Le confinement augmente le risque de violences sur les enfants

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Les pires craintes des professionnels semblent se confirmer. La ligne téléphonique « Allô enfance en danger » joignable en composant le 119 a reçu 20% d’appels supplémentaires depuis le début du confinement, a déclaré le secrétaire d’État à la Protection de l’enfance, Adrien Taquet le 8 avril. Les appels considérés comme urgents, eux, ont bondi, accusant une hausse de 60% selon des données issues d’une comparaison entre les trois premières semaines du confinement et une période équivalente en février, précise le secrétaire d’État. En outre, plus le temps passe plus les signalements recueillis sur ce numéro vert sont nombreux, 53% des appels étant concentrés sur la troisième semaine. « On se maintient à un haut niveau depuis », assure un conseiller auprès d’Adrien Taquet.


Ce sont des situations sociales connues qui flambent avec le confinement.

- Martine Balençon, Société française de pédiatrie médico-légale


Bien qu’ils coïncident avec la montée en puissance des campagnes d’informations diffusées à la radio, à la télévision et sur les réseaux sociaux, ces chiffres ont de quoi inquiéter. « Je suis convaincue que ce confinement va être terrible pour les enfants maltraités. Ce qu’on voit arriver, ce sont des situations sociales connues qui flambent avec le confinement ainsi que de soudain pétages de plomb », assure Martine Balençon, présidente de la Société française de pédiatrie médico-légale. Que l’obligation faite aux familles de rester enfermées du matin au soir conduise à exacerber les tensions n’aurait rien de surprenant. À l’évidence, le confinement joue sur les nerfs. « Tout professionnel est inquiet des jours qui passent, car la tension va monter. On a beau vivre les fenêtres ouvertes, il n’en reste pas moins que quatre murs c’est quatre murs et qu’un enfant reste un enfant avec ses besoins, ses réactions… » , ajoute Martine Brousse, présidente de l’association La Voix de l’enfant.


Bien sûr, tout le monde n’est pas égal devant le confinement. « Vivre dans une chambre de 12 mètres carrés sous les toits avec deux enfants, c’est insupportable. Il faut aider les familles qui manquent de tout à retrouver une dignité, pour leur permettre de s’occuper de leur enfant », souligne Martine Brousse. Mais personne n’est à l’abri : « N’importe quel parent peut déraper ! Certains travaillent tellement qu’ils n’ont jamais le temps de s’occuper de leurs enfants. Du coup, ils ne savent pas comment s’y prendre. Cela peut générer des réactions inattendues. Quoiqu’il en soit, il faut savoir demander de l’aide », conclut-elle.


À l’effet « cocotte-minute » s’ajoute la fragilisation des relais traditionnels amenés à alerter. À commencer par les personnels de l’Éducation nationale qui ne sont plus au contact physique des enfants, mais aussi les services sociaux que la fermeture des Unités territoriales d’action sociales met à rude épreuve, même s’ils restent joignables au téléphone et sont prêts à se déplacer en cas d’urgence. « Des adaptations de l’activité sont faites et malgré certaines difficultés par endroit la continuité des dispositifs reste assurée », indique-t-on au cabinet d’Adrien Taquet.


Ce sont les voisins qui appellent pour dire qu’ils ont entendu des cris, des bruits.

- Martine Brousse, de l’association La Voix de l’enfant


Du côté des médecins de ville, la chute de fréquentation des cabinets au profit de téléconsultations complique l’établissement d’un diagnostic de traumatisme infligé. Avec à la clé le risque que des violences commises à l’abri des regards, dans le huis-clos familial, passent sous les radars. « Tous nos repères sont chamboulés. La maltraitance est déjà compliquée à repérer d’habitude, car les signes peuvent être minimes. C’est par exemple une ecchymose sur une joue, une fracture des côtes. Alors quand en plus il faut changer de paires de lunettes… », souffle Martine Balençon.


Autre obstacle : dans un contexte où tous les regards sont tournés vers le Covid-19, les médecins peuvent passer à côté de certains signaux faibles : « Ce n’est pas parce que Coronavirus nous occupe, que tout le reste doit devenir secondaire. Les délais de prise en charge des infarctus du myocarde sont quatre fois plus long et je crains qu’on assiste au même phénomène s’agissant de la maltraitance. Les médecins doivent continuer à être attentifs à ce volet », insiste la pédiatre. Bonne nouvelle, les voisins le sont. « Ce sont eux qui aujourd’hui appellent le 119 ou des associations comme La Voix de l’enfant ou L’Enfant bleu, pour dire qu’ils ont entendu des cris, des bruits… », indique Martine Brousse. La preuve que l’heure n’est pas à l’indifférence.


Pour émettre un signalement


Par téléphone : 119

Sur Internet : allo119.gouv.fr


Pour être orienté vers des associations d’aide à la parentalité :

Composer le 0800130000

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