A quelle heure l’éclipse du 20 mars sera-t-elle visible chez vous ?

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Une éclipse partielle telle qu'elle peut être observée à travers les lunettes spéciales. Ici, une éclipse qui a eu lieu le 13 novembre 2012 en Australie. / Ph. NASA Goddard space flight - CC BY 2.0

Une éclipse partielle telle qu’elle peut être observée à travers des lunettes spéciales (ici le 13 novembre 2012 en Australie). / Ph. NASA Goddard space flight – CC BY 2.0

 

Dans dix jours, le 20 mars, le Soleil a rendez-vous avec la Lune. Notre satellite passera pile devant notre étoile, projetant son ombre sur la Terre au niveau de l’hémisphère nord. Seule une poignée d’heureux Terriens pourront observer une éclipse totale : la Lune ne couvrira complètement le Soleil que sur une bande de 5850 km courant du Groenland au Pôle nord. Résultat, les chanceux habitants des îles Féroé et de l’archipel de Svalbard profiteront de 2 minutes et 46,8 secondes d’obscurité totale.

Mais pour le reste des européens, ainsi que pour les habitants de l’Afrique du nord, une belle éclipse partielle sera visible dans la matinée. En France, elle ira jusqu’à couvrir 82,5 % de la surface du Soleil dans la Manche, à 10h26 exactement. Moins chanceux, les habitants d’Ajaccio ne verront qu’une éclipse à 58 %, à la même heure.

 

Voici la surface de la Terre concernée par l'éclipse du soleil le 20 mars. L'heure est indiquée en temps universel : il faut y ajouter 1 h pour connaître l'heure locale en Europe. / Ph. © IMCCE - Observatoire de Paris

Voici la surface de la Terre concernée par l’éclipse de soleil du 20 mars. NOTA BENE : L’heure est indiquée en temps universel, il faut donc y ajouter 1 h pour connaître l’heure locale en Europe. / Ph. © IMCCE – Observatoire de Paris

Trouvez l’heure de l’éclipse dans votre commune

Vous ne voulez pas rater ce spectacle ? Vous avez bien raison : les prochaines éclipses partielles visibles en France sont prévues pour le 25 octobre 2022 (couverture de 20 %) et le 2 août 2027 (couverture de 70 %, totale en Afrique). La dernière éclipse totale date, elle, de 1999, et la prochaine aura lieu… le 3 septembre 2081 !

Alors, comment savoir à quelle heure la Lune obscurcira le Soleil chez vous ? Comme l’a calculé l’Institut de mécanique céleste et et du calcul des éphémérides, situé à l’Observatoire de Paris, l’ombre de la Lune, s’étirant sur 200 à 460 kilomètres environ, survolera l’Hexagone d’Ouest en Est, entre 9h11 (sur Bayonne) et 11h47 (sur Strasbourg). En somme, la Lune grignotera progressivement le Soleil durant une heure environ, avant de se retirer durant une autre heure (voir ci-dessous).

 

Voici l'heure où l'éclipse du soleil sera à son comble le 20 mars dans différentes villes de France, ainsi que le pourcentage de la surface du Soleil qui sera couverte. L'heure est indiquée en temps universel : il faut y ajouter 1 h pour connaître l'heure locale. / Ph. © IMCCE - Observatoire de Paris

Voici l’heure où l’éclipse sera à son comble le 20 mars dans différentes villes de France, ainsi que le pourcentage de la surface du Soleil qui sera couverte. NOTA BENE : L’heure est indiquée en temps universel, il faut donc y ajouter 1 h pour connaître l’heure locale. / Ph. © IMCCE – Observatoire de Paris

 

Pour savoir précisément à quelle heure vous pourrez observer l’éclipse dans votre commune, vous pouvez consulter la carte spécialement conçue par la NASA. En positionnant le curseur sur le point de votre choix, vous y connaîtrez l’heure d’arrivée de l’ombre lunaire, l’heure où l’éclipse sera à son comble, puis l’heure où le Soleil sera à nouveau découvert. Attention, cependant : les heures sont indiquées en temps universel (UTC). Il faut donc y ajouter une heure pour avoir l’heure locale en France.

Avant de vous adonner à l’observation du ciel, une mise en garde : prenez soin de vous munir de lunettes spéciales. De simples lunettes de soleil ne permettent pas de protéger les yeux des radiations, risquant d’abîmer irrémédiablement votre rétine. Vous trouverez une paire de lunettes noires équipées d’un filtre qui les rend parfaitement sûres dans le numéro de mars de Science&Vie (n°1170).

Fiorenza Gracci

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Eclipse de soleil du 11 août 99 – S&V n°985 – 1999. Revivez en photos l’éclipse totale de Soleil du 11 août 1999 qui avait plongé un grande partie de la France dans une nuit étoilée en plein jour.

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  • La Terre a deux lunes ! – S&V n°1136 – 2012. Mars à deux lunes, Phobos et Déimos, Jupiter en a au moins 67… Jalouse peut-être de cette inflation, la Terre s’en est découverte une deuxième : un astéroïde géocroiseur qu’elle a capturée dans son champs gravitationnel.

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  • On a retrouvé la Lune ! – S&V n°1154 – 2013. Si proche, si loin… La Lune nous accompagne depuis 4,56 milliards d’années, et toutes les civilisations l’ont adorée, craint et étudiée. Mais malgré les moyens techniques dont nous disposons aujourd’hui et les visites in situ, elle conserve des secrets… qu’on perce progressivement.

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  • Lune : son cœur a été mis à nu – S&V n°1123 – 2011. Parmi les inconnues entourant la Lune, son noyau : est-il solide et inerte ? Liquide et fluctuant ? Ce n’est qu’en 2011 que le profil en coupe de notre satellite a pu être complété : une graine solide en fer, un noyau externe liquide et une couche de roches fondues…

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Solar Impulse, le premier avion 100 % solaire, débute son tour du monde

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First Test Flight of Solar Impulse 2 in Abu Dhabi, United Arab Emirates

Le premier vol de test de Solar Impulse 2 dans le ciel au-dessus d’Abou Dhabi / Ph. © Solar Impulse

Telle une grande cigogne de 72 mètres d’envergure, Solar Impulse s’est élevé dans le ciel au-dessus d’Abou Dhabi (Emirats Arabes Unis) ce lundi matin à 7h12. Sans consommer une goutte de carburant ni émettre un gramme de CO2, il va parcourir les 400 kilomètres qui le séparent de Mascarate (sultanat d’Oman). Ce sera la première étape d’un tour du monde en 25 jours, qui s’égrènera en 13 étapes autour des océans Indien, Pacifique et ensuite Atlantique.

Si, au terme des 35 000 kilomètres de parcours, l’avion et son pilote reviennent indemnes à Abou Dhabi, ce sera la consécration ! La preuve qu’avec les technologies actuelles, il est possible de réaliser des vols habités alimentés, nuit et jour, uniquement par l’énergie solaire.

> Suivre le parcours de Solar Impulse sur le site www.solarimpulse.com

Déjà, en 2010, une première preuve avait été donnée par Solar Impulse dans sa première version, ultra-légère : 61 mètres d’envergure pour 1,6 tonne au total contre 2,3 t actuellement, et quatre moteurs de 10 chevaux contre 4 x 17,5 dans la version 2. L’avion électro-solaire avait réussi à voler au-dessus de la Suisse pendant 26 heures avec la seule énergie absorbée par ses ailes, tapissées de panneaux solaires, et stockée dans ses 400 kilogrammes de batterie. Un exploit pour la société des ingénieurs-pilotes suisses André Borschberg et Bertrand Piccard qui l’a mis au point en quatre ans, entièrement consacrés à alléger le plus possible l’engin, de la nacelle à la pointe des ailes.

Pour y parvenir, le plus grand soin a été accordé aux matériaux de fabrication : l’aile est composée d’un sandwich de carton en nid d’abeilles enduit de cire et de feuilles de fibres de carbone, recouvertes de film flexible ; les panneaux solaires choisis sont ultra fins tout en garantissant un rendement de plus de 20 % ; enfin, le cockpit est en mousse et à l’aménagement optimisé pour les besoins du pilote, qui, lors des étapes les plus longues du tour du monde, pourra y séjourner jusqu’à 5 jours d’affilée ! Ce sera le cas pour les 8500 kilomètres reliant Nanjing (en Chine) et Hawaï.

Deuxième vol d’essai dans le ciel d’Abou Dhabi début mars. / © Solar Impulse.

Une famille d’explorateurs

Après s’être entraînés lors du premier vol intercontinental de Solar Impulse en 2012, de l’Europe à l’Afrique, les deux pilotes seront aux commandes à tour de rôle le long des étapes du tour du monde qui débute à présent.

Il faudra user de patience et d’une grande capacité de contrôle pour piloter cet avion si particulier : non pas car il vole vite (il devrait voler à 70 km/h en moyenne), mais du fait de sa mauvaise maniabilité. Sa légèreté et sa grande envergure lui confèrent en effet un aérodynamisme particulier, qui fait qu’il ne tolère pas que ses ailes soient inclinées de plus de 5 °. Ainsi, un centre de contrôle établi à Monaco et un ordinateur de bord s’occuperont de le diriger. La plupart du temps, l’avion sera maintenu à une altitude propice de plus de 8000 mètres, où les turbulences sont rares et le soleil, abondant.

Pionnier né, Bertrand Piccard est issu d’une famille d’explorateurs aussi connus que son grand-père Auguste Piccard, auteur des premiers vol stratosphériques, de 1930 à 1932, à bord de ballons qu’il avait conçus (et source d’inspiration pour le personnage du Professeur Tournesol des bandes dessinées de Tintin !) et que son père, Jacques Piccard, qui plongea, le premier avec l’américain Don Walsh, tout au fond de la fosse des Mariannes en 1960 à bord du bathyscafe Trieste. Lui-même est l’auteur du premier tour du monde en ballon sans escale, en 1999.

Fiorenza Gracci

 

> Lire aussi dans les Grandes Archives de S&V :

  • Solaire, une alternative au nucléaire ? – S&V n°1125. Après l’accident de Fukushima, les regards se tournent vers le solaire, énergie renouvelable où les progrès avancent à pas de géant : mais peut-elle aspirer à alimenter en énergie tout un pays ?

S&v 1125 - Solaire alternative

S&V 1116 - Solar impulse a volé

S&V 1101 - Solar impulse 1

S&V 1108 - innovations

 

Vaut-il mieux manger cru ou cuit ?

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Quels sont les avantages et inconvénients d'un régime à base d'aliments crus ? (Ph.  Evan Blaser via Flickr CC BY 2.0)

Quels sont les avantages et inconvénients d’un régime à base d’aliments crus ? (Ph. Evan Blaser via Flickr CC BY 2.0)

La “raw food diet” (“régime à base de nourriture crue”), a beau être une tendance actuelle, son origine remonte à plus d’un siècle et demi. Aux États-Unis, Sylvester Graham, puis, en Suisse Maximilien Bircher-Benner – l’inventeur du müesli – mettent au point des régimes sans cuisson. Dans les années 1970-1980, la “raw food” refait son apparition aux États-Unis, remise au goût du jour par les adeptes d’une nourriture plus saine et plus proche de nos origines. Leurs arguments ? D’abord, le fait que la cuisson détruit les vitamines des fruits et légumes.

“ Si certaines vitamines sont effectivement thermolabiles, la plupart sont hydrosolubles. Lorsqu’on cuit un aliment dans l’eau bouillante, ses vitamines sont éliminées dans l’eau de cuisson. Mais la cuisson à la vapeur en préserve une grande partie ”, explique Irène Margaritis, de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).

Les avantages du « manger cru »

Pour les adeptes de la “raw food”, la cuisson, même à la vapeur, détruirait également les enzymes des aliments, qui leur permettraient de s’auto-digérer, facilitant ainsi la tâche de notre propre organisme. “ Notre organisme possède les enzymes nécessaires à la digestion et, de ce fait, rien ne s’oppose à ce qu’on mange des aliments cuits ”, rétorque Irène Margaritis.

Alors bien sûr, en bannissant les produits transformés saturés en sucres, graisses et sel pour faire la part belle aux fruits et légumes, la “raw food diet” peut lutter contre l’épidémie d’obésité mondiale. De façon plus étonnante, quelques rares études ont montré qu’un régime à base de nourriture crue pouvait améliorer la santé de patients souffrant de fibromyalgie.

Les inconvénients du « manger cru »

Oui, mais manger cru n’est pas non plus sans risque. D’abord, parce qu’il conduit à éliminer certains aliments qui ne peuvent être mangés que cuits. Adieu pommes de terre, riz et autres céréales. “ Un régime cru exclusif conduit forcément à un déséquilibre nutritionnel ”, indique Irène Margaritis. Ensuite parce que, comme le rappelle Jean Dupouy-Camet, professeur de parasitologie à l’hôpital Cochin de Paris, “ la cuisson constitue la meilleure prophylaxie contre les virus, bactéries et parasites que peuvent contenir les aliments ”.

En 2011, la bactérie E. coli retrouvée dans des graines germées faisait plus d’une trentaine de morts à travers l’Europe. Dans les années 1980-1990, ce sont des épidémies de trichinellose liées à l’ingestion de viande de cheval crue ou mal cuite qui avaient défrayé la chronique. En raison du risque de toxoplasmose congénitale, on conseille aux femmes enceintes non protégées contre le parasite de ne pas consommer de viande crue. Les aliments crus sont également déconseillés aux personnes immunodéprimées.

C.H.

  • Alimentation : enquête sur les nouveaux interdits – S&V n°1158 – 2014. Avec les progrès de la recherche médicale, de plus en plus d’études démontrent les bienfaits ou les inconvénients d’aliments pour lesquels jusqu’à récemment on ne se posait pas de questions. Un point sur ces nouveaux dogmes et interdits alimentaires.

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  • Cinq sports sur ordonnance – S&V n°1152 – 2013. Manger sain n’est pas, loin s’en faut, la seule façon de garder la forme. Toutes les études montrent que le sport est l’un des facteurs essentiels de l’amélioration de la santé.

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  • Graisses, le retour en grâce ? – S&V n°1125 – 2011. Si la lutte contre l’ingestion excessive de graisses est de mise dans une société d’opulence où croient les risques d’obésité, tout n’est pas mauvais dans la graisse…

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Désormais, l’intelligence artificielle apprend toute seule à jouer

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Capture d'écan de la vidéo montrant le système DQN en train de jouer à Space Invaders (Video courtesy of Atari Inc. and Mnih et al. ).

Capture d’écan de la vidéo montrant le système DQN en train de jouer à Space Invaders (Video courtesy of Atari Inc. and Mnih et al. ).

Un nouveau système d’intelligence artificielle est capable d’égaler voire de battre les meilleurs joueurs dans une cinquantaine de jeux d’arcade (jeu sur écran) grâce à des stratégies originales. Ce résultat, publié par des chercheurs de la firme Google dans la revue Nature, donne un nouvel aperçu du niveau atteint par l’IA depuis quelques années, et pourrait trouver des applications plus utiles dans la vie quotidienne.

Le système est ce qu’on appelle un « réseau neuronal profond à apprentissage par renforcement« , en réalité constitué de deux technologies IA distinctes : celle du réseau de neurones profonds (ou Deep Neural Network, DNN) et celle de l’apprentissage par renforcement (Reinforcement Learning ou Q-Learning). D’où son nom pas sexy : DQN. Mais c’est un sacré joueur : sur un total de 49 jeux testés, il est meilleur qu’un joueur humain expérimenté dans 20 d’entre eux (parfois plus de dix fois meilleur)… mais peut aussi se faire battre à plate couture dans 20 autres – pour les 9 restants, il est d’une force comparable à nous (voir graphique ci-dessous).

Une intelligence artificielle très branchée années 1980

Son secret ? Un apprentissage de deux semaines (pour l’ensemble des 49 jeux) durant lequel DQN découvre le jeu, s’y essaye et met peu à peu en place ses propres stratégies… à l’instar de ce que nous faisons habituellement. Bien sûr, DQN est placé devant l’écran et peut contrôler la manette, mais il n’a pas accès au logiciel du jeu – ce serait trop facile ! Bref, il apprend réellement. Mais il ne s’agit pas de jeux récents du genre Grand Theft Auto (GTA) dernière version, DQN gagne aux jeux d’arcade des années 1980 ou 1990, tels Space Invaders, Breakout (le mur qu’on détruit par une balle), Pong, Kung-Fu Master, etc.

Classement de DQN par rapport à d'autres systèmes IA de jeu (barres grises) et par rapport aux humains (pourcentages). Crédit : Mnih et al. “Human-level control through deep reinforcement learning”, Nature 26 Feb. 2015

Classement de DQN par rapport à d’autres systèmes IA de jeu (barres grises) et par rapport aux humains (pourcentages). Crédit : Mnih et al. “Human-level control through deep reinforcement learning”, Nature 26 Feb. 2015

Des jeux assez simples donc mais qui nécessitent quand même de mettre en place une stratégie, du moins si l’on veut se mesurer aux meilleurs humains. Par exemple sur Breakout, DQN a compris qu’en creusant un « tunnel » dans le mur, il fait passer la balle de l’autre coté, ce qui lui assure que celle-ci va le détruire en grande partie grâce à de multiples rebonds entre le mur et le haut de l’écran (voir vidéo).

Vidéo de DQN en train de jouer à Breakout (Video courtesy of Atari Inc. and Mnih et al. “Human-level control through deep reinforcement learning”, Nature 26 Feb. 2015)

 

Le premier intérêt d’un tel système – outre d’humilier l’adversaire humain – est son aspect innovant dans la recherche en IA : si les chercheurs connaissent bien les Réseaux profonds et les systèmes d’apprentissage automatique (Reinforcement learning), il n’y avait pas jusque-là de système efficace alliant les deux – ce que Google a pu réaliser grâce à ses ressources informatiques quasiment illimitées car de tels systèmes sollicitent énormément de calcul.

De fait Google est devenu omniprésent dans la recherche en IA en particulier lorsqu’il s’agit d’additionner plusieurs technologies déjà éprouvées individuellement : il l’a prouvé récemment en reconnaissance faciale et en reconnaissance des images. Compétence d’autant plus forte que le géant du Net a tendance à « absorber » les plus grands chercheurs du domaine (et les startup innovantes).

DQN en train de jouer à Space Invaders (Video courtesy of Atari Inc. and Mnih et al. “Human-level control through deep reinforcement learning”, Nature 26 Feb. 2015)

 

Dans le cas présent, DQN exploite la capacité des réseaux profonds à reconnaitre une image, c’est-à-dire à transformer un ensemble de signaux lumineux vus (les pixels de l’écran) en une scène cohérente (mur, balle, raquette). Ensuite, DQN exploite l’aptitude des systèmes d’apprentissage à chercher de manière libre comment améliorer sa « récompense » – ici, marquer le plus de points à l’écran (score). Ces deux types de technologies passant nécessairement par une phase d’apprentissage surveillée par un opérateur.

En termes d’applications, un tel système pourrait rendre de grands services dans la gestion automatique de taches relativement complexes et fluctuantes nécessitant des stratégies d’optimisation, comme la conduite automatique ou l’organisation logistique et industrielle.

Román Ikonicoff

 

> Lire également dans le site des Grandes Archives de Science & Vie :

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  • Robots : leur intelligence dépasse déjà la nôtre – S&V n°1166 – 2014 – Peu à peu et sans grandes vagues, l’intelligence artificielle et la robotique sont sorties de l’échec relatif des années 1980 pour finir par devenir des acteurs essentiels dans nos activités. Ils nous dépassent déjà.

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Eclipse du 20 mars : pourquoi il ne faut pas la regarder avec de simples lunettes de soleil

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Les lunettes de soleil n'arrêtent que les UV, mais pas les infrarouges (ph. John Scott via flickr C.C.2)

Les lunettes de soleil filtrent les UV, mais n’arrêtent pas les infrarouges (ph. John Scott via flickr CC BY 2.0)

Si vous sentez l’éblouissement, il est déjà trop tard… Le soleil peut avoir brûlé votre rétine irrémédiablement.

Pour observer une éclipse, qu’elle soit totale ou partielle (ce sera le cas de celle du 20 mars en France), les lunettes de soleil sont à proscrire : elles sont conçues pour protéger les yeux du rayonnement ultraviolet, mais n’arrêtent pas le rayonnement infrarouge, le plus dangereux car c’est lui qui peut brûler la rétine.

Des lunettes spéciales sont donc indispensables. Vous les trouverez auprès des clubs et associations d’astronomie, dans les magasins d’optique spécialisés… et dans le numéro de mars de Science & Vie, actuellement en kiosque.

Et pour ceux qui auraient conservé des lunettes datant de l’éclipse de 1999, mieux vaut les remplacer, car l’écran filtrant a pu être rayé ou le carton décollé de manière imperceptible, mais suffisante pour laisser passer les dangereux rayons.

La rédaction de Science & Vie.

Vie extraterrestre : elle est possible sans eau, avec seulement du méthane liquide

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Vue en coupe d'un azotosome ou vésicule cellulaire à base d'azote (Credit: James Stevenson)

Vue en coupe d’un azotosome ou vésicule cellulaire à base d’azote, qui pourrait se développer dans du méthane liquide (Credit: James Stevenson)

Un modèle informatique démontre pour la première fois qu’un milieu sans eau mais avec du méthane liquide, plongé à des températures très basses, peut voir éclore des structures similaires à celles des membranes cellulaires des organismes vivants sur Terre. Un conclusion qui, toute théorique, change néanmoins radicalement la donne sur la recherche de vie extraterrestre. En particulier, de telles membranes cellulaires, ou vésicules, pourraient se former naturellement et demeurer stables dans un environnement comme celui de Titan, une des lunes de Saturne.

Le résultat est issu d’une collaboration entre des chercheurs en ingénierie chimique, Paulette Clancy et James Stevenson, qui s’occupent des propriétés chimiques des nouveaux matériaux, et d’un astrophysicien spécialiste notamment des lunes de Saturne, Jonathan Lunine, tous les trois chercheurs à l’Université Cornell (New York).

Une membrane cellulaire stable dans du méthane liquide

Ceux-ci ont en effet construit une simulation informatique d’une membrane sans atomes d’oxygène, un des constituants essentiels des membranes cellulaires terrestres – ou liposomes – , mais contenant à la place des atomes d’azote. De fait, c’est toute la structure chimique de cette membrane qui a été pensée en accord avec les éléments chimiques présents sur Titan, dont on sait qu’il contient du méthane liquide.

Ainsi, à la place des liposomes, les chercheurs ont exhibé des « azotosomes » – un néologisme de leur crû. L’important est que ces azotosomes plongés dans un bain de méthane liquide à des températures comprises entre -161,5 °C (température d’ébullition du méthane) et -182,5 °C (sa température de fusion) présentent les mêmes propriétés physico-chimiques de souplesse, résistance et perméabilité, que les liposomes plongés dans de l’eau liquide.

Différents stades de formation d'une vésicule à base d'azote ou "azotosome" (Crédit : James Stevenson)

Différents stades de formation d’une vésicule à base d’azote ou « azotosome » (Crédit : James Stevenson)

Les outils de simulation utilisés par les chercheurs servent habituellement à tester les comportements de matériaux et de molécules virtuelles afin de déterminer si leur synthèse réelle est intéressante d’un point de vue mécanique et électronique. Leur azotosome virtuel a donc toutes les chances de correspondre à ce qu’il serait dans la réalité – une phase de synthèse de ces nouvelles structures devrait suivre ce premier pas théorique.

Certes, la possibilité que de telles vésicules se forment spontanément dans la nature (par les loi de la chimie) n’implique pas directement qu’une cellule vivante puisse également se former dans un milieu comme celui de Titan : l’existence de l’enveloppe cellulaire est une condition nécessaire mais non suffisante à la vie. En effet, il faut aussi que le volume intérieur de la vésicule puisse être le siège d’autres phénomènes chimiques conduisant à la mise en place d’un métabolisme autonome et de la capacité à se répliquer.

Titan dans la ligne de mire

Néanmoins, si l’article des chercheurs est intéressant, c’est que pour la première fois, il permet de dépasser l’hypothèse fondamentale de la recherche exobiologique basée sur l’idée qu’il faut un milieu riche en eau liquide. Une hypothèse « géo-centrée » qui oriente la recherche exobiologique exclusivement sur des planètes (ou lunes) situées dans la « zone habitable » de leur étoile – c’est-à-dire la zone où de l’eau peut se trouver à l’état liquide. Ce modèle ouvre dès lors la voie à une recherche plus large sur la vie, autant du point de vue astronomique que biologique. Et remet Titan dans la ligne de mire de futures missions d’étude.

Román Ikonicoff

 

> Lire également dans les Grandes Archives de S&V :

  • Vie extraterrestre : l’espoir – S&V n°1167 – 2014. Il y a Titan, et il y a Europe, une lune de Jupiter totalement gelée en surface mais avec un océan intérieur alimenté en chaleur par le noyau de la lune. Bref, le Système solaire est un terrain d’exploration pour les exobiologistes bien plus accessible que les exoplanètes lointaines.

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  • Ils ont créé des êtres presque vivants – S&V n°1157 – 2014 – C’est un fait : il y a 3,7 milliards d’années des organismes vivants ont commencé à émerger de l’inerte. Cela ne s’est pas fait du jour au lendemain : des dizaines de millions d’années durant lesquelles des formes intermédiaires, ni vivantes ni inertes, ont crû dans les océans. Les scientifiques tentent de comprendre et reproduire cette étape en laboratoire.

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  • Kepler 186f : la terre a une jumelle – S&V n°1161 – 2014 – Depuis la mise en service du télescope spatial Kepler par la Nasa en 2009, les surprises n’ont pas manqué : plusieurs exoplanètes similaires à la Terre ont été détectées, dont l’exoplanète Kepler-186f, découverte en 2013, qui semble réunir les conditions propices à la vie. Sera-t-elle parmi les nouvelles nommées ?

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Une Croix d’Einstein pour célébrer l’anniversaire de la relativité

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C'est au centre exact de cette image que se trouve la Croix d'Einstein découverte grâce au télescope spatial Hubble. L'amas de galaxies MACS J1149.5+2223 se trouve à 5 milliards d'années-lumière de la Terre. La supernova dessinant les quatre images de la Croix d'Einstein se situe à  9.3 milliards d'années-lumière. Photo Nasa/STSCI.

C’est au centre exact de cette image que se trouve la Croix d’Einstein découverte grâce au télescope spatial Hubble. L’amas de galaxies MACS J1149.5+2223 se trouve à 5 milliards d’années-lumière de la Terre. La supernova dessinant les quatre images de la Croix d’Einstein se situe à 9.3 milliards d’années-lumière. Photo Nasa/STSCI.

Un siècle après la publication par Albert Einstein de sa théorie de la relativité générale, astronomes et physiciens continuent à explorer ses paysages abstraits, magnifiques, magiques, presque. Et, pour célébrer le premier centenaire de la relativité, le cosmos a rendu un bel hommage au grand physicien. C’est un astronome américain, Patrick Kelly, qui a fait la découverte, en étudiant les images prises par le télescope spatial Hubble de l’amas de galaxies MACS J1149,5+2223. Cet amas très massif, situé à 5 milliards d’années-lumière de la Terre (redshift z : 0.54), est connu des astronomes comme « lentille gravitationnelle ». En clair, sa masse totale, équivalent à des millions de milliards de masses solaires, est telle qu’elle courbe l’espace-temps autour d’elle, à un point tel que la lumière provenant d’astres situés en arrière-plan, suivant les trajectoires courbes – des géodésiques – imposées par l’amas, dessine des images déformées, multiples, et amplifiées, aussi, comme si elles étaient formées par la lentille grossissante polie par un piètre opticien…
Albert Einstein avait prédit que son espace-temps courbe créerait de tels « mirages gravitationnels », mais les premiers d’entre eux n’ont été découverts qu’en 1979. D’abord un quasar lointain (QSO 0957+561), qu’une galaxie d’avant-plan dédoublait. Les astronomes ont d’abord été surpris par les caractéristiques similaires de « deux » quasars, situés l’un à côté de l’autre, avant de réaliser qu’il ne s’agissait que d’un seul et même astre… Ensuite, dans les années 1980, les premiers « arcs gravitationnels » ont été découverts par les astronomes français de l’équipe de Bernard Fort dans des amas de galaxies lointains, Abell 370 et CL 2244-02. Aujourd’hui, les amas « lentilles » sont légions, ils sont utilisés par les astronomes comme de véritables « télescopes gravitationnels » pour observer des galaxies situées très loin dans l’Univers. Ces astres demeureraient invisibles sans le coup de pouce des amas lentilles, qui peuvent amplifier leur lumière de dix à cent fois…
Alors, quelle découverte a faite Patrick Kelly avec le télescope spatial Hubble ? Patientez encore un instant, cette observation, voici des dizaines d’années que les astronomes en rêvaient… Observer, en direct, l’explosion d’une supernova lointaine, à travers le prisme déformant d’une lentille gravitationnelle… Les supernovae – ces explosions stellaires un milliard de fois plus brillantes que le Soleil – sont de fantastiques balises cosmiques pour les cosmologistes qui les utilisent pour éclairer des strates de plus en plus profondes du cosmos. Observer une supernova à travers une lentille gravitationnelle était l’un des Graal des héritiers d’Einstein : en effet, ces événements transitoires – une explosion ne dure que quelques semaines, promettaient, à travers la lentille, d’être observés avec un décalage temporel de quelques jours à quelques semaines, voire plus.
Statistiquement, les chances d’observer un jour une supernova amplifiée par une lentille gravitationnelle étaient vertigineusement faibles mais finalement, la chance a souri aux astronomes, à l’occasion du centenaire de la relativité générale…

Autour d'une galaxie géante faisant office de lentille, quatre points lumineux, de couleur jaune. Ce sont les quatre images d'une supernova située à 9.3 milliards d'années-lumière. La lumière de la supernova est amplifiée vingt fois. Cette observation exceptionnelle, en plus de prouver une nouvelle fois la validité de la théorie de la relativité générale d'Einstein, va permettre aux cosmologistes d'étudier la matière noire et l'énergie sombre. Photo Nasa/STSCI.

Autour d’une galaxie géante faisant office de lentille, quatre points lumineux, de couleur jaune. Ce sont les quatre images d’une supernova située à 9.3 milliards d’années-lumière. La lumière de la supernova est amplifiée vingt fois. Cette observation exceptionnelle, en plus de prouver une nouvelle fois la validité de la théorie de la relativité générale d’Einstein, va permettre aux cosmologistes d’étudier la matière noire et l’énergie sombre. Photo Nasa/STSCI.

La chance, mais pas seulement : Kelly et ses collègues de la collaboration GLASS ( The Grism Lens Amplified Survey from Space) observent régulièrement avec Hubble dix amas de galaxies géants, qui sont autant de lentilles gravitationnelles.
C’est dans le cadre de cette surveillance qu’au cœur de l’amas MACS J1149,5+2223, une galaxie géante est apparue en novembre 2014 auréolée par quatre points lumineux… Quatre étoiles symétriques, dessinant ce que les spécialistes d’optique gravitationnelle appellent une Croix d’Einstein. Ces quatre étoiles sont en réalité les quatre images d’une seule et même supernova située en arrière-plan de l’amas. Sa distance ? 9,3 milliards d’années-lumière ! (redshift z : 1.5). C’est énorme et cela fait de cette supernova l’une des plus lointaines jamais vues par les astronomes. Si l’étoile est si bien visible à une telle distance, c’est que l’amplification lumineuse due à la lentille avoisine vingt fois… L’astre a été observé des semaines durant par le télescope spatial, les images étant décalées de quelques jours les unes des autres.

Ces deux images montrent, en haut, l'amas de galaxies avant l'apparition de la supernova, en bas, les quatre images de la supernova entourant la galaxie géante faisant office de lentille gravitationnelle. Photo Nasa/STSCI.

Ces deux images montrent, en haut, l’amas de galaxies avant l’apparition de la supernova, en bas, les quatre images de la supernova entourant la galaxie géante faisant office de lentille gravitationnelle. Photo Nasa/STSCI.

Cette découverte est bien plus que la confirmation, une de plus, de la validité de la relativité générale. Étudier les quatre images de la supernova, mesurer leur décalage temporel, dû à la différence des trajets empruntés par la lumière, permettra aux chercheurs de mieux connaître la masse de l’amas de galaxies et de mieux connaître en particulier sa masse invisible de matière noire. Plus : les trajets empruntés par la lumière entre la supernova et nous vont aussi servir aux cosmologistes pour mesurer l’expansion de l’Univers, et son accélération, provoquée par la mystérieuse énergie noire…
Mais cette explosion d’étoile qui a eu lieu voici 9,3 milliards d’années n’a probablement pas fini de fasciner les astronomes… En effet, ceux-ci ont calculé que de nouvelles images fantômes de la supernova vont apparaître, ailleurs dans l’amas MACS J1149,5+2223, dans les années qui viennent ! Dans l’attente, les astronomes se préparent à une longue veille…
Serge Brunier

Pourquoi la grippe est plus meurtrière cette année en France

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Près de 5 millions de cas de grippe sont attendus cette année. / Ph. Emil via Flickr - CC BY 2.0

Près de 5 millions de cas de grippe sont attendus cette année. / Ph. Emil via Flickr – CC BY 2.0

Vous l’aurez entendu, cet hiver le nombre de décès en France a dépassé de 19 % la moyenne des décès sur les huit dernières années, d’après l’Institut de veille sanitaire (InVS). Une surmortalité de 8 500 décès, dont le responsable est en très grande partie (même si la proportion exacte reste inconnue) l’épidémie de grippe qui traverse l’Hexagone.

Actuellement, il y a environ 2,7 millions de cas recensés depuis le début de l’épidémie fin janvier, et presque autant sont à venir : le pic de la maladie, qui marque environ le milieu de l’épidémie, a été dépassé vers le 20 février.

Mais pourquoi la grippe a mordu si fort cette année ? Une concomitance malheureuse de trois phénomènes permet d’expliquer cette triste situation.

Plus virulent que d’habitude, le virus n’était pas complètement couvert par le vaccin

Premièrement, cette année il y a eu plus de cas de grippe que les années précédentes. A la même date l’année dernière, par exemple, seuls 1 137 000 cas étaient recensés par l’InVS, soit moins de la moitié ! Le virus qui a circulé cet hiver est donc plus virulent.

A cela s’ajoute que la souche virale de la grippe qui prédomine cette année a pour cible privilégiée les personnes les plus fragiles, et surtout les plus âgées. C’est la particularité des virus de type H3N2, retrouvée chez 61 % des patients testés en France cet hiver. De nombreuses personnes de plus de 65 ans auraient ainsi été atteintes par la grippe (l’âge moyen du patient est d’environ 60 ans cette année), alors même que les risques de succomber sont plus élevés dans cette classe d’âge.

Pour couronner le tout : il y aurait eu une défaillance du vaccin utilisé en prévention de la grippe par les personnes à risque, sous la forme d’une injection avant la saison hivernale. Or, comme l’ont montré des chercheurs britanniques début février (dans une étude parue dans la revue Eurosurveillance), le vaccin administré en automne 2014 protégeait mal contre cette variante virale.

Le vaccin est préparé de nombreux mois à l’avance, et entretemps le virus peut muter

Pour quelle raison ? En fait, chaque année le vaccin pour l’hiver est préparé au cours du printemps et de l’été précédents. Sa composition est décidée par l’OMS vers le mois de mars, sur la base du virus qui a circulé pendant l’hiver qui vient de se terminer. Les immunologues parient donc sur le fait que le virus du prochain hiver ressemblera à celui de l’hiver passé. Un lancer de dés qui ne marche pas à tous les coups, car au cours de l’année, le virus peut se transformer au gré de quelques mutations. Au final, ses antigènes peuvent donc être tellement différents que le vaccin prévu n’immunise plus le patient.

Seule défense maintenant que l’épidémie est sur la pente descendante : se laver fréquemment les mains et rester chez soi aux premiers symptômes !

Fiorenza Gracci

 

S&V 1049 grippe aviaire

S&V 1109 vaccination grippe A

  • Grippe espagnole, le retour du virus tueur – S&V n°952. Une pandémie de grippe semblable à celle qui terrassa l’Europe en 1918, l’ »espagnole », pourrait toujours ressurgir. En 1997, les chercheurs mènent des recherches sur les cadavres des victimes pour s’en prémunir.

S&V 952 retour grippe espagnole

 

Des chercheurs ont découvert la plus petite forme de vie possible

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Image inédite d'une mini-bactérie : on y aperçoit le filament replié de son ADN ainsi que des ribosomes (aux deux extrémités). La barre noire représente une longueur de 100 nanomètres. (Credit: Berkeley Lab)

Image inédite d’une mini-bactérie : on y aperçoit à l’intérieur le filament replié de son ADN ainsi que des ribosomes (aux deux extrémités). La barre noire représente une longueur de 100 nanomètres. (Credit: Berkeley Lab)

Ce sont des bactéries inconnues jusqu’ici, bien qu’elles soient fort répandues, de moins de 0,5 millionième de mètre de diamètre : à titre de comparaison, le volume d’une bactérie courante comme E. coli pourrait renferme 150 de ces mini-bactéries. Et selon l’hypothèse admise par la plupart des biologistes, elles représentent la limite inférieure de taille pour toute forme de vie, du moins sur Terre.

Les biologistes se doutaient déjà de leur existence depuis longtemps, mais grâce à des techniques innovantes, des chercheurs du Lawrence Berkeley National Laboratory (dépendant du ministère américain de l’énergie) et de l’université de Californie à Berkeley ont enfin pu les voir et entamer l’étude de leur métabolisme et de leur patrimoine génétique.

Une forme de vie très courante mais qui n’avait jamais été observée

Comment ? Tout simplement en filtrant l’eau du sol de la ville de Rifle (Colorado) et en congelant le filtrat à -272 °C (à peine 1,3 °C au dessus du zéro absolu) – ce qui a demandé néanmoins la mise au point de filtres ultra-fins et de techniques de congélations particulières.

Les échantillons congelés ont ensuite été transportés au laboratoire et observés sous microscope à tomographie électronique 2D et 3D sous ambiance cryogénique (froid). C’est alors que ces mini-bactéries ont révélé leur structure interne : une sphère dans laquelle s’agglutinent de manière très dense des spirales, qu’on suppose être son ADN, et des organes liées au métabolisme dont les ribosomes - des structures semblables à des labyrinthes en trois dimensions – qui servent à produire les protéines nécessaire à la vie.

Un code génétique réduit à sa plus simple expression

L’analyse ADN a déjà révélé que leur code génétique est long d’un million de « lettres » (paires de bases). Un texte bien court quand on sait que la longueur de l’ADN de l’être humain en comporte 3,2 milliards.

Les chercheurs ont également observé des pilus, soit de microscopiques cils hérissés vers l’extérieur, dont la fonction serait de permettre à ces bactéries de se lier à d’autres bactéries plus grandes.

Sur cette image on peut voir les philus de la bactérie, soit les cils qui lui permettent de s'unir à des bactéries plus grandes pour y puiser une partie de leur métabolisme (Credit: Berkeley Lab).

Sur l’image on aperçoit les philus de la bactérie, des cils qui lui permettent de s’unir à des bactéries plus grandes pour y puiser une partie de leur métabolisme (Credit: Berkeley Lab).

Selon les chercheurs, avec seulement 100 lettres de code génétique et les quelques ribosomes qu’elles possèdent – rien de plus ne rentre dans cet infime volume ! – , ces bactéries ont besoin de puiser également dans le métabolisme de leurs grandes sœurs pour pouvoir subsister.

Néanmoins, contrairement aux virus qui doivent parasiter des cellules-hôtes pour se reproduire, ces bactéries se reproduisent classiquement par division cellulaire. C’est pourquoi ont les considère comme des organismes vivants à part entière – les virus, bien plus petits, sont exclus de cette catégorie.

Leur rôle dans l’écosystème planétaire

L’étude de ces organismes, qui représentaient jusque-là une véritable lacune dans notre connaissance de la vie terrestre et dont les chercheurs ont déjà dénombré plusieurs sous-espèces (phyla), devrait permettre de clarifier également la fonction de la communauté des microbes dans l’écosystème planétaire, notamment du point de vue climatique – car les microbes ont joué et jouent toujours un grand rôle dans l’équilibre des gaz atmosphériques, en particulier pour la production d’oxygène .

Román Ikonicoff

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

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  • Bactérie artificielle : la science a réussi à l’améliorer – S&V n°1163 – 2014. Les bactéries, qui sont les formes les plus simples de vie, permettent aux généticiens de tester de nouvelles combinaisons génétiques, totalement artificielles. Un exercice qui en apprend autant sur la vie, et sa complexité, que l’étude des bactéries existantes.

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  • Bactéries : elles font et défont les espèces – S&V n°1152 – 2013. Les bactéries ne sont pas seulement la première forme de vie qu’a connue la Planète, elles sont également présentes dans les organismes vivants plus complexes pour les aider à survivre.

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Origine du sida : après le chimpanzé et le mangabey, le gorille incriminé

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Un gorille des plaines de l'ouest au zoo de San Diego, Californie - Ph. Heather Paul via Flickr - CC BY ND 2.0

Un gorille des plaines de l’ouest au zoo de San Diego, Californie – Ph. Heather Paul via Flickr – CC BY ND 2.0

Il manquait un personnage à l’arbre généalogique du virus du sida ; une équipe internationale de virologues, généticiens et primatologues indique l’avoir trouvé : c’est le gorille. Car le VIH, qui touche environ 35 millions de personnes dans le monde (données 2014), a plusieurs visages et plusieurs origines. On distingue deux variantes principales : le VIH-1, le type le plus répandu sur la planète, et le VIH-2, qui ne se retrouve qu’en Afrique.

Les deux sont depuis longtemps suspectés d’avoir été transmis à l’homme par ses cousins les singes, leur proximité génétique avec nous ayant facilité le passage des virus – dont ils sont porteurs – à notre espèce. Mais de quelles espèces de singes s’agit-il ? La traque au responsable est importante car elle permettra peut-être de mettre à l’abri l’humanité d’éventuelles transmissions supplémentaires de virus.

Dans le cas du VIH-2, le responsable identifié est le mangabey, un petit singe à longue queue habitant en Afrique centrale, souvent chassé dans ces régions ou pris en animal de compagnie. Pour preuve : le virus infectant l’homme a une séquence génétique extrêmement semblable à la version simienne. Quant au VIH-1, les choses se compliquent car il se présente sous la forme de 4 lignées différentes, appelées M, N, O et P.

Chacune de ces lignées a été transmise à l’homme à un moment différent dans l’histoire, avec le résultat le plus tragique pour la lignée M, qui a connu une explosion pandémique et touche 99 % des séropositifs de par le monde aujourd’hui. De même que la lignée N (qui ne touche qu’une vingtaine de personnes au Cameroun), elle trouve son origine chez les chimpanzés.

Récemment, des chercheurs de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) ont trouvé qu’une seule sous-espèce de chimpanzé vivant au Cameroun est concernée par ce virus, Pan troglodytes troglodytes. A partir de là, il aurait gagné Kinshasa dans les années 20, et se serait répandu peu à peu partout ailleurs.

3000 échantillons de matériel génétique de gorilles passés au crible

Restait à trouver l’animal vecteur de la transmission des deux derniers types du VIH-1, d’autant que si la souche P n’a été recensée que sur deux personnes, la souche O est en train de se répandre et a déjà touché 100 000 personnes. Une mission qu’ont réussie les auteurs d’une étude publiée lundi dans la revue Proceedings of the National Academy of Science Pendant quatre ans, ils ont analysé génétiquement près de 3000 échantillons d’excréments de gorilles, provenant de différentes populations (gorilles de plaines occidentales, orientales, et gorilles des montagnes) sur 33 sites différents au Cameroun, au Gabon, en République démocratique du Congo et en Ouganda.

Résultat : les gorilles des plaines de l’ouest, au Cameroun (Gorilla gorilla gorilla), sont bien le réservoir des groupes O et P du virus. Les chercheurs ont été jusqu’à identifier une caractéristique génétique qui rend ce virus transmissible à l’homme, mais pas au chimpanzé : elle porte le nom jargonneux de cytidine-désaminase APOBEC3G.

C’est la première fois que le gorille est identifié comme une espèce à risque pour la transmission du sida à l’homme. Un risque accru en outre à cause de la déforestation, qui rapproche encore davantage les animaux sauvages des populations humaines.

Fiorenza Gracci

 

> Lire également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Guérir du sida – S&V n°1135- 2012. En 2012, un homme infecté par le VIH a guéri grâce à une greffe de moelle osseuse. Ce premier cas de guérison totale par traitement médical est symbolique de l’inversion des rapports de force dans la guerre contre le sida et laisse entrevoir la possible défaite de cette maladie d’ici quelques années.

1135

  • Cela fait 30 ans… L’épidémie de sida – S&Vn°1125 – 2011. Exactement trente ans après l’apparition de cette nouvelle maladie, le point sur le nombre de victimes, le nombre d’infectés et les nouvelles voies de traitement.

1125

  • Virus : la fin de l’homme ? – S&V n°934. Le « péril viral » est annoncé pour le troisième millénaire. Aux nombreux virus déjà connus s’ajoute en effet la menace d’une multitude d’autres…

S&V 934 virus