Initiation au mystère des Chartreux

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Entre les sapins du Charmant Som et du Grand Som, au coeur du parc naturel régional du Massif de la Chartreuse, vous les avez peut-être croisés un jour. Chaque lundi, deux par deux, crampons aux pieds, leur robe de laine blanche frôlant le sol, les chartreux sont de sortie. Le reste du temps, les pères sont en solitude et en silence dans leur monastère niché dans le vallon. Seuls quelques frères sortent parfois pour l’intendance ou pour assurer la préparation de leur fameuse liqueur. La « route du Désert » de Saint-Pierre-de-Chartreuse – nom officiel de la voie goudronnée qui serpente jusqu’à eux entre les montagnes – est coupée à l’endroit où des panneaux « zone de silence » apparaissent entre les arbres.


À pied, on peut braver l’interdit et monter jusqu’aux imposantes portes perçant la haute muraille surplombée par la falaise : las, elles ne s’ouvriront pas. Si les chemins de terre à la lisière de la forêt permettent de longer le domaine, le randonneur aura beau lorgner, il n’apercevra guère qu’une ou deux silhouettes au loin. La Grande Chartreuse est un lieu mystérieux.


Dans la Grande Chartreuse


Pourtant, dans les familles dauphinoises, on se souvient qu’il n’en a pas toujours été ainsi. « Mon père avait visité les lieux quand il était jeune », confie Philip Boyer avec malice. L’homme aux cheveux blancs et à la mise impeccable est un privilégié : lui connaît bien le monastère isérois et ses occupants. S’il n’en arpente pas souvent les couloirs, Philip Boyer est le dépositaire d’un trésor bien plus grand : l’esprit des Chartreux, qu’il est chargé de transmettre aux visiteurs du musée dont il est le directeur. Pourtant, ce musée aurait pu ne jamais exister… « Si mon père a pu arpenter les couloirs de la Grande Chartreuse, c’est tout simplement parce que les chartreux n’y habitaient plus », raconte-t-il.


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