Axelle, la jardinière du passage

Standard

Ce qui frappe d’abord, c’est le silence. À deux pas de la bruyante place de Clichy, dans le 18e arrondissement de Paris, entre un magasin d’optique et une maroquinerie, il suffit, en effet, de pousser une impressionnante porte en fer forgé pour pénétrer dans un havre de paix. Un passage pavé d’au moins 150 mètres de longueur, pas très large mais suffisamment pour que le soleil, entre deux toits d’immeuble, y fasse une percée chaque début d’après-midi. « Heureusement, car sinon beaucoup de mes plantes auraient du mal à pousser », souligne Axelle Verdier, la jeune jardinière du passage.

Le silence et le végétal. Car, en 2012, le conseil syndical regroupant les 8 copropriétés du passage, représentant environ une centaine de locataires, décide de « végétaliser » leur longue et étroite ruelle. Petit à petit les scooters et les motos qui encombraient les lieux cèdent la place aux végétaux. Mais le premier jardinier du passage, recruté à l’extérieur, donne quelques signes de faiblesse. À l’automne 2013, le conseil syndical se tourne vers Axelle, 41 ans, habitante du passage et surtout experte en développement vraiment durable.

La biodiversité en vue

« Cette proposition arrivait au bon moment pour moi, raconte Axelle. Car à la suite de la crise financière qui avait frappé mon précédent employeur (Ndlr : Dexia, la banque des collectivités locales) où je m’occupais notamment de l’opération les Rubans du développement durable, j’étais au chômage, et en fin de droits. »

Certes, Axelle avait retrouvé un emploi de serveuse dans une brasserie mais avec un salaire qui lui permettait tout juste de rembourser son emprunt immobilier. « Cette proposition de devenir, durant mes heures libres, “la jardinière du passage” tombait à pic. D’autant plus que je voulais y ajouter une approche écologique en la reliant aux politiques de biodiversité de la mairie de Paris. »

Écologie et convivialité

Paris tenté, pari gagné… Avec son statut d’autoentrepreneur et ses mains vertes, Axelle a métamorphosé le passage. Une quantité impressionnante de plantes et d’arbres ont élu domicile dans des bacs en plastique d’ordinateur recyclé ou en pierre reconstituée. D’abord des fougères, des euphorbes et du houx dans la partie la plus ombragée du passage. Ensuite du chèvrefeuille, des bambous, des clématites, des hortensias, des rosiers et même un figuier et deux pommiers. Jusqu’à de la lavande, de la mélisse, du sedum, une rose trémière et un olivier dans ce qu’Axelle appelle « la partie méditerranéenne du passage », c’est-à-dire la plus ensoleillée.

La liste (une centaine de végétaux) ferait presque pâlir l’école du Breuil, dont elle suit les cours de jardinage. En y ajoutant de l’écologie – un lombricomposteur à côté des poubelles, de la paille et du crottin apportés du Perche par une habitante, un arrosage économe – et une convivialité qui passe par l’organisation de multiples fêtes (du printemps, des tomates, entre autres). Le tout égayé par les notes de musique qui s’échappent d’un atelier de réparation de pianos, la maison Nebout établie depuis 1912 dans le passage.

« Mon projet de végétalisation repose sur deux pieds : une écologie pratique et patiente mais aussi le lien social entre les habitants. C’est une sorte d’écosystème », résume joliment Axelle. Qui rêve à voix haute d’autres projets : un minipoulailler dans la cour, des semis d’aromatiques dans les jardinières, des plantes sur le toit d’un complexe cinématographique tout proche. Mais peut-être que sa plus belle récompense se lit dans le regard des enfants du passage lorsqu’ils rentrent de l’école. Et qu’Axelle voit ces petits citadins s’arrêter pour regarder les trois poissons rouges de la vieille bassine, sentir les brins de menthe ou tout simplement observer un bourgeon qui s’ouvre…

 

> A savoir :

Axelle raconte ses aventures de jardinière sur son blog : jardinieredepassage.wordpress.com/projet/jardin

 

Appel aux lecteurs jardiniers

Vous êtes jardiniers amateurs, dans une philosophie de jardinage bio ou le plus naturel possible et vous accepteriez de nous rencontrer pour « raconter » votre jardin. Écrivez-nous à La Vie, rubrique « jardinage », 80 boulevard Auguste-Blanqui, 75013 Paris.

Leave a Reply