Pourquoi les allergies alimentaires sont-elles en hausse ?

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L’arachide est, avec l’oeuf et le lait, l’un des aliments les plus sensibles : elle représente 80 % des allergies infantiles. / Ph. ruurmo via Flickr, CC BY-SA 2.0

L’arachide est, avec l’oeuf et le lait, l’un des aliments les plus sensibles : elle représente 80 % des allergies infantiles. / Ph. ruurmo via Flickr, CC BY-SA 2.0

Dans les faits, les allergies alimentaires ont doublé en cinq ans et touchent aujourd’hui au moins 4 % des Français adultes et 8 % des enfants. Tous les aliments peuvent en principe causer une allergie, mais le lait, l’œuf et l’arachide concernent 80 % des enfants touchés.

L’IMMUNITÉ CHAMBOULÉE

L’allergie est due à une réaction anormale de notre système immunitaire lors d’un contact avec un agent pathogène. Habituellement, les aliments, comme d’autres substances étrangères telles que le pollen, les poils de chat, etc., sont bien tolérés. Mais pour une raison qui reste inexpliquée, en leur présence, notre organisme réagit parfois en produisant des anticorps particuliers, les immunoglobulines E, ou IgE, responsables des symptômes de l’allergie : urticaire, boutons, crises d’asthme, etc. D’où vient cette hypersensibilité croissante ? Les causes sont multiples.

Une des raisons du boom des allergies alimentaires serait notre mode de vie moderne qui aurait déstabilisé notre immunité :

“On pense qu’aujourd’hui, à cause du recours massif aux antibiotiques, de la diminution de l’allaitement maternel et d’un environnement aseptisé, les bébés ne sont pas assez confrontés aux bactéries, inoffensives pour la plupart, qui sont indispensables à ‘l’éducation’ de leur système immunitaire, qui est vierge à la naissance”, explique Gisèle Kanny, du service de médecine interne, immunologie clinique et allergologie, au CHU de Nancy.

Ces microbes apprennent au système immunitaire à tolérer certains éléments étrangers à l’organisme, poursuit-elle. Faute d’un contact suffisant avec ceux-ci, le système immunitaire est ainsi désorienté et se met à lutter contre certains aliments, les pollens ou les acariens, provoquant plus d’allergies”. C’est la “théorie hygiéniste”.

Autre facteur pouvant expliquer la hausse des allergies alimentaires : la pollution de notre environnement par le transport automobile, les peintures d’intérieur, etc. Ces substances toxiques peuvent favoriser la production de cellules immunitaires spéciales baptisées TH2, et qui encouragent la production des IgE. Mais médecins et chercheurs pointent aussi du doigt l’industrie agroalimentaire.

TRAITEMENTS INDUSTRIELS

C’est que les plats tout prêts peuvent contenir un grand nombre d’aliments – de 10 à 20 en moyenne – et sont donc plus susceptibles de renfermer des ingrédients responsables d’allergies. De plus, les nombreux traitements industriels subis par les produits alimentaires peuvent provoquer la transformation de molécules “naturelles” inoffensives en protéines allergisantes. Enfin, l’association de différents produits peut aussi faire apparaître de nouveaux allergènes ou des réactions croisées. Ainsi, une étude réalisée en 2003 par des chercheurs anglais a prouvé que mélanger du lait de soja avec de la cacahuète multiplie par 2,6 le risque d’allergie à la cacahuète.

Un autre cause de l’augmentation des allergies : le mode d’alimentation. “Les aliments consommés sont en effet de plus en plus diversifiés ; or de nombreux produits exotiques, tels que le sésame ou les fruits à coque (noix de macadamia, noix de pécan…) peuvent entraîner des réactions allergiques ; d’où une augmentation des allergies”, souligne le médecin du CHU de Nancy. De plus, les systèmes de culture intensive favorisent la production, dans les fruits et légumes, de protéines de stress (des “profilines”), très allergisantes. A noter : des précautions peuvent êtres prises dans l’alimentation du nourrisson afin de limiter les risques qu’il ne développe une allergie.

Aujourd’hui, les allergies, d’une manière générale, figurent au 4e rang des maladies chroniques les plus fréquentes dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé. Elles touchent un Français sur cinq, surtout des enfants. Et les prévisions ne sont pas bonnes : une personne sur deux pourrait être allergique en 2020.
K.B.


LES ALLERGIES DANS LE MONDE

Les allergies dues aux agents extérieurs tels que les pollens sont les plus fréquentes : 94% des allergies aux États-Unis, 90% au Royaume-Uni, 82% en Italie, 80% en France, 73% en Allemagne et 63% en Espagne. Viennent ensuite les allergènes d’intérieur (moisissures, poussières, acariens), qui affectent davantage les Américains (68% des allergiques) et les Français (63%). Les Américains (35%) et les Français (30%) sont aussi les plus sensibles aux animaux, devant les Espagnols (27%). Le printemps est la saison où les allergiques souffrent le plus (92%). La gêne (boutons, difficultés respiratoires) dure de 6 à 30 semaines pour la moitié des individus, moins de 6 semaines pour 39% et plus de 31 semaines chez 11%. Toutes ces affections sont en plein boom, pour les mêmes raisons que les allergies alimentaires, notamment la mauvaise éducation du système immunitaire.


 

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