“Je ne supporte plus ma belle-mère“

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« Comme beaucoup, je suis à bout de ma belle-mère. Donc je vous écris afin d’avoir votre avis. C’est très compliqué. Je me présente. Je suis pacsée avec mon conjoint. On est ensemble depuis 4 ans et on va se marier. Évidemment elle esquive totalement le sujet. Et on est parents d’un petit garçon qui va avoir quatre mois. Pour tout dire je n’ai même plus envie de la voir. Parfois elle passe plusieurs jours chez le frère de mon conjoint sans honte. Et si elle ne me savait pas récalcitrante, elle le ferait chez nous aussi.

Elle le faisait avant, à moitié. C’était, “On passe dans le coin, et on va passer vous voir tel jour ! Et puis, du coup, on mange chez vous le soir ! Et puis au lieu de repartir (c’est à 150km environ) eh bien on va dormir chez vous ! Vous travaillez le lendemain ? Pas grave, on prendra notre temps et on mettra la clef dans la boîte aux lettres en partant !”

Et puis, tu reviens le soir tu as un meuble qui a bougé de place Car en ouvrant la porte, ça peut taper contre le meuble, et abîmer la porte. Bin voyons !

Maintenant elle ne se permet plus ça. Mais elle impose sa date, et fait une crise d’hystérie, si on a le malheur de refuser… Du coup, en ce moment je suis en période où je ne laisse plus rien passer. Elle ne me voit plus et mon fils non plus. Mon conjoint avait envoyé à la fête des grands-mères une photo de notre fils. En effet, elle a refusé de venir à la maison, car il y avait plusieurs personnes de sa famille invitées, à qui elle ne parle plus, bien évidemment.

Et dix jours plus tard, ils ont proposé de garder le petit certains soirs, quand on a envie de se faire une sortie tous les deux. Mon conjoint était ok pour cet été. J’ai dit “Non, là c’est ma mère. Il a trois mois, et cet été il viendra avec nous. Elle, elle ne sait même pas le prendre dans ses bras ! Tu la vois gérer ?!” Il me dit : “Il sera au lit, et ils n’auront rien à faire”. J’ai dit : “Et s’il y a quoi que ce soit, il faut savoir le prendre au bras. Tu la vois changer une couche ?!?! Non c’est mort ! En plus, dès qu’elle le prend il hurle.” Ça m’horripile. Rien qu’elle frappe à la porte, j’ai un nœud à l’estomac. Il me dit : “Moi aussi, à cause de toi… Enfin, à cause des histoires avec toi. Enfin, à cause de ma mère, comment elle est avec toi.” Il est hors de question qu’elle vienne le garder, même deux heures ! Il me dit mais y aura mon père ! Et il sera dans sa chambre. J’ai dit non il est hors de question. On ne s’entend pas. Elle ne peut pas me “pacter”. Elle ne peut pas “pacter” ma mère. Elle est jalouse. Elle a osé demander à ce que ma famille sorte quand elle est venue à la maternité.

Elle a eu notre petit bébé de trois mois aux bras une minute. Il s’est mis à hurler un truc de malade. J’en aurais pleuré. Je l’avais jamais entendu hurler comme ça. Ça me fait mal au cœur de voir mon petit cœur. Je me suis penchée pour le reprendre et, heureusement, mon conjoint a pris le relai, et a calmé notre petit bout de chou. Je l’ai squatté à fond après, au creux de mes bras à le câliner. Je l’ai repris, quand elle a dit : “I est calme comme le frère de mon conjoint” (mon conjoint et son frère sont adoptés et ne sont pas de vrais frères). J’ai dit : “Calme comme sa maman plutôt !” Jamais elle ne compare mon fils à moi, mais toujours à des personnes qui n’ont aucun lien de sang avec lui… »


 


> La réponse de Jacques Arènes :


Je n’ai donné qu’une partie de votre mail, tant il s’étend pour décrire les détails de votre souffrance avec elle. J’ai coupé, j’ai un peu arrangé, mais j’ai voulu, autant que possible garder le côté enflammé de votre courriel. Il suffit d’un geste pour que le feu de forêt s’allume. C’est tellement sec entre vous, que ça s’embrase très vite. C’est tout de suite la passion. Vous accusez belle-maman de faire des crises d’hystérie, mais vous n’en êtes pas loin, en tous cas dans votre manière de raconter l’histoire. C’est tellement aigu que vous narrez tous les détails, et les hyper-détails, pour démontrer combien elle est insupportable. Avec elle, votre riposte n’est pas graduelle, c’est tout de suite la bombe atomique. Votre conjoint essaie de vous dire que peut-être, ce n’est pas seulement elle, et qu’il y a quelque chose dans votre relation qui vous met toutes les deux les nerfs à vif. Vous êtes tellement mal avec elle, que ce n’est pas complètement étonnant que le petit se mette à hurler quand elle le prend dans ses bras. En tous cas devant, vous. Il perçoit sans doute la tension ambiante. Essayez simplement d’imaginer comment votre conjoint vit le fait d’être comme un casque bleu, pris entre les missiles qui le survolent de chaque côté de la ligne de front.


Ce que j’écris là est une constatation. Le pourquoi de cette situation, je ne le connais pas. Si vous m’écrivez, c’est que vous pensez que ce n’est pas complètement ses défauts, sa jalousie, son côté intrusif qui posent problème, mais qu’il y aussi quelqu’un en vous qui surréagit à ce qu’elle.


Tentons donc de comprendre. Je saisis au vol quelques signifiants essentiels, pas tous présents dans l’extrait que je mets en ligne. Vous employez, par exemple, plusieurs fois l’expression « c’est mort » ; c’est une manière de parler et, en même temps, cela exprime un parfum d’angoisse de mort, qui est en filigrane de vos propos. Votre enfant a été opéré très tôt, écrivez-vous ailleurs, dans sa jeune vie. Votre belle-mère s’est montrée envahissante dès ce moment-là, à l’hôpital. Vous la percevez dangereuse, d’où votre réaction forte. Si elle prend votre enfant dans ses bras, il est, dans votre esprit, en situation de risque, presqu’en danger. Quelque chose dans votre ressenti – quasi biologique – de « vraie » mère vous le fait sentir. Dans votre vision, elle ne sait pas ce que c’est d’avoir porté un enfant, et de l’avoir senti sortir de son corps. Elle ne connaît pas cette angoisse de le perdre que vous avez eue. J’essaie de traduire l’explosion de votre ressenti. Votre lien particulier, viscéral, avec votre enfant ne serait pas reconnu par elle. Au fond, à travers lui, c’est vous qui êtes effacée, niée, supprimée. Vous racontez ailleurs un autre épisode où elle refuse obstinément – et probablement inconsciemment – de vous inclure dans un groupe pris en photo. Vous adoptez avec elle une logique de survie. Ou c’est elle, ou c’est vous. Votre famille non plus, votre mère par exemple, ne peut exister en face d’elle.


En face de vous – et, en prolongement, en face de votre petit, qui est « encore » un bout de vous – votre belle-mère existe trop. Vous tentez de rééquilibrer la donne en insistant, dans d’autres passages de votre lettre, sur le fait que l’enfant est bien à vous, et que vous l’avait fait à deux, pas avec elle. Tout cela pose, en creux, une autre question, mystérieuse. Quelle est la nature du lien entre elle et son fils, votre conjoint ? Il est adopté, mais il est quand même, quelque part, son « vrai » fils. En doutez-vous ? Êtes-vous gênée par la relation qu’ils ont tous les deux ? Que l’on soit mère biologique ou mère adoptive, dans ces deux cas, il arrive que le lien maternel soit passionnel. Vous avez raison de réintroduire plusieurs fois votre conjoint dans votre narration de ce qui se passe avec votre bébé. Vous n’êtes pas seule, ainsi que votre bébé, en face d’elle : il y a votre futur mari, il y a votre beau-père. Il y a tout ce tissu de vie autour de vous qui vous permettra de ne pas résumer ce qui se passe à un terrifiant face-à-face avec elle, où il est question de vie ou de mort. Même si vous n’êtes pas d’accord avec la diplomatie de votre conjoint, que vous jugez trop molle, laissez se déployer autour de vous le travail des médiateurs, des ambassadeurs, de tous ceux qui vous permettront d’arrêter le bras de fer sans fin que vous avez engagé avec elle.


 


Posez vos questions à Jacques Arènes


Donner du sens à une épreuve, poser des choix délicats, comprendre une période de la vie… Vous avez des questions existentielles ou spirituelles ?
Adressez-les à Jacques Arènes, psychologue et psychanalyste :


> Par e-mail en écrivant à j.arenes@lavie.fr

> Par courrier postal en écrivant à Jacques Arènes, La Vie, 80 boulevard Auguste-Blanqui, 75013 Paris.


Chaque semaine, Jacques Arènes publie sa réponse à une des questions sur notre site internet.

Retrouvez toutes ses réponses passées dans notre rubrique
Questions de vie

Les couples catholiques face à l’épreuve de l’infertilité

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Aller à la messe du samedi soir et non à celle du dimanche midi pour éviter de croiser des familles avec enfants. Se retrouver oubliés par le prêtre lors des bénédictions car il ne s’adresse qu’aux familles. Esquiver les questions à propos du petit dernier qui ne vient pas. Devoir expliquer pourquoi on ne répond pas aux propositions de pèlerinages des pères et des mères de famille. Tel est le quotidien des couples infertiles dans l’Église.


Aujourd’hui, 10 à 15% des couples sont confrontés à des problèmes d’infertilité, qu’elle soit primaire (incapacité à parvenir à une grossesse ou à la mener à terme) ou secondaire (le couple a pu avoir au moins un enfant mais n’y parvient plus). Certains d’entre eux sont chrétiens. « L’infertilité est une vraie souffrance, se souvient Véronique Cortyl, souriante jeune femme brune, responsable avec son mari de la pastorale Couples en espérance d’enfants dans la communauté de l’Emmanuel. On ne se…

En banlieue, les jeunes se bougent 

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À 21h30, Yanis arrive enfin au point de rendez-vous, dans le centre-ville de Sevran-Beaudottes (Seine-Saint-Denis). Regard noir d’Hawa en raison de ce retard : « J’espère que tu as une bonne raison ! » Elle jette un œil sur sa voiture et explose de rire. Le véhicule de Yanis est tombé en panne. Un carrosse qui semble tout droit sorti du siècle dernier. Nous nous frayons une place entre les sacs de nourriture, et Aurore donne le top : « C’est parti ? » C’est parti. Voilà maintenant près de cinq ans que l’association sevranaise Arc-en-Ciel passe, bénévolement, tous ses samedis soirs à faire le tour des villes voisines : Livry, Tremblay-en-France et son quartier du Vert-Galant… le coffre rempli de vêtements et de repas chauds.


Arc-en-ciel se débrouille


Arrêt numéro 1 : un vieil immeuble abandonné où squattent depuis une quinzaine d’années,…

“J’ai 14 ans et j’ai peur de rater ma vie“

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« Je vous écris pour savoir si c’est normal ce que je ressens. Voilà, j’ai 14 ans et peut-être que c’est qu’un passage mais j’ai vraiment peur, j’ai peur de mon avenir, peur de pas réussir dans la vie je ne me vois aucun avenir, je vois juste du noir. J’ai la conviction que tout ce que j’essaierai de faire va échouer. Je sais que c’est peut-être débile mais je me dis que mourir serait mieux, car je n’aurais plus à m’inquiéter pour mon avenir. Je n’aurais plus à avoir peur de finir pauvre, je n’aurais plus à craindre le prochain examen à passer, et je n’aurais plus à me dire que si je le rate ma vie entière sera fichue.

J’espère que vous allez me répondre.

Ambre. »


> La réponse de Jacques Arènes :


Répondre à votre angoisse : quel défi ! Je devrais vous donner ainsi les bonnes raisons de ne pas mourir. Et mieux encore, vous indiquer de très bonnes raisons de continuer à vivre. Cela m’est difficile. Je suis comme la plupart des gens, je continue à vivre sans savoir complètement pourquoi, au fond parce que je n’ai rien d’autre sous la main que la vie : la mort est pour moi abstraite. La seule « vérité », celle que je peux sentir et toucher, celle dont je peux témoigner est celle de la vie. Il n’empêche que c’est une vérité parfois douloureuse. La vie nous donne des satisfactions, mais elle aussi chienne – ou louve – avec nous. Elle nous mord et nous blesse, mais elle est en même temps ardente, puissante, exaltante. La mort est aussi sans doute abstraite pour vous : vous y projetez le désir d’être enfin au repos, sans angoisse. Mais, comme moi, vous ne savez rien de ce qui se passe après.


Vous évoquez surtout la dimension temporelle de l’existence. Vivre, c’est être plongé dans le temps. La temporalité humaine est pétrie d’inquiétude, d’anticipation. Notre présent n’est pas vide : il est même plein de ce que nous reconstruisons du passé, et de ce que nous anticipons de l’avenir. Le présent constitue au fond tout un « travail », parce qu’il est lourd de toutes ces constructions que nous effectuons, sans même le vouloir. D’où votre peur que vous racontez très bien. Pour vous, tout est peur, et l’avenir se présente seulement sous le signe de la menace, en particulier celle de la pauvreté. Le mot « pauvreté » est surchargé de significations : il résonne avec dénuement, solitude, détresse, et, bien sûr, manque d’avenir.  Vous aurez, comme tout le monde, sûrement des échecs – et des réussites – mais ce qui ne va pas pour vous, c’est que vous imaginez qu’un échec éventuel va faire échouer l’ensemble de votre existence (« si je le rate ma vie entière sera fichue »).


Ce type de pensée est problématique. Cela n’est pas « anormal » – cela arrive à certains, et peut-être à tous à certains moments l’existence – mais c’est paralysant. Le futur immédiat (l’échec éventuel) envahit le présent, et vous empêcherait de continuer. Vous êtes adolescente, et, à votre âge, ce futur immédiat est difficile à penser et à pratiquer. Une erreur, un déboire, et tout est remis en cause. Vous commencez à habiter un corps d’adulte, et une partie de vous est encore en arrière, du côté de l’enfance et de ses sécurités. Vous êtes une voyageuse du temps, qui passe sa tête dans une nouvelle dimension qu’elle a du mal à comprendre et à assimiler. C’est d’abord cette transformation qui est à expérimenter. Ce que vous serez dans 5 ans est en fait inimaginable. La période de l’adolescence est ainsi comme une mort, ouvrant vers de possibles renaissances. Dans les sociétés traditionnelles, elle est marquée par des rites de passages, accompagnés par le monde adulte, rites qui miment cette « mort » à l’enfance et cette renaissance à l’âge adulte. Notre civilisation est plus libre et plus solitaire, et les ados y ont souvent l’impression de s’initier seuls, de s’« auto-initier » en quelque sorte.


L’idéal est en fait de ne pas être (trop) isolée. Essayez de vous appuyer sur l’échange et le témoignage de ceux ou celles de votre âge. N’oubliez pas aussi de vous laisser accompagner par les adultes qui sont importants pour vous. Les parents ne sont pas toujours les mieux placés, mais d’autres existent peut-être. Un psychologue pourrait aussi vous aider. Vous ne pouvez pas savoir l’avenir. Vous avez donc à apprivoiser l’incertitude, qui n’est pas seulement une menace, mais qui pourrait être aussi un espace de création. C’est effrayant de penser que rien n’est joué, et que beaucoup de choses sont encore à créer. En même temps, la « mort » que vous avez à expérimenter n’est pas celle que vous imaginez. Mourir aux certitudes de l’enfance est comme un accouchement douloureux. On l’accepte parce qu’une nouveauté pourrait advenir. Il vous faut oser avancer dans l’incertain. Ce qui naitra, de toute façon, vous surprendra. Et les surprises ont parfois du bon. 


 


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J’espère que vous allez me répondre.

Ambre. »


> La réponse de Jacques Arènes :


Répondre à votre angoisse : quel défi ! Je devrais vous donner ainsi les bonnes raisons de ne pas mourir. Et mieux encore, vous indiquer de très bonnes raisons de continuer à vivre. Cela m’est difficile. Je suis comme la plupart des gens, je continue à vivre sans savoir complètement pourquoi, au fond parce que je n’ai rien d’autre sous la main que la vie : la mort est pour moi abstraite. La seule « vérité », celle que je peux sentir et toucher, celle dont je peux témoigner est celle de la vie. Il n’empêche que c’est une vérité parfois douloureuse. La vie nous donne des satisfactions, mais elle aussi chienne – ou louve – avec nous. Elle nous mord et nous blesse, mais elle est en même temps ardente, puissante, exaltante. La mort est aussi sans doute abstraite pour vous : vous y projetez le désir d’être enfin au repos, sans angoisse. Mais, comme moi, vous ne savez rien de ce qui se passe après.


Vous évoquez surtout la dimension temporelle de l’existence. Vivre, c’est être plongé dans le temps. La temporalité humaine est pétrie d’inquiétude, d’anticipation. Notre présent n’est pas vide : il est même plein de ce que nous reconstruisons du passé, et de ce que nous anticipons de l’avenir. Le présent constitue au fond tout un « travail », parce qu’il est lourd de toutes ces constructions que nous effectuons, sans même le vouloir. D’où votre peur que vous racontez très bien. Pour vous, tout est peur, et l’avenir se présente seulement sous le signe de la menace, en particulier celle de la pauvreté. Le mot « pauvreté » est surchargé de significations : il résonne avec dénuement, solitude, détresse, et, bien sûr, manque d’avenir.  Vous aurez, comme tout le monde, sûrement des échecs – et des réussites – mais ce qui ne va pas pour vous, c’est que vous imaginez qu’un échec éventuel va faire échouer l’ensemble de votre existence (« si je le rate ma vie entière sera fichue »).


Ce type de pensée est problématique. Cela n’est pas « anormal » – cela arrive à certains, et peut-être à tous à certains moments l’existence – mais c’est paralysant. Le futur immédiat (l’échec éventuel) envahit le présent, et vous empêcherait de continuer. Vous êtes adolescente, et, à votre âge, ce futur immédiat est difficile à penser et à pratiquer. Une erreur, un déboire, et tout est remis en cause. Vous commencez à habiter un corps d’adulte, et une partie de vous est encore en arrière, du côté de l’enfance et de ses sécurités. Vous êtes une voyageuse du temps, qui passe sa tête dans une nouvelle dimension qu’elle a du mal à comprendre et à assimiler. C’est d’abord cette transformation qui est à expérimenter. Ce que vous serez dans 5 ans est en fait inimaginable. La période de l’adolescence est ainsi comme une mort, ouvrant vers de possibles renaissances. Dans les sociétés traditionnelles, elle est marquée par des rites de passages, accompagnés par le monde adulte, rites qui miment cette « mort » à l’enfance et cette renaissance à l’âge adulte. Notre civilisation est plus libre et plus solitaire, et les ados y ont souvent l’impression de s’initier seuls, de s’« auto-initier » en quelque sorte.


L’idéal est en fait de ne pas être (trop) isolée. Essayez de vous appuyer sur l’échange et le témoignage de ceux ou celles de votre âge. N’oubliez pas aussi de vous laisser accompagner par les adultes qui sont importants pour vous. Les parents ne sont pas toujours les mieux placés, mais d’autres existent peut-être. Un psychologue pourrait aussi vous aider. Vous ne pouvez pas savoir l’avenir. Vous avez donc à apprivoiser l’incertitude, qui n’est pas seulement une menace, mais qui pourrait être aussi un espace de création. C’est effrayant de penser que rien n’est joué, et que beaucoup de choses sont encore à créer. En même temps, la « mort » que vous avez à expérimenter n’est pas celle que vous imaginez. Mourir aux certitudes de l’enfance est comme un accouchement douloureux. On l’accepte parce qu’une nouveauté pourrait advenir. Il vous faut oser avancer dans l’incertain. Ce qui naitra, de toute façon, vous surprendra. Et les surprises ont parfois du bon. 


 


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J’espère que vous allez me répondre.

Ambre. »


> La réponse de Jacques Arènes :


Répondre à votre angoisse : quel défi ! Je devrais vous donner ainsi les bonnes raisons de ne pas mourir. Et mieux encore, vous indiquer de très bonnes raisons de continuer à vivre. Cela m’est difficile. Je suis comme la plupart des gens, je continue à vivre sans savoir complètement pourquoi, au fond parce que je n’ai rien d’autre sous la main que la vie : la mort est pour moi abstraite. La seule « vérité », celle que je peux sentir et toucher, celle dont je peux témoigner est celle de la vie. Il n’empêche que c’est une vérité parfois douloureuse. La vie nous donne des satisfactions, mais elle aussi chienne – ou louve – avec nous. Elle nous mord et nous blesse, mais elle est en même temps ardente, puissante, exaltante. La mort est aussi sans doute abstraite pour vous : vous y projetez le désir d’être enfin au repos, sans angoisse. Mais, comme moi, vous ne savez rien de ce qui se passe après.


Vous évoquez surtout la dimension temporelle de l’existence. Vivre, c’est être plongé dans le temps. La temporalité humaine est pétrie d’inquiétude, d’anticipation. Notre présent n’est pas vide : il est même plein de ce que nous reconstruisons du passé, et de ce que nous anticipons de l’avenir. Le présent constitue au fond tout un « travail », parce qu’il est lourd de toutes ces constructions que nous effectuons, sans même le vouloir. D’où votre peur que vous racontez très bien. Pour vous, tout est peur, et l’avenir se présente seulement sous le signe de la menace, en particulier celle de la pauvreté. Le mot « pauvreté » est surchargé de significations : il résonne avec dénuement, solitude, détresse, et, bien sûr, manque d’avenir.  Vous aurez, comme tout le monde, sûrement des échecs – et des réussites – mais ce qui ne va pas pour vous, c’est que vous imaginez qu’un échec éventuel va faire échouer l’ensemble de votre existence (« si je le rate ma vie entière sera fichue »).


Ce type de pensée est problématique. Cela n’est pas « anormal » – cela arrive à certains, et peut-être à tous à certains moments l’existence – mais c’est paralysant. Le futur immédiat (l’échec éventuel) envahit le présent, et vous empêcherait de continuer. Vous êtes adolescente, et, à votre âge, ce futur immédiat est difficile à penser et à pratiquer. Une erreur, un déboire, et tout est remis en cause. Vous commencez à habiter un corps d’adulte, et une partie de vous est encore en arrière, du côté de l’enfance et de ses sécurités. Vous êtes une voyageuse du temps, qui passe sa tête dans une nouvelle dimension qu’elle a du mal à comprendre et à assimiler. C’est d’abord cette transformation qui est à expérimenter. Ce que vous serez dans 5 ans est en fait inimaginable. La période de l’adolescence est ainsi comme une mort, ouvrant vers de possibles renaissances. Dans les sociétés traditionnelles, elle est marquée par des rites de passages, accompagnés par le monde adulte, rites qui miment cette « mort » à l’enfance et cette renaissance à l’âge adulte. Notre civilisation est plus libre et plus solitaire, et les ados y ont souvent l’impression de s’initier seuls, de s’« auto-initier » en quelque sorte.


L’idéal est en fait de ne pas être (trop) isolée. Essayez de vous appuyer sur l’échange et le témoignage de ceux ou celles de votre âge. N’oubliez pas aussi de vous laisser accompagner par les adultes qui sont importants pour vous. Les parents ne sont pas toujours les mieux placés, mais d’autres existent peut-être. Un psychologue pourrait aussi vous aider. Vous ne pouvez pas savoir l’avenir. Vous avez donc à apprivoiser l’incertitude, qui n’est pas seulement une menace, mais qui pourrait être aussi un espace de création. C’est effrayant de penser que rien n’est joué, et que beaucoup de choses sont encore à créer. En même temps, la « mort » que vous avez à expérimenter n’est pas celle que vous imaginez. Mourir aux certitudes de l’enfance est comme un accouchement douloureux. On l’accepte parce qu’une nouveauté pourrait advenir. Il vous faut oser avancer dans l’incertain. Ce qui naitra, de toute façon, vous surprendra. Et les surprises ont parfois du bon. 


 


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J’espère que vous allez me répondre.

Ambre. »


> La réponse de Jacques Arènes :


Répondre à votre angoisse : quel défi ! Je devrais vous donner ainsi les bonnes raisons de ne pas mourir. Et mieux encore, vous indiquer de très bonnes raisons de continuer à vivre. Cela m’est difficile. Je suis comme la plupart des gens, je continue à vivre sans savoir complètement pourquoi, au fond parce que je n’ai rien d’autre sous la main que la vie : la mort est pour moi abstraite. La seule « vérité », celle que je peux sentir et toucher, celle dont je peux témoigner est celle de la vie. Il n’empêche que c’est une vérité parfois douloureuse. La vie nous donne des satisfactions, mais elle aussi chienne – ou louve – avec nous. Elle nous mord et nous blesse, mais elle est en même temps ardente, puissante, exaltante. La mort est aussi sans doute abstraite pour vous : vous y projetez le désir d’être enfin au repos, sans angoisse. Mais, comme moi, vous ne savez rien de ce qui se passe après.


Vous évoquez surtout la dimension temporelle de l’existence. Vivre, c’est être plongé dans le temps. La temporalité humaine est pétrie d’inquiétude, d’anticipation. Notre présent n’est pas vide : il est même plein de ce que nous reconstruisons du passé, et de ce que nous anticipons de l’avenir. Le présent constitue au fond tout un « travail », parce qu’il est lourd de toutes ces constructions que nous effectuons, sans même le vouloir. D’où votre peur que vous racontez très bien. Pour vous, tout est peur, et l’avenir se présente seulement sous le signe de la menace, en particulier celle de la pauvreté. Le mot « pauvreté » est surchargé de significations : il résonne avec dénuement, solitude, détresse, et, bien sûr, manque d’avenir.  Vous aurez, comme tout le monde, sûrement des échecs – et des réussites – mais ce qui ne va pas pour vous, c’est que vous imaginez qu’un échec éventuel va faire échouer l’ensemble de votre existence (« si je le rate ma vie entière sera fichue »).


Ce type de pensée est problématique. Cela n’est pas « anormal » – cela arrive à certains, et peut-être à tous à certains moments l’existence – mais c’est paralysant. Le futur immédiat (l’échec éventuel) envahit le présent, et vous empêcherait de continuer. Vous êtes adolescente, et, à votre âge, ce futur immédiat est difficile à penser et à pratiquer. Une erreur, un déboire, et tout est remis en cause. Vous commencez à habiter un corps d’adulte, et une partie de vous est encore en arrière, du côté de l’enfance et de ses sécurités. Vous êtes une voyageuse du temps, qui passe sa tête dans une nouvelle dimension qu’elle a du mal à comprendre et à assimiler. C’est d’abord cette transformation qui est à expérimenter. Ce que vous serez dans 5 ans est en fait inimaginable. La période de l’adolescence est ainsi comme une mort, ouvrant vers de possibles renaissances. Dans les sociétés traditionnelles, elle est marquée par des rites de passages, accompagnés par le monde adulte, rites qui miment cette « mort » à l’enfance et cette renaissance à l’âge adulte. Notre civilisation est plus libre et plus solitaire, et les ados y ont souvent l’impression de s’initier seuls, de s’« auto-initier » en quelque sorte.


L’idéal est en fait de ne pas être (trop) isolée. Essayez de vous appuyer sur l’échange et le témoignage de ceux ou celles de votre âge. N’oubliez pas aussi de vous laisser accompagner par les adultes qui sont importants pour vous. Les parents ne sont pas toujours les mieux placés, mais d’autres existent peut-être. Un psychologue pourrait aussi vous aider. Vous ne pouvez pas savoir l’avenir. Vous avez donc à apprivoiser l’incertitude, qui n’est pas seulement une menace, mais qui pourrait être aussi un espace de création. C’est effrayant de penser que rien n’est joué, et que beaucoup de choses sont encore à créer. En même temps, la « mort » que vous avez à expérimenter n’est pas celle que vous imaginez. Mourir aux certitudes de l’enfance est comme un accouchement douloureux. On l’accepte parce qu’une nouveauté pourrait advenir. Il vous faut oser avancer dans l’incertain. Ce qui naitra, de toute façon, vous surprendra. Et les surprises ont parfois du bon. 


 


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Donner du sens à une épreuve, poser des choix délicats, comprendre une période de la vie… Vous avez des questions existentielles ou spirituelles ?
Adressez-les à Jacques Arènes, psychologue et psychanalyste :


> Par e-mail en écrivant à j.arenes@lavie.fr

> Par courrier postal en écrivant à Jacques Arènes, La Vie, 80 boulevard Auguste-Blanqui, 75013 Paris.


Chaque semaine, Jacques Arènes publie sa réponse à une des questions sur notre site internet.

Retrouvez toutes ses réponses passées dans notre rubrique
Questions de vie

“J’ai 14 ans et j’ai peur de rater ma vie“

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« Je vous écris pour savoir si c’est normal ce que je ressens. Voilà, j’ai 14 ans et peut-être que c’est qu’un passage mais j’ai vraiment peur, j’ai peur de mon avenir, peur de pas réussir dans la vie je ne me vois aucun avenir, je vois juste du noir. J’ai la conviction que tout ce que j’essaierai de faire va échouer. Je sais que c’est peut-être débile mais je me dis que mourir serait mieux, car je n’aurais plus à m’inquiéter pour mon avenir. Je n’aurais plus à avoir peur de finir pauvre, je n’aurais plus à craindre le prochain examen à passer, et je n’aurais plus à me dire que si je le rate ma vie entière sera fichue.

J’espère que vous allez me répondre.

Ambre. »


> La réponse de Jacques Arènes :


Répondre à votre angoisse : quel défi ! Je devrais vous donner ainsi les bonnes raisons de ne pas mourir. Et mieux encore, vous indiquer de très bonnes raisons de continuer à vivre. Cela m’est difficile. Je suis comme la plupart des gens, je continue à vivre sans savoir complètement pourquoi, au fond parce que je n’ai rien d’autre sous la main que la vie : la mort est pour moi abstraite. La seule « vérité », celle que je peux sentir et toucher, celle dont je peux témoigner est celle de la vie. Il n’empêche que c’est une vérité parfois douloureuse. La vie nous donne des satisfactions, mais elle aussi chienne – ou louve – avec nous. Elle nous mord et nous blesse, mais elle est en même temps ardente, puissante, exaltante. La mort est aussi sans doute abstraite pour vous : vous y projetez le désir d’être enfin au repos, sans angoisse. Mais, comme moi, vous ne savez rien de ce qui se passe après.


Vous évoquez surtout la dimension temporelle de l’existence. Vivre, c’est être plongé dans le temps. La temporalité humaine est pétrie d’inquiétude, d’anticipation. Notre présent n’est pas vide : il est même plein de ce que nous reconstruisons du passé, et de ce que nous anticipons de l’avenir. Le présent constitue au fond tout un « travail », parce qu’il est lourd de toutes ces constructions que nous effectuons, sans même le vouloir. D’où votre peur que vous racontez très bien. Pour vous, tout est peur, et l’avenir se présente seulement sous le signe de la menace, en particulier celle de la pauvreté. Le mot « pauvreté » est surchargé de significations : il résonne avec dénuement, solitude, détresse, et, bien sûr, manque d’avenir.  Vous aurez, comme tout le monde, sûrement des échecs – et des réussites – mais ce qui ne va pas pour vous, c’est que vous imaginez qu’un échec éventuel va faire échouer l’ensemble de votre existence (« si je le rate ma vie entière sera fichue »).


Ce type de pensée est problématique. Cela n’est pas « anormal » – cela arrive à certains, et peut-être à tous à certains moments l’existence – mais c’est paralysant. Le futur immédiat (l’échec éventuel) envahit le présent, et vous empêcherait de continuer. Vous êtes adolescente, et, à votre âge, ce futur immédiat est difficile à penser et à pratiquer. Une erreur, un déboire, et tout est remis en cause. Vous commencez à habiter un corps d’adulte, et une partie de vous est encore en arrière, du côté de l’enfance et de ses sécurités. Vous êtes une voyageuse du temps, qui passe sa tête dans une nouvelle dimension qu’elle a du mal à comprendre et à assimiler. C’est d’abord cette transformation qui est à expérimenter. Ce que vous serez dans 5 ans est en fait inimaginable. La période de l’adolescence est ainsi comme une mort, ouvrant vers de possibles renaissances. Dans les sociétés traditionnelles, elle est marquée par des rites de passages, accompagnés par le monde adulte, rites qui miment cette « mort » à l’enfance et cette renaissance à l’âge adulte. Notre civilisation est plus libre et plus solitaire, et les ados y ont souvent l’impression de s’initier seuls, de s’« auto-initier » en quelque sorte.


L’idéal est en fait de ne pas être (trop) isolée. Essayez de vous appuyer sur l’échange et le témoignage de ceux ou celles de votre âge. N’oubliez pas aussi de vous laisser accompagner par les adultes qui sont importants pour vous. Les parents ne sont pas toujours les mieux placés, mais d’autres existent peut-être. Un psychologue pourrait aussi vous aider. Vous ne pouvez pas savoir l’avenir. Vous avez donc à apprivoiser l’incertitude, qui n’est pas seulement une menace, mais qui pourrait être aussi un espace de création. C’est effrayant de penser que rien n’est joué, et que beaucoup de choses sont encore à créer. En même temps, la « mort » que vous avez à expérimenter n’est pas celle que vous imaginez. Mourir aux certitudes de l’enfance est comme un accouchement douloureux. On l’accepte parce qu’une nouveauté pourrait advenir. Il vous faut oser avancer dans l’incertain. Ce qui naitra, de toute façon, vous surprendra. Et les surprises ont parfois du bon. 


 


Posez vos questions à Jacques Arènes


Donner du sens à une épreuve, poser des choix délicats, comprendre une période de la vie… Vous avez des questions existentielles ou spirituelles ?
Adressez-les à Jacques Arènes, psychologue et psychanalyste :


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> Par courrier postal en écrivant à Jacques Arènes, La Vie, 80 boulevard Auguste-Blanqui, 75013 Paris.


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