4 conseils pour une relation épanouie entre père et fille

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Longtemps dans l’ombre du couple mère-fille, les liens entre père et fille sont aujourd’hui sous les projecteurs. Un phénomène qui s’explique notamment par les mutations récentes de la famille et l’implication grandissante des jeunes pères. La Vie donne la parole à des psys sur cette relation unique.

Accueillir un autre que soi

Devenir le père d’une petite fille peut inquiéter. Dans l’imaginaire commun, il est plus facile d’élever un « mini-moi » qu’un « être dont on ignore tous les secrets », souligne Michèle Gaubert, psychothérapeute, spécialiste des rapports parents-enfants. Ainsi, Jean-Louis, 40 ans, aurait préféré d’emblée avoir un garçon « pour aller à la pêche et au foot ». Père d’une fille puis d’un fils, il a pourtant changé d’avis : « C’est avec elle que les relations sont les plus évidentes. Nos goûts et nos caractères similaires nous ont permis de créer une vraie complicité. » Un lien précisément fondé sur la différence. Alejo, lui, désirait que son premier enfant soit une fille. « Comme beaucoup d’hommes en froid avec leur père, je craignais de reproduire le même schéma, explique-t-il. Je voulais explorer un nouveau type de relation. » Un vœu qui a été exaucé. Profiter de la découverte de la paternité est d’autant plus facile lorsqu’on n’est pas en compétition sur le terrain de la virilité…

Favoriser son autonomie

Qu’en est-il pour la fille ? « Pour elle, c’est un vrai dilemme. Il faut se séparer de l’indispensable mère, contre son propre désir, en s’accrochant à son père, pour enfin renoncer aux deux », résume Michèle Gaubert. Il faut savoir poser des limites. Ce que des parents qui s’entendent bien parviennent à faire. Le père doit éviter de dire « mes deux femmes », pour prévenir le risque d’éveiller ou d’entretenir une rivalité. En cas de séparation, les parents rappelleront à leur enfant que « les rôles de ce trio ne changent pas pour autant », affirme Moussa Nabati, psychanalyste et docteur en psychologie. Avec leur rôle de « tiers séparateur », les pères sont appelés à faire le lien entre l’intérieur (le foyer) et le monde extérieur, et à encourager leurs filles dans ce sens, ne serait-ce qu’en leur proposant de jouer au ballon dans le jardin…

Transmettre ses connaissances – du simple nœud de lacets ou des astuces pour retenir les tables de multiplication aux valeurs les plus profondes (tolérance, respect, humilité) –, c’est croire en l’intelligence de sa fille. De même, en racontant ses peurs et ses bêtises d’enfance, le père fait comprendre à sa fille qu’elle est digne de confiance « et lui donne ainsi confiance en elle », estime le psychiatre et psychanalyste Alain Braconnier, pour qui la transmission est essentielle sur le chemin de l’autonomie. La nature des questions et des apprentissages évoluant avec le temps, il devra aussi accepter de basculer dans un autre registre à l’adolescence : celui des questions sur l’amour et sur le sens de la vie adulte.

L’aider à préparer son avenir

Les « papas solo » veilleront cependant à se rendre disponibles aux autres membres de la famille, aux amis, et, le cas échéant, à une nouvelle compagne. Moussa Nabati les encourage à ne pas mettre en suspens leur vie d’homme : « Être tout l’un pour l’autre empêche la fille de s’autonomiser. » Les pères ont également leur rôle à jouer dans l’élaboration d’un parcours professionnel, en « autorisant » notamment l’adolescente à se projeter dans la recherche scientifique ou les métiers du bâtiment, mais aussi en la soutenant tout simplement dans ses choix et son accès à l’indépendance financière, une des clés de l’autonomie. Cette posture se répercutera sur la vie amoureuse de sa fille (s’il s’interdit toute rivalité avec le compagnon de celle-ci) : une femme accompagnée dans son accès à l’indépendance ne cherchera pas un « protecteur » à tout prix, mais un partenaire avec qui partager sa vie.

Valoriser sa féminité

Les papas jouent aussi leur partition dans la construction de la féminité. « Si l’homme est respectueux de sa femme, la mère, et qu’il a une image saine et bienveillante de la féminité, la fille n’aura aucun mal à intégrer ces notions et à construire son estime d’elle-même », analyse Moussa Nabati. Dans le conte Comme une princesse, de Brigitte Minne (voir bibliographie), Marie est triste. Elle ne ressemble pas du tout aux princesses de ses légendes. Son père va alors lui prouver que toutes les femmes sont belles dans leur vraie différence. « J’ai voulu montrer que l’on peut être petite, porter des lunettes ou avoir n’importe quel autre profil et être jolie, rapporte l’auteure. En 2014, les papas peuvent aider leur fille à surmonter ce genre de difficultés. » Et faire rempart aux injonctions nocives d’une beauté normative. Par son regard, sa fierté, son attention, sa tendresse, il viendra à la rescousse de celle qui a besoin d’exister à ses yeux, tout comme d’être protégée et aimée.

À l’adolescence, l’enfant veut être traitée comme une jeune fille. Frapper avant d’entrer dans sa chambre, être respectueux avec ses copines, ne pas porter de jugements a priori sur ses petits copains sont autant de conseils pour entretenir la confiance. De même, les papas se garderont des commentaires désobligeants sur l’apparence des jeunes femmes, même émis sur le ton de la boutade. « Ils ont toujours un certain malaise par rapport à la distance qu’ils doivent avoir avec leur fille, analyse Alain Braconnier. Il faut se dire que la pudeur n’empêche pas l’affection. »

Évidemment, la tâche ne va pas s’interrompre le jour où mademoiselle s’envole. Il faudra réinventer la relation tout au long de la vie, notamment quand le père deviendra grand-père. Encore une autre histoire.’

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