Fêter la nature dans la vallée de Trobodec

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Cela commençait bien. Les averses continuelles de la semaine avaient cessé, laissant la place à un soleil lumineux, et, dans l’ancien lavoir de Guimaëc, point de départ de notre randonnée, tritons, grenouilles et mêmes salamandres s’étaient laissées apercevoir sous les lentilles vertes. Géraldine Gabillet, notre guide, animatrice nature au CPIE (Centre permanent d’initiative pour l’environnement) du pays de Morlaix (Finistère), portant à la boutonnière le badge rouge « Nous voulons des coquelicots » (une campagne nationale antipesticides), nous avait prévenu : « C’est un petit sentier, pas très long, mais on y voit plein de choses… » Plein de confiance, nous nous engageons dans un chemin un peu boueux qui longe un ruisseau.


Éveil des sens


Ce bruit aquatique – parfois simple murmure, d’autres fois cascade plus sonore – nous accompagnera tout au long de notre déambulation champêtre. « C’est la nature en mouvement, le thème précisément…

Avec les enfants, “il y a plein de façons de parler de Dieu”

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« J‘ai posé la question :”Où se trouve le paradis ?” », déclare fièrement Raphaël, 10 ans, qui a suivi le programme #taslaParole. Bien que réservé, ce garçon accepte de témoigner. « Un copain a répondu : “À la droite du Père”, ça m’a assez convaincu », enchaîne avec sérieux le jeune Marseillais qui porte un K-way noir. Le ciel est menaçant au-dessus de la basilique Notre-Dame-de-La-Garde, à Marseille, en ce 8 mai. Mais dans l’enceinte de l’école Lacordaire, dans le XIIIe arrondissement de la cité phocéenne, l’heure est à la joie. Plusieurs centaines d’enfants, de parents et de catéchistes sont venus assister à la Fête du caté, point culminant d’un programme de catéchèse novateur démarré en septembre 2018 et qui court jusqu’à fin juin, intitulé #taslaParole.


Centrales, les questions de l’enfant


Sous cette appellation inspirée des réseaux sociaux, le projet a voulu mettre l’accent sur le questionnement de l’enfant plutôt que sur une transmission verticale du message chrétien. Lors de chaque cours de catéchèse, les élèves marseillais de 7 à 11 ans ont donc été invités à poser des questions à Dieu : « Pourquoi es-tu au ciel ? », « Pourquoi quand on prend l’avion, on ne te voit pas ? », « Comment fais-tu pour nous aimer chacun à la fois ? »… Plus d’une centaine de questions ont circulé dans des boîtes dédiées au sein de jumelages mêlant écoles catholiques et paroisses des quartiers nord et sud de la ville, dans un objectif affiché de mixité sociale et culturelle.


La diversité, un atout clé


« La foi, c’est des questions », argumente soeur Marie-Anne Bourgois, responsable de la catéchèse au sein du diocèse marseillais et instigatrice du projet #taslaParole. « C’est parce que l’enfant se questionne qu’il sera réceptif. L’essentiel n’est pas de donner une réponse, mais d’avancer ensemble, d’écouter l’autre et d’apprendre à respecter les différences », précise la religieuse. La proposition a rapidement fait des émules : une quarantaine de groupes de catéchisme se sont engagés dans l’aventure, chacun recevant les messages des uns et des autres au long des semaines. 


« Le fait que d’autres enfants se posent les mêmes questions qu’eux, ça les marque. Et comme c’est anonyme, il y a moins d’a priori », analyse Gratienne Disdier, enseignante et catéchiste dans une école de l’est marseillais. Depuis septembre, ses élèves ont pu échanger leurs interrogations sur Dieu avec d’autres enfants issus d’une paroisse à forte concentration d’immigrés ainsi qu’avec ceux de Saint-Victor, église historique du Vieux-Port. « Ils comprennent qu’il y a plein de façons de parler de Dieu, ça développe leur écoute », poursuit l’enseignante. Et de conclure : « L’Esprit saint parle à travers eux, et ils ont des choses à dire ! »


Prolonger la réflexion en famille


« Ça m’a motivé pour continuer le caté l’an prochain », assure un élève de CM2. La démarche semble avoir porté ses fruits. Lors de cette fête du 8 mai, les parents ont été conviés à cultiver l’intérêt de leurs enfants pour les questions de foi. Pour Sandrine, mère de Lucas, 8 ans, « ce ne sont pas des sujets dont on discute habituellement à la maison ». Mais elle a constaté l’effet positif de cette méthode : « Lucas ne s’exprime pas beaucoup en classe, là il a été très fédérateur dans son groupe de caté. Une brèche est ouverte : il m’a même demandé de faire sa première communion. »


À Savoir

#taslaParole https://marseille.catholique.fr

Tenir bon face à la surconsommation

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Éduquer à contre-courant dès le plus jeune âge n’a rien d’évident avec les jouets sous licence, la mode vestimentaire, puis très vite les goûters d’anniversaires, la malbouffe, les écrans, un Smartphone à 10 ans… Valérie Halfon vient de publier Tout le monde en a un, sauf moi ! dans lequel elle passe en revue tous ces sujets devenus problématiques. Elle rappelle le rôle essentiel des parents et la juste manière de présenter une alternative qui aidera l’enfant à se construire, gagner en confiance en lui, sans pour autant devenir un paria. Interview.


Comment réagir lorsqu’il veut un sac à dos neuf alors que le sien n’est pas abîmé, une paire de baskets ou un blouson hors de prix, un téléphone ?


Toute demande est une opportunité de dialogue. Plutôt que de passer en mode automatique, évaluer le budget et répondre par oui ou par non, commencez par écouter, posez-lui des questions. En réalité, au-delà du permis/défendu, ces sujets renvoient à des questions existentielles : identité, affirmation de soi et de ses valeurs, place dans un groupe… Les enfants sont gouvernés par le principe du plaisir. Tout l’enjeu de l’éducation consiste à les amener au principe de réalité. Si les parents ne le font pas, la vie s’en chargera… sans tendresse. Or notre société de consommation invite à la facilité. Très tôt, il s’agit de donner des limites, d’accepter qu’on ne pourra pas tout avoir et que l’argent ne saurait nous combler.


Parfois, les parents cèdent de crainte que leur enfant ne soit marginalisé.


Être reconnu par ses pairs est un besoin, à tout âge, sans doute davantage à l’adolescence où l’enfant se construit, se distancie du modèle parental et cherche à faire ses preuves. C’est pourquoi il ne faut pas attendre le collège pour favoriser des prises de conscience et le baigner dans une manière de penser alternative. Elle commence par notre propre attitude d’adulte… Quel est mon rapport à la technologie, à l’argent, au regard de l’autre, à la conformité ? Si mes enfants me voient happée par mon téléphone portable ou occupée à compter le nombre de Like sur mes publications… je peux continuer de leur tenir de beaux discours ! Tout est question de cohérence.


Vous évoquez des prises de conscience, à quoi pensez-vous ?


La réalité, c’est que les enfants sont manipulés par les géants du numérique, par des marques sans scrupules prêtes à tout pour conquérir des parts de marché. Il faut être conscient que des personnes sont payées pour nous faire consommer. Si l’on ne fait rien, nos enfants tomberont dans leurs panneaux publicitaires. Très jeunes, ils peuvent entendre que des enfants de pays pauvres sont exploités pour assembler des vêtements, que des produits alimentaires ou cosmétiques contiennent des produits néfastes pour notre santé, notre planète. Cette conscience les rendra parfois même plus vigilants que nous !


Selon vous, quelle est la priorité éducative pour les parents ?


D’après une étude d’Oxford, 47 % des métiers risquent d’avoir disparu en 2035. Que restera-t-il à l’homme ? Les deux spécificités humaines résident dans sa créativité et ses qualités morales. Voilà le propre de l’homme, qu’une machine n’aura jamais. Face aux succès faciles, aux fortunes gagnées par des « youtubers » parfois encore mineurs, aux salaires disproportionnés de joueurs de foot, favorisez le goût de l’effort, la persévérance et la créativité. Ce sont autant d’antidotes à la passivité à laquelle invite notre société. Veillez aussi à ce qu’ils épanouissent leurs qualités morales et leur vie intérieure… Une étude américaine a montré que les jeunes des années 2010 étaient 40 % moins empathiques que ceux des années 1990 ! Le rôle des parents consiste à aider leur enfant à prendre conscience de ses richesses intérieures.


Comment cultiver ses qualités morales ?


À l’heure des réseaux sociaux, nos enfants ont plus que jamais besoin de vraies relations et de nouer des liens « IRL » (in real life, « dans la vraie vie »). Ils ont cette capacité à donner. Aidons-les à explorer cette fibre, avant qu’ils ne soient transformés en joueurs de jeux vidéo obsessionnels ! Voyez Arthur Soufflet, ce garçon de 10 ans qui finance des paniers-repas pour des sans-abri près de Cambrai en vendant des dessins. Quelles sont les aptitudes de votre enfant, dans quoi peut-il s’engager, devenir bénévole ? Visite de personnes âgées, confection de gâteaux pour des SDF, aide aux devoirs, course pour une cause… Tout est possible ! Se rendre utile rend heureux. Car on comprend pourquoi on est venu dans ce monde et ce qu’on a de spécifique à y apporter.


Ce n’est pas facile de ramer à contre-courant…


Ne doutez pas de vos valeurs. Commencez par en vivre : vous-même, êtes-vous engagés auprès des autres, votre style de vie vous rend-il heureux ? Vous n’êtes pas si isolés que vous le croyez. Beaucoup de parents cèdent à contrecoeur aux sirènes de la consommation, car ils n’osent pas affronter la majorité. Motivez, faites-vous des alliés. À quelques-uns, vous pouvez décider cette année de proposer des anniversaires « made in home », par exemple, ou organiser une conférence sur l’impact des écrans. Un Smartphone à 11 ans, c’est non ! Vos enfants vous remercieront d’avoir tenu bon. Aux États-Unis, une nouvelle tendance prône « Wait until 8 th » c’est-à-dire pas de téléphone portable avant la 4e. En France, la plateforme Slow We Are répertorie les vêtements de mode écoresponsable. Des prises de conscience émergent, rejoignez ce mouvement et devenez acteurs du changement !


Concrètement, par quoi commencer ?


Cette éducation suppose un réel investissement des parents. Cuisiner ensemble plutôt que d’aller dans un fast-food, réparer un objet au lieu de le jeter, entretenir son vélo, bricoler… tout prend du temps. Accompagnez l’enfant qui va sur Internet, aidez-le à ne pas être dupe de la réalité trafiquée d’Instagram. Relevez des défis en famille. Enfin, soyez connectés à la qualité. Si vous prenez soin de proposer à vos enfants de belles choses en tout – des vêtements aux films -, ils sauront reconnaître une étoffe bas de gamme et une série télévisée nulle. Finalement, il n’est pas tant question d’interdire, que d’adopter un certain état d’esprit : veillez à leur offrir des moments de qualité et des souvenirs qu’une console de jeux ne pourra jamais leur procurer.


À lire 
Tout le monde en a un, sauf moi ! de Valérie Halfon, Albin Michel.