Anne-Dauphine Julliand : “La maladie et le bonheur ne sont pas incompatibles“

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Ces enfants ont entre 6 et 9 ans et la maladie est entrée avec force dans leur vie. Anne-Dauphine Julliand les a filmés « avec sensibilité mais sans sensiblerie ». En se mettant à leur hauteur, physiquement et psychiquement, à leur écoute : « Je les ai laissés libres de ce qu’ils avaient envie de partager. » Journaliste de formation, Anne-Dauphine Julliand a elle-même été confrontée, avec son mari, à la maladie et à la mort de l’une de ses filles, Thaïs, décédée à l’âge de 3 ans. Et au lourd handicap de sa seconde fille, Azylis. Deux drames dont elle a témoigné sans pathos au fil de deux livres : Deux Petits Pas sur le sable mouillé et Une journée particulière (les Arènes). C’est cette expérience intime qui, dit-elle, lui a donné « la légitimité » pour réaliser Et les Mistrals gagnants. Un documentaire dont le titre fait écho à la chanson de Renaud et notamment à ces paroles : « Te raconter enfin qu’il faut aimer la vie Et l’aimer même si le temps est assassin Et emporte avec lui les rires des enfants. »  


Un enfant nous dit : « La maladie n’empêche pas d’être heureux ». C’est pour cela que vous avez réalisé ce film ?


Anne-Dauphine Julliand. C’est pour cette phrase et surtout pour celle qui suit : « Rien n’empêche d’être heureux. » Tugdual nous dit cela avec toute sa spontanéité. Il part de son propre cas puis il réfléchit, « Qu’est ce qui empêche d’être heureux ? » J’aime qu’il y ait la continuité de ces deux phrases, car c’est le propos du film de dépasser le cadre de la maladie et nous interroger sur ce qui dans la vie nous empêche d’être heureux. Quand on voit comment un enfant conçoit la vie, cela enlève beaucoup de nos peurs et de nos difficultés, en tout cas cela les remet à leur place.


En quoi vivent-ils la maladie différemment des adultes ?


Elle ne va pas envahir le reste de leur vie. Bien sûr, il y a des moments compliqués et quand c’est dur, ils le disent. Mais ils sont capables de savoir vivre l’instant comme il est. Alors que nous, adultes – c’est mon expérience – nous avons tendance face à une maladie, à nous laisser entièrement contaminer par cette épreuve. On en vient même à penser : « Est-ce que je peux encore être heureux, est-ce que j’ai le droit de l’être ? »


Ces jeunes que vous filmez sont étonnants de courage, voire de maturité…


Oui, mais ils restent des petits enfants. Plus que de la maturité, j’y vois de la sagesse, une conception très instinctive de la vie.