Pourquoi l’eau chaude gèle-t-elle plus rapidement que l’eau froide ?

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On ignore pourquoi les glaçons se forment plus vite si l'eau utilisée est chaude (Ph. Andrew Gustar via Flickr CC BY 2.0)

Les glaçons se forment plus vite si l’eau utilisée est chaude (Ph. Andrew Gustar via Flickr CC BY 2.0)

Vous avez donc fait l’expérience de ce petit truc amusant : placer un bac à glaçons rempli d’eau chaude au freezer pour obtenir de la glace plus rapidement qu’avec de l’eau froide. Curieusement, il n’y a pas encore d’explication bien établie à ce phénomène étrange appelé “effet Mpemba” (du nom de son découvreur tanzanien en 1963). Les scientifiques ont néanmoins proposé cinq hypothèses, qui peuvent être complémentaires, et qui jouent un rôle variable en fonction des conditions.

La plus simple met en cause l’évaporation de l’eau chaude : ce phénomène entraînerait principalement une diminution de la masse d’eau, ce qui favoriserait son refroidissement par rapport à un même volume initial d’eau froide. Ajoutons à cela, deuxième hypothèse, le fait que l’évaporation consomme beaucoup de chaleur, ce qui accélère encore le refroidissement. Mais le phénomène pourrait aussi être dû à la perte de gaz dissous ­(dioxyde de carbone, azote…), qui s’échappent quand l’eau est chauffée ; or, sans ces gaz, l’eau gèlerait plus rapidement.

L’eau chaude est-elle moins sensible à l’effet de surfusion ? Engendre-t-elle des courants de convection plus intenses ?

Troisième hypothèse : l’eau chaude refroidirait plus vite car elle serait moins sensible à l’effet de “surfusion” qui permet à un liquide de conserver sa viscosité alors que sa température est passée sous son seuil de solidification. Un état qui se produit de préférence lorsque le refroidissement est lent et que l’eau contient peu d’impuretés. Or, comme l’eau chaude aurait moins tendance à la surfusion que la froide, elle gèlerait à une température supérieure, et donc plus vite.

La quatrième explication repose sur l’existence de courants de convection plus importants dans l’eau chaude : ces courants accéléreraient les transferts thermiques entre l’eau chaude et son environnement, ce qui favoriserait là encore un refroidissement plus rapide. Enfin, la cinquième hypothèse fait intervenir une modification de l’environnement autour de l’échantillon provoquée par la chaleur de l’eau. Par exemple, si le récipient repose sur de la glace pilée, l’eau chaude, contrairement à l’eau froide, peut faire fondre la glace, établissant ainsi une meilleure conduction de la chaleur durant l’expérience et favorisant le refroidissement de l’eau chaude.

Ces cinq thèses n’ont pas été validées rigoureusement car les tests dépendent d’un grand nombre de facteurs mal définis. L’effet Mpemba reste donc difficile à reproduire et à étudier.

K.B.

 

> Voir également dans les Grandes Archives de Science & Vie :

  • Et voici le froid qui vient du son – S&V n°1072 – 2007. Une lacune existe : nous ne disposons pas d’un équivalent des fours à micro-ondes pour le froid : un appareil capable de refroidir à grande vitesse des objets autrement que par échanges thermiques. Cela pourrait peut-être changer grâce à la découverte d’un phénomène lié aux ondes sonores.

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  • L’expérience quantique qui jette un froid – S&V n°1074 – 2007. La physique du froid, c’est-à-dire de l’absence de chaleur, n’est pas aussi bien connue qu’on ne le croit. Ainsi, en physique quantique, le froid (ou le refroidissement) intrigue les chercheurs.

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  • Le point sur le réfrigérateur – S&V n°1068 – 2006. Alors que la production chaleur, via le feu et la combustion, est connue et maîtrisée depuis au moins 350 000 ans, la production de froid, elle, n’a été maîtrisée qu’au XIXe siècle. Pourquoi un tel déséquilibre entre ces deux phénomènes antagonistes ? Une plongée dans l’histoire et la thermodynamique…

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