Cultiver le plaisir d’écrire avec le Labo des histoires

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La nuit tombe sur l’automne. Devant leurs cahiers ouverts, ils ont l’air bien, présents et concentrés. Certains ont déjà huit heures de cours derrière eux. Mais la qualité d’attention et la plénitude du silence qui règnent un mardi soir, dans cette annexe de la Maison de la poésie, à deux pas du Centre Pompidou, à Paris, feraient rêver n’importe quel prof. Les cinq filles et trois garçons attablés dans ce bel atelier aux murs de pierres ont entre 14 et 24 ans. Ils font partie des 30.000 enfants et jeunes accueillis par le Labo des histoires en 2016, dans toute la France.


Fondée il y a tout juste cinq ans, l’association présidée par l’éditeur Philippe Robinet (Kero et Calmann-Lévy) propose gratuitement aux moins de 25 ans des ateliers d’écriture animés par des professionnels. « Vous voulez faire de la musique ? Vous avez les conservatoires. Du sport ? Tout le réseau des clubs et associations. Vous voulez écrire ? Vous êtes marri, pour parler poliment », argumente Charles Autheman, le délégué général du réseau national en pleine expansion, avec neuf antennes en France et outre-mer et d’autres à venir.


Les jeunes n’aiment pas écrire ?


« Les pratiques culturelles évoluent, mais à ceux qui clament que les jeunes n’aiment pas écrire, on voulait montrer le contraire », poursuit-il. Avec la conviction que la discipline artistique mérite des lieux « inspirants, valorisants pour les jeunes », la structure s’est installée dans de beaux écrins de culture, à la Maison de la poésie, à Paris, au théâtre de la Manufacture, à Nancy (Meurthe-et-Moselle), ou à la Condition publique, à Roubaix (Nord), et l’équipe a vite décroché des soutiens solides. Celui du président de la République – le Labo a notamment reçu le label « La France s’engage » initié par François Hollande – mais aussi l’appui du Centre national du livre et de grandes fondations d’entreprises, dont celle de la SNCF.


Ce soir-là, c’est Martine Paulais, auteure de théâtre, de poésie et de fiction, spécialisée dans l’accompagnement à l’écriture, qui anime l’atelier. Parmi les « laborantins », comme on les appelle ici, certains ont commencé à écrire « tout petits ». Fanny a bouclé son « premier livre à 13 ans », quelques poèmes aussi, et souhaite partager sa passion. Alexandre, 15 ans, vient là chaque semaine depuis deux ans pour « s’exprimer et se faire plaisir » et apprécie particulièrement la « bonne humeur » à l’oeuvre dans ces rencontres. 

Martine Paulais, auteure de théâtre et de nouvelles, anime un atelier.
Martine Paulais, auteure de théâtre et de nouvelles, anime un atelier. © Stéphanie Jayet pour La Vie


Au programme du jour, l’écriture de nouvelles en 55 mots, sous le haut patronage d’Hemingway (dont la micronouvelle en six mots fit couler l’encre de la théorie littéraire) et de Jacques Sternberg qui, dans ses Contes griffus, propose d’excellents spécimens du genre, comme le Miracle ramassé en 39 mots. 


« Pour réussir une nouvelle très courte, il nous faut un petit nombre de personnages, une situation et une chute », résume Martine Paulais. Au mur, un extrait reproduit sur deux mètres de haut du Livre de Perle, du romancier pour la jeunesse Timothée de Fombelle, et des aphorismes de circonstance (Diderot : « Il vaut mieux écrire de grandes choses que d’en exécuter de petites » ; Cocteau : « Un chef-d’oeuvre de la littérature n’est jamais qu’un dictionnaire en désordre. »)


Bâtir un récit en 15 minutes


L’atelier va se jouer en trois rounds. Martine Paulais a prévu une série de situations délicates, puis des photos ou des images, et enfin une phrase d’amorce, sur laquelle Laurène, Pauline, Alexandre, Fanny, Alexis, Laure, Elio et Flore-Amélie vont devoir bâtir une histoire en 15 minutes. Inutile de retenir votre souffle et de vous en faire pour eux. Ils foncent, ils rayent et puis reviennent, ils tournent autour de leurs idées avec entrain : ils ont toujours un récit à livrer. « Quand on se concentre sur la contrainte, on oublie d’avoir peur d’écrire ! », note l’animatrice.


Laurène devait inventer autour de l’histoire d’un homme qui reçoit un poids sur le crâne. Elle lit : « Léo marchait dans la campagne lorsqu’un objet lourd et doré lui tomba sur la tête et l’assomma. Je sais que tu es fier d’avoir gagné cet oscar, Georges, mais je pense que ça n’était pas une bonne idée de le prendre avec toi en deltaplane. » Pauline a pioché Night Shadows, une gravure de Edward Hopper figurant un homme marchant seul dans la rue, en plongée. Elle se lance : « Deux heures qu’il guette en attendant qu’un piéton passe. Il est à sa fenêtre. Il s’est assuré que personne ne gêne ce qu’il a entrepris de faire. Un homme arrive. Enfin. L’ombre est idéale. Cette fois c’est la bonne. Il se positionne et mitraille. Plus tard, dans son salon, il accrochera la photo. »

Cultiver le plaisir d'écrire avec le Labo des histoires
© Stéphanie Jayet pour La Vie


Pauline a commencé les ateliers à l’âge de 9 ans. À 16 ans, elle teste les propositions des cafés et des théâtres, s’exerce à la poésie, aux carnets de voyage, aux critiques de spectacles. L’an dernier, elle a participé au cycle polar du Labo. Au troisième tour, les laborantins devront tous commencer leur texte par la première phrase d’une nouvelle tirée de la Femme sur la plage avec un chien, de William Boyd : « Le patient numéro 39 a été admis ce matin. »


Récits piégés, histoires à rebondissements, chroniques psychiatriques… Autour de la table, on s’enthousiasme. Et quand un récit est plus bancal, on analyse ensemble et, naturellement, les points positifs émergent : « Même si ce détail ne marche pas, ton histoire est vraiment bien construite », dit une jeune fille à un des garçons, plus jeune qu’elle. « On dirait le début d’un polar qu’on aurait bien envie de lire », entend-on d’un texte qui plante un univers mieux qu’il ne respecte la consigne. Marine Noé, la directrice du Labo parisien n’est pas surprise. « Les animateurs établissent un cadre invitant au respect, mais les enfants sont spontanément bienveillants, c’est très agréable », note-t-elle.


Expérience de liberté


L’association propose différentes formules : ateliers à la carte, masterclass pour découvrir l’univers d’un auteur en deux heures, cycles de dix séances dédiées à un genre : roman, scénario, paroles de chanson, etc. Les Labos de l’histoire interviennent aussi en milieu hospitalier, auprès des jeunes du service militaire adapté outre-mer, dans les librairies, les bibliothèques, les écoles et les collèges, en plus de leurs espaces propres. La motivation ne peut être la même quand on est volontaire et « commis d’office ». Mais la demande va croissant. Après être tombée un temps en désuétude, l’écriture (ré)créative inspire.


Nourri, entre autres, de l’expérience de l’écrivain américain Dave Eggers, fondateur du réseau d’ateliers 826 National, le Labo a senti le désir monter et a su proposer un programme vivant, varié et soigné avant même que l’université française se lance (avec la création du premier Master lettres et création littéraire, au Havre, en 2012). 


Aujourd’hui, l’association qui se déploie sur les grandes villes de France entend aussi répondre aux demandes de plus petites communes et de territoires ruraux. Elle s’apprête à lancer le Labo-mobile, une antenne itinérante que les collectivités locales accueilleront pour une ou deux semaines. Le but : que cet accompagnement gratuit puisse profiter au plus grand nombre. La carte de l’illettrisme recouvre celle de la pauvreté.


Au Labo, c’est entendu, passé ce prérequis de l’accessibilité, on ne vise ici rien d’autre que le plaisir. « Si leur niveau de grammaire ou d’orthographe progresse, s’ils se sentent mieux après, tant mieux. Mais c’est en plus. Notre but est d’offrir aux enfants et aux jeunes un moment agréable, de casser la routine, de leur ouvrir un espace d’inventivité, des trésors de savoir, rappelle Charles Autheman. Pour les jeunes, l’écriture, celle du journal intime comme du monde imaginaire, est souvent la première expérience de la liberté. Voilà ce qui nous paraît essentiel. »

Cultiver le plaisir d'écrire avec le Labo des histoires
© Stéphanie Jayet pour La Vie


Où trouver le Labo des histoires ?

Le réseau national comprend neuf antennes en France et outre-mer, et il est en expansion. Pour tout renseignement sur les ateliers : http://labodeshistoires.com

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La nuit tombe sur l’automne. Devant leurs cahiers ouverts, ils ont l’air bien, présents et concentrés. Certains ont déjà huit heures de cours derrière eux. Mais la qualité d’attention et la plénitude du silence qui règnent un mardi soir, dans cette annexe de la Maison de la poésie, à deux pas du Centre Pompidou, à Paris, feraient rêver n’importe quel prof. Les cinq filles et trois garçons attablés dans ce bel atelier aux murs de pierres ont entre 14 et 24 ans. Ils font partie des 30.000 enfants et jeunes accueillis par le Labo des histoires en 2016, dans toute la France.


Fondée il y a tout juste cinq ans, l’association présidée par l’éditeur Philippe Robinet (Kero et Calmann-Lévy) propose gratuitement aux moins de 25 ans des ateliers d’écriture animés par des professionnels. « Vous voulez faire de la musique ? Vous avez les conservatoires. Du sport ? Tout le réseau des clubs et associations. Vous voulez écrire ? Vous êtes marri, pour parler poliment », argumente Charles Autheman, le délégué général du réseau national en pleine expansion, avec neuf antennes en France et outre-mer et d’autres à venir.


Les jeunes n’aiment pas écrire ?


« Les pratiques culturelles évoluent, mais à ceux qui clament que les jeunes n’aiment pas écrire, on voulait montrer le contraire », poursuit-il. Avec la conviction que la discipline artistique mérite des lieux « inspirants, valorisants pour les jeunes », la structure s’est installée dans de beaux écrins de culture, à la Maison de la poésie, à Paris, au théâtre de la Manufacture, à Nancy (Meurthe-et-Moselle), ou à la Condition publique, à Roubaix (Nord), et l’équipe a vite décroché des soutiens solides. Celui du président de la République – le Labo a notamment reçu le label « La France s’engage » initié par François Hollande – mais aussi l’appui du Centre national du livre et de grandes fondations d’entreprises, dont celle de la SNCF.


Ce soir-là, c’est Martine Paulais, auteure de théâtre, de poésie et de fiction, spécialisée dans l’accompagnement à l’écriture, qui anime l’atelier. Parmi les « laborantins », comme on les appelle ici, certains ont commencé à écrire « tout petits ». Fanny a bouclé son « premier livre à 13 ans », quelques poèmes aussi, et souhaite partager sa passion. Alexandre, 15 ans, vient là chaque semaine depuis deux ans pour « s’exprimer et se faire plaisir » et apprécie particulièrement la « bonne humeur » à l’oeuvre dans ces rencontres. 

Martine Paulais, auteure de théâtre et de nouvelles, anime un atelier.
Martine Paulais, auteure de théâtre et de nouvelles, anime un atelier. © Stéphanie Jayet pour La Vie


Au programme du jour, l’écriture de nouvelles en 55 mots, sous le haut patronage d’Hemingway (dont la micronouvelle en six mots fit couler l’encre de la théorie littéraire) et de Jacques Sternberg qui, dans ses Contes griffus, propose d’excellents spécimens du genre, comme le Miracle ramassé en 39 mots. 


« Pour réussir une nouvelle très courte, il nous faut un petit nombre de personnages, une situation et une chute », résume Martine Paulais. Au mur, un extrait reproduit sur deux mètres de haut du Livre de Perle, du romancier pour la jeunesse Timothée de Fombelle, et des aphorismes de circonstance (Diderot : « Il vaut mieux écrire de grandes choses que d’en exécuter de petites » ; Cocteau : « Un chef-d’oeuvre de la littérature n’est jamais qu’un dictionnaire en désordre. »)


Bâtir un récit en 15 minutes


L’atelier va se jouer en trois rounds. Martine Paulais a prévu une série de situations délicates, puis des photos ou des images, et enfin une phrase d’amorce, sur laquelle Laurène, Pauline, Alexandre, Fanny, Alexis, Laure, Elio et Flore-Amélie vont devoir bâtir une histoire en 15 minutes. Inutile de retenir votre souffle et de vous en faire pour eux. Ils foncent, ils rayent et puis reviennent, ils tournent autour de leurs idées avec entrain : ils ont toujours un récit à livrer. « Quand on se concentre sur la contrainte, on oublie d’avoir peur d’écrire ! », note l’animatrice.


Laurène devait inventer autour de l’histoire d’un homme qui reçoit un poids sur le crâne. Elle lit : « Léo marchait dans la campagne lorsqu’un objet lourd et doré lui tomba sur la tête et l’assomma. Je sais que tu es fier d’avoir gagné cet oscar, Georges, mais je pense que ça n’était pas une bonne idée de le prendre avec toi en deltaplane. » Pauline a pioché Night Shadows, une gravure de Edward Hopper figurant un homme marchant seul dans la rue, en plongée. Elle se lance : « Deux heures qu’il guette en attendant qu’un piéton passe. Il est à sa fenêtre. Il s’est assuré que personne ne gêne ce qu’il a entrepris de faire. Un homme arrive. Enfin. L’ombre est idéale. Cette fois c’est la bonne. Il se positionne et mitraille. Plus tard, dans son salon, il accrochera la photo. »

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Pauline a commencé les ateliers à l’âge de 9 ans. À 16 ans, elle teste les propositions des cafés et des théâtres, s’exerce à la poésie, aux carnets de voyage, aux critiques de spectacles. L’an dernier, elle a participé au cycle polar du Labo. Au troisième tour, les laborantins devront tous commencer leur texte par la première phrase d’une nouvelle tirée de la Femme sur la plage avec un chien, de William Boyd : « Le patient numéro 39 a été admis ce matin. »


Récits piégés, histoires à rebondissements, chroniques psychiatriques… Autour de la table, on s’enthousiasme. Et quand un récit est plus bancal, on analyse ensemble et, naturellement, les points positifs émergent : « Même si ce détail ne marche pas, ton histoire est vraiment bien construite », dit une jeune fille à un des garçons, plus jeune qu’elle. « On dirait le début d’un polar qu’on aurait bien envie de lire », entend-on d’un texte qui plante un univers mieux qu’il ne respecte la consigne. Marine Noé, la directrice du Labo parisien n’est pas surprise. « Les animateurs établissent un cadre invitant au respect, mais les enfants sont spontanément bienveillants, c’est très agréable », note-t-elle.


Expérience de liberté


L’association propose différentes formules : ateliers à la carte, masterclass pour découvrir l’univers d’un auteur en deux heures, cycles de dix séances dédiées à un genre : roman, scénario, paroles de chanson, etc. Les Labos de l’histoire interviennent aussi en milieu hospitalier, auprès des jeunes du service militaire adapté outre-mer, dans les librairies, les bibliothèques, les écoles et les collèges, en plus de leurs espaces propres. La motivation ne peut être la même quand on est volontaire et « commis d’office ». Mais la demande va croissant. Après être tombée un temps en désuétude, l’écriture (ré)créative inspire.


Nourri, entre autres, de l’expérience de l’écrivain américain Dave Eggers, fondateur du réseau d’ateliers 826 National, le Labo a senti le désir monter et a su proposer un programme vivant, varié et soigné avant même que l’université française se lance (avec la création du premier Master lettres et création littéraire, au Havre, en 2012). 


Aujourd’hui, l’association qui se déploie sur les grandes villes de France entend aussi répondre aux demandes de plus petites communes et de territoires ruraux. Elle s’apprête à lancer le Labo-mobile, une antenne itinérante que les collectivités locales accueilleront pour une ou deux semaines. Le but : que cet accompagnement gratuit puisse profiter au plus grand nombre. La carte de l’illettrisme recouvre celle de la pauvreté.


Au Labo, c’est entendu, passé ce prérequis de l’accessibilité, on ne vise ici rien d’autre que le plaisir. « Si leur niveau de grammaire ou d’orthographe progresse, s’ils se sentent mieux après, tant mieux. Mais c’est en plus. Notre but est d’offrir aux enfants et aux jeunes un moment agréable, de casser la routine, de leur ouvrir un espace d’inventivité, des trésors de savoir, rappelle Charles Autheman. Pour les jeunes, l’écriture, celle du journal intime comme du monde imaginaire, est souvent la première expérience de la liberté. Voilà ce qui nous paraît essentiel. »

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Parents, reprenez les rênes !

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À 8 ans, il a pris l’habitude de mentir effrontément, de chaparder de la nourriture qu’il grignote dans sa chambre, d’utiliser en cachette le portable familial. Et de tout négocier. De plus en plus fort, jusqu’à obtenir gain de cause. Raphaël va jusqu’à insulter son père. Ce dernier se lance alors dans un long sermon explicatif que le fiston écoute en soupirant, visage fermé. Sa mère le prive de dessert, mais a tôt fait d’oublier la sanction. Et l’enfant, qui se garde bien de la lui rappeler, obtient sa part de gâteau au chocolat. 


Devenu « difficile », Raphaël se retrouve chez le psychologue. Son père explique : « J’essaie de l’élever avec beaucoup d’amour, de nourrir son estime de lui-même. Mais je ne suis pas toujours compris par mon entourage. » Et pour cause. Sous couvert de « bienveillance », certains parents n’osent plus imposer quoi que ce soit à l’enfant : menu, activités, heure du coucher… 


L’enfant…

Tous aux fourneaux !

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Quand il était « petit », Basile a dévoré un livre de Claude Ponti, Blaise et le Château d’Anne Hiversère, une histoire de poussin masqué, chef de chantier d’une demeure en chocolat, à manger de l’intérieur. Pendant presque un an, le jeune garçon a dessiné des châteaux-gâteaux. « À la fin, je réussissais bien mes tours en meringue ! » se souvient-il, du haut de ses 8 ans. 


Et puis ce rêveur appliqué a fait son palais chez les pâtissiers de son quartier, triangle d’or des becs sucrés où officient ceux qu’il a retrouvés à la télé, Christophe Michalak et Christophe Adam (Qui sera le prochain grand pâtissier ? sur France 2). Comme eux, notre bon élève, fils d’un médecin et d’une institutrice, veut en faire son métier. Dans quelques années, Basile viendra peut-être grossir les rangs des apprentis cuisiniers, toujours plus nourris en France. 


Entre 2010 et 2015, le nombre d’inscrits en CAP…

Pourquoi donner rend heureux

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« Donner fait du bien aux autres et à soi-même », tel était le slogan de France Générosités en 2015. Un slogan reconduit cette année. Qu’est-ce qui vous séduit dans ce message ?


C’est un message nouveau qui tranche avec les angles souvent utilisés pour les appels au don (la responsabilité, la morale et l’émotionnel). Avec un tel slogan, France Générosités contribue à ce que notre société reconnaisse aujourd’hui les bienfaits du don, pour tout le monde. En tant que spécialiste de l’économie du bonheur (voir ci-dessous), j’étudie comment les comportements économiques, notamment à travers nos modes de consommation et en entreprise, peuvent avoir un impact sur notre bonheur. Or, selon la recherche, s’il y a un type d’action économique qui augmente significativement le bonheur, c’est bien le don.


L’argent ne fait pas le bonheur, mais le donner oui, assurez-vous. Selon vous, plus on donne, plus on a de chances d’être heureux ?


Je travaille d’après des observations faites par des chercheurs internationaux soit en laboratoire soit dans la vie réelle. À partir de ces matériaux, on observe que les gens qui donnent, quel que soit le montant de leur don, sont plus heureux que leurs homologues (du même âge et de même situation socio-économique) qui ne donnent pas. Une étude internationale a même révélé qu’un donateur augmente le niveau de satisfaction de sa vie autant que s’il voyait un doublement de son salaire. En clair : un euro donné vaut beaucoup plus (jusqu’à 20 fois plus) qu’un euro gagné en salaire ! Et le don augmente de manière bien plus durable le bonheur que la consommation.


Comment expliquer ce fait ?


Les sciences du bonheur, qui font intervenir la psychologie, les neurosciences et même l’économie, mesurent trois dimensions du bonheur : premièrement, la dimension émotionnelle, que l’on appelle « bien-être émotionnel », c’est-à-dire l’équilibre entre émotions positives et négatives, et qui s’expérimente dans le court terme. Ensuite, la dimension cognitive reflétée par la « satisfaction de la vie », une note d’ensemble donnée à sa vie : elle s’inscrit dans le moyen terme. Enfin, la dimension psychologique, ou « bien-être psychologique », qui s’inscrit, elle, dans le long terme et inclut différents sentiments (l’autonomie, le contrôle, la relation aux autres, l’estime de soi, le sens de sa vie, etc.). 


De l’altruisme à la gratuité, les nouvelles formes de don


En donnant, on ressent immédiatement des émotions positives, la vie semble plus satisfaisante et avoir plus de valeur, et on se sent plus autonome dans ses choix, tout en ayant un impact sur le monde et en trouvant un sens à la vie. Je pourrais dire comme Jean-Jacques Rousseau dans les Rêveries d’un promeneur solitaire : « Je sais et je sens que faire du bien est le plus vrai bonheur que le cœur humain puisse goûter. »


Aux États-Unis, des études ont montré que les personnes sans ressources donnaient davantage que les riches. Un paradoxe ?


Non, ce n’est pas vraiment un paradoxe. Le don répond à de multiples motivations. Donner est positif pour l’image de soi et l’image sociale. Pour ceux qui sont en bas de l’échelle, c’est donc très important. Le don, au même titre que la consommation ostentatoire, contribue à donner un statut.


Quels conseils donnez-vous à ceux qui souhaitent faire un don mais ne savent pas trop comment s’y prendre ?


Je préconise de ne pas attendre le Téléthon pour donner, mais de mobiliser sa puissance de don tout au long de l’année, par de petits dons fréquents plutôt que des versements importants mais rares. Cela permet de se reconnecter fréquemment à ses valeurs. Je ne suis pas favorable au prélèvement automatique, car, pour générer du bonheur, le don doit être accompli consciemment ; si l’on a recours à ce moyen de paiement, on finit par l’oublier. Mais je sais aussi que pour le bonheur des associations, la régularité et la prévisibilité de ces versements réguliers sont un vrai plus… Celles-ci peuvent amplifier la dimension solidaire du don, en organisant des communautés de donateurs, pour créer chez ces derniers ce sentiment d’appartenance à un groupe qui partage les mêmes valeurs.


Être croyant contribue-t-il au bonheur ?


Les chercheurs ont repéré que le don a un effet très clairement positif chez les adeptes et pratiquants d’une religion. Le monde apparaît moins chaotique au croyant car il croit en Dieu, il a trouvé un sens à sa vie, et il est connecté socialement au monde, ne serait-ce qu’en allant aux offices où il rencontre d’autres personnes.


Selon le rapport du World Giving Index 2015, qui étudie l’état de la générosité dans le monde, la France est en retard sur d’autres pays occidentaux, comment l’expliquer ?


Les chiffres montrent qu’il y a environ 30% de donateurs réguliers en France contre 60 à 70% dans les pays anglo-saxons. Chez ces derniers, le total des dons privés se situe dans une fourchette comprise entre 0,5% et 1,4% du PIB, alors qu’il ne représente que 0,1% dans l’Hexagone. Les habitudes prises en matière de dons sont notamment le reflet des structures politiques dans lesquelles une population évolue. En France, l’État a pris en charge un certain nombre de causes sociales et les Français se sont habitués à se reposer sur lui. De nombreuses personnes ne donnent pas car elles donnent déjà aux impôts. Mais, par définition, le don, volontaire, n’est pas un impôt ! Les études affirment aussi qu’environ 30% de l’écart de bonheur entre la France et les pays dits « les plus heureux au monde » (pays scandinaves et anglo-saxons) s’expliquerait par la moindre propension à donner des Français.


La défiance des Français vis-à-vis de l’État peut-elle avoir un impact sur leurs dons ?


Oui, je le crois. On sait depuis longtemps que les gens donnent plus à des organismes quand ils considèrent ceux-ci comme efficaces. Une étude très récente a montré que les dons aux associations dépendaient aussi de la perception de l’efficacité de l’État et donc des impôts qu’il collecte. Lorsque ce dernier semble peu efficace, les intermédiaires que sont les associations en pâtissent également. L’impact sur le don est négatif quand les particuliers paient beaucoup d’impôts et qu’en plus, ils ont l’impression que leur argent est mal utilisé. Une attitude répandue, dans ce genre de situations, est de se passer des intermédiaires que sont les associations et de garder son argent pour soi ou pour s’occuper de ses proches.


 


L’économie du bonheur


Ce nouveau courant de recherche en économie s’inscrit dans la voie ouverte par des économistes iconoclastes des années 1970. Ceux-ci ont commencé à étudier les corrélations entre les différentes variables économiques et le niveau de bonheur des individus à travers le monde. Au même moment se sont développées la psychologie positive, qui étudie l’épanouissement des individus, ou encore la psychologie hédoniste, qui s’intéresse au plaisir et à la satisfaction. Ces courants prennent en compte davantage les émotions positives et le bien-être plutôt que les pathologies mentales.

Ces adolescents qui ont “la rage“

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« J’ai la rage » cet état de tension extrême, caractéristique de l’incertitude adolescente, peut mener à l’impasse et à la destruction ou servir de moteur. C’est aussi un cri qui monte dans une société où l’individu, chargé de se façonner par lui-même, guette sans fin la reconnaissance des autres.


Daniel Marcelli, psychiatre, est président de la Fédération nationale des écoles des parents et des éducateurs. Il est aussi vice-président de la Société française de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et disciplines associées.


Pourquoi vous être intéressé à cette jeunesse « enragée » ?


Le mot de « rage » revient sans cesse dans les constats cliniques et le discours médiatique. Il y a 40 ans, on ne disait pas : « J’ai la rage », mais : « Je suis en colère contre mon père, contre la société… » La rage diffère de l’émotion, car elle précède la rencontre…

Portrait d’une France généreuse

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Le don ne connaît pas la crise. En 2015, 68% des donateurs disent avoir maintenu ou augmenté le montant de leurs dons, selon le baromètre du syndicat France Générosités d’octobre 2016. Et, en 2014, les Français ont donné 4% de plus qu’en 2013 (entre 4,2 et 4,4 milliards d’euros), comme l’indiquent les derniers chiffres en date publiés par Recherches et Solidarités, qui scrute sans relâche depuis 20 ans la générosité dans l’Hexagone. « Pour ce qui concerne l’argent, près de la moitié des Français sont des donateurs, observe Jacques Malet, président de l’association Recherches et Solidarités, mais seulement 20 % donnent d’une manière régulière et significative. »


Les catholiques toujours généreux


« Le montant global augmente parce que les gros dons croissent mais le…

“Quand on lit, on crée avec l’auteur“

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Réfléchie et concise, Zôé, 11 ans, avoue que l’école n’est pas sa tasse de thé : « J’ai l’impression qu’on me répète chaque jour ce que je sais… » En revanche, lecture rime pour elle avec aventure. Lauréate l’an dernier du jeu-concours Les Petits Champions de la lecture, elle partage les raisons de sa passion à l’occasion du lancement de la 5e édition.


Que dirais-tu à un enfant qui n’aime pas lire ?


Je lui demanderais s’il aime voyager. S’il me répond oui, je lui dirais qu’il aime donc lire. Lire, c’est voyager ! C’est dommage de rester chez soi, derrière les écrans, alors qu’on peut s’évader si facilement…


Quand lis-tu ?


Quand j’étais petite, je mangeais les livres, au sens propre ! Aujourd’hui je continue de les dévorer. Je lis beaucoup : tous les…

“Quand on lit, on crée avec l’auteur“

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Réfléchie et concise, Zôé, 11 ans, avoue que l’école n’est pas sa tasse de thé : « J’ai l’impression qu’on me répète chaque jour ce que je sais… » En revanche, lecture rime pour elle avec aventure. Lauréate l’an dernier du jeu-concours Les Petits Champions de la lecture, elle partage les raisons de sa passion à l’occasion du lancement de la 5e édition.


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Je lui demanderais s’il aime voyager. S’il me répond oui, je lui dirais qu’il aime donc lire. Lire, c’est voyager ! C’est dommage de rester chez soi, derrière les écrans, alors qu’on peut s’évader si facilement…


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Réfléchie et concise, Zôé, 11 ans, avoue que l’école n’est pas sa tasse de thé : « J’ai l’impression qu’on me répète chaque jour ce que je sais… » En revanche, lecture rime pour elle avec aventure. Lauréate l’an dernier du jeu-concours Les Petits Champions de la lecture, elle partage les raisons de sa passion à l’occasion du lancement de la 5e édition.


Que dirais-tu à un enfant qui n’aime pas lire ?


Je lui demanderais s’il aime voyager. S’il me répond oui, je lui dirais qu’il aime donc lire. Lire, c’est voyager ! C’est dommage de rester chez soi, derrière les écrans, alors qu’on peut s’évader si facilement…


Quand lis-tu ?


Quand j’étais petite, je mangeais les livres, au sens propre ! Aujourd’hui je continue de les dévorer. Je lis beaucoup : tous les…