L’univers poétique et foisonnant de la Fabuloserie

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C’est l’un des joyaux de ce lieu fantastique. Une pièce ingénieuse créée par un adulte facétieux. Au fond du jardin, derrière l’étang ombragé de saules pleureurs, le manège de Pierre Avezard, dit Petit Pierre, épate les visiteurs. L’ancien gardien vacher de la région d’Orléans, « né avec une malformation congénitale », un oeil quasi fermé mais l’autre malicieux, a construit dans sa ferme de la Beauce « une étonnante machine poétique ». Constitué d’une multitude de figurines en fer-blanc, qui tournent sur des carrousels, voltigent dans les airs, ce manège ici reconstitué n’est fait que de matériaux de récupération : tonneaux, chambres à air, fils de fer, boulons, tôles ondulées.


Ce monde extraordinaire, animé grâce à un moteur électrique, veillé par une tour Eiffel en acacia haute de 23 m, informe sur son créateur. Au bal, les personnages évoluent par couple. Mais Pierre, célibataire en raison de son handicap, s’est représenté dansant…

L’univers poétique et foisonnant de la Fabuloserie

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C’est l’un des joyaux de ce lieu fantastique. Une pièce ingénieuse créée par un adulte facétieux. Au fond du jardin, derrière l’étang ombragé de saules pleureurs, le manège de Pierre Avezard, dit Petit Pierre, épate les visiteurs. L’ancien gardien vacher de la région d’Orléans, « né avec une malformation congénitale », un oeil quasi fermé mais l’autre malicieux, a construit dans sa ferme de la Beauce « une étonnante machine poétique ». Constitué d’une multitude de figurines en fer-blanc, qui tournent sur des carrousels, voltigent dans les airs, ce manège ici reconstitué n’est fait que de matériaux de récupération : tonneaux, chambres à air, fils de fer, boulons, tôles ondulées.


Ce monde extraordinaire, animé grâce à un moteur électrique, veillé par une tour Eiffel en acacia haute de 23 m, informe sur son créateur. Au bal, les personnages évoluent par couple. Mais Pierre, célibataire en raison de son handicap, s’est représenté dansant…

La chauve-souris sous toutes les coutures

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“Souche à virus”, bête légendaire : qui est l’animal qui a mis le monde sous cloche ?


On la dit du côté du diable et des sorcières, on craint qu’elle ne s’accroche aux cheveux… Bien que proches de nous, les chauves-souris ne sont perçues souvent qu’au travers d’un monde d’idées préconçues. C’est peu dire que la désignation de cet animal comme réservoir à virus du Sars-CoV-2 mais aussi des différentes épidémies qui parcourent le globe depuis le début des années 2000, ne va pas aider à rétablir sa réputation négative. Pourtant, ce chiroptère gagne à être connu, ne serait-ce que pour ses caractéristiques assez exceptionnelles. Le point avec le concours d’experts scientifiques.


1. Les chauves-souris sont-elles des réservoirs à virus ?


« Incontestablement, répond avec franchise Jean-François Julien, chiroptérologue au Muséum national d’histoire naturelle, à Paris. Même si dans la longue histoire des zoonoses, elles ne viennent qu’en troisième position derrière les bovins et animaux domestiques, puis les rongeurs (rats, souris…), les chauves-souris ont un taux de portage du coronavirus estimé à 10 % dans les espèces testées. » Pour ce naturaliste qui les observe en France et dans le monde depuis plus de 30 ans, il y a trois raisons essentielles à cela : « D’abord leur proximité avec l’homme, ensuite celle avec le reste du monde animal, et enfin leur caractère grégaire. Ce sont des êtres sociaux qui vivent groupés et ont une forte tendance à se disperser un peu partout. »


Et c’est ainsi que, depuis le début du XXe siècle, la liste des épidémies causées par ces petits mammifères volants, notamment en raison du commerce d’espèces sauvages – car pour être transmis à l’homme, il faut que le virus transite de la chauve-souris à l’homme par une seconde espèce réservoir – commence à être longue : le Sars-CoV-1 en 2003 (chauve-souris + civette), le Mers-CoV en 2012 (chauve-souris + dromadaire) et enfin, le Sars-CoV-2 (chauve-souris + pangolin ?).


2. Quel est leur nombre exact et sont-elles en voie d’extinction ?


Même si elles se comptent en millions, il est presque impossible de les évaluer précisément. « Il y a deux ans, fait remarquer Jean-François Julien, je vous aurais répondu entre 1300 et 1350 espèces dans le monde, dont 35 en France métropolitaine. Aujourd’hui, je vous dirais davantage : 1500 au moins, soit un quart des mammifères connus, car on en découvre de nouvelles tous les ans. » Leur poids et leur taille peuvent aller ainsi de 2 g et 2,8 cm, pour la minuscule chauve-souris bourdon de Thaïlande, à plus de 1kg et 1,50m d’envergure, pour le spectaculaire renard volant des Philippines !


Pourtant, leur présence est de plus en plus menacée dans plusieurs endroits du globe. En Afrique et en Asie, par la déforestation, en Amérique du Nord, par une maladie dite du syndrome du museau blanc (un champignon qui s’attaque au métabolisme de l’animal) et en France et en Europe, par l’érosion de la biodiversité. Ainsi une étude récente de sciences participatives menée sous l’égide du Muséum national d’histoire naturelle a montré une diminution de 30% des espèces communes de chauves-souris en 10 ans en France. Plusieurs raisons à cela : l’impact du réseau autoroutier, les éoliennes, la pollution lumineuse, l’usage des pesticides en agriculture.


3. Sont-elles dangereuses ?


« La légende selon laquelle elle s’accrocherait à nos cheveux, est une pure invention, constate Jean-François Julien. Si vous faites allusion au fait que certaines d’entre elles sont hématophages (buveuses de sang), en clair, des vampires, il en existe trois espèces qu’on ne trouve qu’en Amérique du Sud : Mexique, Argentine et Brésil. Mais il est vrai que là-bas, en raison de la déforestation, elles pullulent. Elles puisent beaucoup de sang dans le bétail. » Et des chercheurs brésiliens redoutent même qu’elles puissent un jour s’attaquer à l’homme et lui transmettre la rage.


4. Faut-il les éradiquer ?


En Chine et même au Pérou, on a vu récemment des communautés villageoises, effrayées par la propagation coronavirus Sars-CoV2, se livrer à des destructions massives de chauves-souris, notamment dans des grottes où elles logeaient. « Généraliser de tels comportements, ce serait jouer aux apprentis sorciers. Comme on l’avait fait au temps de la rage avec les renards, pointe sans hésiter Jean-François Julien. Car, au lieu de résoudre un problème, vous créez un déséquilibre dans les écosystèmes. » Ainsi, leur mode d’alimentation permet à la fois de réguler la présence de nombreux moustiques – porteurs, eux aussi, de maladies infectieuses – et de diminuer les parasites présents dans certaines cultures agricoles. D’ailleurs, en France, elles sont placées sous la loi de protection de la nature du 10 juillet 1976, complété par un arrêté ministériel de 2007, qui interdit de les capturer, les sanctions pouvant aller jusqu’à un an de prison et 15.000€ d’amende.


L’écologue Serge Morand, chercheur du CNRS qui vit en Asie du Sud-Est, apporte une autre grille de compréhension : « Un pays riche en biodiversité peut être riche aussi en maladies infectieuses. Mais attention, la destruction de la biodiversité augmente les risques de pandémie. Si on se livre à la déforestation ou si on urbanise trop, les animaux sauvages perdent leur habitat et cela favorise leurs contacts avec les animaux domestiques et les humains ».


C’est ce qui était déjà arrivé avec le virus Nipah en 1998 en Malaisie, où, rappelle-t-il, l’habitat des chauves-souris avait été détruit pour permettre des plantations de palmiers à huile. Poussant les chauves-souris à migrer près des villages où elles avaient contaminé des cochons d’élevage destinés à l’exportation, diffusant ainsi une épidémie jusqu’à Singapour… Et nos deux écologues de tomber d’accord sur la vraie solution : « Intensifier la surveillance sanitaire, et cela au niveau mondial. » Comme dans le système préconisé par le concept One World, One Health (« Un seul monde, une seule santé ») où médecins, vétérinaires et écologues travailleraient enfin de concert.


5. Qu’ont-elles à nous apprendre ?


Depuis 2017, un consortium universitaire baptisé Bat-1K cherche à mieux comprendre le système immunitaire et la résistance au vieillissement des chauves-souris. Ainsi, grâce à un baguage, on a appris récemment qu’une chauve-souris pesant à peine 7 g pouvait vivre jusqu’à 41 ans ! D’où les grands espoirs d’Éric Petit, chercheur à l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) de Rennes et membre du groupe chiroptères à l’association Bretagne vivante, qui suit de près les travaux du consortium Bat-1K menés et initiés par sa collègue irlandaise Emma Teeling, de l’université de Dublin.


« L’objet est d’arriver à un séquençage des génomes de toutes les espèces connues de chauves-souris, d’où le nom de Bat – « chauve-souris », en anglais – et de 1K comme one thousand, c’est-à-dire un millier d’espèces, explique-t-il. Décrites comme des réservoirs à virus, les chauves-souris sont aussi des mammifères qui ont développé un système immunitaire leur permettant de résister à de très nombreux virus et microparasites. D’après les premières observations du consortium, elles généreraient une sorte de mécanisme cellulaire permanent qui les aiderait à combattre l’inflammation et ainsi de vivre longtemps et en bonne santé. Le Graal de la santé humaine. » Aussi, une fois passée la phase aiguë de la pandémie due au Sars-CoV-2, tous ces chercheurs espèrent que les peurs anciennes ou nouvelles suscitées par les chauves-souris s’estomperont et laisseront place à la fois à une meilleure connaissance de ce petit mammifère volant et surtout de son utilité écologique. Et Éric Petit de conclure : « Leur véritable ennemi, c’est l’ignorance. »


À consulter

La SFEPM. Le site de la Société française pour l’étude et la protection des mammifères : www.sfepm.org

Les merveilles sous-marines de la côte Vermeille

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Le port de Banyuls-sur-Mer (Pyrénées-Orientales) s’éloigne doucement, la houle faiblit un peu, et le sourd vrombissement du moteur couvre à peine le claquement des vagues sur la coque. Bordé à gauche par le bleu profond de la Méditerranée et à droite par la côte rocheuse qui marque l’extrémité des Pyrénées, le paysage se découvre lentement, sous un ciel sans nuage. Le bateau ne dépasse pas 8 noeuds, soit 15 km/h, la limite de vitesse fixée dans la réserve naturelle marine de Cerbère-Banyuls. Les agents Jean-François Planque et Didier Fioramonti partent pour leur tournée d’observation quotidienne.


La première réserve marine de France a été créée en 1974, à l’initiative de biologistes, de plongeurs et de pêcheurs artisanaux inquiets de voir les ressources de la mer s’effondrer à cause de la généralisation des activités de plaisance et le développement de la pêche intensive. Plutôt qu’une mise sous cloche, il a été choisi, dans les 650 ha de mer de la réserve, qui s’étend jusqu’à 2 km du rivage, de concilier activités humaines et préservation du milieu naturel. Avec succès : « Nous avons obtenu trois distinctions internationales, dont le statut de Refuge mondial pour la mer, explique Jean-François Planque. Mais aussi l’inscription sur la liste verte de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), pour la qualité du travail que nous menons avec les pêcheurs et les plaisanciers. C’est une réserve d’État, mais l’évolution de la réglementation se fait avec les usagers eux-mêmes. » Jean-François salue le bateau d’une autre équipe, attelée à installer les 29 bouées d’amarrage qui évitent les dégâts causés par les ancres et limitent la fréquentation des lieux.


« Les poissons viennent nous voir »


Passé l’anse du Pin parasol, notre objectif se découvre : protégée de la tramontane par une haute falaise, chauffée au doux soleil de cette fin de printemps, l’eau du sentier sous-marin est calme et accueillante. Accessible depuis la mer ou la plage de Peyrefite, entre Banyuls et Cerbère, ce sentier est une curiosité locale particulièrement courue. Ou plutôt nagée ! Il permet d’appréhender la réserve dans sa diversité : sur 250 m de long et 50 m de large, matérialisé par des bouées, on y découvre cinq milieux typiques des fonds de la côte Vermeille, et surtout leurs habitants. « La chasse sous-marine étant interdite, les poissons n’ont pas peur de l’homme, explique Didier Fioramonti, qui guide gratuitement les vacanciers sur le sentier tout au long de l’été. Les plongeurs qui viennent d’ailleurs nous disent qu’ils n’ont jamais vu ça. Ici, on peut voir ce que fait la nature quand on la protège. »


À chacune des cinq stations du sentier, des panneaux immergés rappellent les espèces végétales et animales de chaque milieu, mais aussi les consignes de base. « On ne crie pas, on ne s’agite pas, et les poissons vont venir nous voir, assure notre guide en chaussant de longues palmes. Il ne faut pas non plus retourner les cailloux, pour ne pas perturber le développement des végétaux et des petits poissons qui se cachent en dessous. » Le plongeur, lesté d’une ceinture de 7 kg, masque et tuba sur la tête, se laisse glisser dans l’eau depuis le bateau et nous invite à le suivre. Cinq mètres plus bas, le fond est tapissé de posidonie, une herbe marine endémique de méditerranée, qui occupe 25% de la réserve. Ses feuilles, qui peuvent atteindre jusqu’à 1 m, agissent comme un poumon marin, stockant le gaz carbonique et libérant de grandes quantités d’oxygène. Elles hébergent également de nombreux poissons, qui s’y réfugient pour se reproduire et mettre leurs rejetons à l’abri.

DIDIER FIORAMONTI
DIDIER FIORAMONTI


Après un signe de la main pour capter notre attention, Didier descend en apnée. L’eau se remplit de discrets claquements de bouche émis par le plongeur. Immédiatement, une nuée de poissons curieux l’entoure. Au milieu des petites oblades, reconnaissables à leur tache noire sur la queue, une daurade royale de 50 cm passe d’un air sérieux, faisant miroiter ses écailles argentées dans un rayon de soleil. « C’est une eau très riche, nourrie par les courants marins et les alluvions des Pyrénées, indique le guide une fois revenu à la surface. On y trouve toute la chaîne alimentaire. » Après quelques coups de palmes, un nouveau milieu se découvre, composé de gros blocs de pierre et de crevasses profondes. Un corb glisse entre les rochers, suivi par un énorme mérou. Ce dernier est l’un des 608 relevés au dernier comptage, contre une dizaine il y a 40 ans. L’avenir de cette espèce protégée s’éclaircit dans les eaux de la côte Vermeille. Comme celui des 1 200 espèces animales et 500 espèces végétales recensées dans la réserve.


Un répit total pour la nature


Jean-François et Didier ont aujourd’hui une mission de la plus haute importance : redonner sa liberté à une grande cigale de mer, une espèce protégée. C’est l’un des trois derniers pêcheurs artisanaux de Banyuls qui l’a retrouvée dans ses casiers à langoustes et à homards et qui l’a confiée de bon coeur aux agents. L’endroit idéal pour la relâcher se situe à quelques centaines de mètres du sentier marin, au coeur de la réserve : la zone de protection renforcée, qui baigne le cap Rederis, offre 65 ha de répit total au milieu naturel. La pêche y est totalement interdite, comme la plongée et le mouillage.


Le moteur éteint, les vagues et les oiseaux marins remplissent l’espace sonore. Jean-François Planque lâche la barre pour ouvrir un vivier à l’arrière du bateau. Le crustacé de près de 30 cm y agite ses antennes. Penché par-dessus bord, l’agent pose délicatement l’animal à la surface de l’eau, pour le laisser rejoindre le fond. « Les gens pensent que dans la zone de protection renforcée il y a un trésor, mais il est partout, le trésor !, s’amuse Didier. Ici tout est protégé. Même sur le sentier, il n’y a qu’un mois et demi de dérangement par an, c’est peu. » Sous la surveillance quotidienne de ses agents, qui ont la compétence de police de l’environnement, la réserve sert de nurserie à une zone bien plus vaste : « On trouve maintenant des mérous et des larves de corail rouge jusqu’en Espagne, se réjouit Didier. La richesse de la réserve se diffuse. »


Préparer sa visite

Depuis Perpignan, prendre la voie rapide direction Argelès (N114), puis la route côtière D914.

L’accès au sentier marin, gratuit, se fait depuis la plage de Peyrefite. Pour l’observation, prévoir un masque ; tuba et palmes conseillés.

Le sentier est matérialisé et placé sous la surveillance d’un maître-nageur du 1er juillet au 31 août, de 11h à 19h. Vous n’avez pied que jusqu’à la première des cinq stations, le reste est ainsi déconseillé aux nageurs débutants.


Gardons nos réserves

Dans le périmètre de la réserve, les navires de plaisance doivent s’amarrer à l’une des bouées blanches, respecter les limitations de vitesse et garder leurs distances avec les navires de plongée et de pêche professionnelle. La pêche à la ligne est soumise à autorisation, comme la plongée sous-marine. Informations et demandes d’autorisation sur le site : www.ledepartement66.fr

Dans le Jura, au chevet de la faune sauvage

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L’Étoile, cette commune du Jura de 600 âmes où nous avons rendez-vous, doit son nom aux cinq collines recouvertes de vignes qui l’entourent, formant des branches rappelant un astre. Elle constitue une des appellations majeures de l’AOC jurassienne. C’est au bout d’un chemin surplombant le village que se loge le centre Athénas, structure spécialisée dans l’accueil et la sauvegarde de la faune sauvage. Gilles Moyne, son directeur et notre guide, nous y accueille vêtu d’un tee-shirt floqué du logo du centre, représentant un lynx. « Au départ, nous avions choisi comme animal la chouette, mais depuis que les lynx ont été réintroduits de l’autre côté de la frontière helvète dans les années 1970 et que nous sommes régulièrement amenés à en recueillir, il est devenu notre emblème », explique ce passionné d’animaux, cofondateur du lieu en 1987.


L’accueil d’oiseaux blessés


Il nous emboîte le pas vers le local principal, un bâtiment en Algeco où le premier nourrissage des plus jeunes animaux vient d’être assuré par ses trois collaboratrices. Nous y retrouvons Lorane Mouzon-Moyne. Salariée et, comme Gilles Moyne, « capacitaire » (titulaire du certificat de capacité pour l’entretien des animaux délivré par la préfecture), elle est en train de former deux jeunes filles en service civique à reconnaître les différentes espèces et elle assure leur suivi.


Au sol, sous la table d’opération située au centre de la pièce, s’amoncellent une vingtaine de cartons scellés. À l’intérieur, de nouveaux animaux, notamment des oiseaux, en attente de soin. « En ce moment, nous en recevons une vingtaine par jour. C’est la période la plus dense de l’année, de début mai jusqu’à mi-août ; ce qui concorde avec la période de reproduction », précise le directeur. Durant la dernière décennie, leur nombre a doublé, passant de 1500 à 3000 par an, ce qui fait d’Athénas l’un des plus gros centres de recueil de la faune sauvage en France. « Nous intervenons sur 11 départements, dans l’Ain et la région Bourgogne-Franche-Comté, grâce à une équipe de 200 correspondants bénévoles, formés par nous, qui assurent les premiers soins sur le terrain et, si nécessaire, l’acheminement des animaux vers le centre », précise Gilles Moyne. De l’une des boîtes s’élèvent des cris stridents semblables à une alarme : « Je pense que c’est un pic épeiche, écoutez comme ses cris sont rapprochés, c’est parce qu’elle a peur », indique le directeur. Il nous précise que cet oiseau, dont ils ont reçu plusieurs spécimens, a pour particularité de nicher dans les cavités, ce qui en fait un habitué des forêts jurassiennes.


(…)

Collecter les souvenirs des anciens pour tisser un lien entre les générations

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« Le 28 mai 1944, c’étaient les derniers bombardements à Nantes. La maison que nous habitions n’était plus qu’un tas de pierres et de cailloux ! » La voix d’Annick Giraud, 89 ans, est vive et dynamique à l’évocation de ses souvenirs vieux de 75 ans, toujours bien frais dans sa mémoire. Ses récits de jeune Nantaise en temps de guerre sont disponibles gratuitement sur le site internet de l’association Globe conteur. Créée en 2017, elle oeuvre à la transmission de l’histoire populaire entre les générations en effectuant la collecte de récits de vie par audio, vidéo ou écrit ; elle redonne ainsi aux aînés une place centrale dans la société. 


Comme Annick, 120 autres « globeconteurs » dans toute la France racontent les pensionnats de filles et de garçons, la pêche à la bernique ou la liesse à la Libération. « Cela permet de comprendre la grande Histoire à travers les anecdotes individuelles, explique Cédric Jolivet, coordinateur de l’association. Il s’agit aussi d’offrir un temps d’écoute et de partage unique pour les seniors comme pour les collecteurs bénévoles. » Menant habituellement des actions de sensibilisation sur le terrain, notamment auprès d’écoles et d’Éhpad, Globe conteur a dû s’adapter en temps de confinement. En partenariat avec l’association nantaise Manou Partages, qui entretient le lien social entre les générations, des bénévoles ont contacté des personnes âgées isolées désirant confier des bribes de leur mémoire par téléphone. 


Emmanuelle Cerveau, professeure d’histoire-géographie de 50 ans, avait déjà collecté plusieurs récits depuis l’automne dernier, après avoir suivi un parcours de formation à l’écoute, mais aussi aux procédés techniques d’enregistrement audio : « Durant cette période de confinement, je souhaitais poursuivre mon engagement autrement. » Depuis mi-avril, Emmanuelle appelle donc Annick une fois par semaine et consigne sa mémoire, au gré de ses envies. « Pour moi, c’est une échappatoire, explique la volubile octogénaire. Raconter toutes ces histoires m’apporte une bouffée d’air pur, je suis toute guillerette après ! »


CÉDRIC JOLIVET, coordinateur  de Globe conteur : « Nous souhaitons régénérer  la place de l’écoute dans la société. »


ANNICK GIRAUD, conteuse : « Je raconte à  Emmanuelle ma scolarité, mon travail, l’après-guerre… en fonction de ce qui vient sur le moment ! »


EMMANUELLE CERVEAU, collectrice : « Ces  anecdotes font découvrir l’histoire autrement,  celle que l’on peut qualifier de souterraine. » 


À savoir

Pour découvrir les récits de vie de Globe conteur et devenir collecteur : globeconteur.org




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Sur les traces des chrétiens cachés du Japon

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Tout est arrivé de France, après un long voyage sur les océans. Et tout est là, comme neuf : l’horloge comtoise, les statues, les livres de comptes, les outils et même ce curieux mannequin gynécologique destiné à former les sages-femmes. Maria Akasako s’assied à l’harmonium, lui aussi importé au XIXe siècle. Elle se met à jouer avec entrain. Accompagnée d’une plus jeune religieuse, elle est la gardienne du temple, ou plutôt du mémorial. « Regardez, me dit la soeur, qui ne ménage pas son enthousiasme alors que nous poursuivons la visite : la machine à faire les macaronis, c’est lui qui l’a faite, pour faire rentrer de l’argent. Jusque-là, les villageois mouraient quasiment de faim. Les pâtes à l’occidentale étaient vendues aux expatriés qui s’installaient alors à Nagasaki. »

Le bâtiment où nous nous trouvons est d’architecture japonaise, bois et tuiles vernissées. Dehors, tout en bas, le Pacifique scintille. Maria Akasako me montre comme…