Certains sont-ils hypersensibles aux ondes électromagnétiques ?

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Sommes-nous attaqués par les ondes électromagnétiques ? (Ph. librement inspirée du "Cri" d'Edward Munch, par Arkangel via Flickr CC BY 2.0)

Sommes-nous attaqués par les ondes électromagnétiques ? (Ph. librement inspirée du « Cri » d’Edvard Munch, par Arkangel via Flickr CC BY 2.0)

Il n’y a pas encore de réponse bien établie à cette question. Il n’est même pas sûr que les personnes qui s’en plaignent soient réellement sensibles aux ondes électromagnétiques. Certes, ces personnes et les associations qui les défendent affirment que les symptômes dont elles souffrent (rougeurs, picotements, fatigue, difficultés de concentration, palpitations cardiaques, troubles digestifs…) sont dus aux ondes électromagnétiques émises par les téléphones portables, les antennes relais, le wi-fi, les lignes haute tension et pratiquement tous les appareils émetteurs. Mais nombre de scientifiques (et les opérateurs de téléphonie) soutiennent que les ondes n’y sont pour rien, attribuant surtout à ­cette “électrohypersensibilité” (EHS) une origine psychologique. Lever le voile sur les vraies causes de la maladie est donc plus complexe qu’il n’y paraît. Techniquement et socialement.

Pas de preuves de l’existence d’une sensibilité aux ondes

A commencer par la caractérisation même de la maladie. Cette “hypersensibilité électromagnétique”, décrite pour la première fois en Suède au début des années 1980, touche de 1,5 à 13 % de la population française, selon les symptômes et les degrés de sévérité pris en compte. A ce jour, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et les autorités médicales françaises reconnaissent officiellement les souffrances des patients, mais pas le lien avec une exposition aux ondes électro­magnétiques.

Pourtant, l’hypothèse selon laquelle certains champs magnétiques de grande intensité (lignes à haute tension) puissent perturber notre organisme est acceptée par de nombreux chercheurs. Sauf que “depuis 2005, aucun auteur n’a apporté la preuve d’une relation de causalité entre l’exposition et l’EHS”, souligne le rapport 2009 de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset), “Expertise ­collective relative aux radiofréquences”, le plus ­récent sur le sujet.

L’OMS et l’Afsset s’appuient sur des dizaines d’expériences réalisées ces deux dernières décennies, qui consistent à recueillir les troubles ressentis par des personnes atteintes lorsqu’elles sont mises en présence d’un dispositif émetteur allumé ou éteint sans que l’expérimentateur et la personne testée sachent s’il est en marche ou non (étude en “double aveugle”). Or, jusqu’ici, aucune étude sérieuse n’a montré que les “électrosensibles” sont capables de percevoir la présence d’ondes électromagnétiques. Toutes ont donc échoué à établir un lien entre exposition et troubles.

Les rares études qui suggèrent le contraire présentent toutes des faiblesses méthodologiques qui les discréditent. “La subjectivité, la complexité et la non-­spécificité des symptômes cliniques, et la ­quasi-négativité des études de provocation conduisent légitimement à se demander si l’EHS n’est pas un trouble psychosomatique”, conclut l’Afsset.

Pas d’outils de diagnostic

Mais voilà, l’absence de preuve n’est pas la preuve de l’absence… “D’autres études sont nécessaires”, selon le neurologue ­Jean-Pierre Marc-Vergnes, co-auteur du rapport. Car il n’est pas exclu que l’EHS découle de plusieurs facteurs biologiques, psychologiques ou psychosociaux simultanés. Il faudrait donc examiner minutieusement diverses causes possibles. Sachant qu’il reste aussi des hypothèses à creuser, “comme la possibilité d’une réactivité plus élevée du système nerveux central des électrosensibles”, précise le neurologue.

Pour réaliser ce type ­d’étude, il faudra surmonter deux obstacles. “Mettre au point un système permettant de mieux analyser les caractéristiques des ondes électromagnétiques susceptibles d’avoir des effets sanitaires autres qu’un échauffement des tissus vivants, détaille Jean-Pierre Marc-Vergnes. Et développer un outil de diagnostic objectif pour mieux distinguer les personnes réellement électrosensibles…” Le seul diagnostic disponible à ce jour étant l’affirmation par les patients eux-mêmes de leur électrosensibilité… Enfin, à toutes ces difficultés s’ajoute le manque de financement. D’autant plus cruel que pour les opérateurs et les autorités de santé, la preuve de l’innocuité semble faite.

Voilà pourquoi les médecins préfèrent axer leurs efforts sur le développement d’un protocole de prise en charge spécialisée des patients. Dans ce but, a été lancée en février une vaste étude pilotée par l’hôpital Cochin, à Paris, visant à suivre pendant un an des électrosensibles à travers 24 centres. Une étude critiquée par les associations qui préféreraient qu’on se concentre sur l’analyse des causes.

 PS : deux autres syndromes tout aussi énigmatiques

Tout aussi mystérieuse que l’électrohypersensibilité (EHS) est l’intolérance aux odeurs chimiques. Elle se manifeste par des maux de tête, nausées ou vertiges chez des personnes exposées de façon chronique à de faibles concentrations de produits chimiques non toxiques. L’OMS propose de l’associer à l’EHS dans la rubrique des intolérances environnementales “idiopathiques” (de cause inconnue).

Autre syndrome aussi énigmatique : le syndrome du bâtiment malsain (SBM), caractérisé par une irritation de la peau, du nez, de la gorge, des yeux, des maux de tête, etc. Lui aussi reste médicalement inexpliqué. A ce jour, les scientifiques soupçonnent les contaminants chimiques et biologiques de l’air urbain et/ou des matériaux du bâtiment lui-même. Mais sans certitude.

K.B.

 

> Lire également dans le site des Grandes Archives de Science & Vie :

  • Ondes, les dessous d’une interminable polémique – S&V n°1110 – 2010 – Les ondes radio peuvent traverser la matière. C’est une chance pour nos communications… mais elles peuvent aussi traverser notre boîte crânienne. Est-ce un risque pour notre santé ? La polémique est encore vive.

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  • Le point sur les antennes-relais – S&V n°1102 – 2009 – En l’absence de preuves directes d’un quelconque phénomène d’hypersensibilité aux ondes électromagnétiques, il est important de faire le point sur la technologie en jeu dans ce débat. C’est au moins un bon antidote contre le risque d’hallucination collective.

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  • Ondes électromagnétiques et exposition – S&V n°1096 – 2009 – Smartphones, wi-fi… Depuis une dizaine d’années, les ondes radio nous baignent littéralement. Et depuis les premières études sur les liens possibles avec le développement de tumeurs cérébrales, nombre d’utilisateurs s’interrogent sur leur exposition à ces ondes. Quelques données sur la question…

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Pourquoi le vent se lève-t-il juste avant la pluie ?

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Le vent qui précède la pluie est engendré par le phénomène d'évaporation-condensation (Ph. Jeanne Menj via Flickr CC BY 2.0)

Le vent qui précède la pluie est engendré par le phénomène d’évaporation-condensation (Ph. Jeanne Menj via Flickr CC BY 2.0)

Parce qu’il pleut déjà… en altitude ! Cette rafale d’air frais, qui soulève les poussières et fait bruisser les feuilles en même temps que le ciel s’assombrit, naît souvent à la fin d’une journée estivale, sous le nuage le plus dense et le plus épais, doté du plus grand développement vertical du bestiaire météorologique : le cumulonimbus. Lorsque l’air humide des basses couches de l’atmosphère, chauffé par le soleil, se dilate, il entame une irrésistible ascension. En altitude, il rencontre des masses d’air froid et se condense, donnant naissance à ces fameux cumulonimbus. Au centre de ce nuage, de minuscules gouttelettes d’eau, à force de grossir, nourries par l’humidité ambiante, finissent par chuter sous l’effet de la gravité : il pleut.

Et cette machine à produire de la pluie s’auto-entretient tant qu’elle trouve de l’air chaud et humide pour l’alimenter… “ça, c’est la théorie, mais dans la réalité, les courants d’air chaud et d’air froid au sein du cumulonimbus sont très désordonnés, précise ­Etienne Kapikian, prévisionniste à Météo France. Au-delà de ces grands courants que l’on a l’habitude de schématiser, il existe une multitude de petits phénomènes locaux.” Ainsi, des masses d’air chaud et humide peuvent remonter en tourbillonnant comme des bulles dans une casserole d’eau bouillante, fendant les courants froids ; ou bien des filets d’air chaud et sec ne cessent de s’infiltrer par la base et les bords du nuage…

Ce vent peut dépasser 100 km/h

Dans ce grand mélange turbulent, les gouttes ont la vie dure : elles peuvent se scinder de nouveau en une multitude de gouttelettes à cause de la pression de l’air et stopper leur chute, voire remonter… ou rencontrer un courant d’air chaud et sec sur leur trajet. Dans ce cas, la différence de température et d’humidité est trop grande, et les gouttes ne résistent pas : elles s’évaporent. C’est ce phénomène qui est à l’origine des rafales qui naissent sous les nuages.

Info

Car le changement d’état de liquide à gaz nécessite de l’énergie que les physiciens appellent “chaleur latente de vaporisation”. Les gouttes prennent cette énergie dans l’air environnant, qui se refroidit localement. Un petit volume d’air frais, donc plus dense, se met alors à descendre rapidement jusqu’au sol, où il finit par s’étaler, formant ce qu’on appelle un front de rafale et une multitude de tourbillons. : un vent qui peut dépasser les 100 km/h et se propager sur quelques kilomètres. Et comme ce vent avance avec le nuage, il laisse juste le temps de trouver un abri avant l’arrivée de la pluie.

M.F.

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Ils ont résolu l’énigme des gouttes de pluie – S&V n°1104 – 2009 – C’est un mystère minuscule mais qui titillait la curiosité des savants depuis 1904 : la taille des gouttes d’eau. Désormais l’on sait pourquoi il y a peu de gouttes qui dépassent quelques millimètres de diamètre en arrivant au sol.

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  • Nuages : la physique ne prédit toujours pas la pluie – S&V n°1026 – 2003 – Les météorologistes savent prévoir globalement les risques d’averses grâce à des calculs statistiques, mais ils ne disposent pas de modèle physique leur permettant de dire avec exactitude si la vapeur en suspension dans un nuage va se condenser suffisamment pour être précipité vers le sol, car les mécanismes en jeu sont aussi complexes que microscopiques…

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  • L’homme peut-il faire la pluie et beau temps ? – S&V n°1109 – 2010 – Depuis les années 1950, la science explore la possibilité de contrôler la météo en provoquant la formation de nuages et de pluie ou, au contraire, en l’évitant. Si quelques techniques existent déjà, elles restent très aléatoires.

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