Pourquoi la tyrannie de l’urgence nous déconnecte du temps de Dieu

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Votre diagnostic sur notre rapport au temps ?


Grâce aux progrès technologiques toujours plus performants, nous sommes censés gagner de plus en plus de temps… mais nous avons paradoxalement le sentiment d’en manquer toujours plus ! Notre comportement social est colonisé par une exigence de productivité qui pénètre jusque dans notre intimité : il faut consommer toujours davantage, remplir son emploi du temps, être sans cesse plus rapide… Un exemple probant est celui des mails et du smartphone. Pourquoi répond-on à un mail dans les minutes ou heures qui suivent ? Rien n’y oblige. Nous subissons une forme de pression sociale, qui alimente nos peurs d’être dépassés par la course du monde et de finir, justement, hors-jeu.


Sommes-nous tous égaux face au temps ?


Le…

Vendée Globe : ils voyagent en solidaires

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Les bizuths sont au zénith ! Pour cette 8e édition du Vendée Globe, qui s’élance le dimanche 6 novembre des Sables-d’Olonne, 14 marins s’apprêtent à effectuer pour la première fois le tour du monde en solitaire à la voile, sans escale et sans assistance. C’est presque la moitié de la flotte, qui comprendra 29 skippers – dont un ancien vainqueur, Vincent Riou, qui avait triomphé en 2004-2005. Originaires de France, mais aussi de quatre pays qui n’avaient jamais participé au Vendée Globe (Nouvelle-Zélande, Pays-Bas, Irlande, Japon), ces néophytes, qui sont loin de constituer une flottille de bleusailles, sillonnent les océans souvent lestés de convictions et de valeurs. Paradoxalement, loin d’alourdir la cale, les projets qu’ils portent avec force et sincérité semblent les alléger.


C’est le cas d’Éric Bellion, à la barre de Comme un seul homme, skipper habitué à naviguer avec des équipiers handicapés, déterminé durant ce Vendée voile Globe à faire…

“Opposer les intelligences humaine et animale est dépassé“

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« Et en France, vous avez des candidats femelles qui se présentent à l’élection présidentielle ? » Voilà où mènent quatre décennies d’étude des agissements des primates ! Psychologue, primatologue de renommée mondiale, l’Américano-Néerlandais Frans de Waal paraît avoir aiguisé auprès des animaux l’art de décrypter avec plus d’acuité les stratégies de ses semblables. Celui qui a exploré les comportements sociaux des singes, leurs processus de domination, de réconciliation et de coopération, a signé en 1992 un ouvrage, la Politique du chimpanzé (Éditions du Rocher), où il comparait les manoeuvres, les luttes d’influence et les règlements de compte chez ces animaux (les chimpanzés surtout) et les hommes politiques. 


C’est donc d’un oeil expert, et perçant, que ce scientifique, biologiste et éthologue de formation, a scruté ces derniers mois la campagne électorale américaine et les menées de Donald Trump. « Trump a…

Que vaut la vie d’un chat face à un TGV en retard ?

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C’est une question qui taraude les humains depuis toujours : l’homme est-il une espèce comme les autres ? Et voilà que le débat resurgit aujourd’hui, alors que l’on porte un intérêt accru à l’idée de souffrance, et donc de conscience, animale. On le sait, deux courants philosophiques s’affrontent à ce sujet depuis au moins le XVIIe siècle. L’un, « humaniste », venu tout droit de Descartes, affirme que seul l’homme est un être pourvu de raison et libre ; l’autre, « anti-humaniste », inspiré de Spinoza et Voltaire, s’oppose à cette conception. Le philosophe Denis Moreau, nous livre ici des clefs de compréhension.


Histoire d’un matou exfiltré


« À peu près au moment où l’on évoquait la création d’un « secrétariat d’État à la condition animale » (Le Monde du 17 octobre), mon TGV a eu du retard. Il avait d’abord été stoppé, sans que personne n’y trouve à redire, à cause d’un homme divaguant sur la voie. Puis, à la gare suivante, on nous annonça que le train resterait arrêté plus longtemps que prévu, parce qu’un chat se trouvait désormais sur les rails. Une discussion s’engagea entre les passagers, scindés en deux camps : ceux (minoritaires) qui estimaient qu’il fallait, cette fois, démarrer, quitte à écrabouiller le minet ; ceux qui pensaient qu’on devait encore laisser le train à l’arrêt, et évacuer l’animal avant de repartir (un petit malin compliqua les choses en leur demandant ce qu’ils auraient préconisé si on avait eu affaire à un rat). La SNCF donna raison aux seconds : le train ne s’ébranla qu’au bout de 20 minutes, une fois le matou exfiltré. L’animal fut donc sauvé, mais de nombreux passagers du train ratèrent ensuite leur correspondance.


Au nombre des diverses raisons de prendre le parti du chat figure cette vision du monde qu’on appelle « antispéciste » : elle considère que l’homme est une espèce comme les autres, voire plus nuisible que les autres, et que la vie du chat doit donc être respectée au moins au même titre que celle d’un humain. Ce terme « antispéciste » est récent et le thème est à la mode.


Mais, pour qui a fréquenté l’histoire des idées, l’actuel et croissant intérêt pour l’antispécisme apparaît comme un nouvel épisode d’un vieux débat : celui qui oppose les « humanistes » aux « anti-humanistes ». Les premiers considèrent que l’humain est si différent des autres espèces, et supérieur à elles, qu’il est seul à être doté de certaines caractéristiques : posséder une dignité telle que sa vie mérite d’être toujours respectée ; avoir des « droits » signalés par des « déclarations » (des droits de l’homme, mais pas, en 1789 ou 1948, des animaux ou des plantes) ; faire partie d’une espèce dont tous les membres sont égaux (alors qu’on se voit mal proclamer l’égalité des éléphants, des chiens voire des éléphants et des chiens entre eux). Parmi les philosophes classiques, Descartes est un représentant typique de ce courant humaniste : pour lui, seul l’être humain possède un esprit rationnel et libre, si bien qu’il est fondé à se considérer « comme maître et possesseur de la nature » (Discours de la méthode, VI).


Pour Descartes, seul l’être humain possède un esprit rationnel et libre. 


Descartes, ou son disciple Malebranche, dont on dit qu’il donnait des coups de pied aux chiens au motif que, dépourvus d’âme selon lui, ces animaux ne sentaient pas la douleur, aurait donc sans hésiter fait passer le train sur le chat pour éviter aux voyageurs les désagréments d’un retard. Mais des philosophes comme Spinoza ou Voltaire ont développé quant à eux une pensée qui combat cette vision humaniste du monde. Pour le premier, « l’homme n’est pas dans la nature comme un empire (un secteur particulier) dans un empire » (Éthique, III, préface), son statut est celui d’une simple « chose finie », comme les animaux et les plantes, et il n’est pas plus libre qu’eux. Pour le second (article « Liberté » du Dictionnaire philosophique), la différence entre l’esprit d’un homme et celui d’un chien est tout au plus de degré, mais pas de nature. Spinoza et Voltaire auraient sans doute souhaité que le train reste en gare.


On n’est pas des bêtes !


La modernité occidentale a globalement été « humaniste », y compris dans ses excès : surexploitation et saccage de la planète, indifférence aux souffrances animales. L’actuel retour de balancier antispéciste était donc prévisible, et s’avère sous certains aspects bienvenu : l’idée de porter aux animaux la même attention qu’aux humains est généreuse. Reste à éviter que le balancier n’aille trop loin : on peut aussi craindre qu’à vouloir traiter les animaux comme des personnes, on finisse par traiter les personnes comme des bêtes. Les positions extrêmes de certains antispécistes, qui estiment par exemple que les vies d’un chien ou d’un grand singe adultes ont plus de valeur que celles d’un petit bébé ou d’un vieillard, peuvent amener à réfléchir avant de renoncer à tous les éléments d’une vision humaniste du monde. »