0,05 seconde d’arc environ, ce qui, à la distance de la galaxie d’Andromède, représente seulement 0,6 année-lumière ! Ce n’est pas tout. Cette image montre des étoiles de magnitude apparente 28, ce qui, à la distance d’Andromède correspond à une magnitude absolue de + 3,6. Un tel éclat correspond à des étoiles de type solaire, les étoiles les plus pâles visibles sur cette image étant environ trois fois plus brillantes que le Soleil…

Lorsque l'on compare l'image de la galaxie d'Andromède prise par Hubble, en bas, à la même définition que celles prises par les plus puissants télescopes terrestres - ici, le télescope géant Subaru, à Hawaii, en haut - les images semblent identiques... Photos NAOJ/Robert Gendler/Nasa/ESA/STSCI.

Lorsque l’on compare l’image de la galaxie d’Andromède prise par Hubble, en bas, à la même définition que celles prises par les plus puissants télescopes terrestres – ici, le télescope géant Subaru, à Hawaii, en haut – les images semblent identiques… Photos NAOJ/Robert Gendler/Nasa/ESA/STSCI.

Le projet PHAT vise à étudier les populations stellaires de la galaxie d’Andromède, comme le projet européen Gaia vise à étudier celles de la Voie lactée. Dans le cas du télescope spatial Gaia, ce sont environ un milliard d’étoiles qui seront très précisément identifiées et caractérisées. Le PHAT a commencé le recensement de la galaxie d’Andromède, en caractérisant quelques dizaines de milliers d’étoiles.
Mais la photographie prise par Hubble en compte… plus de cent dix millions sur le milliard et demi de pixels qu’elle contient ! Jamais on n’avait contemplé une galaxie d’aussi près, jamais on n’avait vu les étoiles d’une autre galaxie aussi bien. C’est une image monde. Trop grande, trop riche pour être appréhendée du regard. Un immense panorama cosmique que l’on pourrait, une vie entière, explorer, sans jamais l’épuiser.

... Mais si l'on présente les images à la résolution obtenue par le télescope spatial Hubble, un vertigineux poudroiement d'étoiles apparaît. L'image de Hubble montre cent fois plus de détails que les photographies obtenues jusqu'ici par les télescopes terrestres. PhotoNAOJ/Robert Gendler/Nasa/ESA/STSCI.

… Mais si l’on présente les images à la résolution obtenue par le télescope spatial Hubble, un vertigineux poudroiement d’étoiles apparaît. L’image de Hubble montre cent fois plus de détails que les photographies obtenues jusqu’ici par les télescopes terrestres. Pour vraiment réaliser ce qu’a fait Hubble, clickez sur l’image et regardez-la dans sa définition native… PhotoNAOJ/Robert Gendler/Nasa/ESA/STSCI.

Et pourtant… Pourtant, malgré sa richesse, malgré l’indescriptible brouillard d’étoiles que cette image nous révèle, elle ne montre rien, ou presque, de la galaxie d’Andromède… En effet, cent dix millions d’étoiles, c’est bien peu, à l’échelle de cette fantastique agglomération stellaire. La spirale géante doit compter, en tout, peut-être, quelque quatre cent milliards d’étoiles. En contemplant cette image, songez que pour chaque étoile que vous percevez, mille demeurent invisibles…
Serge Brunier

Les mécanismes du rhume s’éclairent

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Le virus du rhume infecte les cellules les plus exposées au froid. / Ph. Tina Franklin via Flickr CC BY 2.0

Le virus du rhume infecte les cellules les plus exposées au froid. / Ph. Tina Franklin via Flickr CC BY 2.0

Comment le virus du rhume infecte-t-il notre organisme ? Aussi banale soit-elle, la maladie du nez qui coule – chacun de nous l’attrape environ 3 fois par an, 8 fois pour les enfants –  est pourtant encore mal comprise par la science.

C’est dans un laboratoire d’immunobiologie de l’université Yalta (États-Unis) qu’un pas de plus a été franchi dans la connaissance des mécanismes qui permettent aux quelques 100 types de rhinovirus (virus du rhume) de s’emparer de nos voies respiratoires, provoquant éternuements, mal de gorge et surtout le très fastidieux écoulement nasal.

Une chose était établie : ces rhinovirus, qui pullulent autour de nous, se reproduisent d’autant mieux que la température est fraîche. Pour preuve, ils n’attaquent que les voies respiratoires hautes (nez, gorge), et pas les basses (bronches, poumons) beaucoup plus chaudes par temps froid (environ 4°C de plus). Est-ce donc le froid qui provoque les rhumes ? Et l’expression populaire « couvre-toi, tu vas attraper froid » trouverait ainsi son fondement scientifique ? Ou bien, à l’inverse, est-ce une défaillance du système immunitaire qui permet à ces virus de s’insinuer dans notre organisme ?

Le froid affaiblit la réponse immunitaire

En réalité, ce que viennent de mettre en lumière Ellen Foxman et ses collaborateurs, c’est plutôt l’existence d’une interaction entre le froid et la réponse immunitaire.

Pour départager l’effet du froid de l’action du système immunitaire, ils ont observé, sur des cellules des voies aériennes de souris, comment un rhinovirus attaque des cellules saines et des cellules à l’immunité bloquée (par modification génétique), et ce, à deux températures différentes, 37 °C et 33 °C. Cette dernière est la température à laquelle se trouvent les cellules de notre nez exposées aux frimas de l’hiver, tandis que les cellules des poumons, à l’intérieur du corps, restent bien au chaud à 37 °C.

Résultat des observations : à la température corporelle normale (37 °C), la réponse immunitaire contre le virus est marquée : elle active une cascade de gènes et de molécules de défense, à commencer par une molécule appelée interféron, ce qui empêche au virus de s’y multiplier. Par contre, à la température du nez refroidi, cette réponse immunitaire est fortement freinée, ouvrant la voie à la multiplication du virus. En revanche, même à la température corporelle normale, les cellules à l’immunité déficiente ne sont pas capables de se défendre du virus. Celui-ci s’y multiplie à des taux tout autant élevés qu’à 33 °C.

Les chercheurs voient là la preuve que le froid n’agit pas sur le virus du rhume lui-même, mais sur la capacité du système immunitaire à s’en défendre. Autrement dit, un nez froid est une porte ouverte au rhume parce que les défenses de ses cellules sont… figées par le froid.

Ainsi, un conseil de science pour se prémunir contre le rhume est bel et bien de se couvrir le nez ! Il est aussi efficace de pratiquer régulièrement une activité physique… et de s’adonner aux câlins, deux activités dont il a été récemment prouvé qu’elles renforcent la résistance de l’organisme.

Fiorenza Gracci

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S&V 1139 défenses immunitaires

S&V 1085 système immunitaire

 

Les smartphones réduisent le temps de sommeil des enfants

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Utiliser tablettes ou smartphones avant d’aller se coucher est mauvais pour le sommeil / Ph. Rafiqs via Flickr CC BY SA 2.0

Parents, méfiez-vous des petits écrans dans les chambres de vos enfants ! Ils affectent leur sommeil, à la fois en quantité et en qualité. Tel est en substance le message d’une étude publiée lundi dans la revue Pediatrics, menée sur plus de 2000 collégiens américains interrogés sur leurs habitudes quotidiennes entre 2012 et 2013.

Il en ressort que les enfants possédant dans leur chambre à coucher un smartphone ou une tablette dorment en moyenne 21 minutes de moins par jour que ceux qui s’endorment loin de tout écran. Les petits écrans engendrent une privation de sommeil encore plus accentuée que le grand écran : la présence de la télévision dans la chambre réduit, elle, de 18 minutes le sommeil quotidien des enfants.

Par contre, même les enfants qui regardent énormément la télévision ne déclarent pas avoir des difficultés à s’endormir ou se réveiller la nuit, alors que les enfants qui emmènent tablettes et téléphones dans leur lit sont 40 % plus nombreux à souffrir de ce genre de troubles du sommeil.

Cerise sur le gâteau : regarder des films, des vidéos ou jouer aux jeux vidéos à d’autres moment de la journée réduit aussi la durée du sommeil quotidien.

En cause, la lumière bleue émise par les écrans, ainsi que l’interruption de la routine du repos

De l’avis de l’auteure de l’étude Jennifer Falbe, de l’université de Californie à Berkeley, la lumière bleue émise par les écrans à LED des dispositifs électroniques est la principale incriminée. Par rapport à la lumière blanche, elle réduit de manière plus forte la production de mélatonine (hormone du sommeil) par le cerveau. Or, de plus en plus d’écrans incorporent cette technologie, en raison du bon rendu des couleurs et de la bonne définition qu’elle offre, tout en étant économe en énergie.

Une autre étude parue fin décembre avait conclu que lire un e-book sur une tablette rétroéclairée dans les heures avant le coucher perturbe le sommeil, de la même manière que semblent le faire smartphones et tablettes. Par rapport à la lecture d’un livre en papier, les participants voyaient leur rythme circadien prendre du retard, leur sécrétion de mélatonine chuter, et leur attention le lendemain se détériorer.

Plus inquiétant, l’Institut de la vision (situé à Paris), a observé en 2013 un effet délétère des longueurs d’ondes bleues de la lumière sur les cellules de la rétine de porc : elles provoquent l’accumulation dans les cellules pigmentaires d’un composé appelé lipofuscine, responsable d’une maladie appelée DMLA (dégénérescence maculaire liée à l’âge) qui provoque une forte baisse de la vision. A haute dose, cette lumière bleue peut aller jusqu’à provoquer la mort des cellules, d’après l’Institut de la vision. Mais des études supplémentaires restent nécessaires avant d’affirmer qu’elle rend aveugle.

D’autant que selon les auteurs de l’étude américaine, il est possible, et simple, de se prémunir contre les dégâts des écrans : par exemple, en arrêtant de les utiliser au moins une demi-heure avant d’aller se coucher, et en les retirant des chambres des enfants. Ainsi, la routine de l’endormissement du soir ne subit pas d’interférences, et la qualité du sommeil s’en retrouve préservée.

Fiorenza Gracci

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S&V 1149 écrans jeunes

  • Le point sur les LED — S&V n° 1121. Economiques et efficaces, les LED se sont progressivement imposées comme source d’éclairage passe partout. Voici leurs atouts.

S&V 1121 LED

 

 

Que voit-on avec une acuité visuelle supérieure à 10 ?

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Certaines personnes perçoivent mieux les détails que la moyenne (Ph. Trochim via Flickr CC BY 2.0)

Echelle ophtalmologique mise au point par Ferdinand Monoyer en 1875 (Ph. Trochim via Flickr CC BY 2.0)

Les personnes dotées de cette acuité distinguent… des objets plus petits. L’acuité visuelle n’est autre que le pouvoir de discrimination, mesuré lorsqu’on regarde un petit objet, appelé optotype, sur un fond qui a le contraste maximal : généralement, des petites lettres noires sur un fond blanc. Cette acuité dépend de la forme du cristallin, de l’œil et de la cornée, de la densité des photorécepteurs sur la rétine, et du traitement de l’image par le cerveau.

En France, la mesure de l’acuité se rapporte à l’échelle de l’ophtalmologiste Ferdinand Monoyer, mise au point en 1875 à Nancy et utilisée depuis dans de nombreux pays. Une acuité de 10/10 sur l’échelle de Monoyer n’est pas le score le plus haut, mais correspond à la moyenne de l’acuité de la population générale.

14/10, ou même 16/10 d’acuité visuelle

Ce qui permet de distinguer les emmétropes (doté d’une vision normale), les myopes (qui voient moins bien de loin) et les hypermétropes (qui voient moins bien de près). Une acuité de 10/10 correspond à la capacité de voir une lettre de 7,3 mm environ à 5 m. Il existe cependant des personnes capables de voir, à cette distance, des lettres de 4 ou 5 millimètres, ce qui correspond à une acuité de 14/10 et 16/10. En plus de la variabilité naturelle entre les personnes, ces différences sont liées à l’âge.

Au cours de la vie, l’acuité visuelle va de 1/20 chez le nourrisson, pour atteindre les 10/10 vers l’âge de 5 ans et les dépasser le plus souvent à l’adolescence. Progressivement, on revient aux 10/10 entre 50 et 60 ans et le déclin se prolonge jusqu’à la vieillesse, notamment en raison du jaunissement du cristallin.

F.G.

 

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  • Vision nocturne : le tour de passe-passe de l’ADN – S&V n°1103 – 2009 – Avoir une acuité visuelle supérieur à 10/10, c’est bien… Mais la vue est capable de prouesses bien plus impressionnantes, en particulier chez les mammifères nocturnes : la vision de nuit. Des chercheurs ont réussi à comprendre comment l’évolution a façonné cette aptitude, qui sollicite l’ADN des cellules visuelles.

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  • Lentilles infrarouges, voir la nuit comme en plein jour – S&V n°1162 – 2014 – Défiant l’évolution, voilà que la technologie s’empare des incroyables capacités de vision des espèces nocturnes pour la transférer à l’homme. Désormais, la nuit, tous les chats ne seront pas gris…

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Peut-on rester anonyme quand on surfe sur Internet ?

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Le réseau internet, avec ses sous-réseaux, tel qu'il était en 2004 (Ph.  Steve Jurvetson via Flickr CC BY 2.0)

Le réseau internet, avec ses sous-réseaux, tel qu’il était en 2004 (Ph. Steve Jurvetson via Flickr CC BY 2.0)

Oui… mais les techniques efficaces exigent des compétences et des moyens hors de portée du grand public. Cela étant, chacun peut prendre certaines précautions afin d’empêcher autant que faire se peut les sites de vous suivre ou de vous “espionner”, sachant que dès que vous vous connectez, ils récupèrent des informations précises sur votre connexion. Vous pourrez l’observer en faisant l’expérience ­proposée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés.

Première mesure à prendre : régler les options de son navigateur web (Firefox, Internet Explorer…) pour supprimer les cookies, ces petits fichiers que les sites consultés inscrivent dans votre ordinateur. Revers de la médaille : en n’étant plus reconnu par les sites que vous fréquentez régulièrement, ceux-ci n’afficheront plus de pages personnalisées présentant diverses informations qu’il vous faudra ressaisir. Pour éviter ce désagrément, vous pouvez conserver certains cookies… et éliminer les autres.

Pour rester anonyme, allez dans un cybercafé

La seconde solution permet de ne pas être “espionné” sur un réseau public. Elle consiste à installer l’extension “HTTPS everywhere” compatible avec Firefox et Chrome. Dès que vous vous connectez à l’un des 1500 sites répertoriés dans la liste de ce ­module (Google, Twitter, Wikipédia…), il vous redirige vers sa version “htpps”, une liaison sécurisée (un petit cadenas s’affiche dans la barre d’adresse). Cette option est utile lorsque vous vous connectez à une borne wi-fi publique.

Troisième technique : masquer son adresse IP (Internet Protocol), c’est-à-dire la plaque d’immatriculation de tout appareil raccordé à un réseau, grâce à un proxy (un ordinateur qui sert d’intermédiaire entre votre connexion et le site que vous visitez). Vous pouvez passer par des services spécialisés comme (www.anonymizer.com, megaproxy.com) ou utiliser un logiciel qui se ­connectera, via votre navigateur, à des proxy (comme ­Ultrasurf). Cette solution présente trois limites.

Premièrement, c’est le proxy qui stocke votre adresse IP et vos mots de passe ; il faut donc faire confiance à cet intermédiaire. Deuxièmement, le paramétrage depuis le navigateur n’est pas évident pour le grand public (si ce n’est Ultrasurf qui est automatique, mais avec Internet Explorer seulement). Enfin, la navigation devient plus lente puisque la connexion transite par le proxy. Finalement, pour rester anonyme, le plus simple est d’utiliser les machines d’un cybercafé.

P.R.

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie

  • L’heure du cryptage quantique a sonné – S&V n°1155 – 2013 – L’affaire Snowden a ébranlé le monde du renseignement, et la confiance entre de supposés pays alliés qui, finalement, n’ont pas cessé de s’espionner comme dans les pires cauchemars paranoïaques de la guerre froide… La recherche de nouvelles solutions techniques, comme la cryptographie quantique, vise à résoudre ce problème.

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  • Web : bien protéger sa vie privée - S&V 1126, juillet 2011 – Comment rester maître de ses données personnelles, si prisées par les firmes du Net ? Un petit guide pour améliorer sa sécurité quand on surfe sur le Web.

S&V 1126 - piratage

  • Les virus ont-ils gagné ? – S&V n°1141 – 2012 – Tout a commencé en 1982, quand un informaticien a conçu un programme se propageant tout seul aux ordinateurs connectés au sien, pour impressionner ses amis… Quel est l’état du monde des virus et autres « malwares » 30 ans plus tard ?

S&V1141

Exploration spatiale : les promesses de 2015

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6 décembre 2014, 17 h 40, à Kourou, en Guyane. La fusée Ariane 5 s'élance pour l'espace. C'est son 63 e succès d'affilée. Photo S.Brunier/Point du Jour.

6 décembre 2014, 17 h 40, à Kourou, en Guyane. La fusée Ariane 5 s’élance pour l’espace. C’est son 63 e succès d’affilée. Photo S.Brunier/Point du Jour.

2014 restera dans l’histoire de l’exploration spatiale comme « l’année de la comète ». L’Agence spatiale européenne (ESA), en menant à bien la mission Rosetta auprès de la comète Churyumov-Gerasimenko, a réalisé une véritable prouesse technique qui a fasciné le monde entier, ou presque. Jamais on n’avait approché d’aussi près une comète, et jamais on n’avait – d’accord, pas de manière très académique – posé un module sur un tel astre… L’exploit européen à cinq cents millions de kilomètres d’ici, sur un astre à la géométrie et au champ de gravité complexes, relativise quelque peu la mission chinoise Chang’ 3 qui a consisté… à poser, voici un an et un demi siècle après Soviétiques et Américains, un module sur la Lune.

La comète Churyumov-Gerasimenko, photographiée par la sonde européenne Rosetta en décembre 2014. Dans la vallée qui sépare les deux régions principales de la comète, du gaz et de la poussière commence à s'échapper dans l'espace. En s'approchant du Soleil, l'activité de la comète augmente... Photo ESA.

La comète Churyumov-Gerasimenko, photographiée par la sonde européenne Rosetta en décembre 2014. Dans la vallée qui sépare les deux régions principales de la comète, du gaz et de la poussière commence à s’échapper dans l’espace. En s’approchant du Soleil, l’activité de la comète augmente… Photo ESA.

L’Europe spatiale se souviendra de 2014, aussi, car c’est l’année où elle a enfin décider de lancer le programme Ariane 6… L’aventure Ariane a commencé voici une quarantaine d’années, sous le regard amusé et vaguement méprisant de la Nasa, qui s’imaginait alors lancer une navette spatiale toutes les semaines vers le cosmos ; mais la dynastie des fusées européennes, Ariane 1, 2, 3, 4, 5, s’est progressivement imposée sur le marché du lancement des satellites. Avec ses lanceurs Vega, Ariane 6 et Ariane 5 pour les satellites les plus lourds, l’Europe restera probablement leader du lancement spatial sur la planète Terre quelques décennies encore… La décision de lancer le programme Ariane 6 a fait, en revanche, une victime collatérale : les Russes, qui s’étaient implantés sur le site de lancement de Kourou, avec leur Soyouz, quitteront probablement la Guyane dans moins de dix ans…
Enfin, l’espace en 2014, c’est, aussi, des échecs, parfois dramatiques… Côté vols habités, rien de neuf : les astronautes continuent à tourner en rond dans la Station spatiale internationale. La Nasa a testé pour la première fois avec succès sa nouvelle capsule Orion destinée à prendre place au sommet du SLS, le futur lanceur géant américain. Ce lanceur, d’une capacité semblable aux fameuses fusées Saturn V du programme Apollo, est construit par la Nasa sans le budget de Guerre froide des années 1960 : l’engin est donc retardé, il volera peut-être en 2018, et emportera peut-être ses premiers occupants en 2022. Vers où ? On ne sait pas. Cette fusée puissante est capable d’envoyer satellites et astronautes n’importe où dans le système solaire, mais rien n’est prévu, encore, pour des voyages au long cours, et trop coûteux le SLS (Space Launch System) ne volera probablement qu’une fois par an… Alors chaque administration repasse la patate chaude à l’administration suivante, et la Nasa multiplie les annonces plus ou moins loufoques : un jour on retourne sur la Lune, le lendemain on part coloniser Mars, puis on visite un astéroïde ou, mieux encore, on joue au ballon sur Vénus…

Le désert martien, exploré par le robot mobile américaine Curiosity. Photo JPL/Nasa.

Le désert martien, exploré par le robot mobile américaine Curiosity. Photo JPL/Nasa.

Pendant ce temps-là, les robots, projection virtuelle de l’humanité dans le ciel, explorent réellement le système solaire. Et en 2015, nous vivrons de ce point de vue une véritable apothéose… Mais avant cette année spatiale d’une richesse exceptionnelle, soldons 2014. L’année qui s’achève, avec l’explosion au décollage de la fusée Antarès en octobre, nous rappelle qu’on ne lance pas un engin – pour 90 % constitué de carburant – vers l’espace comme on prend le train ou l’avion… L’espace reste, et demeurera longtemps, une activité à haut risque. En témoigne, encore le drame survenu en octobre dernier, quand le prototype de vaisseau spatial « touristique » SpaceShipTwo s’est brisé en vol, tuant l’un de ses deux pilotes d’essai, blessant l’autre grièvement… L’aventure SpaceShipTwo, conçue par le milliardaire Richard Branson, a déjà coûté la vie à quatre personnes, après un premier accident, au sol, en 2007. Dans ses délires, qui lui assuraient une visibilité médiatique mondiale et les fonds d’investisseurs baroques, Branson envisageait une flotte de cinq ou six engins spatiaux, emportant dans les années qui viennent des dizaines de milliers de touristes pour un saut de puce à deux cent mille dollars et à cent kilomètres de la surface terrestre, en attendant plus tard de boire du champagne dans un hôtel orbital 1000 étoiles ou de faire une virée sur la Lune. Les candidats, qui patientent depuis des années, attendront encore quelques années ou décennies : SpaceShipTwo, mal né, mal motorisé, va probablement être abandonné au profit d’un autre engin, qui ne sera pas forcément américain… Pendant ce temps, au Nouveau-Mexique, les contribuables qui ont payé pour construire « Spaceport America » au profit de Virgin Galactic, la société intersidérale de Richard Branson, commencent à trouver la note salée. Leur « port spatial » installé en plein désert n’est pas près de connaître les embouteillages provoqués par des touristes en tongs, casque à la main, en partance pour la Lune, Mars et au delà…

La meilleure image de Pluton a été prise par le télescope spatial Hubble. Pluton a été découverte en 1930, en 2015, elle sera visitée par la sonde New Horizons. Photo JPL/Nasa.

La meilleure image de Pluton a été prise par le télescope spatial Hubble. Pluton a été découverte en 1930, en 2015, elle sera visitée par la sonde New Horizons. Photo JPL/Nasa.

Alors, 2015 ? Eh bien, cette année va connaître un véritable achèvement symbolique. Cet été, le système solaire entier, aura, symboliquement, été exploré par l’humanité… C’est en effet en juillet 2015 que la sonde américaine New Horizons va, après neuf ans de voyage, traverser le système de Pluton et ses satellites. Pluton, pendant près d’un siècle et avant son déclassement par l’Union astronomique internationale (UAI) a fait office de borne, de frontière – symbolique, encore une fois – du système solaire. Pluton, à six milliards de kilomètres de la Terre, était « la dernière planète du système solaire », et donc, après Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune, cette « dernière planète » va enfin être visitée par un robot spatial. Un événement historique, qui va bouleverser les astronomes, qui attendaient de découvrir cet astre lointain et mystérieux, dont on ne sait rien ou presque, depuis des décennies… Pluton, en effet, est tout à la fois lointaine et minuscule : même le télescope spatial Hubble ne perçoit quasiment rien de sa surface. Avant que New Horizons ne frôle la petite planète naine – c’est aujourd’hui son appellation officielle, à bon droit, Pluton n’est plus considérée comme une vraie planète – la sonde, en mai, prendra une première image d’une qualité supérieure à celles obtenues par Hubble, un événement, déjà.

Titan passe devant le globe et les anneaux de Saturne, sur cette image prise par la sonde Cassini. Photo Ciclops/JPL/Nasa.

Titan passe devant le globe et les anneaux de Saturne, sur cette image prise par la sonde Cassini. Photo Ciclops/JPL/Nasa.

2015, année de Pluton ? Oui, mais pas seulement : d’abord, à la fin du mois de janvier, la Nasa fêtera un anniversaire presque incroyable : cela fera onze ans que son robot Opportunity explore la planète Mars… Opportunity aura alors parcouru pratiquement 42 kilomètres dans la rocaille et le sable martiens. Sept engins, deux à la surface, cinq en orbite, continueront d’étudier la planète rouge, et l’on continuera à suivre les pérégrinations de Curiosity au pied du mont Aeolis. Beaucoup plus loin, la sonde Cassini continuera à nous transmettre des images de Saturne, ses anneaux et ses satellites. La longévité de Cassini force l’admiration : la sonde de la Nasa a quitté la Terre voici plus de dix sept ans et tourne autour de la planètes aux anneaux depuis onze ans…

L'astéroïde Vesta, photographié en 2012 par la sonde Dawn. Photo JPL/Nasa.

L’astéroïde Vesta, photographié en 2012 par la sonde Dawn. Photo JPL/Nasa.

L’année 2015 verra la Nasa, encore, réaliser un exploit inédit dans l’histoire de l’exploration spatiale : sa sonde Dawn, après s’être satellisée autour de l’astéroïde Vesta, en 2011, s’approche actuellement de la planète naine Cérès, autour de la laquelle elle se satellisera au mois de mars, nous offrant probablement des images étonnantes de ce corps céleste, mi astéroïde, mi planète.
Enfin, nous allons continuer à suivre, tout au long de l’année, la mission Rosetta, qui pourrait nous réserver quelques belles surprises. En effet, en s’approchant du Soleil, la comète Churyumov-Gerasimenko va devenir de plus en plus active, la sonde, en orbite autour de la comète va prendre des images inédites, probablement parmi les plus belles de l’histoire de la conquête spatiale.
2015, l’année où le système solaire entier aura été visité par l’humanité.
Serge Brunier

Les yeux clairs sont-ils plus sensibles à la lumière ?

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Yeux clairs (Ph. Rémi via Flickr CC BY 2.0)

Yeux clairs (Ph. Rémi via Flickr CC BY 2.0)

C’est une légende. Les yeux bleus ou verts n’ont pas de sensibilité particulière à la lumière. Certes, c’est bien l’iris, siège de la couleur des yeux, qui protège la rétine contre un excès de rayons lumineux : en se contactant et en se dilatant, il commande l’ouverture de la pupille et par là, transforme l’œil en chambre noire.

Il est vrai que les iris clairs contiennent moins de pigments que les iris foncés et absorbent donc moins de rayons lumineux… mais seulement en surface ! Car sous les pigments colorés se cache une seconde couche plus profonde qui, elle, est parfaitement opaque quelle que soit la couleur des yeux.

Avoir des yeux clairs n’a “aucun impact visuel”

D’ailleurs, nombre d’études ont été menées pour évaluer si les personnes aux yeux clairs étaient plus sujettes à certaines maladies comme par exemple, la dégénérescence maculaire (l’altération du centre de la rétine) et aucune corrélation n’a pu être établie. Seule l’absence totale de pigments dans les deux couches de l’iris (comme dans les cas extrêmes d’albinisme) provoque des troubles de la vision.

“On pense que la couleur des yeux est simplement cosmétique, conclut Jean-Antoine Bernard, directeur scientifique de la société française d’ophtalmologie. Elle n’a pas plus d’impact sur la vision que la couleur des plumes sur les performances aériennes des oiseaux !”

M.F.

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Vision, les nouveaux miracles de la médecine – S&V n°  1156 – 2014 – Dans tous les pays du monde – en particulier en France – les pathologies de la vue explosent. Heureusement, les techniques médicales pour traiter ces maladies ont fait un saut qualitatif ces dernières années : greffe de cellules, implants bioniques, thérapie génique…

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  • Ils ont trouvé un moyen pour rendre la vue – S&V n°     1115 – 2010 – La rétinite pigmentaire, maladie génétique qui rend progressivement aveugle, touche 1 personne sur 4 000. Or, des neurobiologistes ont réussi à réactiver les cellules lésées par la maladie… chez des souris. Mais cette prouesse donne de l’espoir aux malades.

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Pourquoi seules les ondes radio passent-elles les murs ?

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Contrairement à d'autres ondes électromagnétiques, les ondes radio traversent les obstacles (Ph. Emily Mills via Flickr CC BY 2.0)

Contrairement à d’autres ondes électromagnétiques, les ondes radio traversent les obstacles (Ph. Emily Mills via Flickr CC BY 2.0)

En effet, les ondes radio traversent les murs et pas les ondes lumineuses. Et pourtant, il s’agit d’ondes électromagnétiques, tout comme les rayons X, ultraviolets ou infrarouges. Elles sont l’association d’un champ électrique et d’un champ magnétique, variant à une certaine fréquence mesurée en hertz (Hz) (nombre d’oscillations par seconde). Et certes, chacun sait que la lumière, toute onde électromagnétique qu’elle soit, ne traverse pas les murs… Or, elle devrait, puisque les ondes radio, elles, le peuvent.

En fait tout est question de fréquence. Car, en fonction de leur fréquence, les ondes sont plus ou moins stoppées par la matière qu’elles rencontrent. “Lorsqu’une onde électromagnétique arrive sur un mur, une partie de l’onde peut soit être réfléchie ou diffractée, soit le traverser sans peine suivant la fréquence de l’onde et les caractéristiques électriques du mur”, explique Guillaume Andrieu, chercheur dans le département des Ondes et systèmes associés à la faculté des sciences et techniques de Limoges. Les atomes du mur sont formés d’un noyau autour duquel gravitent des électrons qui peuvent se mettre en mouvement au passage d’une onde électromagnétique… Des électrons qui ont tendance à vibrer à des fréquences bien précises qui dépendent des propriétés du matériau.

C’est une question de fréquence de l’onde

Or, plus une onde a une fréquence proche de celle de l’électron rencontré, plus elle interagit avec lui. La lumière a pile la bonne fréquence (entre 0,4 et 0,8.1014 Hz) pour mettre en mouvement les électrons d’un mur. Au contact de la surface, elle perd son énergie et les électrons, forts de l’énergie de l’onde, émettent à leur tour une onde électromagnétique dans toutes les directions. L’onde initiale est “réfléchie” et “réfractée”. Les électrons du verre, eux, ne s’agitent qu’à des fréquences supérieures à 0,8.1014 Hz, lorsqu’ils rencontrent des rayons ultraviolets : nous voyons à travers le verre… et nous ne bronzons pas en voiture.

Mais les ondes radio ou téléphoniques ont une fréquence 10 000 fois inférieure à celles la lumière visible… bien éloignée de la fréquence des électrons des matériaux de construction. C’est à cause de cette lenteur d’ondulation que l’onde radio ne transfère que très peu d’énergie aux électrons et en conserve suffisamment pour traverser le mur… Sauf si la construction est en béton armé. Car le métal ne laisse passer aucune onde électromagnétique : il contient des électrons libres, non liés à un noyau, plus mobiles et susceptibles d’absorber l’énergie des ondes. Assez en tout cas pour que l’armature métallique des tunnels du métro brouille le signal de nos portables…

L.V.

 

> Lire également dans le site des Grandes Archives de Science & Vie :

  • Ondes, les dessous d’une interminable polémique – S&V n°1110 – 2010 – Les ondes radio peuvent traverser la matière. C’est une chance pour nos communications… mais elles peuvent aussi traverser notre boîte crânienne. Est-ce un risque pour notre santé ? La polémique est encore vive.

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  • Ondes électromagnétiques et exposition – S&V n°1096 – 2009 – Smartphones, wi-fi… Depuis une dizaine d’années, les ondes radio nous baignent littéralement. Et depuis les premières études sur les liens possibles avec le développement de tumeurs cérébrales, nombre d’utilisateurs s’interrogent sur leur exposition à ces ondes. Quelques données sur la question…

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