Redonnons de la vie aux Éhpad

Standard


Éhpad. Cinq lettres pour désigner les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Ce mot vient de passer brutalement dans le langage courant. Il représentera dans l’esprit de beaucoup d’entre nous, et pour de longues années, ces lieux où on laisse mourir nos aînés, seuls dans leurs chambres, sans que leurs proches soient autorisés à les entourer pour les accompagner dans cet ultime passage. Cette réalité nous choque par son ampleur : les plus de 7700 personnes décédées à ce jour en Éhpad représenteraient un tiers des victimes du Covid-19. 

Éhpad : “Certains résidents se sont laissés mourir de tristesse”

Standard


Ce fut un choc, que les mots ne traduisent pas toujours dans leur globalité. Et au réveil, la prise de conscience que le système a montré ses limites. Révoltée par notre incapacité collective à sauvegarder les vies affaiblies, Valérie Régnier a ajouté la semaine dernière sa voix singulière à celles des syndicats, directeurs d’Éhpad et autres spécialistes des questions du grand âge pour dénoncer avec force les situations vécues depuis le début du confinement par les résidents de ces établissements, publics et privés, et par leurs familles.


Faire renaître le lien à l’autre


« Les plus révoltés, ce sont les enfants des personnes victimes de l’épidémie, précise-t-elle. Du jour au lendemain, ils n’ont plus été autorisés à aller les voir, n’ont pas pu leur dire au revoir, et ont été prévenus par un appel téléphonique leur recommandant de prendre contact avec les pompes funèbres ! Certains résidents se sont laissés mourir de tristesse, car ils…

Covid-19 : “La crise remet la personne au cœur de notre quotidien”

Standard

« Dès les premiers cas de Covid-19 dans la région Occitanie, nous avons mis en place le confinement en chambre, fermé l’accès à la maison et suspendu toutes les visites. Aujourd’hui, 50 salariés ne ménagent pas leur peine pour le bien-être de nos 84 résidents. Le vrai plus par rapport à d’autres Éhpad : la présence continue d’une communauté de soeurs – une dizaine en activité.

Le regard des petits frères des pauvres par rapport à la vieillesse

Nous connaissons très bien nos résidents, des plus autonomes à ceux qui souffrent de troubles cognitifs importants, et mettons en place une présence renforcée auprès d’eux, en lien étroit avec les familles. En collaboration avec l’équipe de laïcs (responsables du soin, des ressources humaines, du contrôle de gestion, des questions éthiques et juridiques), nous avons aussi aidé très tôt les autres maisons de notre province à s’organiser. Habituellement, près de 80 bénévoles nous accompagnent dans notre mission, à Montpellier. Quelques-uns continuent de nous épauler à l’accueil, mais la majorité a dû inventer des initiatives à distance.

Voici des années que l’on porte un regard assez négatif sur les Éhpad. Cette crise peut nous permettre de le changer.

Via des appels sur les réseaux sociaux, de nouvelles personnes se sont jointes à ce beau mouvement. Certains cousent des blouses en tissu, des habitués déposent des gâteaux à l’accueil, d’autres réalisent et partagent des vidéos avec les résidents. Pour ces derniers, la situation peut être très anxiogène. S’ils sont conscients de l’intérêt des gestes barrières, ils ressentent la coupure avec leurs familles et se sentent vulnérables face à l’actualité. Voici des années que l’on porte un regard assez négatif sur les Éhpad. Cette crise peut nous permettre de le changer. De considérer différemment ceux qui oeuvrent auprès des plus fragiles.

Ce sont de beaux métiers, sans lesquels on ne peut rien faire. Même si l’idéal serait de garder chez soi ses parents âgés, nous aurons toujours besoin de lieux pour qu’ils soient aimés, soutenus, respectés dans tout ce qu’ils sont. Après la gestion de l’urgence, il faudra tirer des conclusions de cette crise pour déterminer quel visage aura l’Éhpad de demain et ce qui reste à notre portée pour rendre ce monde meilleur. Cette épreuve nous aura alors permis de redécouvrir qu’il y a des gens autour de nous. Elle remet, dès aujourd’hui, la personne au cœur de notre quotidien. »