“Le jour où je suis née grand-mère”

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« Elle est si petite et elle est déjà tout ! », c’est la pensée émue qui m’a traversée la première fois que j’ai tenu Louisa, puis Marta deux ans après, dans le creux de mes bras. Nourrisson au souffle paisible, regard venu d’éternité, petit corps chaud lové dans mes bras devenus alcôve : ce jour où je suis « née grand-mère » m’a bouleversée. 


Si mes propres enfants m’avaient éveillée à la patience, aux capacités de puiser en moi des forces insoupçonnées pour renoncer (par exemple !) au sommeil, mes petites-filles ont réveillé ma part d’émerveillement. Croiser un regard confiant, caresser des joues veloutées, sentir une petite tête chaude, s’étonner de la précision des doigts, de la force du poing qui enserre, de la vitalité de ce petit être… je n’avais jamais perçu tout cela avec une telle densité. Sans responsabilité aucune de conduire leur éducation, ni même de leur fixer les règles de la vie, j’étais là au contraire pour recevoir et apprendre de leurs faits et gestes, élargir mon monde avec elles et m’étonner de la plénitude que j’y puisais. 


De l’art d’être grand-père


Est-ce un hasard si ma première petite-fille est née trois mois jour pour jour avant que ma propre mère ne quitte cette terre ? J’y ai vu comme un relais de la vie. Celle-ci me faisait le cadeau d’une transmission à l’heure où il me fallait définitivement renoncer à ma propre enfance. Et de fait, c’est avec Louisa que j’ai ressenti la première fois comme la fugace conviction que désormais tout était accompli, la vie s’était frayé un chemin et je n’avais plus rien à craindre… Il fallait cependant trouver le mot juste, les quelques syllabes qui résument et baptisent cette responsabilité qui m’était donnée. Grand-mère ? Bonne-maman (pas que des confitures !) ? Mamé, Mamoune, Maminette ?… J’en passe et des meilleurs. 


Choisir son appellation contrôlée de grand-mère est un vrai défi. Comment identifier ce lien si particulier, sans céder à l’air du temps tout en se distinguant par un zeste d’originalité ? J’ai finalement opté pour le très classique « mamie ». J’aime cet alliage musical d’un son maternel et du mot amie, « m’amie », car mes petites filles sont celles que j’aime et dont j’accompagne en amie les premiers pas dans la vie. Déjà, je me réjouis de la nouvelle expérience à venir cet automne dans notre famille, avec celle (ou celui ?) qui grandit doucement dans le sein de sa mère et qui sera bientôt mon troisième maître en « grand-maternité » !

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